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[16] τίνα γὰρ ἐλπίδα
καὶ αὐτὸς ἔχων εἰς τὰ βιβλία καὶ ἀνατυλίττεις
ἀεὶ καὶ διακολλᾷς καὶ περικόπτεις καὶ ἀλείφεις
τῷ κρόκῳ καὶ τῇ κέδρῳ καὶ διφθέρας περιβάλλεις
καὶ ὀμφαλοὺς ἐντίθης, ὡς δή τι ἀπολαύσων αὐτῶν;
πάνυ γοῦν ἤδη βελτίων γεγένησαι διὰ τὴν
ὠνήν, ὃς τοιαῦτα μὲν φθέγγῃ—μᾶλλον δὲ τῶν
ἰχθύων ἀφωνότερος εἶ—βιοῖς δὲ ὡς οὐδ´ εἰπεῖν
καλόν, μῖσος δὲ ἄγριον, φασί, παρὰ πάντων ἔχεις
ἐπὶ τῇ βδελυρίᾳ· ὡς εἰ τοιούτους ἀπειργάζετο τὰ
βιβλία, φυγῇ φευκτέον ἂν ἦν ὅτι πορρωτάτω ἀπ´ αὐτῶν.
| [16] Quel est donc ton espoir, lorsque tu es sans cesse occupé à rouler tes
livres, à les coller, à les ébarber, à les frotter de safran et de cèdre, à les
habiller de peaux, à les garnir d’ombilics ? Quel fruit te flattes-tu d'en
recueillir ? Leur acquisition t'a-t-elle rendu plus vertueux ? Tu ne dis rien ? Te
voilà plus muet qu'un poisson ! Mais ta vie est connue, et l'on n'a rien de beau
à en dire. Une haine sauvage, comme on dit, environne de toutes parts tes
mœurs éhontées. Ah ! si les livres produisent de pareils effets, il faut les fuir
d'une fuite éternelle.
| [17] δυοῖν δὲ ὄντοιν ἅττ´ ἂν παρὰ τῶν
παλαιῶν τις κτήσαιτο, λέγειν τε δύνασθαι καὶ
πράττειν τὰ δέοντα ζήλῳ τῶν ἀρίστων καὶ φυγῇ
τῶν χειρόνων, ὅταν μήτε ἐκεῖνα μήτε ταῦτα φαίνηταί
τις παρ´ αὐτῶν ὠφελούμενος, τί ἄλλο ἢ
τοῖς μυσὶ διατριβὰς ὠνεῖται καὶ ταῖς τίλφαις
οἰκήσεις καὶ πληγὰς ὡς ἀμελοῦσι τοῖς οἰκέταις;
| [17] Il y a deux avantages qu'on peut retirer du commerce avec les anciens :
l'un est de s'exprimer avec élégance, l'autre d'apprendre à faire le bien par
l'imitation des meilleurs modèles, et à éviter le mal. Mais celui qui, dans sa
conduite et dans ses paroles, montre qu'il n'a retiré aucune utilité des livres,
que fait-il autre chose que de tailler, en les achetant, de la besogne aux rats,
des demeures aux vers et des coups aux esclaves sous prétexte de négligence ?
| [18] Πῶς δὲ οὐ κἀκεῖνο αἰσχρόν, εἴ τις ἐν τῇ χειρὶ
ἔχοντά σε βιβλίον ἰδών—ἀεὶ δέ τι πάντως ἔχεις
—ἔροιτο οὗτινος ἢ ῥήτορος ἢ συγγραφέως ἢ
ποιητοῦ ἐστι, σὺ δὲ ἐκ τῆς ἐπιγραφῆς εἰδὼς
πρᾴως εἴποις τοῦτό γε· εἶτα, ὡς φιλεῖ τὰ τοιαῦτα
ἐν συνουσίᾳ προχωρεῖν εἰς μῆκος λόγων, ὁ μὲν
ἐπαινοῖ τι ἢ αἰτιῷτο τῶν ἐγγεγραμμένων, σὺ δὲ
ἀποροίης καὶ μηδὲν ἔχοις εἰπεῖν; οὐκ εὔξῃ τότε
χανεῖν σοι τὴν γῆν, κατὰ σεαυτοῦ ὁ Βελλεροφόντης
περιφέρων τὸ βιβλίον;
| [18] Quelle ne doit pas être ta honte, lorsque quelqu'un, te voyant un livre à la
main, et tu en as toujours, te demande de qui il est, orateur, historien, poète ?
Comme tu en as lu le titre, tu as peut-être de quoi répondre, Mais si la
conversation s'engage, comme il est tout naturel que cela arrive dans un
commerce amical, et que ton interlocuteur blâme ou approuve certains
passages, te voilà tout perplexe ; tu n'as pas un mot à dire. N'es-tu-pas près
de souhaiter que la terre s'entre ouvre, nouveau Bellérophon qui fournis un
livre contre toi ?
| [19] Δημήτριος δὲ ὁ Κυνικὸς ἰδὼν ἐν Κορίνθῳ ἀπαίδευτόν
τινα βιβλίον κάλλιστον ἀναγιγνώσκοντα
—τὰς Βάκχας οἶμαι τοῦ Εὐριπίδου, κατὰ τὸν
ἄγγελον δὲ ἦν τὸν διηγούμενον τὰ τοῦ Πενθέως
πάθη καὶ τὸ τῆς Ἀγαύης ἔργον—ἁρπάσας διέσπασεν
αὐτὸ εἰπών, "Ἄμεινόν ἐστι τῷ Πενθεῖ
ἅπαξ σπαραχθῆναι ὑπ´ ἐμοῦ ἢ ὑπὸ σοῦ πολλάκις."
Ζητῶν δὲ ἀεὶ πρὸς ἐμαυτὸν οὔπω καὶ τήμερον
εὑρεῖν δεδύνημαι τίνος ἕνεκα τὴν σπουδὴν ταύτην
ἐσπούδακας περὶ τὴν ὠνὴν τῶν βιβλίων· ὠφελείας
μὲν γὰρ ἢ χρείας τῆς ἀπ´ αὐτῶν οὐδ´ ἂν
οἰηθείη τις τῶν καὶ ἐπ´ ἐλάχιστόν σε εἰδότων, οὐ
μᾶλλον ἢ φαλακρὸς ἄν τις πρίαιτο κτένας ἢ
κάτοπτρον ὁ τυφλὸς ἢ ὁ κωφὸς αὐλητὴν ἢ παλλακὴν
ὁ εὐνοῦχος ἢ ὁ ἠπειρώτης κώπην ἢ ὁ
κυβερνήτης ἄροτρον. ἀλλὰ μὴ ἐπίδειξιν πλούτου
σοι τὸ πρᾶγμα ἔχει καὶ βούλει τοῦτο ἐμφῆναι
ἅπασιν, ὅτι καὶ εἰς τὰ μηδέν σοι χρήσιμα
ὅμως ἐκ πολλῆς τῆς περιουσίας ἀναλίσκεις; καὶ
μὴν ὅσα γε κἀμὲ Σύρον ὄντα εἰδέναι, εἰ μὴ σαυτὸν
φέρων ταῖς τοῦ γέροντος ἐκείνου διαθήκαις
παρενέγραψας, ἀπωλώλεις ἂν ὑπὸ λιμοῦ ἤδη καὶ
ἀγορὰν προὐτίθεις τῶν βιβλίων.
| [19] Démétrius le cynique voyait un jour à Corinthe un ignorant qui lisait un
livre splendidement orné ; c'étaient, je crois, les Bacchantes d'Euripide.
Le lecteur en était à la scène où le messager vient annoncer la mort de
Penthée et la fureur d'Agavé. Alors Démétrius, lui arrachant le livre et le
mettant en pièces : " Mieux vaut, dit-il, pour Penthée d'être une bonne fois
déchiré par mes mains que mille par ta bouche !" J'ai beau chercher en moi-même,
je n'ai pas encore pu trouver le motif qui te pousse à courir ainsi après
les livres, pour les acheter. Que ce soit pour ton utilité et ton besoin, c'est ce
que ne pourront jamais se figurer même ceux qui ne te connaissent que de
vue. On croira plutôt qu'un chauve achète un peigne ; un aveugle, un miroir ;
un sourd, une flûte ; une femme galante, un eunuque ; un habitant de
l'intérieur des terres, une rame ; un pilote, une charrue. Mais peut-être ta
grande affaire est-elle de faire étalage de tes richesses, de montrer à tout le
monde que tes immenses dépenses s'étendent jusqu'à l'achat d'objets
parfaitement inutiles ? C'est possible ; mais, autant que j'ai pu le savoir en ma
qualité de Syrien, si tu ne t'étais pas frauduleusement inscrit sur le testament
d'un certain vieillard, tu mourrais de faim, et tu aurais mis en vente tous tes livres.
| [20] λοιπὸν οὖν δὴ ἐκεῖνο, πεπεισμένον ὑπὸ τῶν κολάκων
ὡς οὐ μόνον καλὸς εἶ καὶ ἐράσμιος ἀλλὰ σοφὸς καὶ
ῥήτωρ καὶ συγγραφεὺς οἷος οὐδ´ ἕτερος, ὠνεῖσθαι
τὰ βιβλία, ὡς ἀληθεύοις τοὺς ἐπαίνους αὐτῶν.
φασὶ δὲ σὲ καὶ λόγους ἐπιδείκνυσθαι αὐτοῖς
ἐπὶ δείπνῳ κἀκείνους χερσαίων βατράχων δίκην
διψῶντας κεκραγέναι, ἢ μὴ πίνειν, ἢν μὴ διαρραγῶσι βοῶντες.
Καὶ γὰρ οὐκ οἶδ´ ὅπως ῥᾷστος εἶ τῆς ῥινὸς ἕλκεσθαι,
καὶ πιστεύεις αὐτοῖς ἅπαντα, ὅς ποτε
κἀκεῖνο ἐπείσθης, ὡς βασιλεῖ τινι ὡμοιώθης τὴν
ὄψιν, καθάπερ ὁ ψευδαλέξανδρος καὶ ὁ ψευδοφίλιππος
ἐκεῖνος κναφεὺς καὶ ὁ κατὰ τοὺς προπάτορας
ἡμῶν ψευδονέρων καὶ εἴ τις ἄλλος τῶν
ὑπὸ τῷ ψευδο τεταγμένων.
| [20] Reste ceci, que les éloges de tes flatteurs t'ayant mis en tête que tu es
non seulement aimable et beau, mais encore savant, orateur, historien,
comme on n'en a jamais vu, tu dois nécessairement acheter des livres pour
justifier leurs louanges. On dit donc que souvent, après le repas, tu leur lis
quelque chose de ta façon, et que ces gens altérés se mettent à crier comme
des grenouilles à sec, et n'ont à boire que quand ils se sont rompu les
poumons. Mais je ne puis concevoir comment tu es assez niais pour te laisser
ainsi mener par le nez, comment tu peux croire à tout ce qu'ils te disent, au
point de te laisser persuader que tu ressembles à un souverain, comme le
faux Alexandre, le faux Philippe, qui était fils d'un dégraisseur, le faux Néron
qui a paru du temps de nos pères, comme tous ceux enfin dont le nom est
marqué au coin du mensonge.
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