[15,300] ὁρμαίνων ἤ κεν θάνατον φύγοι ἦ κεν ἁλώῃ.
τὼ δ᾽ αὖτ᾽ ἐν κλισίῃ Ὀδυσεὺς καὶ δῖος ὑφορβὸς
δορπείτην· παρὰ δέ σφιν ἐδόρπεον ἀνέρες ἄλλοι.
αὐτὰρ ἐπεὶ πόσιος καὶ ἐδητύος ἐξ ἔρον ἕντο,
τοῖς δ᾽ Ὀδυσεὺς μετέειπε, συβώτεω πειρητίζων,
305 ἤ μιν ἔτ᾽ ἐνδυκέως φιλέοι μεῖναί τε κελεύοι
αὐτοῦ ἐνὶ σταθμῷ, ἦ ὀτρύνειε πόλινδε·
"κέκλυθι νῦν, Εὔμαιε, καὶ ἄλλοι πάντες ἑταῖροι·
ἠῶθεν προτὶ ἄστυ λιλαίομαι ἀπονέεσθαι
πτωχεύσων, ἵνα μή σε κατατρύχω καὶ ἑταίρους.
310 ἀλλά μοι εὖ θ᾽ ὑπόθευ καὶ ἅμ᾽ ἡγεμόν᾽ ἐσθλὸν ὄπασσον
ὅς κέ με κεῖσ᾽ ἀγάγῃ· κατὰ δὲ πτόλιν αὐτὸς ἀνάγκῃ
πλάγξομαι, αἴ κέν τις κοτύλην καὶ πύρνον ὀρέξῃ.
καί κ᾽ ἐλθὼν πρὸς δώματ᾽ Ὀδυσσῆος θείοιο
ἀγγελίην εἴποιμι περίφρονι Πηνελοπείῃ,
315 καί κε μνηστήρεσσιν ὑπερφιάλοισι μιγείην,
εἴ μοι δεῖπνον δοῖεν ὀνείατα μυρί᾽ ἔχοντες.
αἶψά κεν εὖ δρώοιμι μετὰ σφίσιν ἅσσ᾽ ἐθέλοιεν.
ἐκ γάρ τοι ἐρέω, σὺ δὲ σύνθεο καί μευ ἄκουσον·
Ἑρμείαο ἕκητι διακτόρου, ὅς ῥά τε πάντων
320 ἀνθρώπων ἔργοισι χάριν καὶ κῦδος ὀπάζει,
δρηστοσύνῃ οὐκ ἄν μοι ἐρίσσειε βροτὸς ἄλλος,
πῦρ τ᾽ εὖ νηῆσαι διά τε ξύλα δανὰ κεάσσαι,
δαιτρεῦσαί τε καὶ ὀπτῆσαι καὶ οἰνοχοῆσαι,
οἷά τε τοῖς ἀγαθοῖσι παραδρώωσι χέρηες."
325 τὸν δὲ μέγ᾽ ὀχθήσας προσέφης, Εὔμαιε συβῶτα·
"ὤ μοι, ξεῖνε, τίη τοι ἐνὶ φρεσὶ τοῦτο νόημα
ἔπλετο; ἦ σύ γε πάγχυ λιλαίεαι αὐτόθ᾽ ὀλέσθαι.
εἰ δὴ μνηστήρων ἐθέλεις καταδῦναι ὅμιλον,
τῶν ὕβρις τε βίη τε σιδήρεον οὐρανὸν ἵκει.
330 οὔ τοι τοιοίδ᾽ εἰσὶν ὑποδρηστῆρες ἐκείνων,
ἀλλὰ νέοι, χλαίνας εὖ εἱμένοι ἠδὲ χιτῶνας,
αἰεὶ δὲ λιπαροὶ κεφαλὰς καὶ καλὰ πρόσωπα,
οἵ σφιν ὑποδρώωσιν· ἐΰξεστοι δὲ τράπεζαι
σίτου καὶ κρειῶν ἠδ᾽ οἴνου βεβρίθασιν.
335 ἀλλὰ μέν᾽· οὐ γάρ τίς τοι ἀνιᾶται παρεόντι,
οὔτ᾽ ἐγὼ οὔτε τις ἄλλος ἑταίρων, οἵ μοι ἔασιν.
αὐτὰρ ἐπὴν ἔλθῃσιν Ὀδυσσῆος φίλος υἱός,
κεῖνός σε χλαῖνάν τε χιτῶνά τε εἵματα ἕσσει,
πέμψει δ᾽ ὅππη σε κραδίη θυμός τε κελεύει."
340 τὸν δ᾽ ἠμείβετ᾽ ἔπειτα πολύτλας δῖος Ὀδυσσεύς·
"αἴθ᾽ οὕτως, Εὔμαιε, φίλος Διὶ πατρὶ γένοιο
ὡς ἐμοί, ὅττι μ᾽ ἔπαυσας ἄλης καὶ ὀϊζύος αἰνῆς.
πλαγκτοσύνης δ᾽ οὐκ ἔστι κακώτερον ἄλλο βροτοῖσιν·
ἀλλ᾽ ἕνεκ᾽ οὐλομένης γαστρὸς κακὰ κήδε᾽ ἔχουσιν
345 ἀνέρες, ὅν τιν᾽ ἵκηται ἄλη καὶ πῆμα καὶ ἄλγος.
νῦν δ᾽ ἐπεὶ ἰσχανάᾳς μεῖναι τέ με κεῖνον ἄνωγας,
εἴπ᾽ ἄγε μοι περὶ μητρὸς Ὀδυσσῆος θείοιο
πατρός θ᾽, ὃν κατέλειπεν ἰὼν ἐπὶ γήραος οὐδῷ,
ἤ που ἔτι ζώουσιν ὑπ᾽ αὐγὰς ἠελίοιο,
| [15,300] une idée occupait son esprit : pourrait-il
éviter la mort? Serait-il pris?
Cependant, en la cabane, Ulysse et l'excellent porcher
prenaient leur repas. Auprès d'eux mangeaient les autres.
Quand ils se furent rassasiés de boire et de manger,
Ulysse prit la parole : il voulait éprouver le porcher, voir
s'il aurait encore pour lui d'amicales prévenances et lui
demanderait de rester, là même, dans la ferme, ou s'il
l'enverrait à la ville. « Écoute-moi maintenant, Eumée;
écoutez-moi aussi, vous autres, ses compagnons. Dès
l'aurore, je désire m'en retourner à la ville, pour y mendier;
je ne veux pas vivre à tes dépens, Eumée, ni aux
dépens de tes compagnons. Aide-moi de tes conseils : procure-moi
aussi un bon guide, pour me conduire là-bas.
Ensuite, — il le faut bien, — j'irai à l'aventure par la
ville, en quête d'une tasse et d'une miche. Allant à la
maison du divin Ulysse, je pourrais donner des nouvelles
à la sage Pénélope, me mêler aux prétendants sans vergogne,
qui me feraient l'aumône d'un dîner : ils regorgent
de vivres ! Je saurais vite bien faire au milieu d'eux tout
ce qu'ils voudraient. Car je vais te dire; toi, écoute et
comprends-moi bien. Par une faveur du messager Hermès,
le dieu qui donne grâce et réputation aux travaux de
tous les hommes, aucun mortel ne pourrait pour le service
rivaliser avec moi : faire un bon tas de bois pour
le feu, le fendre de la hache, quand il est sec, découper,
rôtir, verser à boire, toutes besognes du service que les
vilains font pour les nobles gens. »
Bien à contre-coeur, tu lui dis, porcher Eumée : « Ah !
grands dieux, mon hôte, comment pareil projet a-t-il
pu te venir en l'esprit? Est-ce donc que tu désires beaucoup
trouver incontinent ta perte? Quoi tu veux te
joindre à la foule des prétendants, dont l'orgueil et la
violence montent jusqu'au ciel de fer? Leurs serviteurs
n'ont rien de ton extérieur; ils sont jeunes, bien vêtus de
manteaux et tuniques; ils ont toujours cheveux luisants
et belle figure, les gens à leur service; les tables bien
polies sont chargées de pain, de viandes et de vin. Reste
plutôt; nul n'est gêné par ta présence, ni moi, ni aucun
des compagnons que j'ai sous mes ordres. Quand sera
revenu l'aimable fils d'Ulysse, il te donnera manteau,
tunique, vêtements, et il te conduira où t'appelle le désir
de ton coeur. »
Alors, le noble Ulysse, modèle de patience, lui répondit :
« Puisses-tu, Eumée, devenir aussi cher à Zeus le père
que tu l'es à moi-même, pour avoir mis fin à cette vie
errante et à mes peines cruelles. Rien n'est pour les
mortels plus pénible que ce vagabondage. C'est leur
maudit ventre, qui cause de terribles ennuis aux hommes,
condamnés à une existence aventureuse, à ses souffrances,
à ses angoisses. Mais, puisque tu me retiens et me presses
d'attendre ton maître, parle-moi donc de la mère du
divin Ulysse et de son père, que lors de son départ il laissa
au terme de la vieillesse : vivent-ils encore sous les
rayons du soleil,
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