HODOI ELEKTRONIKAI
Du texte à l'hypertexte

Isocrate, Sur la paix (texte complet)

Paragraphes 80-89

  Paragraphes 80-89

[80] Ἀλλὰ γὰρ εἰ τολμήσαιμι περὶ τῶν ἐν ἐκείνοις τοῖς χρόνοις γενομένων ἀκριβῶς διελθεῖν, ὑμᾶς μὲν ἴσως ἂν ποιήσαιμι βέλτιον βουλεύσασθαι περὶ τῶν παρόντων, αὐτὸς δ' ἂν διαβληθείην· εἰώθατε γὰρ μισεῖν οὐχ οὕτω τοὺς αἰτίους τῶν ἁμαρτημάτων ὡς τοὺς κατηγοροῦντας αὐτῶν. (81) Τοιαύτην οὖν ὑμῶν γνώμην ἐχόντων, δέδοικα μὴ πειρώμενος ὑμᾶς εὐεργετεῖν αὐτὸς ἀπολαύσω τι φλαῦρον. Οὐ μὴν ἀποστήσομαι παντάπασιν ὧν διενοήθην, ἀλλὰ τὰ μὲν πικρότατα καὶ μάλιστ' ἂν ὑμᾶς λυπήσοντα παραλείψω, μνησθήσομαι δὲ τούτων μόνον ἐξ ὧν γνώσεσθε τὴν ἄνοιαν τῶν τότε πολιτευομένων. (82) Οὕτω γὰρ ἀκριβῶς εὕρισκον ἐξ ὧν ἄνθρωποι μάλιστ' ἂν μισηθεῖεν, ὥστ' ἐψηφίσαντο τὸ περιγιγνόμενον ἐκ τῶν φόρων ἀργύριον, διελόντες κατὰ τάλαντον, εἰς τὴν ὀρχήστραν τοῖς Διονυσίοις εἰσφέρειν ἐπειδὰν πλῆρες τὸ θέατρον· καὶ τοῦτ' ἐποίουν, καὶ παρεισῆγον τοὺς παῖδας τῶν ἐν τῷ πολέμῳ τετελευτηκότων, ἀμφοτέροις ἐπιδεικνύοντες τοῖς μὲν συμμάχοις τὰς τιμὰς τῆς οὐσίας αὐτῶν ὑπὸ μισθωτῶν εἰσφερομένης, τοῖς δ' ἄλλοις Ἕλλησι τὸ πλῆθος τῶν ὀρφανῶν καὶ τὰς συμφορὰς τὰς διὰ τὴν πλεονεξίαν ταύτην γιγνομένας. (83) Καὶ ταῦτα δρῶντες αὐτοί τε τὴν πόλιν εὐδαιμόνιζον, καὶ πολλοὶ τῶν νοῦν οὐκ ἐχόντων ἐμακάριζον αὐτήν, τῶν μὲν συμβήσεσθαι διὰ ταῦτα μελλόντων οὐδεμίαν ποιούμενοι πρόνοιαν, τὸν δὲ πλοῦτον θαυμάζοντες καὶ ζηλοῦντες, ὃς ἀδίκως εἰς τὴν πόλιν εἰσελθὼν καὶ τὸν δικαίως ὑπάρξαντα διὰ ταχέων ἤμελλε προσαπολεῖν. (84) Εἰς τοῦτο γὰρ κατὲστησαν τῶν μὲν οἰκείων ἀμελείας τῶν δ' ἀλλοτρίων ἐπιθυμίας, ὥστε Λακεδαιμονίων εἰσβεβληκότων εἰς τὴν χώραν καὶ τοῦ τείχους ἤδη τοῦ Δεκελειᾶσιν ἑστηκότος εἰς Σικελίαν τριήρεις ἐπλήρουν, καὶ οὐκ ᾐσχύνοντο τὴν μὲν πατρίδα τεμνομένην καὶ πορθουμένην περιορῶντες, ἐπὶ δὲ τοὺς οὐδὲν πώποτ' εἰς ἡμᾶς ἐξαμαρτόντας στρατιὰν ἐκπέμποντες, (85) ἀλλ' εἰς τοῦτ' ἀφροσύνης ἦλθον, ὥστε τῶν προαστείων τῶν οἰκείων οὐ κρατοῦντες Ἰταλίας καὶ Σικελίας καὶ Καρχηδόνος ἄρξειν προσεδόκησαν. Τοσοῦτον δὲ διήνεγκαν ἀνοίᾳ πάντων ἀνθρώπων, ὥστε τοὺς μὲν ἄλλους αἱ συμφοραὶ συστέλλουσι καὶ ποιοῦσιν ἐμφρονεστέρους, ἐκεῖνοι δ' οὐδ' ὑπὸ τούτων ἐπαιδεύθησαν. (86) Καίτοι πλείοσι καὶ μείζοσι περιέπεσον ἐπὶ τῆς ἀρχῆς ταύτης τῶν ἐν ἅπαντι τῷ χρόνῳ τῇ πόλει γεγενημένων. Εἰς Αἴγυπτον μέν γε διακόσιαι πλεύσασαι τριήρεις αὐτοῖς τοῖς πληρώμασι διεφθάρησαν, περὶ δὲ Κύπρον πεντήκοντα καὶ ἑκατόν· ἐν δὲ τῷ Δεκελεικῷ πολέμῳ μυρίους ὁπλίτας αὑτῶν καὶ τῶν συμμάχων ἀπώλεσαν, ἐν Σικελίᾳ δὲ τέτταρας μυριάδας καὶ τριήρεις τετταράκοντα καὶ διακοσίας, τὸ δὲ τελευταῖον ἐν Ἑλλησπόντῳ διακοσίας. (87) Τὰς δὲ κατὰ δέκα καὶ κατὰ πέντε καὶ πλείους τούτων ἀπολλυμένας καὶ τοὺς κατὰ χιλίους καὶ δισχιλίους ἀποθνήσκοντας τίς ἄν ἐξαριθμήσειεν; Πλήν ἓν ἦν τοῦτο τῶν ἐγκυκλίων, ταφὰς ποιεῖν καθ' ἕκαστον τὸν ἐνιαυτόν, εἰς ἃς πολλοὶ καὶ τῶν ἀστυγειτόνων καὶ τῶν ἄλλων Ἑλλήνων ἐφοίτων, οὐ συμπενθήσοντες τοὺς τεθνεῶτας ἀλλὰ συνησθησόμενοι ταῖς ἡμετέραις συμφοραῖς. (88) Τελευτῶντες δ' ἔλαθον σφᾶς αὐτοὺς τοὺς μὲν τάφους τοὺς δημοσίους τῶν πολιτῶν ἐμπλήσαντες, τὰς δὲ φρατρίας καὶ τὰ γραμματεῖα τὰ ληξιαρχικὰ τῶν οὐδὲν τῇ πόλει προσηκόντων. Γνοίη δ' ἄν τις ἐκεῖθεν μάλιστα τὸ πλῆθος τῶν ἀπολλυμένων· τὰ γὰρ γένη τῶν ἀνδρῶν τῶν ὀνομαστοτάτων καὶ τοὺς οἴκους τοὺς μεγίστους, οἳ καὶ τὰς τυραννικὰς στάσεις καὶ τὸν Περσικὸν πόλεμον διέφυγον, εὑρήσομεν ἐπὶ τῆς ἀρχῆς, ἧς ἐπιθυμοῦμεν, ἀναστάτους γεγενημένους. (89) Ὥστ' εἴ τις σκοπεῖσθαι βούλοιτο περὶ τῶν ἄλλων, ὥσπερ πρὸς δεῖγμα τοῦτ' ἀναφέρων, φανεῖμεν ἂν μικροῦ δεῖν ἀντηλλαγμένοι. Καίτοι χρὴ πόλιν μὲν εὐδαιμονίζειν μὴ τὴν ἐξ ἁπάντων ἀνθρώπων εἰκῇ πολλοὺς πολίτας ἀθροίζουσαν, ἀλλὰ τὴν τὸ γένος τῶν ἐξ ἀρχῆς τὴν πόλιν οἰκισάντων μᾶλλον τῶν ἄλλων διασώζουσαν, ἄνδρας δὲ ζηλοῦν μὴ τοὺς τὰς τυραννίδας κατέχοντας μηδὲ τοὺς μείζω δυναστείαν τοῦ δικαίου κεκτημένους, ἀλλὰ τοὺς ἀξίους μὲν ὄντας τῆς μεγίστης τιμῆς, στέργοντας δ' ἐπὶ ταῖς ὑπὸ τοῦ πλήθους διδομέναις. [80] Mais si je me hasardais à entrer dans le détail des faits qui se sont produits alors, peut-être, en cherchant à vous persuader de suivre aujourd'hui de meilleurs conseils, deviendrais-je moi-même l'objet de vos accusations, car vous avez, pour usage de porter moins de haine aux auteurs de vos fautes qu'à ceux qui les blâment. (81) J'ai donc lieu de craindre, en vous voyant dans une telle disposition, qu'en cherchant à nous servir je ne recueille quelque fruit amer de mon dévouement. Toutefois je ne me départirai pas entièrement de ma résolution : je passerai sous silence ce qui serait trop pénible et surtout trop blessant pour vous, et je rappellerai seulement des faits qui vous serviront à connaître la folie des hommes qui nous gouvernaient alors. (82) 29. Ces hommes mettaient un tel soin à rechercher tout ce qui pouvait exaspérer la haine, qu'un jour ils ordonnèrent, par un décret, de diviser en parties d'un talent chacune l'argent qui restait des tributs levés sur les alliés, et de le transporter, pendant les fêtes de Bacchus, sur l'orchestre, lorsque le théâtre serait rempli de spectateurs ; et en même temps qu'un tel ordre s'exécutait, ils introduisaient les enfants des citoyens qui avaient péri à la guerre, faisant voir d'une part, aux alliés, la valeur des richesses qui leur avaient été enlevées et qu'apportaient des mercenaires; de l'autre, montrant aux Grecs, dans la multitude des orphelins, les malheurs qu'avait produits une ambitieuse cupidité. (83) Et tandis qu'ils agissaient ainsi, ils vantaient le bonheur de leur patrie, qu'une foule insensée exaltait sans aucune prévoyance d'un avenir inévitable, admirant avec envie une opulence obtenue par l'injustice, et destinée à entraîner bientôt dans sa ruine les richesses légitimement acquises. (84) Ils en étaient venus à un tel point d'indifférence pour leur fortune personnelle, d'avidité pour celle des autres, qu'à l'époque où les Lacédémoniens envahissaient l'Attique, et lorsque déjà les fortifications de Décélie étaient élevées, ils équipaient des galères pour porter la guerre en Sicile, ne rougissant pas de voir leur pays dévasté et saccagé sous leurs yeux, en même temps qu'ils envoyaient une armée contre des peuples qui jamais ne nous avaient offensés : (85) leur aberration était si grande que, n'étant pas même les maîtres des faubourgs de leur ville, ils se croyaient au moment d'établir leur domination sur l'Italie, la Sicile et Carthage. Leur folie dépassait tellement celle du reste des mortels, que les malheurs qui font rentrer les hommes en eux-mêmes, qui les rendent plus circonspects, ne leur apportaient aucun enseignement. (86) Et cependant, cette suprématie maritime leur avait apporté des calamités plus grandes et plus nombreuses que celles qui avaient frappé notre ville dans tout le cours de son existence. Deux cents galères à trois rangs de rames avaient fait voile vers l'Égypte, et elles y avaient trouvé leur perte avec les équipages qui les montaient : cent cinquante avaient été anéanties autour de Cypre; dix mille hoplites, les uns citoyens d'Athènes, les autres alliés de la république, avaient trouvé la mort à Datos ; quarante mille avaient succombé en Sicile avec deux cent quarante galères, et récemment deux cents galères avaient péri dans l'Hellespont. (87) Qui pourrait compter en outre les vaisseaux perdus par cinq, par dix, ou même en plus grand nombre, les hommes tombés sous le fer de l'ennemi par mille, par deux mille? Bien plus, chaque année voyait se renouveler les cérémonies funèbres auxquelles venaient assister un grand nombre de nos voisins, ainsi que beaucoup d'autres Grecs, moins pour pleurer les morts avec nous, que pour se réjouir ensemble de nos malheurs. (88) Enfin ils ne s'apercevaient pas que, tandis que les citoyens remplissaient les sépultures publiques, les tableaux des tribus, les registres de l'État se couvraient de noms portés par des hommes que rien n'attachait à la patrie. Voici un fait qui pourrait servir à juger l'immensité de nos pertes. Les races des hommes les plus célèbres et les plus nobles familles, qui avaient échappé aux luttes contre la tyrannie et à la guerre persique, ont disparu sous l'empire de cette suprématie que nous désirons encore. (89) Si donc on voulait, par les familles dont je parle, juger des autres, on trouverait que nous sommes un peuple pour ainsi dire renouvelé. 30. Il faut considérer comme heureuse, non pas la ville qui a rassemblé au hasard dans son enceinte des citoyens empruntés à toutes les nations, mais celle qui a conservé, plus que les autres, la race de ses premiers fondateurs ; il ne faut pas porter envie à ceux qui se maintiennent par la violence en possession de la tyrannie, ou qui ont acquis une puissance excessive, mais à ceux qui, dignes des plus grands honneurs, se montrent satisfaits des récompenses que le peuple leur accorde.


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Dernière mise à jour : 26/09/2008