HODOI ELEKTRONIKAI
Du texte à l'hypertexte

Lucien, Qu'il ne faut pas croire d'une manière enfantine

Paragraphes 7-8

  Paragraphes 7-8

[7] Πρῶτον μὲν δή, εἰ δοκεῖ, παραγάγωμεν τὸν πρωταγωνιστὴν τοῦ δράματος, λέγω δὲ τὸν ποιητὴν τῆς διαβολῆς. οὗτος δὲ δὴ ὡς μὲν οὐκ ἀγαθὸς ἄνθρωπός ἐστι, πᾶσιν οἶμαι γνώριμον· οὐδεὶς γὰρ ἂν ἀγαθὸς κακῶν αἴτιος γένοιτο τῷ πλησίον, ἀλλ´ ἔστιν ἀγαθῶν ἀνδρῶν ἀφ´ ὧν εὖ ποιοῦσιν αὐτοὶ τοὺς φίλους, οὐκ ἀφ´ ὧν τοὺς ἄλλους ἀδικοῦντες αἰτιῶνται καὶ μισεῖσθαι παρασκευάζουσιν, εὐδοκιμεῖν δόξαν εὐνοίας προσλαβόντες. [7] Tout d'abord, si vous le voulez bien, introduisons le protagoniste du drame, je veux dire l'auteur de la délation. Que celui-ci ne soit pas un honnête homme, cela, je pense, ne fait de doute pour personne, car jamais un honnête homme ne fera du mal à son prochain. C'est au contraire le propre des gens de bien de combler leurs amis de bienfaits, de ne pas accuser les autres injustement, de ne pas attirer sur eux la haine publique, et de se faire ainsi estimer et d'acquérir une réputation de bonté.
[8] Ἔπειτα δὲ ὡς ἄδικος τοιοῦτος καὶ παράνομός ἐστι καὶ ἀσεβὴς καὶ τοῖς χρωμένοις ἐπιζήμιος, ῥᾴδιον καταμαθεῖν. τίς γὰρ οὐκ ἂν ὁμολογήσειε τὴν μὲν ἰσότητα ἐν ἅπαντι καὶ τὸ μηδὲν πλέον δικαιοσύνης ἔργα εἶναι, τὸ δὲ ἄνισόν τε καὶ πλεονεκτικὸν ἀδικίας; δὲ τῇ διαβολῇ κατὰ τῶν ἀπόντων λάθρᾳ χρώμενος πῶς οὐ πλεονέκτης ἐστὶν ὅλον τὸν ἀκροατὴν σφετεριζόμενος καὶ προκαταλαμβάνων αὐτοῦ τὰ ὦτα καὶ ἀποφράττων καὶ τῷ δευτέρῳ λόγῳ παντελῶς ἄβατα κατασκευάζων αὐτὰ ὑπὸ τῆς διαβολῆς προεμπεπλησμένα; ἐσχάτης ἀδικίας τὸ τοιοῦτον, ὡς φαῖεν ἂν καὶ οἱ ἄριστοι τῶν νομοθετῶν, οἷον Σόλων καὶ Δράκων, ἔνορκον ποιησάμενοι τοῖς δικασταῖς τὸ ὁμοίως ἀμφοῖν ἀκροᾶσθαι καὶ τὸ τὴν εὔνοιαν ἴσην τοῖς κρινομένοις ἀπονέμειν, ἄχρι ἂν τοῦ δευτέρου λόγος παρατεθεὶς θατέρου χείρων ἀμείνων φανῇ· πρὶν δέ γε ἀντεξετάσαι τὴν ἀπολογίαν τῇ κατηγορίᾳ, παντελῶς ἀσεβῆ καὶ ἀνόσιον ἡγήσαντο ἔσεσθαι τὴν κρίσιν. καὶ γὰρ ἂν καὶ αὐτοὺς ἀγανακτῆσαι τοὺς θεοὺς εἴποιμεν, εἰ τῷ κατηγόρῳ μετ´ ἀδείας θέλει λέγειν ἐπιτρέποιμεν, ἀποφράξαντες δὲ τῷ κατηγορουμένῳ τὰ ὦτα τῷ στόματι σιωπῶντος καταψηφιζοίμεθα τῷ προτέρῳ λόγῳ κεχειρωμένοι, ὥστε οὐ κατὰ τὸ δίκαιον καὶ τὸ νόμιμον καὶ τὸν ὅρκον τὸν δικαστικὸν φαίη τις ἂν γίγνεσθαι τὰς διαβολάς. εἰ δέ τῳ μὴ ἀξιόπιστοι δοκοῦσιν οἱ νομοθέται παραινοῦντες οὕτω δικαίας καὶ ἀμερεῖς ποιεῖσθαι τὰς κρίσεις, ποιητήν μοι δοκῶ τὸν ἄριστον ἐπάγειν τῷ λόγῳ εὖ μάλα περὶ τούτων ἀποφηνάμενον, μᾶλλον δὲ νομοθετήσαντα. φησὶ δέ, "μήτε δίκην δικάσῃς, πρὶν ἄμφω μῦθον ἀκούσῃς". ἠπίστατο γάρ, οἶμαι, καὶ οὗτος ὡς πολλῶν ὄντων ἐν τῷ βίῳ ἀδικημάτων οὐδὲν ἄν τις εὕροι χεῖρον οὐδὲ ἀδικώτερον ἀκρίτους τινὰς καὶ ἀμοίρους λόγων καταδεδικάσθαι· ὅπερ ἐξ ἅπαντος διαβάλλων ἐπιχειρεῖ ποιεῖν ἄκριτον ὑπάγων τὸν διαβαλλόμενον τῇ τοῦ ἀκούοντος ὀργῇ καὶ τὴν ἀπολογίαν τῷ λαθραίῳ τῆς κατηγορίας παραιρούμενος. [8] Ensuite il est facile de se convaincre qu'un tel homme est injuste, ennemi des lois, impie et nuisible à ceux qui le fréquentent. Qui n'admettrait pas en effet que le caractère de la justice, c'est de garder l'égalité en tout et de ne pas convoiter plus que sa part, et que l'inégalité et l'empiétement sur les droits d'autrui sont le propre de l'injustice? Or celui qui emploie la délation en cachette contre les absents n'empiète-t-il pas sur leurs droits, en accaparant complètement son auditeur, en s'emparant à l'avance de ses oreilles, en les bouchant et en les rendant totalement inaccessibles à la défense par les calomnies dont il a eu soin de les remplir? Une telle conduite est le comble de l'injustice, comme en témoignent les meilleurs législateurs, Solon et Dracon par exemple. Ils font prêter serment aux juges d'écouter également les deux parties et d'accorder aux plaideurs une égale bienveillance, jusqu'à ce que le discours de l'un mis en parallèle avec celui de l'autre paraisse pire ou meilleur. Juger avant de confronter la défense à la plainte serait, pensaient-ils, un sacrilège, une impiété consommée. Nous pouvons affirmer que les dieux eux-mêmes seraient indignés, si nous permettions à l'accusateur de dire impunément ce qu'il veut et si, fermant nos oreilles à l'accusé et le réduisant au silence, nous le condamnions, subjugués par le premier plaidoyer. On peut donc dire que les délations sont contraires à la justice, à la loi et au serment des juges. Mais si l'autorité des législateurs paraît insuffisante, quand ils recommandent ainsi la justice et l'impartialité aux juges, je citerai à l'appui de mon discours le meilleur des poètes. Il a énoncé à ce sujet une belle maxime ou plutôt une belle loi, quand il a dit : « Ne jugez pas avant d'avoir entendu plaider les deux parties. » Il savait en effet, lui aussi, je pense, que, parmi les nombreuses injustices qui se commettent dans le monde, on n'en saurait trouver de pire ni de plus injuste que de condamner des gens sans les juger et sans leur donner la parole. Or c'est justement ce que le délateur essaye de faire de tout point : il livre l'accusé sans défense à la colère de celui qui l'écoute et, en l'accusant en cachette, il lui ôte la possibilité de se justifier.


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Dernière mise à jour : 22/11/2007