[250] ἀθάνατοι φράζονται, ὅσοι σκολιῇσι δίκῃσιν
ἀλλήλους τρίϐουσι θεῶν ὄπιν οὐκ ἀλέγοντες.
τρὶς γὰρ μύριοί εἰσιν ἐπὶ χθονὶ πουλυϐοτείρῃ
ἀθάνατοι Ζηνὸς φύλακες θνητῶν ἀνθρώπων·
οἵ ῥα φυλάσσουσίν τε δίκας καὶ σχέτλια ἔργα
255 ἠέρα ἑσσάμενοι, πάντη φοιτῶντες ἐπ' αἶαν.
ἡ δέ τε παρθένος ἐστὶ Δίκη, Διὸς ἐκγεγαυῖα,
κυδρή τ' αἰδοίη τε θεῶν, οἳ Ὄλυμπον ἔχουσιν.
καί ῥ' ὁπότ' ἄν τίς μιν βλάπτῃ σκολιῶς ὀνοτάζων,
αὐτίκα πὰρ Διὶ πατρὶ καθεζομένη Κρονίωνι
260 γηρύετ' ἀνθρώπων ἄδικον νόον, ὄφρ' ἀποτίσῃ
δῆμος ἀτασθαλίας βασιλέων, οἳ λυγρὰ νοεῦντες
ἄλλῃ παρκλίνωσι δίκας σκολιῶς ἐνέποντες.
ταῦτα φυλασσόμενοι, βασιλῆς, ἰθύνετε δίκας
δωροφάγοι, σκολιέων δὲ δικέων ἐπὶ πάγχυ λάθεσθε.
265 οἷ γ' αὐτῷ κακὰ τεύχει ἀνὴρ ἄλλῳ κακὰ τεύχων,
ἡ δὲ κακὴ βουλὴ τῷ βουλεύσαντι κακίστη.
πάντα ἰδὼν Διὸς ὀφθαλμὸς καὶ πάντα νοήσας
καί νυ τάδ', αἴ κ' ἐθέλῃσ', ἐπιδέρκεται, οὐδέ ἑ λήθει,
οἵην δὴ καὶ τήνδε δίκην πόλις ἐντὸς ἐέργει.
270 νῦν δὴ ἐγὼ μήτ' αὐτὸς ἐν ἀνθρώποισι δίκαιος
εἴην μήτ' ἐμὸς υἱός· ἐπεὶ κακὸν ἄνδρα δίκαιον
ἔμμεναι, εἰ μείζω γε δίκην ἀδικώτερος ἕξει·
ἀλλὰ τά γ' οὔ πω ἔολπα τελεῖν Δία μητιόεντα.
Ὦ Πέρση, σὺ δὲ ταῦτα μετὰ φρεσὶ βάλλεο σῇσι,
275 καὶ νυ δίκης ἐπάκουε, βίης δ' ἐπιλήθεο πάμπαν.
τόνδε γὰρ ἀνθρώποισι νόμον διέταξε Κρονίων
ἰχθύσι μὲν καὶ θηρσὶ καὶ οἰωνοῖς πετεηνοῖς
ἐσθέμεν ἀλλήλους, ἐπεὶ οὐ δίκη ἐστὶ μετ' αὐτοῖς·
ἀνθρώποισι δ' ἔδωκε δίκην, ἣ πολλὸν ἀρίστη
280 γίγνεται· εἰ γάρ τίς κ' ἐθέλῃ τὰ δίκαι' ἀγορεῦσαι
γιγνώσκων, τῷ μέν τ' ὄλϐον διδοῖ εὐρύοπα Ζεύς·
ὃς δέ κε μαρτυρίῃσι ἑκὼν ἐπίορκον ὀμόσσας
ψεύσεται, ἐν δὲ δίκην βλάψας νήκεστον ἀασθῇ,
τοῦ δέ τ' ἀμαυροτέρη γενεὴ μετόπισθε λέλειπται·
285 ἀνδρὸς δ' εὐόρκου γενεὴ μετόπισθεν ἀμείνων.
Σοὶ δ' ἐγὼ ἐσθλὰ νοέων ἐρέω, μέγα νήπιε Πέρση.
τὴν μέν τοι κακότητα καὶ ἰλαδὸν ἔστιν ἑλέσθαι
ῥηιδίως· λείη μὲν ὁδός, μάλα δ' ἐγγύθι ναίει·
τῆς δ' ἀρετῆς ἱδρῶτα θεοὶ προπάροιθεν ἔθηκαν
290 ἀθάνατοι· μακρὸς δὲ καὶ ὄρθιος οἶμος ἐς αὐτὴν
καὶ τρηχὺς τὸ πρῶτον· ἐπὴν δ' εἰς ἄκρον ἵκηται,
ῥηιδίη δὴ ἔπειτα πέλει, χαλεπή περ ἐοῦσα.
Οὗτος μὲν πανάριστος, ὃς αὐτὸς πάντα νοήσῃ
{φρασσάμενος, τά κ' ἔπειτα καὶ ἐς τέλος ᾖσιν ἀμείνω}·
295 ἐσθλὸς δ' αὖ κἀκεῖνος, ὃς εὖ εἰπόντι πίθηται·
ὃς δέ κε μήτ' αὐτὸς νοέῃ μήτ' ἄλλου ἀκούων
ἐν θυμῷ βάλληται, ὃ δ' αὖτ' ἀχρήιος ἀνήρ.
ἀλλὰ σύ γ' ἡμετέρης μεμνημένος αἰὲν ἐφετμῆς
ἐργάζευ, Πέρση, δῖον γένος, ὄφρα σε λιμὸς
| [250] aperçoivent tous ceux
qui s'accablent mutuellement par des arrêts iniques sans
craindre la vengeance divine. Par l'ordre de Jupiter, sur la
terre fertile, trente mille génies, gardiens des mortels,
observent leurs jugements et leurs actions coupables, et,
revêtus d'un nuage, parcourent le monde entier. La Justice,
fille de Jupiter, est une vierge auguste et respectée des
dieux habitants de l'Olympe ; lorsqu'un insolent ose
l'outrager, soudain, assise auprès de Jupiter, puissant fils
de Saturne, elle se plaint de la méchanceté des hommes et
le conjure de faire retomber sur le peuple les fautes des
rois qui, dans leurs criminelles pensées, s'écartent du droit
chemin et prononcent d'injustes sentences. Pour éviter ces
malheurs, ô rois dévorateurs de présents ! Redressez vos
arrêts et oubliez entièrement le langage de l’iniquité.
265 L'homme qui fait du mal à autrui s’en fait aussi à lui-même ;
un mauvais jugement est toujours terrible pour le juge.
L'oeil de ce Jupiter, qui voit et découvre tout, contemple
notre procès si telle est sa volonté ; il n'ignore pas quel
débat s'agite dans l'enceinte de notre ville. Puissions-nous
maintenant, mon fils et moi, ne pas être justes aux yeux
des mortels, puisque la justice n'attire plus que des
malheurs, puisque l'homme le moins équitable obtient le
plus de droits ! Mais je ne pense pas que Jupiter, maître de
la foudre, tolère de semblables abus.
274 O Persès ! Grave bien mes conseils au fond de ton esprit.
Écoute la voix de la justice et renonce pour toujours à la
violence : telle est la loi que le fils de Saturne a
imposée aux mortels. Il a permis aux poissons, aux
animaux sauvages, aux oiseaux rapides de se dévorer les
uns les autres, parce qu'il n'existe point de justice parmi
eux ; mais il a donné aux hommes cette justice, le plus
précieux des biens. 280 Si dans la place publique, un juge veut
parler avec droiture et avec prudence, Jupiter à la large vue
lui accorde la richesse ; mais s'il se parjure volontairement,
s'il blesse l'équité par de faux témoignages, il subit des
maux sans remède ; la gloire de sa postérité s'obscurcit
d'âge en âge, tandis que d'âge en âge la postérité de
l'homme juste devient plus illustre. 286 Écoute mes utiles
conseils, imprudent Persès ! Rien n'est plus aisé que de se
précipiter dans le vice : le chemin en est court et nous
l'avons près de nous ; mais les dieux immortels ont baigné
de sueurs la route de la vertu : cette route est longue,
escarpée et d'abord hérissée d'obstacles ; mais quand on
touche à son sommet, elle devient facile, quoique toujours pénible.
293 Le plus sage est celui qui, jugeant tout par lui-même,
considère les actions qui seront les meilleures lorsqu'il les
aura terminées. L'homme docile aux bons conseils est
encore digne d'estime, mais celui qui ne sait pas s'éclairer
par sa propre sagesse et refuse d'écouter les avis des
autres est entièrement inutile sur la terre. Quant à toi,
Persès ! ô rejeton des dieux ! garde l'éternel souvenir
de mes avis :
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