HODOI ELEKTRONIKAI
Du texte à l'hypertexte

Isocrate, Éloge d'Hélène (texte complet)

Paragraphes 50-59

  Paragraphes 50-59

[50] Ἐξὸν δὲ τοῖς μὲν ἀποδοῦσιν Ἑλένην ἀπηλλάχθαι τῶν παρόντων κακῶν, τοῖς δ' ἀμελήσασιν ἐκείνης ἀδεῶς οἰκεῖν τὸν ἐπίλοιπον χρόνον, οὐδέτεροι ταῦτ' ἠθέλησαν· ἀλλ' οἱ μὲν περιεώρων καὶ πόλεις ἀναστάτους γιγνομένας καὶ τὴν χώραν πορθουμένην, ὥστε μὴ προέσθαι τοῖς Ἕλλησιν αὐτήν, οἱ δ' ᾑροῦντο μένοντες ἐπὶ τῆς ἀλλοτρίας καταγηράσκειν καὶ μηδέποτε τοὺς αὑτῶν ἰδεῖν μᾶλλον 'κείνην καταλιπόντες εἰς τὰς αὑτῶν πατρίδας ἀπελθεῖν. (51) Καὶ ταῦτ' ἐποίουν οὐχ ὑπὲρ Ἀλεξάνδρου καὶ Μενελάου φιλονικοῦντες, ἀλλ' οἱ μὲν ὑπὲρ τῆς Ἀσίας, οἱ δ' ὑπὲρ τῆς Εὐρώπης, νομίζοντες, ἐν ὁποτέρᾳ τὸ σῶμα τοὐκείνης κατοικήσειε, ταύτην εὐδαιμονεστέραν τὴν χώραν ἔσεσθαι. (52) Τοσοῦτος δ' ἔρως ἐνέπεσε τῶν πόνων καὶ τῆς στρατείας ἐκείνης οὐ μόνον τοῖς Ἕλλησι καὶ τοῖς βαρβάροις ἀλλὰ καὶ τοῖς θεοῖς, ὥστ' οὐδὲ τοὺς ἐξ αὑτῶν γεγονότας ἀπέτρεψαν τῶν ἀγώνων τῶν περὶ Τροίαν, ἀλλὰ Ζεὺς μὲν προειδὼς τὴν Σαρπηδόνος εἱμαρμένην, Ἠὼς δὲ τὴν Μέμνονος, Ποσειδῶν δὲ τὴν Κύκνου, Θέτις δὲ τὴν Ἀχιλλέως, ὅμως αὐτοὺς συνεξώρμησαν καὶ συνεξέπεμψαν, (53) ἡγούμενοι κάλλιον αὐτοῖς εἶναι τεθνάναι μαχομένοις περὶ τῆς Διὸς θυγατρὸς μᾶλλον ζῆν ἀπολειφθεῖσι τῶν περὶ ἐκείνης κινδύνων. Καὶ τί δεῖ θαυμάζειν, περὶ τῶν παίδων διενοήθησαν; Αὐτοὶ γὰρ πολὺ μείζω καὶ δεινοτέραν ἐποιήσαντο παράταξιν τῆς πρὸς Γίγαντας αὐτοῖς γενομένης· πρὸς μὲν γὰρ ἐκείνους μετ' ἀλλήλων ἐμαχέσαντο, περὶ δὲ ταύτης πρὸς σφᾶς αὐτοὺς ἐπολέμησαν. (54) Εὐλόγως δὲ κἀκεῖνοι ταῦτ' ἔγνωσαν, κἀγὼ τηλικαύταις ὑπερβολαῖς ἔχω χρήσασθαι περὶ αὐτῆς· κάλλους γὰρ πλεῖστον μέρος μετέσχεν, σεμνότατον καὶ τιμιώτατον καὶ θειότατον τῶν ὄντων ἐστίν. Ῥᾴδιον δὲ γνῶναι τὴν δύναμιν αὐτοῦ· τῶν μὲν γὰρ ἀνδρίας σοφίας δικαιοσύνης μὴ μετεχόντων πολλὰ φανήσεται τιμώμενα μᾶλλον τούτων ἕκαστον, τῶν δὲ κάλλους ἀπεστερημένων οὐδὲν εὑρήσομεν ἀγαπώμενον ἀλλὰ πάντα καταφρονούμενα, πλὴν ὅσα ταύτης τῆς ἰδέας κεκοινώνηκε, καὶ τὴν ἀρετὴν διὰ τοῦτο μάλιστ' εὐδοκιμοῦσαν, ὅτι κάλλιστον τῶν ἐπιτηδευμάτων ἐστίν. (55) Γνοίη δ' ἄν τις κἀκεῖθεν ὅσον διαφέρει τῶν ὄντων, ἐξ ὧν αὐτοὶ διατιθέμεθα πρὸς ἕκαστον αὐτῶν. Τῶν μὲν γὰρ ἄλλων ὧν ἂν ἐν χρείᾳ γενώμεθα, τυχεῖν μόνον βουλόμεθα, περαιτέρω δὲ περὶ αὐτῶν οὐδὲν τῇ ψυχῇ προσπεπόνθαμεν· τῶν δὲ καλῶν ἔρως ἡμῖν ἐγγίγνεται, τοσούτῳ μείζω τοῦ βούλεσθαι ῥώμην ἔχων, ὅσῳ περ καὶ τὸ πρᾶγμα κρεῖττόν ἐστιν. (56) Καὶ τοῖς μὲν κατὰ σύνεσιν κατ' ἄλλο τι προέχουσι φθονοῦμεν, ἢν μὴ τῷ ποιεῖν ἡμᾶς εὖ καθ' ἑκάστην τὴν ἡμέραν προσαγάγωνται καὶ στέργειν σφᾶς αὐτοὺς ἀναγκάσωσι· τοῖς δὲ καλοῖς εὐθὺς ἰδόντες εὖνοι γιγνόμεθα, καὶ μόνους αὐτοὺς ὥσπερ τοὺς θεοὺς οὐκ ἀπαγορεύομεν θεραπεύοντες, (57) ἀλλ' ἥδιον δουλεύομεν τοῖς τοιούτοις τῶν ἄλλων ἄρχομεν, πλείω χάριν ἔχοντες τοῖς πολλὰ προστάττουσιν τοῖς μηδὲν ἐπαγγέλλουσιν. Καὶ τοὺς μὲν ὑπ' ἄλλῃ τινὶ δυνάμει γιγνομένους λοιδοροῦμεν καὶ κόλακας ἀποκαλοῦμεν, τοὺς δὲ τῷ κάλλει λατρεύοντας φιλοκάλους καὶ φιλοπόνους εἶναι νομίζομεν. (58) Τοσαύτῃ δ' εὐσεβείᾳ καὶ προνοίᾳ χρώμεθα περὶ τὴν ἰδέαν τὴν τοιαύτην ὥστε καὶ τῶν ἐχόντων τὸ κάλλος τοὺς μὲν μισθαρνήσαντας καὶ κακῶς βουλευσαμένους περὶ τῆς αὑτῶν ἡλικίας μᾶλλον ἀτιμάζομεν τοὺς εἰς τὰ τῶν ἄλλων σώματ' ἐξαμαρτόντας· ὅσοι δ' ἂν τὴν αὑτῶν ὥραν διαφυλάξωσιν ἄβατον τοῖς πονηροῖς ὥσπερ ἱερὸν ποιήσαντες, τούτους εἰς τὸν ἐπίλοιπον χρόνον ὁμοίως τιμῶμεν ὥσπερ τοὺς ὅλην τὴν πόλιν ἀγαθόν τι ποιήσαντας. (59) Καὶ τὶ δεῖ τὰς ἀνθρωπίνας δόξας λέγοντα διατρίβειν; Ἀλλὰ Ζεὺς κρατῶν πάντων ἐν μὲν τοῖς ἄλλοις τὴν αὑτοῦ δύναμιν ἐνδείκνυται, πρὸς δὲ τὸ κάλλος ταπεινὸς γιγνόμενος ἀξιοῖ πλησιάζειν. Ἀμφιτρύωνι μὲν γὰρ εἰκασθεὶς ὡς Ἀλκμήνην ἦλθε, χρυσὸς δὲ ῥυεὶς Δανάῃ συνεγένετο, κύκνος δὲ γενόμενος εἰς τοὺς Νεμέσεως κόλπους κατέφυγε, τούτῳ δὲ πάλιν ὁμοιωθεὶς Λήδαν ἐνύμφευσεν· ἀεὶ δὲ μετὰ τέχνης ἀλλ' οὐ μετὰ βίας θηρώμενος φαίνεται τὴν φύσιν τὴν τοιαύτην. [50] Les uns pouvaient, en rendant Hélène, s'affranchir des maux qu'ils souffraient; les autres, en l'abandonnant, pouvaient passer le reste de leur existence dans une sécurité complète, mais ni les uns ni les autres ne voulurent y consentir. Les Barbares regardaient d'un œil indifférent leurs villes saccagées, leur pays dévasté, pourvu qu'ils ne fussent pas obligés de remettre Hélène aux mains des Grecs; et les Grecs préféraient vieillir sur la terre étrangère et renoncer à revoir jamais leurs familles, plutôt que de revenir dans leur patrie en abandonnant Hélène. (51) Ils agissaient ainsi, non pour soutenir la querelle d'Alexandre et de Ménélas, mais les uns pour la cause de l'Asie, les autres, pour celle de l'Europe, tous également convaincus que celle des deux contrées qui posséderait Hélène serait la plus heureuse. (52) 24. L'ardeur de s'associer aux travaux, de partager les dangers de cette grande expédition, était telle, non seulement parmi les Grecs et les Barbares, mais aussi parmi les dieux, que ces derniers ne détournaient même pas les héros auxquels ils avaient donné le jour de prendre part à la lutte engagée sous les murs de Troie. Jupiter prévoyait la mort de Sarpédon ; l'Aurore, celle de Memnon; Neptune, celle de Cycnus; Thétis, celle d'Achille; et pourtant ils les exhortaient à s'armer; ils les envoyaient à cette guerre, (53) convaincus qu'il était préférable de mourir en combattant pour la fille de Jupiter, que de vivre en se dérobant aux périls qu'on allait braver pour elle. Comment d'ailleurs s'étonner que les dieux aient éprouvé un tel sentiment à l'égard de leurs enfants, quand on les voit se livrer eux-mêmes des combats plus grands, plus terribles que ceux qu'ils avaient jadis soutenus contre les Géants? Contre les Géants, en effet, ils combattaient réunis; dans la guerre dont Hélène était l'objet, ils combattaient les uns contre les autres. (54) 25. La résolution qu'ils prirent était conforme à la raison; et j'ai le droit, lorsque je parle d'Hélène, de me servir d'un langage si pompeux, car Hélène réunissait en elle la plupart des trésors dont la beauté se compose, et il n'est rien dans l'univers de plus auguste, de plus noble, de plus divin que la beauté. Il est facile de reconnaître sa puissance. Parmi les choses qui ne participent ni de la force, ni de la sagesse, ni de la justice, il en est un grand nombre qui sont plus honorées que chacune de ces vertus, tandis que, sans la beauté, nous ne trouvons rien qui nous charme, ou plutôt nous dédaignons tout ce qui n'est pas doué de ce précieux avantage, et la vertu est surtout admirée parce qu'elle est la beauté de l'âme. (55) On peut apprécier à quel point la beauté l'emporte sur toutes les choses qui existent, par la disposition où nous sommes à l'égard de chacune d'elles. Pour tous les autres objets, dans le moment où nous en ressentons le besoin , nous cherchons à les obtenir; au delà, ils n'exercent aucune action sur notre âme : mais l'amour de ce qui est beau existe en nous, avec une force d'autant plus supérieure à notre volonté que ce qui en est l'objet le mérite davantage. (56) Nous éprouvons de la jalousie à l'égard de ceux qui se distinguent par leur intelligence ou par quelque autre avantage, à moins que, nous attirant chaque jour par des bienfaits, ils ne nous forcent à les aimer; tandis que ceux qui ont la beauté en partage nous inspirent au premier aspect un tel sentiment de bienveillance que pour eux seuls, de même que pour les dieux, nous ne nous lassons jamais du culte que nous leur rendons ; (57) nous trouvons plus de douceur à leur obéir en esclaves qu'à commander aux autres hommes; et nous savons plus de gré à ceux qui multiplient leurs ordres qu'à ceux qui ne nous commandent rien. Nous poursuivons de nos injures, nous appelons vils flatteurs ceux qui subissent le joug d'un ascendant étranger, et nous considérons ceux qui se vouent au culte de la beauté comme des hommes distingués par l'intelligence et le bon goût. (58) Nous entourons d'un tel respect, d'un soin si religieux, ce don de la divinité que, parmi les êtres qui en sont doués , nous vouons à l'infamie ceux qui, séduits par un vil intérêt ou entraînés par de funestes conseils, flétrissent la fleur de leur jeunesse, et nous les méprisons plus encore que les êtres dégradés qui outragent dans les autres le sentiment de la pudeur: tandis que ceux qui gardent leur innocence dans sa pureté, qui en font comme un sanctuaire impénétrable aux méchants, sont l'objet de nos respects, et sont honorés dans tout le cours de leur vie , comme les auteurs d'un bienfait qui se répand sur la société tout entière. (59) 26. Mais pourquoi nous arrêter à reproduire les opinions des hommes ? Jupiter, le maître de l'univers, se montre partout environné de l'éclat de sa puissance ; mais, dès qu'il veut s'approcher de la beauté, aussitôt sa fierté s'abaisse. S'il se rend près d'Alcmène , c'est sous les traits d'Amphitryon ; il se répand en pluie d'or pour s'unir à Danaé ; c'est sous la forme d'un cygne qu'il se réfugie dans le sein de Némésis, et c'est encore sous cette forme qu'il devient l'époux de Léda; en un mot, on le voit toujours employer l'art, et non la force, pour soumettre la beauté.


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Dernière mise à jour : 16/10/2008