[30] Καὶ τοιούτῳ μοι γεγενημένῳ τετόλμηκεν ἀμφισβητεῖν τῶν
χρημάτων ἡ μηδ᾽ ἐπισκέψασθαι πώποτ᾽ αὐτὸν ἀξιώσασα, τοσοῦτον μὲν
χρόνον ἀσθενήσαντα, πυνθανομένη δὲ καθ᾽ ἑκάστην τὴν ἡμέραν, ὡς
διέκειτο, ῥᾳδίας δ᾽ οὔσης αὐτῇ τῆς πορείας. Εἶτα νῦν αὐτὸν ἀδελφίζειν
ἐπιχειρήσουσιν, ὥσπερ οὐχ ὅσῳ περ ἂν οἰκειότερον προσείπωσι τὸν
τεθνεῶτα, τοσούτῳ δόξουσαν αὐτὴν μείζω καὶ δεινότερ᾽ ἐξαμαρτεῖν· <31>
ἥτις οὐδ᾽ ἐπειδὴ τελευτᾶν ἤμελλε τὸν βίον, ὁρῶσα τοὺς πολίτας τοὺς
ἡμετέρους, ὅσοι περ ἦσαν ἐν Τροιζῆνι, διαπλέοντας εἰς Αἴγιναν, ἵν᾽ αὐτὸν
συγκαταθάψειαν, οὐδ᾽ εἰς τοῦτον τὸν καιρὸν ἀπήντησεν, ἀλλ᾽ οὕτως ὠμῶς
καὶ σχετλίως εἶχεν, ὥστ᾽ ἐπὶ μὲν τὸ κῆδος οὐκ ἠξίωσεν ἀφικέσθαι, τῶν δὲ
καταλειφθέντων οὐδὲ δέχ᾽ ἡμέρας διαλιποῦς᾽ ἦλθεν ἀμφισβητοῦσα, ὥσπερ
τῶν χρημάτων ἀλλ᾽ οὐκ ἐκείνου συγγενὴς οὖσα. <32> Καὶ εἰ μὲν ὁμολογήσει
τοσαύτην ἔχθραν ὑπάρχειν αὑτῇ πρὸς ἐκεῖνον ὥστ᾽ εἰκότως ταῦτα ποιεῖν,
οὐκ ἂν κακῶς εἴη βεβουλευμένος, εἰ τοῖς φίλοις ἠβουλήθη μᾶλλον ἢ ταύτῃ
τὴν οὐσίαν καταλιπεῖν· εἰ δὲ μηδεμιᾶς διαφορᾶς οὔσης οὕτως ἀμελὴς καὶ
κακὴ περὶ αὐτὸν ἐγένετο, πολὺ ἂν δήπου δικαιότερον στερηθείη τῶν αὑτῆς
ἢ τῶν ἐκείνου κληρονόμος γίγνοιτο. <33> Ἐνθυμεῖσθε δ᾽ ὅτι τὸ μὲν ταύτης
μέρος οὔτ᾽ ἐν τῇ νόσῳ θεραπείας ἔτυχεν οὔτ᾽ ἀποθανὼν τῶν νομιζομένων
ἠξιώθη, δι᾽ ἐμὲ δ᾽ ἀμφότερα ταῦτ᾽ αὐτῷ γεγένηται. Καίτοι δίκαιόν ἐστιν
ὑμᾶς τὴν ψῆφον φέρειν, οὐκ εἴ τινες γένει μέν φασι προσήκειν, ἐν δὲ τοῖς
ἔργοις ὅμοιοι τοῖς ἐχθροῖς γεγόνασιν, ἀλλὰ πολὺ μᾶλλον ὅσοι μηδὲν ὄνομα
συγγενείας ἔχοντες οἰκειοτέρους σφᾶς αὐτοὺς ἐν ταῖς συμφοραῖς τῶν
ἀναγκαίων παρέσχον.
<34> Λέγουσι δ᾽ ὡς τὰς μὲν διαθήκας οὐκ ἀπιστοῦσι Θρασύλοχον
καταλιπεῖν, οὐ μέντοι καλῶς οὐδ᾽ ὀρθῶς φασὶν αὐτὰς ἔχειν. Καίτοι, ὦ
ἄνδρες Αἰγινῆται, πῶς ἄν τις ἄμεινον ἢ μᾶλλον συμφερόντως περὶ τῶν
αὑτοῦ πραγμάτων ἐβουλεύσατο; ὃς οὔτ᾽ ἔρημον τὸν οἶκον κατέλιπε τοῖς τε
φίλοις χάριν ἀπέδωκεν, ἔτι δὲ τὴν μητέρα καὶ τὴν ἀδελφὴν οὐ μόνον τῶν
αὑτοῦ κυρίας ἀλλὰ καὶ τῶν ἐμῶν κατέστησε, τὴν μὲν ἐμοὶ συνοικίσας, τῇ δ᾽
υἱόν μ᾽ εἰσποιήσας; <35> Ἆρ᾽ ἂν ἐκείνως ἄμεινον ἔπραξεν, εἰ μήτε τῆς
μητρὸς τὸν ἐπιμελησόμενον κατέστησε, μήτ᾽ ἐμοῦ μηδεμίαν μνείαν
ἐποιήσατο, τὴν δ᾽ ἀδελφὴν ἐπὶ τῇ τύχῃ κατέλιπε, καὶ τὸν οἶκον ἀνώνυμον
τὸν αὑτοῦ περιεῖδε γενόμενον;
<36> Ἀλλὰ γὰρ ἴσως ἀνάξιος ἦν υἱὸς εἰσποιηθῆναι Θρασυλόχῳ καὶ
λαβεῖν αὐτοῦ τὴν ἀδελφήν. Ἀλλὰ πάντες ἂν μαρτυρήσειαν Σίφνιοι τοὺς
προγόνους τοὺς ἐμοὺς καὶ γένει καὶ πλούτῳ καὶ δόξῃ καὶ τοῖς ἄλλοις ἅπασι
πρώτους εἶναι τῶν πολιτῶν. Τίνες γὰρ ἢ μειζόνων ἀρχῶν ἠξιώθησαν ἢ
πλείω χρήματ᾽ εἰσήνεγκαν ἢ κάλλιον ἐχορήγησαν ἢ μεγαλοπρεπέστερον
τὰς ἄλλας λῃτουργίας ἐλῃτούργησαν; Ἐκ ποίας δ᾽ οἰκίας τῶν ἐν Σίφνῳ
πλείους βασιλεῖς γεγόνασιν; <37> Ὥστε Θρασύλοχός τ᾽ εἰ καὶ μηδὲ πώποτ᾽
αὐτῷ διελέχθην, εἰκότως ἂν ἠβουλήθη μοι διὰ ταῦτα δοῦναι τὴν ἀδελφήν,
ἐγώ τ᾽ εἰ καὶ μηδέν μοι τούτων ὑπῆρχεν, ἀλλὰ φαυλότατος ἦν τῶν πολιτῶν,
δικαίως ἂν παρ᾽ αὐτοῦ διὰ τὰς εὐεργεσίας τὰς εἰς ἐκεῖνον τῶν μεγίστων
ἠξιώθην.
<38> Οἶμαι τοίνυν αὐτὸν καὶ Σωπόλιδι τἀδελφῷ μάλιστα κεχαρίσθαι
ταῦτα διαθέμενον. Καὶ γὰρ ἐκεῖνος ταύτην μὲν ἐμίσει καὶ κακόνουν τοῖς
αὑτοῦ πράγμασιν ἡγεῖτο, ἐμὲ δὲ περὶ πλείστου τῶν αὑτοῦ φίλων ἐποιεῖτο.
Ἐδήλωσε δ᾽ ἐν ἄλλοις τε πολλοῖς καὶ ὅτ᾽ ἔδοξε τοῖς συμφυγάσιν ἐπιχειρεῖν
τῇ πόλει μετὰ τῶν ἐπικούρων. Αἱρεθεὶς γὰρ ἄρχειν αὐτοκράτωρ ἐμὲ καὶ
γραμματέα προσείλετο καὶ τῶν χρημάτων ταμίαν ἁπάντων κατέστησε, καὶ
ὅτ᾽ ἠμέλλομεν κινδυνεύειν, αὐτὸς αὑτῷ με παρετάξατο. <39> Καὶ σκέψασθ᾽
ὡς σφόδρ᾽ αὐτῷ συνήνεγκεν· δυστυχησάντων γὰρ ἡμῶν ἐν τῇ προσβολῇ
τῇ πρὸς τὴν πόλιν καὶ τῆς ἀναχωρήσεως οὐχ οἵας ἠβουλόμεθα γενομένης,
τετρωμένον αὐτὸν καὶ βαδίζειν οὐ δυνάμενον ἀλλ᾽ ὀλιγοψυχοῦντα
ἀπεκόμις᾽ ἐπὶ τὸ πλοῖον μετὰ τοῦ θεράποντος τοὐμαυτοῦ, φέρων ἐπὶ τῶν
ὤμων, ὥστ᾽ ἐκεῖνον πολλάκις καὶ πρὸς πολλοὺς εἰπεῖν ὅτι μόνος
ἀνθρώπων αἴτιος εἴην αὑτῷ τῆς σωτηρίας.
| [30] 15. C'est donc lorsque j'ai été tel à l'égard de Thrasylochus, que
cette femme ose me disputer son héritage, elle qui n'a pas même daigné
le visiter une fois pendant le cours de ses longues souffrances, lorsque,
n'étant séparée de lui que par un intervalle facile à franchir, elle entendait
parler chaque jour de sa triste situation! Et voilà que maintenant elle
essaye avec ceux qui la soutiennent de lui donner le nom de frère,
comme si elle ne semblait pas l'injurier d'une manière plus coupable et
plus odieuse en raison de la douceur du titre qu'elle lui donne après sa
mort. <31> Enfin, lorsque Thrasylochus touchait à sa dernière heure,
qu'elle voyait tous nos concitoyens établis à Trézène faire voile vers Égine
pour assister à ses funérailles, même alors elle ne se présente pas ; elle
pousse la dureté et la barbarie jusqu'à ne pas daigner paraître à ses
obsèques ; et lorsque ensuite il s'agit de sa fortune, dix jours ne sont pas
écoulés qu'elle vient la réclamer, comme si elle eût été parente, non de sa
personne, mais de son argent ! <32> Si elle avoue qu'il existait entre elle et
lui une telle inimitié qu'elle a eu de justes motifs pour en agir ainsi, il n'a
pas suivi une résolution insensée en préférant laisser ses biens à ses
amis plutôt qu'à elle ; et s'il n'existait, au contraire, nul dissentiment entre
eux, quand elle a montré à son égard tant d'indifférence et de
méchanceté, il serait beaucoup plus juste de la priver de ses biens que de
la rendre héritière de ceux de Thrasylochus. <33> Considérez qu'il n'a
obtenu, de la part de cette femme, ni les soins auxquels il avait droit
pendant sa maladie, ni les honneurs qui lui étaient dus après sa mort,
tandis qu'il a reçu de moi les uns et les autres. Enfin il est juste de donner
vos suffrages, non pas en faveur de ceux qui prétendent avoir des droits
fondés sur la parenté, et que l'on voit, dans tous leurs actes, se comporter
en ennemis, mais bien plutôt en faveur de ceux qui, sans avoir le nom de
parents, se sont montrés plus dévoués dans le malheur que les parents
véritables.
16. <34> Mes adversaires déclarent ne pas révoquer en doute que ce
testament ait été laissé par Thrasylochus, mais ils ajoutent que ses
dispositions ne sont ni honorables ni justes ; et pourtant, citoyens d'Egine,
comment un homme aurait-il pu prendre un parti plus sage, plus conforme
à l'intérêt de ses affaires? Il a pourvu au maintien de sa famille; il s'est
montré reconnaissant envers ses amis ; il a établi sa mère et sa
sœur maîtresses, non seulement de sa fortune, mais de la mienne, en me
rendant l'époux de l'une et le fils de l'autre. <35> Aurait-il agi avec plus de
sagesse s'il n'eût chargé personne du soin de sa mère, s'il n'eût pas fait
mention de moi, s'il eût abandonné sa sœur aux caprices de la fortune, et
s'il eut vu avec indifférence s'éteindre le nom de sa famille ?
17. <36> Mais peut-être n'étais-je pas digne d'être adopté pour fils par
Thrasylochus et d'épouser sa sœur ? Tous les Siphniens pourraient
attester que nos ancêtres occupaient le premier rang dans Siphnos par
leur naissance, leurs richesses, leur considération, et par tous les autres
genres de supériorité. Quels sont ceux qui ont été honorés de plus hautes
magistratures, qui ont fourni des sommes plus considérables à l'Etat, qui
ont rempli avec plus de noblesse les fonctions de chorège et avec plus de
magnificence les autres charges publiques ? Quel est, enfin, dans
Siphnos, la famille d'où il est sorti plus de rois ? <37> De sorte que
Thrasylochus, quand bien même je ne lui eusse jamais parlé, aurait, par
ces motifs, sagement agi en me donnant sa sœur ; et, lors même que
j'eusse été privé de tous ces avantages, que j'eusse été le dernier des
citoyens, j'aurais pu obtenir de lui, avec justice, les plus grandes marques
de reconnaissance pour les bienfaits qu'il avait reçus de moi.
18. <38> Je crois aussi que Thrasylochus a fait, dans ce testament,
l'acte qui pouvait être le plus agréable à son frère Sopolis. Sopolis, en
effet, haïssait cette femme ; il la regardait comme animée à son égard de
sentiments ennemis, et j'étais, au contraire, parmi ses amis, celui qu'il
estimait le plus. Il l'a montré dans beaucoup d'occasions, mais
principalement à l'époque où les exilés essayèrent de rentrer dans leur
pays, en s'appuyant sur des troupes auxiliaires. Choisi alors pour général
avec un pouvoir absolu, il me prit auprès de lui en qualité de secrétaire,
me nomma trésorier général de l'armée, et, au moment du combat, il me
plaça à ses côtés. <39> Voyez à quel point ce choix fut utile pour lui. Nous
avions été malheureux dans l'assaut donné à la ville, et notre retraite avait
été loin de s'exécuter comme nous l'eussions voulu : Sopolis blessé était
dans l'impossibilité de marcher ; je le chargeai sur mes épaules, aidé de
mon esclave ; je le portai mourant jusqu'au vaisseau, et plusieurs fois il a
répété, devant un grand nombre de personnes, que seul, entre tous les
autres, j'avais été l'auteur de son salut.
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