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| [30] "Πῶς λέγεις," ἦ δ´ ὃς ὁ Ἀρίγνωτος, δριμὺ
 ἀπιδὼν εἰς ἐμέ, "οὐδέν σοι τούτων γίγνεσθαι
 δοκεῖ, καὶ ταῦτα πάντων, ὡς εἰπεῖν, ὁρώντων;"
 "Ἀπολόγησαι," ἦν δ´ ἐγώ, "ὑπὲρ ἐμοῦ, εἰ μὴ
 πιστεύω, διότι μηδὲ ὁρῶ μόνος τῶν ἄλλων· εἰ δὲ
 ἑώρων, καὶ ἐπίστευον ἂν δηλαδὴ ὥσπερ ὑμεῖς."
 "Ἀλλά," ἦ δ´ ὅς, "ἤν ποτε εἰς Κόρινθον ἔλθῃς,
 ἐροῦ ἔνθα ἐστὶν ἡ Εὐβατίδου οἰκία, καὶ ἐπειδάν
 σοι δειχθῇ παρὰ τὸ Κράνειον, παρελθὼν εἰς
 αὐτὴν λέγε πρὸς τὸν θυρωρὸν Τίβειον ὡς ἐθέλοις
 ἰδεῖν ὅθεν τὸν δαίμονα ὁ Πυθαγορικὸς Ἀρίγνωτος
 ἀνορύξας ἀπήλασε καὶ πρὸς τὸ λοιπὸν οἰκεῖσθαι
 τὴν οἰκίαν ἐποίησεν."
 | [30] – Que me dit-on là ? s'écria Arignotos,  
en me lançant un regard plein de poignards,  
tu refuses de croire en ces choses quand bien  
même le premier venu atteste les avoir vues ?  
 – Un instant, s'il te plaît ! Je n'y crois pas,  
simplement parce que je suis le seul parmi  
vous à ne pas les avoir vues. En revanche, si  
je les voyais, je réagirai comme vous. 
 – Eh bien alors, reprit–il, si, un jour, tu te  
rends à Corinthe, demande où est la maison  
d'Eubatide. Quand tu sauras qu'elle se trouve  
près du Cranéion, précipite-toi là–bas, et  
insiste auprès du portier Tibios pour visiter  
l'endroit où Arignotos extirpa un démon du  
fond d'un fossé, puis l'expulsa, permettant  
aux propriétaires de la maison de pouvoir  
enfin respirer. 
 |  | [31] "Τί δὲ τοῦτο ἦν, ὦ Ἀρίγνωτε;" ἤρετο ὁ
 Εὐκράτης. "Ἀοίκητος ἦν," ἦ δ´ ὅς, "ἐκ πολλοῦ
 ὑπὸ δειμάτων, εἰ δέ τις οἰκήσειεν εὐθὺς ἐκπλαγεὶς
 ἔφευγεν, ἐκδιωχθεὶς ὑπό τινος φοβεροῦ καὶ ταραχώδους
 φάσματος. συνέπιπτεν οὖν ἤδη καὶ ἡ
 στέγη κατέρρει, καὶ ὅλως οὐδεὶς ἦν ὁ θαρρήσων
 παρελθεῖν εἰς αὐτήν.
 "Ἐγὼ δὲ ἐπεὶ ταῦτα ἤκουσα, τὰς βίβλους
 λαβὼν—εἰσὶ δέ μοι Αἰγύπτιαι μάλα πολλαὶ περὶ
 τῶν τοιούτων—ἧκον εἰς τὴν οἰκίαν περὶ πρῶτον
 ὕπνον ἀποτρέποντος τοῦ ξένου καὶ μόνον οὐκ
 ἐπιλαμβανομένου, ἐπεὶ ἔμαθεν οἷ βαδίζοιμι, εἰς
 προὖπτον κακόν, ὡς ᾤετο. ἐγὼ δὲ λύχνον λαβὼν
 μόνος εἰσέρχομαι, καὶ ἐν τῷ μεγίστῳ οἰκήματι
 καταθεὶς τὸ φῶς ἀνεγίγνωσκον ἡσυχῇ χαμαὶ
 καθεζόμενος· ἐφίσταται δὲ ὁ δαίμων ἐπί τινα τῶν
 πολλῶν ἥκειν νομίζων καὶ δεδίξεσθαι κἀμὲ ἐλπίζων
 ὥσπερ τοὺς ἄλλους, αὐχμηρὸς καὶ κομήτης
 καὶ μελάντερος τοῦ ζόφου. καὶ ὁ μὲν ἐπιστὰς
 ἐπειρᾶτό μου, πανταχόθεν προσβάλλων εἴ ποθεν
 κρατήσειεν, καὶ ἄρτι μὲν κύων ἄρτι δὲ ταῦρος
 γιγνόμενος ἢ λέων. ἐγὼ δὲ προχειρισάμενος τὴν
 φρικωδεστάτην ἐπίρρησιν αἰγυπτιάζων τῇ φωνῇ
 συνήλασα κατᾴδων αὐτὸν εἴς τινα γωνίαν σκοτεινοῦ
 οἰκήματος· ἰδὼν δὲ αὐτὸν οἷ κατέδυ, τὸ
 λοιπὸν ἀνεπαυόμην.
 "Ἕωθεν δὲ πάντων ἀπεγνωκότων καὶ νεκρὸν
 εὑρήσειν με οἰομένων καθάπερ τοὺς ἄλλους, προελθὼν
 ἀπροσδόκητος ἅπασι πρόσειμι τῷ Εὐβατίδῃ,
 εὖ ἀγγέλλων ὅτι καθαρὰν αὐτῷ καὶ ἀδείμαντον
 ἤδη ἐξῆν τὴν οἰκίαν οἰκεῖν. παραλαβὼν
 οὖν αὐτόν τε καὶ τῶν ἄλλων πολλοὺς—εἵποντο
 γὰρ τοῦ παραδόξου ἕνεκα—ἐκέλευον ἀγαγὼν ἐπὶ
 τὸν τόπον οὗ καταδεδυκότα τὸν δαίμονα ἑωράκειν,
 σκάπτειν λαβόντας δικέλλας καὶ σκαφεῖα, καὶ
 ἐπειδὴ ἐποίησαν, εὑρέθη ὅσον ἐπ´ ὀργυιὰν κατορωρυγμένος
 τις νεκρὸς ἕωλος μόνα τὰ ὀστᾶ κατὰ
 σχῆμα συγκείμενος. ἐκεῖνον μὲν οὖν ἐθάψαμεν
 ἀνορύξαντες, ἡ οἰκία δὲ τὸ ἀπ´ ἐκείνου ἐπαύσατο
 ἐνοχλουμένη ὑπὸ τῶν φασμάτων."
 | [31] – Qu'est–il donc arrivé, Arignotos ?  
insista Eucrate. 
 – Cette demeure, dit–il, était à l'abandon  
depuis des lustres car, régulièrement, elle  
était visitée par des spectres effroyables  
Quiconque s'y installait, devait bien vite  
quitter les lieux, à cause des fantômes. Aussi  
la bâtisse tomba–t–elle en ruine, au point que  
le toit menaça de s'effondrer. Bien entendu,  
nul n'osait plus y entrer. Dès que j'eus  
entendu parler de cet envoûtement, je  
consultai quelques ouvrages – je possède un  
nombre considérable de textes égyptiens qui  
traitent de ces problèmes de fantômes – et, à  
l'heure du premier sommeil, je me rendis à la  
maison hantée, malgré les prières de mon  
hôte qui voulut m'en empêcher et qui faillit  
même me retenir par le pan de mon  
manteau : il était persuadé que je courais à  
ma perte. Prenant une lampe, je pénétrai  
dans la maison. Après avoir posé ma lampe  
dans la plus grande salle, je m'assis par terre  
et je lus mon texte, presque avec  
désinvolture. Le démon ne se fit pas attendre  
et crut que j'étais une victime ordinaire, tout  
heureux à l'idée de me faire une peur  
panique. Dois–je vous préciser qu'il était  
répugnant, très chevelu, et qu'il avait la  
couleur sombre des ténèbres. Il se planta  
devant moi, me fit maintes provocations pour  
m'intimider, puis se métamorphosa  
successivement en chien, en taureau et en  
lion. Gardant mon sang-froid, je prononçai les  
formules égyptiennes, réussissant par la  
toute–puissance de mes paroles, à le faire  
replier dans un coin de pièce obscur. Après  
avoir consciencieusement observé l'endroit  
où il se trouvait, je m'endormis. 
 Au petit matin, alors que tout le monde  
s'attendait à me voir terrassé par le démon,  
comme les visiteurs précédents, je sortis de  
la baraque à la surprise générale. Je  
m'empressai de me rendre chez Eubatide  
pour lui annoncer la bonne nouvelle : il  
pouvait à ce jour vivre tranquillement dans  
une maison enfin exorcisée de ses démons. Il  
m'accompagna, lui et une foule de badauds –  
ils étaient tous étonnés par le prodige –  
jusqu'à l'endroit où l'esprit avait disparu. Je  
donnai l'ordre au groupe de s'armer de  
pioches et de fouiller. C'est alors que l'on  
exhuma un squelette que l'on s'empressa  
d'ensevelir décemment. Depuis cette  
opération, la maison a cessé d'être la proie  
des fantômes. 
 |  | [32] Ὡς δὲ ταῦτα εἶπεν ὁ Ἀρίγνωτος, ἀνὴρ δαιμόνιος
 τὴν σοφίαν καὶ ἅπασιν αἰδέσιμος, οὐδεὶς
 ἦν ἔτι τῶν παρόντων ὃς οὐχὶ κατεγίγνωσκέ μου
 πολλὴν τὴν ἄνοιαν τοῖς τοιούτοις ἀπιστοῦντος,
 καὶ ταῦτα Ἀριγνώτου λέγοντος. ἐγὼ δὲ ὅμως
 οὐδὲν τρέσας οὔτε τὴν κόμην οὔτε τὴν δόξαν τὴν
 περὶ αὐτοῦ, "Τί τοῦτ´," ἔφην, "ὦ Ἀρίγνωτε; καὶ
 σὺ τοιοῦτος ἦσθα, ἡ μόνη ἐλπὶς τῆς ἀληθείας—
 καπνοῦ μεστὸς καὶ ἰνδαλμάτων; τὸ γοῦν τοῦ
 λόγου ἐκεῖνο, ἄνθρακες ἡμῖν ὁ θησαυρὸς πέφηνε."
 "Σὺ δέ," ἦ δ´ ὃς ὁ Ἀρίγνωτος, "εἰ μήτε ἐμοὶ
 πιστεύεις μήτε Δεινομάχῳ ἢ Κλεοδήμῳ τουτωῒ
 μήτε αὐτῷ Εὐκράτει, φέρε εἰπὲ τίνα περὶ τῶν
 τοιούτων ἀξιοπιστότερον ἡγῇ τἀναντία ἡμῖν λέγοντα;"
 "Νὴ Δί´," ἦν δ´ ἐγώ, "μάλα θαυμαστὸν
 ἄνδρα τὸν Ἀβδηρόθεν ἐκεῖνον Δημόκριτον, ὃς
 οὕτως ἄρα ἐπέπειστο μηδὲν οἷόν τε εἶναι συστῆναι
 τοιοῦτον ὥστε, ἐπειδὴ καθείρξας ἑαυτὸν εἰς μνῆμα
 ἔξω πυλῶν ἐνταῦθα διετέλει γράφων καὶ συντάττων
 καὶ νύκτωρ καὶ μεθ´ ἡμέραν, καί τινες
 τῶν νεανίσκων ἐρεσχελεῖν αὐτὸν βουλόμενοι καὶ
 δειματοῦν στειλάμενοι νεκρικῶς ἐσθῆτι μελαίνῃ
 καὶ προσωπείοις εἰς τὰ κρανία μεμιμημένοις περιστάντες
 αὐτὸν περιεχόρευον ὑπὸ πυκνῇ τῇ βάσει
 ἀναπηδῶντες, ὁ δὲ οὔτε ἔδεισεν τὴν προσποίησιν
 αὐτῶν οὔτε ὅλως ἀνέβλεψεν πρὸς αὐτούς, ἀλλὰ
 μεταξὺ γράφων, ‘Παύσασθε,’ ἔφη, ‘παίζοντες·’
 οὕτω βεβαίως ἐπίστευε μηδὲν εἶναι τὰς ψυχὰς
 ἔτι ἔξω γενομένας τῶν σωμάτων."
 | [32] Quand Arignotos, ce phare de la  
sagesse, devant lequel chacun s'inclinait, eut  
terminé son récit, plus personne n'était en  
mesure de stigmatiser mon impudence :  
comment, en effet, douter d'une histoire,  
forcément vraie, puisqu'elle était rapportée  
par le grand Arignotos ? Pourtant, je n'avais  
que faire de ses cheveux blancs et de sa  
réputation de grand philosophe : « Ainsi  
donc, dis–je à Arignotos, tu n'es qu'un  
homme comme les autres, toi l'unique espoir  
d'intelligence auquel je m'étais raccroché. Tu  
es, toi aussi, une de ces personnes éprises de  
fumées et d'illusions. Le proverbe te sied à  
merveille : « Cet or n'est qu'un vil plomb. »  
 – Puisque, reprit–il, tu rejettes mes propos  
et ceux de nos amis, Dinomaque, Cléodème et  
Eucrate, alors, parle–moi de la personne qui  
serait, selon toi, la plus digne de traiter de  
ces sujets et de nous contredire. 
 – Par Zeus, répondis–je, il a existé, jadis,  
un homme remarquable, citoyen d'Abdère,  
qui se nommait Démocrite. Il avait le  
sentiment que rien de ce qui fut dit dans cette  
assistance n'était vrai. Il en était si convaincu  
qu'il vivait reclus dans un tombeau, hors des  
remparts de la cité : c'est là qu'il travaillait à  
écrire ses livres, de jour comme de nuit. On  
rapporte que de jeunes écervelés se  
moquèrent de lui en se faisant passer pour  
des fantômes : ils avaient revêtu des robes  
noires et s'étaient mis sur la figure un  
masque représentant une tête de mort. Ils  
entourèrent le philosophe et exécutèrent  
sous son nez mille pirouettes d'un goût  
macabre. Mais Démocrite ne se laissa pas  
abuser par la mascarade et il ne daigna même  
pas lever les yeux sur ces lascars. Tout en  
continuant à écrire, il finit par leur dire :  
« Bon, je crois qu'on a assez ri pour  
aujourd'hui, vous pouvez arrêter ! ». Cette  
anecdote prouve avec éclat que, pas un seul  
instant, il n'avait pensé que les âmes pussent  
encore exister après avoir quitté le corps. 
 |  | [33] "Τοῦτο φής," ἦ δ´ ὃς ὁ Εὐκράτης, "ἀνόητόν
 τινα ἄνδρα καὶ τὸν Δημόκριτον γενέσθαι, εἴ γε
οὕτως ἐγίγνωσκεν. ἐγὼ δὲ ὑμῖν καὶ ἄλλο διηγήσομαι
 αὐτὸς παθών, οὐ παρ´ ἄλλου ἀκούσας·
 τάχα γὰρ ἂν καὶ σύ, ὦ Τυχιάδη, ἀκούων προσβιβασθείης
 πρὸς τὴν ἀλήθειαν τῆς διηγήσεως.
 "Ὁπότε γὰρ ἐν Αἰγύπτῳ διῆγον ἔτι νέος ὤν,
 ὑπὸ τοῦ πατρὸς ἐπὶ παιδείας προφάσει ἀποσταλείς,
 ἐπεθύμησα εἰς Κοπτὸν ἀναπλεύσας
 ἐκεῖθεν ἐπὶ τὸν Μέμνονα ἐλθὼν ἀκοῦσαι τὸ θαυμαστὸν
 ἐκεῖνο ἠχοῦντα πρὸς ἀνίσχοντα τὸν ἥλιον.
 ἐκείνου μὲν οὖν ἤκουσα οὐ κατὰ τὸ κοινὸν τοῖς
 πολλοῖς ἄσημόν τινα φωνήν, ἀλλά μοι καὶ
 ἔχρησεν ὁ Μέμνων αὐτὸς ἀνοίξας γε τὸ στόμα ἐν
 ἔπεσιν ἑπτά, καὶ εἴ γε μὴ περιττὸν ἦν, αὐτὰ ἂν
 ὑμῖν εἶπον τὰ ἔπη. 
 | [33] – Ton baratin, reprit Eucrate, est plutôt  
la preuve que ce Démocrite était un parfait  
abruti, si vraiment telle était sa pensée.  
Maintenant je vais vous raconter une  
aventure qui m'est bel et bien arrivée : peut- 
être te convaincra-t-elle, Tychiade, sait–on  
jamais ? Quand j'étais jeune et que je vivais  
en Égypte, où mon père m'avait envoyé pour  
poursuivre mes études, je voulus remonter le  
Nil jusqu'à Coptos, afin de contempler le  
célèbre Memnon, et écouter le son  
miraculeux qu'il émet tous les matins. Or,  
rien que pour moi, la statue, loin de me livrer  
un son inepte, comme il fait pour le commun  
des mortels, me fit l'honneur d'un oracle en  
sept vers, sur lequel je ne vais pas m'étendre.  
 |  | [34] κατὰ δὲ τὸν ἀνάπλουν ἔτυχεν  ἡμῖν συμπλέων 
Μεμφίτης ἀνὴρ τῶν ἱερῶν γραμματέων,
 θαυμάσιος τὴν σοφίαν καὶ τὴν παιδείαν
 πᾶσαν εἰδὼς τὴν Αἰγύπτιον· ἐλέγετο δὲ τρία καὶ
 εἴκοσιν ἔτη ἐν τοῖς ἀδύτοις ὑπόγειος ᾠκηκέναι
 μαγεύειν παιδευόμενος ὑπὸ τῆς Ἴσιδος."
 "Παγκράτην," ἔφη ὁ Ἀρίγνωτος, "λέγεις
 ἐμὸν διδάσκαλον, ἄνδρα ἱερόν, ἐξυρημένον, ἐν
 ὀθονίοις, ἀεὶ νοήμονα, οὐ καθαρῶς ἑλληνίζοντα,
 ἐπιμήκη, σιμόν, πρόχειλον, ὑπόλεπτον τὰ σκέλη."
 "Αὐτόν," ἦ δ´ ὅς, "ἐκεῖνον τὸν Παγκράτην· καὶ τὰ
 μὲν πρῶτα ἠγνόουν ὅστις ἦν, ἐπεὶ δὲ ἑώρων
 αὐτὸν εἴ ποτε ὁρμίσαιμεν τὸ πλοῖον ἄλλα τε
 πολλὰ τεράστια ἐργαζόμενον, καὶ δὴ καὶ ἐπὶ
 κροκοδείλων ὀχούμενον καὶ συννέοντα τοῖς θηρίοις,
 τὰ δὲ ὑποπτήσσοντα καὶ σαίνοντα ταῖς οὐραῖς,
 ἔγνων ἱερόν τινα ἄνθρωπον ὄντα, κατὰ μικρὸν δὲ
 φιλοφρονούμενος ἔλαθον ἑταῖρος αὐτῷ καὶ συνήθης
 γενόμενος, ὥστε πάντων ἐκοινώνει μοι τῶν ἀπορρήτων.
 "Καὶ τέλος πείθει με τοὺς μὲν οἰκέτας ἅπαντας
 ἐν τῇ Μέμφιδι καταλιπεῖν, αὐτὸν δὲ μόνον ἀκολουθεῖν
 μετ´ αὐτοῦ, μὴ γὰρ ἀπορήσειν ἡμᾶς τῶν
 διακονησομένων· καὶ τὸ μετὰ τοῦτο οὕτω διήγομεν.
 | [34] Comme je remontais le Nil, j'eus le  
bonheur de voyager en compagnie d'un  
citoyen de Memphis, un scribe doué d'une  
sagesse inouïe et fort versé dans la science  
égyptienne. On me disait qu'il avait vécu  
vingt–trois années dans les cryptes des  
temples et qu'il avait acquis un savoir  
magique dispensé par la déesse Isis. 
 – Mais il s'agit de Pancrate, mon grand  
maître, ajouta Arignotos : quel homme divin !  
Il rasait son crâne, s'habillait de lin, toujours  
en méditation. Il savait un peu de grec, était  
grand, avait un gros nez, des lèvres épaisses,  
des jambes maigres. 
 – C'est tout à fait son portrait, dit Eucrate,  
c'est Pancrate ! Au début, il m'était inconnu.  
À force de le voir pratiquer des prodiges à  
chaque escale, chevauchant des crocodiles et  
nageant dans le Nil au milieu des bêtes  
féroces qu'il impressionnait, j'eus vite la  
conviction que c'était un saint homme. Je  
voulus en faire un ami et j'y parvins si bien  
qu'il me révéla tous les secrets de son vaste savoir.  
 Un jour, il me demanda de laisser tous mes  
serviteurs à Memphis pour l'accompagner  
seul, me disant « que nous ne serions pas en  
pénurie d'esclaves ». C'était vrai.  
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