[14,250] δαίνυντ᾽· αὐτὰρ ἐγὼν ἱερήϊα πολλὰ παρεῖχον
θεοῖσίν τε ῥέζειν αὐτοῖσί τε δαῖτα πένεσθαι.
ἑβδομάτῃ δ᾽ ἀναβάντες ἀπὸ Κρήτης εὐρείης
ἐπλέομεν Βορέῃ ἀνέμῳ ἀκραέϊ καλῷ
ῥηϊδίως, ὡς εἴ τε κατὰ ῥόον· οὐδέ τις οὖν μοι
255 νηῶν πημάνθη, ἀλλ᾽ ἀσκηθέες καὶ ἄνουσοι
ἥμεθα, τὰς δ᾽ ἄνεμός τε κυβερνῆταί τ᾽ ἴθυνον.
"πεμπταῖοι δ᾽ Αἴγυπτον ἐϋρρείτην ἱκόμεσθα,
στῆσα δ᾽ ἐν Αἰγύπτῳ ποταμῷ νέας ἀμφιελίσσας.
ἔνθ᾽ ἦ τοι μὲν ἐγὼ κελόμην ἐρίηρας ἑταίρους
260 αὐτοῦ πὰρ νήεσσι μένειν καὶ νῆας ἔρυσθαι,
ὀπτῆρας δὲ κατὰ σκοπιὰς ὤτρυνα νέεσθαι·
οἱ δ᾽ ὕβρει εἴξαντες, ἐπισπόμενοι μένεϊ σφῷ,
αἶψα μάλ᾽ Αἰγυπτίων ἀνδρῶν περικαλλέας ἀγροὺς
πόρθεον, ἐκ δὲ γυναῖκας ἄγον καὶ νήπια τέκνα,
265 αὐτούς τ᾽ ἔκτεινον· τάχα δ᾽ ἐς πόλιν ἵκετ᾽ ἀϋτή.
οἱ δὲ βοῆς ἀΐοντες ἅμ᾽ ἠοῖ φαινομένηφιν
ἦλθον· πλῆτο δὲ πᾶν πεδίον πεζῶν τε καὶ ἵππων
χαλκοῦ τε στεροπῆς· ἐν δὲ Ζεὺς τερπικέραυνος
φύζαν ἐμοῖς ἑτάροισι κακὴν βάλεν, οὐδέ τις ἔτλη
270 μεῖναι ἐναντίβιον· περὶ γὰρ κακὰ πάντοθεν ἔστη.
ἔνθ᾽ ἡμέων πολλοὺς μὲν ἀπέκτανον ὀξέϊ χαλκῷ,
τοὺς δ᾽ ἄναγον ζωούς, σφίσιν ἐργάζεσθαι ἀνάγκῃ.
αὐτὰρ ἐμοὶ Ζεὺς αὐτὸς ἐνὶ φρεσὶν ὧδε νόημα
ποίησ᾽--ὡς ὄφελον θανέειν καὶ πότμον ἐπισπεῖν
275 αὐτοῦ ἐν Αἰγύπτῳ· ἔτι γάρ νύ με πῆμ᾽ ὑπέδεκτο --
αὐτίκ᾽ ἀπὸ κρατὸς κυνέην εὔτυκτον ἔθηκα
καὶ σάκος ὤμοιϊν, δόρυ δ᾽ ἔκβαλον ἔκτοσε χειρός·
αὐτὰρ ἐγὼ βασιλῆος ἐναντίον ἤλυθον ἵππων
καὶ κύσα γούναθ᾽ ἑλών· ὁδ᾽ ἐρύσατο καί μ᾽ ἐλέησεν,
280 ἐς δίφρον δέ μ᾽ ἕσας ἄγεν οἴκαδε δάκρυ χέοντα.
ἦ μέν μοι μάλα πολλοὶ ἐπήϊσσον μελίῃσιν,
ἱέμενοι κτεῖναι--δὴ γὰρ κεχολώατο λίην--
ἀλλ᾽ ἀπὸ κεῖνος ἔρυκε, Διὸς δ᾽ ὠπίζετο μῆνιν
ξεινίου, ὅς τε μάλιστα νεμεσσᾶται κακὰ ἔργα.
285 "ἔνθα μὲν ἑπτάετες μένον αὐτόθι, πολλὰ δ᾽ ἄγειρα
χρήματ᾽ ἀν᾽ Αἰγυπτίους ἄνδρας· δίδοσαν γὰρ ἅπαντες.
ἀλλ᾽ ὅτε δὴ ὄγδοόν μοι ἐπιπλόμενον ἔτος ἦλθεν,
δὴ τότε Φοῖνιξ ἦλθεν ἀνὴρ ἀπατήλια εἰδώς,
τρώκτης, ὃς δὴ πολλὰ κάκ᾽ ἀνθρώποισιν ἐώργει·
290 ὅς μ᾽ ἄγε παρπεπιθὼν ᾗσι φρεσίν, ὄφρ᾽ ἱκόμεσθα
Φοινίκην, ὅθι τοῦ γε δόμοι καὶ κτήματ᾽ ἔκειτο.
ἔνθα παρ᾽ αὐτῷ μεῖνα τελεσφόρον εἰς ἐνιαυτόν.
ἀλλ᾽ ὅτε δὴ μῆνές τε καὶ ἡμέραι ἐξετελεῦντο
ἄψ περιτελλομένου ἔτεος καὶ ἐπήλυθον ὧραι,
295 ἐς Λιβύην μ᾽ ἐπὶ νηὸς ἐέσσατο ποντοπόροιο
ψεύδεα βουλεύσας, ἵνα οἱ σὺν φόρτον ἄγοιμι,
κεῖθι δέ μ᾽ ὡς περάσειε καὶ ἄσπετον ὦνον ἕλοιτο.
τῷ ἑπόμην ἐπὶ νηός, ὀϊόμενός περ, ἀνάγκῃ.
ἡ δ᾽ ἔθεεν Βορέῃ ἀνέμῳ ἀκραέϊ καλῷ,
| [14,250] et je leur fournissais beaucoup de victimes pour sacrifier,
aux dieux et se préparer leur festin. Le septième, nous
nous embarquâmes et poussés par un beau vent de Borée,
qui soufflait fort, nous voguions au large de la vaste Crète,
facilement, comme au courant d'un fleuve. Aucun de mes
vaisseaux n'eut d'avarie; sans accident, sans maladie,
nous restions assis, et le vent, avec les pilotes, dirigeait
les nefs. Le cinquième jour nous atteignîmes l'Egyptos
au beau cours. Je mouillai dans ce fleuve mes vaisseaux
en forme de croissant. Alors, je ne manquai pas de recommander
à mes fidèles compagnons de rester là près des
vaisseaux et de les garder, et j'ordonnai aux vigies d'aller
sur les guettes. Mais eux, cédant à leur esprit de démesure
et suivant leur envie, de ravager aussitôt les si beaux
champs des Égyptiens, d'enlever femmes et enfants
dépourvus de raison, et de tuer les hommes. L'appel de
guerre parvint vite à la ville. Les habitants, entendant ce
cri, accoururent comme le jour paraissait. Toute la plaine
se remplit de fantassins et de cavaliers, ainsi que des
éclairs du bronze. Zeus, qui lance la foudre, jeta en mes
compagnons la funeste panique, et nul n'eut le courage de
rester et d'opposer la force. Le malheur les investissait
de toutes parts. Alors, ils tuèrent beaucoup des nôtres à
la pointe du bronze; ils emmenèrent les survivants afin de
les obliger à travailler pour eux, par contrainte. Mais,
pour moi, Zeus lui-même fit naître cette pensée en mon
esprit. -- Ah ! j'aurais bien dû mourir et accomplir ma
destinée là même, en Égypte. Que de malheurs, en effet,
m'attendaient encore ! -- Aussitôt, j'ôtai de ma tête mon
casque bien fait, et de mes épaules mon bouclier; je
rejetai ma javeline loin de ma main. J'allai droit aux
chevaux du roi, je me jetai à ses genoux et les embrassai.
Il me protégea et eut pitié de moi. Il me fit asseoir sur
son char et m'emmena tout en pleurs à son logis. Beaucoup
à la vérité, s'élançaient contre moi avec leurs lances
de frêne, n'ayant qu'un désir, me tuer. Leur ressentiment
était à son comble. Mais lui les écartait, il pensait à la
rancune de Zeus protecteur des hôtes, qui toujours garde
le ressentiment des mauvaises actions. Je restai là sept
ans; je rassemblai beaucoup d'argent parmi les hommes
d'Égypte; car tous me donnaient. Quand commença le
cours de la huitième année, alors vint un Phénicien,
savant en tromperies, un rapace qui avait déjà fait
bien du mal aux gens; il réussit à me duper par son astuce,
et m'emmena; nous devions aller en Phénicie, où il avait
sa maison et ses biens. Là, je demeurai chez lui le reste
de l'année. Mais, comme les mois et les jours étaient
achevés, l'année recommençant son cours, et le printemps
revenu, il m'embarqua sur son vaisseau vers la
haute mer, et en route pour la Libye ! Il avait ourdi des
mensonges; il voulait me faire emmener ma cargaison
avec lui, me vendre là-bas et tirer du tout un prix incalculable.
Je le suivis sur son vaisseau, nonobstant mes
soupçons, il le fallait bien ! La nef courait, poussée par
un bon vent de Borée, qui soufflait fort, au milieu de la mer,
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