[15,150] στῆ δ᾽ ἵππων προπάροιθε, δεδισκόμενος δὲ προσηύδα·
"χαίρετον, ὦ κούρω, καὶ Νέστορι ποιμένι λαῶν
εἰπεῖν· ἦ γὰρ ἐμοί γε πατὴρ ὣς ἤπιος ἦεν,
ἧος ἐνὶ Τροίῃ πολεμίζομεν υἷες Ἀχαιῶν."
τὸν δ᾽ αὖ Τηλέμαχος πεπνυμένος ἀντίον ηὔδα·
155 "καὶ λίην κείνῳ γε, διοτρεφές, ὡς ἀγορεύεις,
πάντα τάδ᾽ ἐλθόντες καταλέξομεν· αἲ γὰρ ἐγὼν ὣς
νοστήσας Ἰθάκηνδε, κιχὼν Ὀδυσῆ᾽ ἐνὶ οἴκῳ,
εἴποιμ᾽ ὡς παρὰ σεῖο τυχὼν φιλότητος ἁπάσης
ἔρχομαι, αὐτὰρ ἄγω κειμήλια πολλὰ καὶ ἐσθλά."
160 ὣς ἄρα οἱ εἰπόντι ἐπέπτατο δεξιὸς ὄρνις,
αἰετὸς ἀργὴν χῆνα φέρων ὀνύχεσσι πέλωρον,
ἥμερον ἐξ αὐλῆς· οἱ δ᾽ ἰΰζοντες ἕποντο
ἀνέρες ἠδὲ γυναῖκες· ὁ δέ σφισιν ἐγγύθεν ἐλθὼν
δεξιὸς ἤϊξε πρόσθ᾽ ἵππων· οἱ δὲ ἰδόντες
165 γήθησαν, καὶ πᾶσιν ἐνὶ φρεσὶ θυμὸς ἰάνθη.
τοῖσι δὲ Νεστορίδης Πεισίστρατος ἤρχετο μύθων·
"φράζεο δή, Μενέλαε διοτρεφές, ὄρχαμε λαῶν,
ἢ νῶϊν τόδ᾽ ἔφηνε θεὸς τέρας ἦε σοὶ αὐτῷ."
ὣς φάτο, μερμήριξε δ᾽ ἀρηΐφιλος Μενέλαος,
170 ὅππως οἱ κατὰ μοῖραν ὑποκρίναιτο νοήσας.
τὸν δ᾽ Ἑλένη τανύπεπλος ὑποφθαμένη φάτο μῦθον·
"κλῦτέ μευ· αὐτὰρ ἐγὼ μαντεύσομαι, ὡς ἐνὶ θυμῷ
ἀθάνατοι βάλλουσι καὶ ὡς τελέεσθαι ὀΐω.
ὡς ὅδε χῆν᾽ ἥρπαξ᾽ ἀτιταλλομένην ἐνὶ οἴκῳ
175 ἐλθὼν ἐξ ὄρεος, ὅθι οἱ γενεή τε τόκος τε,
ὣς Ὀδυσεὺς κακὰ πολλὰ παθὼν καὶ πόλλ᾽ ἐπαληθεὶς
οἴκαδε νοστήσει καὶ τίσεται· ἠὲ καὶ ἤδη
οἴκοι, ἀτὰρ μνηστῆρσι κακὸν πάντεσσι φυτεύει."
τὴν δ᾽ αὖ Τηλέμαχος πεπνυμένος ἀντίον ηὔδα·
180 "οὕτω νῦν Ζεὺς θείη, ἐρίγδουπος πόσις Ἥρης·
τῷ κέν τοι καὶ κεῖθι θεῷ ὣς εὐχετοῴμην."
ἦ καὶ ἐφ᾽ ἵπποιϊν μάστιν βάλεν· οἱ δὲ μάλ᾽ ὦκα
ἤϊξαν πεδίονδε διὰ πτόλιος μεμαῶτες.
οἱ δὲ πανημέριοι σεῖον ζυγὸν ἀμφὶς ἔχοντες.
185 δύσετό τ᾽ ἠέλιος σκιόωντό τε πᾶσαι ἀγυιαί·
ἐς Φηρὰς δ᾽ ἵκοντο Διοκλῆος ποτὶ δῶμα,
υἱέος Ὀρτιλόχοιο, τὸν Ἀλφειὸς τέκε παῖδα.
ἔνθα δὲ νύκτ᾽ ἄεσαν ὁ δὲ τοῖς πὰρ ξείνια θῆκεν.
ἦμος δ᾽ ἠριγένεια φάνη ῥοδοδάκτυλος Ἠώς,
190 ἵππους τε ζεύγνυντ᾽ ἀνά θ᾽ ἅρματα ποικίλ᾽ ἔβαινον,
ἐκ δ᾽ ἔλασαν προθύροιο καὶ αἰθούσης ἐριδούπου·
μάστιξεν δ᾽ ἐλάαν, τὼ δ᾽ οὐκ ἄκοντε πετέσθην.
αἶψα δ᾽ ἔπειθ᾽ ἵκοντο Πύλου αἰπὺ πτολίεθρον·
καὶ τότε Τηλέμαχος προσεφώνεε Νέστορος υἱόν·
195 "Νεστορίδη, πῶς κέν μοι ὑποσχόμενος τελέσειας
μῦθον ἐμόν; ξεῖνοι δὲ διαμπερὲς εὐχόμεθ᾽ εἶναι
ἐκ πατέρων φιλότητος, ἀτὰρ καὶ ὁμήλικές εἰμεν·
ἥδε δ᾽ ὁδὸς καὶ μᾶλλον ὁμοφροσύνῃσιν ἐνήσει.
μή με παρὲξ ἄγε νῆα, διοτρεφές, ἀλλὰ λίπ᾽ αὐτοῦ,
| [15,150] Il s'arrêta devant les chevaux, et dit en portant
leur santé : « Bon voyage, jeunes gens; et salut à Nestor,
pasteur de peuples. En vérité, ce fut pour moi un tendre
père, tout le temps que nous, les fils des Achéens, nous
faisions la guerre en Troade. » Le sage Télémaque lui
répondit : « Oui, certes, dès notre arrivée, nourrisson de
Zeus, nous répéterons en détail toutes tes paroles à Nestor;
et puissé-je, moi-même, revenu à Ithaque et trouvant
Ulysse en mon logis, les lui répéter à lui-même; lui dire
quelles preuves d'amitié j'ai reçues de toi avant mon départ,
et combien de magnifiques cadeaux j'emporte de chez toi »
Tandis qu'il parlait ainsi, s'envola sur la droite un
oiseau, un aigle, qui, dans ses serres, enlevait de la cour
une énorme oie blanche, apprivoisée; on le poursuivit
en criant, hommes et femmes; l'aigle s'approcha d'eux,
puis s'élança par la droite, en avant des chevaux. A ce
spectacle, les assistants se réjouirent, et, dans toutes les
poitrines, les coeurs exultèrent. C'est le fils de Nestor,
Pisistrate, qui le premier prit la parole : « Dis un peu,
Ménélas, nourrisson de Zeus, chef de guerriers, est-ce
pour nous deux qu'un dieu a fait paraître ce prodige,
ou pour toi seul? »
Ainsi parla-t-il : le favori d'Arès, Ménélas, réfléchissait,
préoccupé de faire une sage réponse. Mais Hélène, au
voile traînant, le devança et lui dit : « Écoutez-moi; je vais
vous faire une prédiction, comme les immortels me la
mettent en l'esprit, et je suis convaincue qu'elle s'accomplira.
Cet oiseau a enlevé une oie, élevée dans la maison;
il était venu de la montagne, où il avait ses parents et
ses aiglons; ainsi Ulysse, après maintes traverses, après
tant de courses errantes, reviendra en sa maison et se
vengera. Peut-être est-il présentement au logis et porte-t-il
à tous les prétendants le coup qui les abat. » Le sage
Télémaque lui repartit : « Puisse maintenant en ordonner
ainsi l'époux d'Héré, Zeus au bruyant tonnerre; à toi,
comme à une déesse, iraient de là-bas mes prières. »
Il dit, et cingla du fouet les chevaux. Ceux-ci s'élancèrent
à toute vitesse, dans leur ardeur à gagner la plaine
à travers la ville. Tout le jour, ils secouèrent le joug
qu'ils portaient des deux côtés. Le soleil se coucha et
toutes les rues se couvraient d'ombre, quand ils parvinrent
à Phères, chez Dioclès, fils d'Ortiloque, qu'avait
engendré Alphée. Là, ils passèrent la nuit, et Dioclès
leur offrit des présents d'hospitalité.
Quand parut Aurore aux doigts de rose, qui naît de
grand matin, ils attelèrent les chevaux, montèrent sur le
char incrusté et firent franchir à l'attelage la cour et le
portique sonore. Un coup de fouet les enleva, et ils volèrent
avec ardeur. Bientôt ils arrivèrent à l'acropole escarpée
de Pylos. Alors Télémaque s'adressa au fils de Nestor :
« Fils de Nestor, veux-tu me promettre d'accomplir ce
que je vais te demander? Nous nous honorons d'être à
jamais des hôtes, par suite de l'amitié qui unit nos pères,
et, de plus, nous sommes du même âge. Ce voyage rendra
notre union encore plus étroite. Ne me conduis pas au
delà de mon vaisseau, nourrisson de Zeus, et laisse-moi là;
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