[7] Ἀλλὰ μή ποτε χρὴ περὶ ἡμῶν ἄμεινον κρίνειν, οὐκ
εἰς ἀπραξίαν καὶ πρᾶξιν βλέποντας, μᾶλλον δὲ εἰς τὸ
«Γνῶθι σαυτὸν» καὶ τὸ
«Ἔρδοι δ´ ἕκαστος ἥντιν´ εἰδείη τέχνην».
Μεῖζον ἔμοιγε φαίνεται τὸ βασιλεύειν ἢ κατ´ ἄνθρωπον
καὶ φύσεως δεῖσθαι δαιμονιωτέρας βασιλεύς, ὥσπερ οὖν
καὶ Πλάτων ἔλεγε· καὶ νῦν Ἀριστοτέλους εἰς ταὐτὸ
συντείνοντα παραγράψω λόγον, οὐ γλαῦκα Ἀθηναίοις ἄγων,
ἀλλ´ ὅτι μὴ παντάπασιν ἀμελῶν τῶν ἐκείνου λόγων
ἐπιδεικνύμενος· φησὶ δὲ ὁ ἀνὴρ ἐν τοῖς πολιτικοῖς
συγγράμμασιν· «Εἰ δὲ δή τις ἄριστον θείη τὸ βασιλεύεσθαι ταῖς
πόλεσι, πῶς ἕξει τὰ περὶ τῶν τέκνων; Πότερον καὶ τὸ
γένος δεῖ βασιλεύειν; Ἀλλὰ γιγνομένων ὁποῖοί τινες
ἔτυχον, βλαβερόν. Ἀλλὰ οὐ παραδώσει κύριος ὢν τοῖς
τέκνοις; Ἀλλ´ οὐκ ἔτι ῥᾴδιον τοῦτο πιστεῦσαι· χαλεπὸν
γὰρ καὶ μείζονος ἀρετῆς ἢ κατ´ ἀνθρωπίνην φύσιν.»
Ἑξῆς δὲ περὶ τοῦ κατὰ νόμον λεγομένου βασιλέως
διεξελθών, ὃς ἐστὶν ὑπηρέτης καὶ φύλαξ τῶν νόμων, καὶ
τοῦτον οὐδὲ βασιλέα καλῶν, οὐδὲ τὸ τοιοῦτον εἶδος βασιλείαν
οἰόμενος, προστίθησι· «Περὶ δὲ τῆς παμβασιλείας
καλουμένης, αὕτη δὲ ἐστὶ καθ´ ἣν ἄρχει πάντων κατὰ τὴν
αὑτοῦ βούλησιν ὁ βασιλεύς, δοκεῖ τισιν οὐδὲ {τὸ} κατὰ
φύσιν εἶναι τὸ κύριον ἕνα πάντων εἶναι τῶν πολιτῶν· τοῖς
γὰρ ὁμοίοις φύσει τὸ αὐτὸ δίκαιον ἀναγκαῖον εἶναι.» Εἶτα
μετ´ ὀλίγον φησίν· «Ὁ μὲν οὖν τὸν νόμον κελεύων ἄρχειν
δοκεῖ κελεύειν ἄρχειν τὸν θεὸν καὶ τὸν νοῦν μόνους· ὁ δὲ
ἄνθρωπον κελεύων προστίθησι καὶ θηρία· ἥ τε γὰρ ἐπιθυμία
τοῦτον καὶ ὁ θυμὸς διαστρέφει καὶ τοὺς ἀρίστους ἄνδρας·
διόπερ ἄνευ ὀρέξεως νοῦς ὁ νόμος ἐστίν.» Ὁρᾷς, ὁ φιλόσοφος
ἔοικεν ἐνταῦθα σαφῶς ἀπιστοῦντι καὶ κατεγνωκότι
τῆς ἀνθρωπίνης φύσεως. Φησὶ γὰρ οὕτω ῥήματι τοῦτο
λέγων, οὐδεμίαν ἀξιόχρεων εἶναι φύσιν ἀνθρωπίνην πρὸς
τοσαύτην τύχης ὑπεροχήν· οὔτε γὰρ τῶν παίδων τὸ κοινῇ
τοῖς πολίταις συμφέρον προτιμᾶν ἄνθρωπόν γε ὄντα ῥᾴδιον
ὑπολαμβάνει, καὶ πολλῶν ὁμοίων ἄρχειν οὐ δίκαιον εἶναί
φησι, καὶ τέλος ἐπιθεὶς τὸν κολοφῶνα τοῖς ἔμπροσθεν
λόγοις νόμον μὲν εἶναί φησι τὸν νοῦν χωρὶς ὀρέξεως,
ᾧ μόνῳ τὰς πολιτείας ἐπιτρέπειν χρῆναι, ἀνδρῶν δὲ
οὐδενί. Ὁ γὰρ ἐν αὐτοῖς νοῦς, κἂν ὦσιν ἀγαθοί, συμπέπλεκται
θυμῷ καὶ ἐπιθυμίᾳ, θηρίοις χαλεπωτάτοις.
| [7] Toutefois, il ne faut pas juger de nous d'après notre amour
du rien faire ou notre goût pour les affaires, mais d'après la maxime :
« Connais-toi toi-même » , ou d'après le proverbe :
"Que chacun fasse ici le métier qu'il sait faire."
Or, celui de souverain me paraît excéder les forces de l'homme: il faut à
un roi la nature d'un dieu. Platon l'a dit, et j'y joindrai une citation
d'Aristote qui tend au même dessein. Je ne porte pas de chouette aux
Athéniens, mais je veux montrer que je ne néglige pas du tout les
ouvrages de ce philosophe. Il dit donc dans sa Politique : « Si l'on
prétend que la monarchie est la meilleure forme de gouvernement,
qu'adviendra-il des enfants du souverain? Sa race sera-t-elle apte à
régner? Faudra-t-il les prendre, quels qu'ils soient? C'est dangereux.
Mais, dira-t-on, le roi, maître de son héritage, ne le transmettra point à
ses enfants. Voilà qui est difficile à croire : c'est un effort de vertu
au-dessus de la nature humaine. » Plus loin, après avoir parlé d'un roi
dépendant de la loi, dont il n'est que le ministre et le gardien, et après
avoir dit que ce n'est pas un roi, mais qu'on doit le ranger dans une
autre classe, il ajoute : « Quant à ce qu'on appelle la royauté
absolue, qui est le gouvernement d'un roi avant le pouvoir de faire
tout ce qu'il veut, il semble à quelques-uns contraire à la nature qu'un
seul homme soit le maître de tous les citoyens, l'égalité étant une loi
naturelle, juste et nécessaire. » Il dit quelques lignes plus bas :
« Vouloir que la raison règne, c'est vouloir le règne de la Divinité et
des lois ; vouloir qu'un homme règne, c'est vouloir le règne d'une bête
fauve. Car la passion et la colère dépravent les hommes les meilleurs,
tandis que la loi c'est la raison sans la passion. » Tu le vois, notre
philosophe a bien l'air de se défier de nous et d'accuser la nature
humaine. Il dit sous une autre forme qu'il n'y a point de nature humaine
capable de soutenir une telle hauteur de fortune, vu qu'il n'est pas
facile, selon lui, à un homme de sacrifier les intérêts de ses enfants à
ceux de l'État. Il pense, en outre, qu'il n'est pas juste de régner sur
ses égaux ; enfin, pour ajouter le dernier trait à ce qu'il vient, de
dire, il définit la loi, la raison exempte de passion, disant que c'est à
elle seule qu'on doit confier le gouvernement et jamais à un homme. Chez
les hommes, en effet, la raison, quelque bons qu'ils soient, est mêlée de
passion et de colère, animaux de la dernière férocité.
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