[20] Ἢν δὲ τὴν εἰρήνην
ποιησώμεθα, καὶ τοιούτους ἡμᾶς αὐτοὺς παράσχωμεν οἵους αἱ κοιναὶ συνθῆκαι
προστάττουσι, μετὰ πολλῆς μὲν ἀσφαλείας τὴν πόλιν οἰκήσομεν, ἀπαλλαγέντες
πολέμων καὶ κινδύνων καὶ ταραχῆς, εἰς ἣν νῦν πρὸς ἀλλήλους καθέσταμεν, καθ'
ἑκάστην δὲ τὴν ἡμέραν πρὸς εὐπορίαν ἐπιδώσομεν, ἀναπεπαυμένοι μὲν τῶν εἰσφορῶν
καὶ τῶν τριηραρχιῶν καὶ τῶν ἄλλων τῶν περὶ τὸν πόλεμον λειτουργιῶν, ἀδεῶς δὲ
γεωργοῦντες καὶ τὴν θάλατταν πλέοντες καὶ ταῖς ἄλλαις ἐργασίαις ἐπιχειροῦντες, αἳ νῦν
διὰ τὸν πόλεμον ἐκλελοίπασιν. (21) Ὀψόμεθα δὲ τὴν πόλιν διπλασίας μὲν ἢ νῦν τὰς
προσόδους λαμβάνουσαν, μεστὴν δὲ γιγνομένην ἐμπόρων καὶ ξένων καὶ μετοίκων, ὧν
νῦν ἐρήμη καθέστηκεν. Τὸ δὲ μέγιστον, συμμάχους ἕξομεν ἅπαντας ἀνθρώπους, οὐ
βεβιασμένους ἀλλὰ πεπεισμένους, οὐδ' ἐν ταῖς μὲν ἀσφαλείαις διὰ τὴν δύναμιν ἡμᾶς
ὑποδεχομένους, ἐν δὲ τοῖς κινδύνοις ἀποστησομένους, ἀλλ' οὕτω διακειμένους ὥσπερ
χρὴ τοὺς ὡς ἀληθῶς συμμάχους καὶ φίλους ὄντας. (22) Πρὸς δὲ τούτοις, ἃ νῦν
ἀπολαβεῖν οὐ δυνάμεθα διὰ πολέμου καὶ πολλῆς δαπάνης, ταῦτα διὰ πρεσβείας
ῥᾳδίως κομιούμεθα. Μὴ γὰρ οἴεσθε μήτε Κερσοβλέπτην ὑπὲρ Χερρονήσου μήτε
Φίλιππον ὑπὲρ Ἀμφιπόλεως πολεμήσειν, ὅταν ἴδωσιν ἡμᾶς μηδενὸς τῶν ἀλλοτρίων
ἐφιεμένους. Νῦν μὲν γὰρ εἰκότως φοβοῦνται γείτονα ποιήσασθαι τὴν πόλιν ταῖς αὑτῶν
δυναστείαις, (23) ὁρῶσι γὰρ ἡμᾶς οὐ στέργοντας ἐφ' οἷς ἂν ἔχωμεν, ἀλλ' ἀεὶ τοῦ
πλέονος ὀρεγομένους, ἢν δὲ μεταβαλώμεθα τὸν τρόπον καὶ δόξαν βελτίω λάβωμεν, οὐ
μόνον ἀποστήσονται τῆς ἡμετέρας, ἀλλὰ καὶ τῆς αὑτῶν προσδώσουσι· λυσιτελήσει γὰρ
αὐτοῖς θεραπεύουσι τὴν δύναμιν τὴν τῆς πόλεως ἀσφαλῶς ἔχειν τὰς ἑαυτῶν βασιλείας.
(24) Καὶ μὲν δὴ καὶ τῆς Θρᾴκης ἡμῖν ἐξέσται τοσαύτην ἀποτεμέσθαι χώραν, ὥστε μὴ
μόνον αὐτοὺς ἄφθονον ἔχειν, ἀλλὰ καὶ τοῖς δεομένοις τῶν Ἑλλήνων καὶ δι' ἀπορίαν
πλανωμένοις ἱκανὸν δύνασθαι βίον παρασχεῖν. Ὅπου γὰρ Ἀθηνόδωρος καὶ
Καλλίστρατος, ὁ μὲν ἰδιώτης ὤν, ὁ δὲ φυγάς, οἰκίσαι πόλεις οἷοί τε γεγόνασιν, ἦ που
βουληθέντες ἡμεῖς πολλοὺς ἂν τόπους τοιούτους κατασχεῖν δυνηθεῖμεν. Χρὴ δὲ τοὺς
πρωτεύειν ἐν τοῖς Ἕλλησιν ἀξιοῦντας τοιούτων ἔργων ἡγεμόνας γίγνεσθαι πολὺ μᾶλλον
ἢ πολέμου καὶ στρατοπέδων ξενικῶν, ὧν νῦν ἐπιθυμοῦντες ἡμεῖς τυγχάνομεν.
(25) Περὶ μὲν οὖν ὧν οἱ πρέσβεις ἐπαγγέλλονται, καὶ ταῦθ' ἱκανά, καὶ πολλὰ ἂν
ἴσως τις προσθείη τούτοις· ἡγοῦμαι δὲ δεῖν ἡμᾶς οὐ μόνον ψηφισαμένους τὴν εἰρήνην
ἐκ τῆς ἐκκλησίας ἀπελθεῖν, ἀλλὰ καὶ βουλευσαμένους ὅπως ἄξομεν αὐτήν, καὶ μὴ
ποιήσομεν ὅπερ εἰώθαμεν, ὀλίγον χρόνον διαλιπόντες πάλιν εἰς τὰς αὐτὰς
καταστησόμεθα ταραχάς, μηδ' ἀναβολὴν ἀλλ' ἀπαλλαγὴν εὑρήσομέν τινα τῶν κακῶν
τῶν παρόντων. (26) Οὐδὲν δὲ τούτων οἷόν τ' ἐστὶ γενέσθαι πρότερον, πρὶν ἂν πεισθῆτε
τὴν μὲν ἡσυχίαν ὠφελιμωτέραν καὶ κερδαλεωτέραν εἶναι τῆς πολυπραγμοσύνης, τὴν δὲ
δικαιοσύνην τῆς ἀδικίας, τὴν δὲ τῶν ἰδίων ἐπιμέλειαν τῆς τῶν ἀλλοτρίων ἐπιθυμίας.
Περὶ ὧν οὐδεὶς πώποτε τῶν ῥητόρων εἰπεῖν ἐν ὑμῖν ἐτόλμησεν· ἐγὼ δὲ περὶ αὐτῶν
τούτων τοὺς πλείστους τῶν λόγων μέλλω ποιεῖσθαι πρὸς ὑμᾶς· ὁρῶ γὰρ τὴν
εὐδαιμονίαν ἐν τούτοις ἐνοῦσαν, ἀλλ' οὐκ ἐν οἷς νῦν τυγχάνομεν πράττοντες. (27)
Ἀνάγκη δὲ τὸν ἔξω τῶν εἰθισμένων ἐπιχειροῦντα δημηγορεῖν καὶ τὰς ὑμετέρας γνώμας
μεταστῆσαι βουλόμενον πολλῶν πραγμάτων ἅψασθαι καὶ διὰ μακροτέρων τοὺς λόγους
ποιήσασθαι, καὶ τὰ μὲν ἀναμνῆσαι, τῶν δὲ κατηγορῆσαι, τὰ δ' ἐπαινέσαι, περὶ δὲ τῶν
συμβουλεῦσαι· μόλις γὰρ ἄν τις ὑμᾶς ἐξ ἁπάντων τούτων ἐπὶ τὸ βέλτιον φρονῆσαι
δυνηθείη προαγαγεῖν.
(28) Ἔχει γὰρ οὕτως. Ἐμοὶ δοκοῦσιν ἅπαντες μὲν ἐπιθυμεῖν τοῦ συμφέροντος καὶ
τοῦ πλέον ἔχειν τῶν ἄλλων, οὑκ εἰδέναι δὲ τὰς πράξεις τὰς ἐπὶ ταῦτα φερούσας, ἀλλὰ
ταῖς δόξαις διαφέρεν ἀλλήλων· οἱ μὲν γὰρ ἔχειν ἐπιεικεῖς καὶ στοχάζεσθαι τοῦ δέοντος
δυναμένας, οἱ δ' ὡς οἷόν τε πλεῖστον τοῦ συμφέροντος διαμαρτανούσας. (29) Ὅπερ καὶ
τῇ πόλει συμβέβηκεν. Ἡμεῖς γὰρ οἰόμεθα μέν, ἢν τὴν θάλατταν πλέωμεν πολλαῖς
τριήρεσι καὶ βιαζώμεθα τὰς πόλεις συντάξεις διδόναι καὶ δεόντων· πλεῖστον
διεψεύσμεθα τῆς ἀληθείας. Ὦ μὲν γὰρ ἠλπίζομεν, οὐδὲν ἀποβέβηκεν, ἔχθραι δ' ἡμῖν ἐξ
αὐτῶν καὶ πόλεμοι καὶ δαπάναι μεγάλαι γεγόνασιν,
| [20] Si nous faisons la paix,
si nous exécutons les traités, nous vivrons dans une grande sécurité;
affranchis des luttes, des combats et des troubles qui nous divisent aujourd'hui, nous
ajouterons chaque jour à notre prospérité, nous cesserons de payer des contributions,
d'armer des galères pour l'État, de supporter les autres sacrifices que la guerre nous
impose ; délivrés de toute crainte, nous cultiverons nos champs, nous parcourrons les
mers et nous reprendrons les travaux que la guerre a interrompus. (21) Nous verrons
notre ville doubler ses revenus, et nous y verrons affluer les marchands, les étrangers
qui viendront la visiter ou s'y établir, avantage dont maintenant elle est privée. Enfin, et
ce résultat est de tous le plus important, nous compterons tous les peuples pour alliés,
non par la contrainte et la violence, mais par l'ascendant de la persuasion; et, au lieu
de nous accepter pour amis dans les temps de sécurité, à cause de notre puissance,
sauf à nous abandonner dans le péril, ils seront en réalité pour nous ce que doivent
être de fidèles alliés, de véritables amis. (22) J'ajoute que ce qu'il nous est impossible
de recouvrer par la guerre et par des dépenses énormes, nous l'obtiendrons avec une
grande facilité par de simples négociations. Ne croyez pas que Kersoblepte veuille
nous déclarer la guerre à cause de la Chersonèse, ou Philippe pour Amphipolis,
lorsqu'ils auront reconnu que nous ne convoitons plus les possessions étrangères.
Aujourd'hui ils craignent, avec raison, de nous rendre voisins de leurs États, (23) parce
qu'ils voient qu'au lieu d'être satisfaits de ce que nous avons, nous voulons ajouter
sans cesse à notre puissance; mais, si nous changeons de système et si nous
obtenons une meilleure renommée, ils s'abstiendront non seulement de toucher à
notre territoire, mais ils nous donneront une partie de celui qui leur appartient, parce
qu'ils trouveront, dans l'accroissement de notre puissance, l'avantage d'une garantie
de sécurité pour leurs propres États. (24) Que dis-je? nous pourrons même occuper
une partie de la Thrace assez grande pour nous assurer d'abondantes ressources, et
pour nous permettre de procurer une existence suffisante aux Grecs que la misère
force à mener une vie errante. N'est-il pas évident que, dans un pays où Athénodore et
Callistrate, l'un simple particulier, l'autre exilé, ont pu fonder des villes, il nous sera
possible de nous emparer, si nous le voulons, d'un grand nombre de positions qui
nous offriront la même faculté? Il appartient à des hommes qui se croient dignes du
premier rang parmi les Grecs, de se mettre à la tête de semblables entreprises, plutôt
que de provoquer des guerres et d'entretenir des armées mercenaires, comme nous
en éprouvons le désir maintenant.
(25) 10. Pour ce qui touche aux propositions apportées par les ambassadeurs, ce
qui précède suffit, et pourtant il serait possible d'ajouter encore beaucoup de choses.
Je crois que nous ne devons nous séparer qu'après avoir non seulement décrété la
paix, mais délibéré sur les moyens de la rendre durable, afin de ne pas, selon notre
coutume, après quelque temps écoulé, replonger notre pays dans les mêmes
embarras, et qu'ainsi nous arriverons, non à un simple ajournement, mais à la
délivrance des maux que nous souffrons. (26) Aucun de ces avantages ne peut se
réaliser, si vous n'êtes pas convaincus que le repos est plus profitable et plus utile que
l'agitation inquiète, l'équité plus que l'injustice, le soin de vos intérêts plus que le désir
d'usurper des possessions étrangères. Mais ce sont là des vérités dont jamais aucun
de vos orateurs n'a osé vous entretenir; et moi, je prétends leur consacrer la plus
grande partie de mes discours, car j'aperçois dans ces vérités le gage d'une félicité
que nous ne pouvons obtenir avec le système que nous suivons aujourd'hui. (27) Il est
indispensable toutefois pour l'orateur qui entreprend de sortir du cercle des
discussions ordinaires, et qui veut vous faire adopter des opinions nouvelles, d'aborder
un grand nombre de questions, de donner un plus grand développement à ses
paroles, de réveiller vos souvenirs, de blâmer certaines choses, d'en louer d'autres,
d'offrir des conseils sur quelques-unes, et encore c'est à peine s'il parviendra, à l'aide
de toutes ces ressources, à vous inspirer des pensées plus sages.
(28) 11. Telle est la vérité. Tous les hommes me paraissent désirer ce qui leur est
utile, et vouloir s'assurer des avantages qui les élèvent au-dessus de leurs semblables
; mais tous ne connaissent pas les moyens d'y parvenir et diffèrent dans leurs
opinions: les uns possèdent un jugement sain, capable d'apprécier ce qu'il faut faire;
les autres manquent autant qu'il est possible le but qu'il faut atteindre. (29) C'est ce qui
est arrivé à notre patrie. Nous nous sommes persuadés qu'en couvrant la mer de nos
vaisseaux, en contraignant par la violence les villes à nous payer des tributs, à
envoyer vers nous des hommes qui les représentent, nous faisions un calcul habile, et
nous nous sommes gravement trompés ! Nous n'avons vu se réaliser aucune de nos
espérances ; des haines, des guerres, des dépenses énormes, ont été pour nous les
seuls fruits de cette politique,
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