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[11] Οὐ μέντοι μικρὸν οὐδὲ ἁπλοῦν ἐστι τοῦτο, ὡς
ἄν τις ὑπολάβοι, ἀλλὰ πολλῆς μὲν τέχνης, οὐκ
ὀλίγης δὲ ἀγχινοίας, ἀκριβοῦς δέ τινος ἐπιμελείας
δεόμενον· οὐ γὰρ ἂν τοσαῦτα ἔβλαπτεν ἡ διαβολή,
εἰ μὴ πιθανόν τινα τρόπον ἐγίνετο· οὐδ´ ἂν
κατίσχυε τὴν πάντων ἰσχυροτέραν ἀλήθειαν, εἰ
μὴ πολὺ τὸ ἐπαγωγὸν καὶ πιθανὸν καὶ μυρία ἄλλα
παρεσκεύαστο κατὰ τῶν ἀκουόντων.
| [11] Cependant la délation n'est pas, comme on pourrait
le supposer, une chose facile et simple; elle exige
au contraire beaucoup d'habileté, une grande finesse
et des précautions rigoureuses; car elle ne ferait pas tant
de mal, si elle n'était pas présentée de manière à attirer
la confiance et elle ne prévaudrait pas contre la vérité,
dont la force triomphe de tous les obstacles, si elle ne
disposait pas d'une grande force de séduction et de persuasion
et de mille artifices pour gagner les auditeurs.
| [12] Διαβάλλεται μὲν οὖν ὡς τὸ πολὺ μάλιστα ὁ
τιμώμενος καὶ διὰ τοῦτο τοῖς ὑπολειπομένοις
αὐτοῦ ἐπίφθονος· ἅπαντες γὰρ τῷ δ´ ἐπιτοξάζονται
καθάπερ τι κώλυμα καὶ ἐμπόδιον προορώμενοι,
καὶ ἕκαστος οἴεται πρῶτος αὐτὸς ἔσεσθαι τὸν
κορυφαῖον ἐκεῖνον ἐκπολιορκήσας καὶ τῆς φιλίας
ἀποσκευασάμενος. οἷόν τι καὶ ἐπὶ τοῖς γυμνικοῖς
ἀγῶσιν ἐπὶ τῶν δρομέων γίγνεται· κἀκεῖ γὰρ ὁ
μὲν ἀγαθὸς δρομεὺς τῆς ὕσπληγγος εὐθὺς καταπεσούσης
μόνον τοῦ πρόσω ἐφιέμενος καὶ τὴν
διάνοιαν ἀποτείνας πρὸς τὸ τέρμα κἀν τοῖς ποσὶ
τὴν ἐλπίδα τῆς νίκης ἔχων τὸν πλησίον οὐδὲν
κακουργεῖ οὐδέ τι τῶν κατὰ τοὺς ἀγωνιστὰς
πολυπραγμονεῖ, ὁ δὲ κακὸς ἐκεῖνος καὶ ἄναθλος
ἀνταγωνιστὴς ἀπογνοὺς τὴν ἐκ τοῦ τάχους ἐλπίδα
ἐπὶ τὴν κακοτεχνίαν ἐτράπετο, καὶ τοῦτο μόνον
ἐξ ἅπαντος σκοπεῖ, ὅπως τὸν τρέχοντα ἐπισχὼν
ἢ ἐμποδίσας ἐπιστομιεῖ, ὡς, εἰ τούτου διαμάρτοι,
οὐκ ἄν ποτε νικῆσαι δυνάμενος. ὁμοίως δὲ τούτοις
κἀν ταῖς φιλίαις τῶν εὐδαιμόνων τούτων γίνεται·
ὁ γὰρ προέχων αὐτίκα ἐπιβουλεύεται καὶ ἀφύλακτος
ἐν μέσῳ ληφθεὶς τῶν δυσμενῶν ἀνηρπάσθη, οἱ
δὲ ἀγαπῶνται καὶ φίλοι δοκοῦσιν ἐξ ὧν ἄλλους
βλάπτειν ἔδοξαν.
| [12] En général, la délation s'attaque de préférence à
l'homme qui est en faveur et par cela même envié par
ceux qu'il a laissés derrière lui. C'est sur lui que tous
les courtisans dirigent leurs traits, parce qu'ils le voient
devant eux qui leur barre la route et leur fait obstacle.
Chacun pense qu'il sera le premier, s'il parvient à prendre
d'assaut ce coryphée et à le dépouiller de l'amitié du
prince. Les choses se passent là comme entre les coureurs
dans les jeux gymniques. Ici aussi le bon coureur, dès
que la barrière est tombée, ne songe qu'à s'élancer en
avant, tend sa pensée vers le but et place l'espoir de la
victoire dans ses jambes, sans chercher à nuire à son
voisin, sans s'ingérer en rien de ce que font ses concurrents.
Mais le mauvais coureur, incapable de soutenir la lutte,
abandonnant tout espoir de vaincre par
sa vitesse, a recours à l'artifice et ne songe absolument
qu'à une chose, au moyen d'enrayer la course des autres,
en les retenant ou leur faisant obstacle, car il sait que s'il
manque son coup, il ne pourra jamais être vainqueur.
Il en est de même des amis des puissants. Celui qui tient
le premier rang est aussitôt en butte aux embûches,
et, s'il est pris sans défense au milieu de ses ennemis,
ils l'enlèvent sur-le-champ, et ce sont eux qu'on aime et
qui passent pour des favoris, dès qu'on voit qu'ils peuvent
perdre les autres.
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