[5,300] πρόσθε δέ οἱ δόρυ τ᾽ ἔσχε καὶ ἀσπίδα πάντοσ᾽ ἐΐσην,
τὸν κτάμεναι μεμαὼς ὅς τις τοῦ γ᾽ ἀντίος ἔλθοι
σμερδαλέα ἰάχων· ὃ δὲ χερμάδιον λάβε χειρὶ
Τυδεΐδης μέγα ἔργον ὃ οὐ δύο γ᾽ ἄνδρε φέροιεν,
οἷοι νῦν βροτοί εἰσ᾽· ὃ δέ μιν ῥέα πάλλε καὶ οἶος.
305 Τῷ βάλεν Αἰνείαο κατ᾽ ἰσχίον ἔνθά τε μηρὸς
ἰσχίῳ ἐνστρέφεται, κοτύλην δέ τέ μιν καλέουσι·
θλάσσε δέ οἱ κοτύλην, πρὸς δ᾽ ἄμφω ῥῆξε τένοντε·
ὦσε δ᾽ ἀπὸ ῥινὸν τρηχὺς λίθος· αὐτὰρ ὅ γ᾽ ἥρως
ἔστη γνὺξ ἐριπὼν καὶ ἐρείσατο χειρὶ παχείῃ
310 γαίης· ἀμφὶ δὲ ὄσσε κελαινὴ νὺξ ἐκάλυψε.
Καί νύ κεν ἔνθ᾽ ἀπόλοιτο ἄναξ ἀνδρῶν Αἰνείας,
εἰ μὴ ἄρ᾽ ὀξὺ νόησε Διὸς θυγάτηρ Ἀφροδίτη
μήτηρ, ἥ μιν ὑπ᾽ Ἀγχίσῃ τέκε βουκολέοντι·
ἀμφὶ δ᾽ ἑὸν φίλον υἱὸν ἐχεύατο πήχεε λευκώ,
315 πρόσθε δέ οἱ πέπλοιο φαεινοῦ πτύγμα κάλυψεν
ἕρκος ἔμεν βελέων, μή τις Δαναῶν ταχυπώλων
χαλκὸν ἐνὶ στήθεσσι βαλὼν ἐκ θυμὸν ἕλοιτο.
Ἣ μὲν ἑὸν φίλον υἱὸν ὑπεξέφερεν πολέμοιο·
οὐδ᾽ υἱὸς Καπανῆος ἐλήθετο συνθεσιάων
320 τάων ἃς ἐπέτελλε βοὴν ἀγαθὸς Διομήδης,
ἀλλ᾽ ὅ γε τοὺς μὲν ἑοὺς ἠρύκακε μώνυχας ἵππους
νόσφιν ἀπὸ φλοίσβου ἐξ ἄντυγος ἡνία τείνας,
Αἰνείαο δ᾽ ἐπαΐξας καλλίτριχας ἵππους
ἐξέλασε Τρώων μετ᾽ ἐϋκνήμιδας Ἀχαιούς.
325 Δῶκε δὲ Δηϊπύλῳ ἑτάρῳ φίλῳ, ὃν περὶ πάσης
τῖεν ὁμηλικίης ὅτι οἱ φρεσὶν ἄρτια ᾔδη,
νηυσὶν ἔπι γλαφυρῇσιν ἐλαυνέμεν· αὐτὰρ ὅ γ᾽ ἥρως
ὧν ἵππων ἐπιβὰς ἔλαβ᾽ ἡνία σιγαλόεντα,
αἶψα δὲ Τυδεΐδην μέθεπε κρατερώνυχας ἵππους
330 ἐμμεμαώς· ὃ δὲ Κύπριν ἐπῴχετο νηλέϊ χαλκῷ
γιγνώσκων ὅ τ᾽ ἄναλκις ἔην θεός, οὐδὲ θεάων
τάων αἵ τ᾽ ἀνδρῶν πόλεμον κάτα κοιρανέουσιν,
οὔτ᾽ ἄρ᾽ Ἀθηναίη οὔτε πτολίπορθος Ἐνυώ.
Ἀλλ᾽ ὅτε δή ῥ᾽ ἐκίχανε πολὺν καθ᾽ ὅμιλον ὀπάζων,
335 ἔνθ᾽ ἐπορεξάμενος μεγαθύμου Τυδέος υἱὸς
ἄκρην οὔτασε χεῖρα μετάλμενος ὀξέϊ δουρὶ
ἀβληχρήν· εἶθαρ δὲ δόρυ χροὸς ἀντετόρησεν
ἀμβροσίου διὰ πέπλου, ὅν οἱ Χάριτες κάμον αὐταί,
πρυμνὸν ὕπερ θέναρος· ῥέε δ᾽ ἄμβροτον αἷμα θεοῖο
340 ἰχώρ, οἷός πέρ τε ῥέει μακάρεσσι θεοῖσιν·
οὐ γὰρ σῖτον ἔδουσ᾽, οὐ πίνουσ᾽ αἴθοπα οἶνον,
τοὔνεκ᾽ ἀναίμονές εἰσι καὶ ἀθάνατοι καλέονται.
Ἣ δὲ μέγα ἰάχουσα ἀπὸ ἕο κάββαλεν υἱόν·
καὶ τὸν μὲν μετὰ χερσὶν ἐρύσατο Φοῖβος Ἀπόλλων
345 κυανέῃ νεφέλῃ, μή τις Δαναῶν ταχυπώλων
χαλκὸν ἐνὶ στήθεσσι βαλὼν ἐκ θυμὸν ἕλοιτο·
τῇ δ᾽ ἐπὶ μακρὸν ἄϋσε βοὴν ἀγαθὸς Διομήδης·
εἶκε Διὸς θύγατερ πολέμου καὶ δηϊοτῆτος·
ἦ οὐχ ἅλις ὅττι γυναῖκας ἀνάλκιδας ἠπεροπεύεις;
| [5,300] il le couvrait de sa lance et de son bouclier
bien équilibré, prêt à tuer quiconque l'affronterait, et
poussant des cris effroyables. Mais le fils de Tydée saisit
de sa main une pierre, lourde masse, que ne porteraient
pas deux hommes tels que les humains d'aujourd'hui ;
lui, il la brandissait aisément, et seul. Il en frappa Enée
à la hanche, à l'endroit où la cuisse tourne dans la hanche,
et qu'on appelle cotyle. Il froissa le cotyle, et, en outre,
rompit les deux tendons; et la peau fut emportée par la
pierre raboteuse. Le héros, tombé à genoux, se soutint
en appuyant sa main épaisse sur la terre; et sur ses yeux
une nuit sombre s'étendit.
Sans doute aurait péri là le chef de guerriers Énée, s'il
n'eût été vite aperçu par la fille de Zeus, Aphrodite, sa
mère (elle le conçut d'Anchise, un jour qu'il gardait ses
boeufs). Autour de son fils chéri elle coula ses bras blancs;
et devant lui, d'un pan de sa robe, elle fit un voile, un
rempart contre les traits, de peur qu'un Danaen aux
chevaux rapides, en frappant avec le bronze Enée à la
poitrine, ne lui enlevât la vie.
Elle emporta donc, furtivement, son fils chéri loin du
combat. Quant au fils de Capanée, il n'oublia pas les instructions
de Diomède bon pour le cri de guerre. Il arrêta
ses chevaux aux sabots massifs à l'écart du tumulte,
les rênes attachées au bouton, et, bondissant sur les chevaux
d'Énée, à la belle robe, les poussa loin des Troyens
vers les Achéens aux beaux jambarts. Il les donna à
Déipyle, son compagnon, — l'homme de son âge qu'il
estimait le plus, parce que ses pensées s'adaptaient
bien aux siennes — pour les pousser vers les vaisseaux
creux. Le héros, lui, remontant derrière ses chevaux, saisit
les rênes brillantes, et vite vers le fils de Tydée lança
ses chevaux aux sabots robustes, avec impatience.
Or, Diomède poursuivait Cypris avec le bronze impitoyable.
Il la savait déesse sans vaillance, et non de ces
déesses qui commandent aux hommes à la guerre, Athénè,
ou Enyo, destructrice de villes. Quand il l'eut rejointe
en la poursuivant dans l'épaisse mêlée, se fendant, le fils
du courageux Tydée blessa Cypris à l'extrémité de la
main, d'un bond, lance aiguë contre chair délicate. Aussitôt
la lance perça la peau, (à travers la robe divine que
les Charites avaient faite elles-mêmes) au poignet, au-dessus
de la paume. Alors coula le sang divin de la déesse,
l'ichor, tel qu'il coule du corps des dieux bienheureux;
car ils ne mangent pas de pain, ne boivent pas de vin
flamboyant : c'est pourquoi ils n'ont pas de sang, et sont
appelés immortels.
La déesse, poussant un grand cri, laissa retomber son
fils. Celui-ci, les mains de Phébus Apollon l'enlevèrent
dans un nuage sombre, de peur qu'un Danaen aux chevaux
rapides, le frappant avec le bronze à la poitrine, ne lui
enlevât la vie. Quant à Cypris, d'une voix forte, Diomède
bon pour le cri de guerre lui cria :
« Quitte, fille de Zeus, la guerre et le carnage. Ne suffit-il
pas que tu séduises des femmes sans vaillance?
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