[40] Οὔπω δὲ κεκριμένου τοῦ μέλλοντος αὐτῇ συνοικήσειν ἀλλ' ἔτι κοινῆς
τῆς τύχης οὔσης οὕτω πρόδηλος ἦν ἅπασιν ἐσομένη περιμάχητος ὥστε συνελθόντες
πίστεις ἔδοσαν ἀλλήλοις ἦ μὴν βοηθήσειν, εἴ τις ἀποστεροίη τὸν ἀξιωθέντα λαβεῖν αὐτήν,
νομίζων ἕκαστος τὴν ἐπικουρίαν ταύτην αὑτῷ παρασκευάζειν. (41) Τῆς μὲν οὖν ἰδίας
ἐλπίδος πλὴν ἑνὸς ἀνδρὸς ἅπαντες ἐψεύσθησαν, τῆς δὲ κοινῆς δόξης ἧς ἔσχον περὶ
ἐκείνης οὐδεὶς αὐτῶν διήμαρτεν.
Οὐ πολλοῦ γὰρ χρόνου διελθόντος, γενομένης ἐν θεοῖς περὶ κάλλους ἔριδος ἧς
Ἀλέξανδρος ὁ Πριάμου κατέστη κριτής, καὶ διδούσης Ἥρας μὲν ἁπάσης αὐτῷ τῆς Ἀσίας
βασιλεύειν, Ἀθηνᾶς δὲ κρατεῖν ἐν τοῖς πολέμοις, (42) Ἀφροδίτης δὲ τὸν γάμον τὸν Ἑλένης,
τῶν μὲν σωμάτων οὐ δυνηθεὶς λαβεῖν διάγνωσιν ἀλλ' ἡττηθεὶς τῆς τῶν θεῶν ὄψεως, τῶν
δὲ δωρεῶν ἀναγκασθεὶς γενέσθαι κριτής, εἵλετο τὴν οἰκειότητα τὴν Ἑλένης ἀντὶ τῶν ἄλλων
ἁπάντων, οὐ πρὸς τὰς ἡδονὰς ἀποβλέψας, -- καίτοι καὶ τοῦτο τοῖς εὖ φρονοῦσι πολλῶν
αἱρετώτερόν ἐστιν, (43) ἀλλ' ὅμως οὐκ ἐπὶ τοῦθ' ὥρμησεν, ἀλλ' ἐπεθύμησε Διὸς γενέσθαι
κηδεστής, νομίζων πολὺ μείζω καὶ καλλίω ταύτην εἶναι τὴν τιμὴν ἢ τὴν τῆς Ἀσίας βασιλείαν,
καὶ μεγάλας μὲν ἀρχὰς καὶ δυναστείας καὶ φαύλοις ἀνθρώποις ποτὲ παραγίγνεσθαι,
τοιαύτης δὲ γυναικὸς οὐδένα τῶν ἐπιγιγνομένων ἀξιωθήσεσθαι, πρὸς δὲ τούτοις οὐδὲν ἂν
κτῆμα κάλλιον καταλιπεῖν τοῖς παισὶν ἢ παρασκευάσας αὐτοῖς ὅπως μὴ μόνον πρὸς
πατρὸς ἀλλὰ καὶ πρὸς μητρὸς ἀπὸ Διὸς ἔσονται γεγονότες. (44) Ἠπίστατο γὰρ τὰς μὲν
ἄλλας εὐτυχίας ταχέως μεταπιπτούσας, τὴν δ' εὐγένειαν ἀεὶ τοῖς αὐτοῖς παραμένουσαν,
ὥστε ταύτην μὲν τὴν αἵρεσιν ὑπὲρ ἅπαντος τοῦ γένους ἔσεσθαι, τὰς δ' ἑτέρας δωρεὰς
ὑπὲρ τοῦ χρόνου μόνον τοῦ καθ' αὑτόν.
(45) Τῶν μὲν οὖν εὖ φρονούντων οὐδεὶς ἂν τοῖς λογισμοῖς τούτοις ἐπιτιμήσειεν, τῶν δὲ
μηδὲν πρὸ τοῦ πράγματος ἐνθυμουμένων ἀλλὰ τὸ συμβαῖνον μόνον σκοπουμένων ἤδη
τινὲς ἐλοιδόρησαν αὐτόν· ὧν τὴν ἄνοιαν ἐξ ὧν ἐβλασφήμησαν περὶ ἐκείνου ῥᾴδιον ἅπασι
καταμαθεῖν. (46) Πῶς γὰρ οὐ καταγέλαστον πεπόνθασιν, εἰ τὴν αὑτῶν φύσιν ἱκανωτέραν
εἶναι νομίζουσι τῆς ὑπὸ τῶν θεῶν προκριθείσης; Οὐ γὰρ δή που περὶ ὧν εἰς τοσαύτην ἔριν
κατέστησαν τὸν τυχόντα διαγνῶναι κύριον ἐποίησαν, ἀλλὰ δῆλον ὅτι τοσαύτην ἔσχον
σπουδὴν ἐκλέξασθαι, κριτὴν τὸν βέλτιστον, ὅσηνπερ περὶ αὐτοῦ τοῦ πράγματος ἐπιμέλειαν
ἐποιήσαντο. (47) Χρὴ δὲ σκοπεῖν ὁποῖός τις ἦν καὶ δοκιμάζειν αὐτὸν οὐκ ἐκ τῆς ὀργῆς τῆς
τῶν ἀποτυχουσῶν, ἀλλ' ἐξ ὧν ἅπασαι βουλευσάμεναι προείλοντο τὴν ἐκείνου διάνοιαν.
Κακῶς μὲν γὰρ παθεῖν ὑπὸ τῶν κρειττόνων οὐδὲν κωλύει καὶ τοὺς μηδὲν ἐξημαρτηκότας·
τοιαύτης δὲ τιμῆς τυχεῖν ὥστε θνητὸν ὄντα θεῶν γενέσθαι κριτὴν, οὐχ οἷόν τε μὴ οὐ τὸν
πολὺ τῇ γνώμῃ διαφέροντα.
(48) Θαυμάζω δ' εἴ τις οἴεται κακῶς βεβουλεῦσθαι τὸν μετὰ ταύτης ζῆν ἑλόμενον, ἧς
ἕνεκα πολλοὶ τῶν ἡμιθέων ἀποθνῄσκειν ἠθέλησαν. Πῶς δ' οὐκ ἂν ἦν ἀνόητος, εἰ τοὺς
θεοὺς εἰδὼς περὶ κάλλους φιλονικοῦντας αὐτὸς κάλλους κατεφρόνησε, καὶ μὴ ταύτην
ἐνόμισε μεγίστην εἶναι τῶν δωρεῶν, περὶ ἧς κἀκείνας ἑώρα μάλιστα σπουδαζούσας;
(49) Τίς δ' ἂν τὸν γάμον τὸν Ἑλένης ὑπερεῖδεν, ἧς ἁρπασθείσης οἱ μὲν Ἕλληνες οὕτως
ἠγανάκτησαν ὥσπερ ὅλης τῆς Ἑλλάδος πεπορθημένης, οἱ δὲ βάρβαροι τοσοῦτον
ἐφρόνησαν, ὅσον περ ἂν εἰ πάντων ἡμῶν ἐκράτησαν. Δῆλον δ' ὡς ἑκάτεροι διετέθησαν·
πολλῶν γὰρ αὐτοῖς πρότερον ἐγκλημάτων γενομένων περὶ μὲν τῶν ἄλλων ἡσυχίαν ἦγον,
ὑπὲρ δὲ ταύτης τηλικοῦτον συνεστήσαντο πόλεμον οὐ μόνον τῷ μεγέθει τῆς ὀργῆς ἀλλὰ
καὶ τῷ μήκει τοῦ χρόνου καὶ τῷ πλήθει τῶν παρασκευῶν ὅσος οὐδεὶς πώποτε γέγονεν.
| [40] Celui qui devait s'unir à elle
n'était pas encore désigné, et les chances de la fortune étaient entières;
mais il était si évident qu'elle deviendrait une cause de guerre pour tous, qu'ils
se réunirent et s'engagèrent par des serments réciproques à secourir celui qui aurait été
jugé digne de la posséder, si un autre la lui enlevait; chacun croyait ainsi se préparer un
appui dans l'avenir, (41) et tous, à l'exception d'un seul, s'abusaient dans leur espérance, mais aucun ne se trompait dans la haute opinion qu'ils avaient tous conçue d'elle.
20. Une lutte pour la palme de la beauté s'étant élevée peu de temps après entre les
déesses, Alexandre, fils de Priam, fut choisi par elles pour juge. Junon lui promettait
l'empire de toute l'Asie; Minerve lui assurait la victoire sur ses ennemis; (42) Vénus lui
offrait la main d'Hélène. Il n'était pas en son pouvoir de se former un jugement sur les
charmes des trois déesses, mais, ébloui par l'éclat de leur beauté, il était contraint de
juger d'après la valeur des dons qui lui étaient offerts. Il choisit la possession d'Hélène
comme un bien supérieur à tous les autres avantages, et en cela il n'était pas entraîné
par l'attrait des voluptés, encore que des hommes sages les regardent comme
préférables à beaucoup d'autres biens ; (43) mais telle n'était pas sa pensée : il voulait
devenir le gendre de Jupiter, considérant cet honneur comme plus grand, plus éclatant,
que l'empire même de l'Asie. Il voyait de puissants royaumes, de glorieuses dynasties,
tomber entre les mains d'hommes méprisables, tandis que jamais un mortel, dans les
siècles à venir, ne pourrait être jugé digne de posséder une telle femme ; et de plus, il
comprenait qu'il ne pouvait préparer à ses enfants un plus bel héritage que l'honneur de
descendre de Jupiter par leur père et par leur mère. (44) Il savait que les autres faveurs
de la fortune passent bientôt dans des mains étrangères, mais qu'une noble origine est
un patrimoine éternel, et que la splendeur de son choix s'étendrait sur toute sa race,
tandis que l'effet des autres dons ne pourrait dépasser le terme de sa vie.
(45) 21. Aucun esprit sensé ne condamnerait de tels calculs, et c'est seulement parmi
les hommes qui, sans tenir compte des circonstances antérieures, ne voient que le fait
accompli, qu'il s'en est trouvé quelques-uns qui l'ont blâmé avec injure. Leur démence,
toutefois, est facile à reconnaître dans les reproches mêmes qu'ils lui adressent. (46)
Comment, en effet, le ridicule ne s'attacherait-il pas à des hommes qui croient que leur
intelligence surpasse celle qui a été honorée du choix des déesses ? N'est-il pas évident
que, dans une lutte si importante à leurs yeux, elles n'avaient pas remis le droit de
prononcer à un homme ordinaire, et qu'elles avaient apporté d'autant plus de soin à
désigner le meilleur juge, qu'elles attachaient plus de prix à l'objet d'une si ardente rivalité
? (47) Il faut donc voir ce qu'il était, et l'estimer, non d'après le ressentiment de celles qui
avaient succombé, mais d'après l'opinion qu'elles avaient conçue de lui, lorsque,
délibérant ensemble, elles s'étaient déterminées à se soumettre à son jugement. Rien
n'empêche d'être accablé par une puissance supérieure, alors même qu'on est innocent,
mais obtenir un tel degré d'honneur, et, mortel, devenir l'arbitre des déesses, ne pouvait
appartenir qu'à l'intelligence la plus élevée.
(48) 22. J'admire, au reste, que l'on puisse blâmer la résolution de celui qui a voulu
passer sa vie près d'une femme pour laquelle un grand nombre de demi-dieux ont voulu
mourir. N'eût-il pas été un insensé si, après avoir vu les déesses disputer avec tant
d'ardeur la palme de la beauté, il eût méprisé cette faveur du ciel, et s'il n'eut pas regardé
comme le bien le plus précieux un don auquel il voyait les déesses elles-mêmes attacher
un si grand prix ?
(49) 23. Qui aurait pu dédaigner la possession d'Hélène, puisque, après son
enlèvement, on voit les Grecs transportes de la même colère que si la Grèce entière eût
été ravagée, et les Barbares aussi fiers que s'ils nous eussent tous vaincus? Le sentiment
qui enflammait les deux partis est évident, car de nombreux sujets de plaintes s'étaient
élevés entre eux dans les temps antérieurs, et cependant ils étaient restés en paix : mais,
dès qu'il s'agit d'Hélène, ils se firent une guerre telle que jamais l'on n'en vit une
semblable, non seulement par la fureur qui animait les combattants, mais par la durée du
temps et par l'immensité des préparatifs.
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