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[6,80] ἐνθαῦτα δὴ ὁ Κλεομένης ἐκέλευε πάντα τινὰ τῶν εἱλωτέων περινέειν ὕλῃ τὸ
ἄλσος, τῶν δὲ πειθομένων ἐνέπρησε τὸ ἄλσος. καιομένου δὲ ἤδη ἐπείρετο τῶν τινα
αὐτομόλων τίνος εἴη θεῶν τὸ ἄλσος· ὁ δὲ ἔφη Ἄργου εἶναι. ὁ δὲ ὡς ἤκουσε,
ἀναστενάξας μέγα εἶπε “ὦ Ἄπολλον χρηστήριε, ἦ μεγάλως με ἠπάτηκας φάμενος
Ἄργος αἱρήσειν· συμβάλλομαι δ᾽ ἐξήκειν μοι τὸ χρηστήριον”.
| [6,80] Alors Cléomène ordonna à tous les Ilotes d'entasser des
matières combustibles autour du bois sacré ; et dès qu'ils eurent obéi,
il y fit mettre le feu. Tandis qu'il brûlait, il demanda à un transfuge à
quel dieu ce bois était consacré. Celui-ci lui répondit que c'était à
Argos. À ces mots, il s'écria, en poussant un grand soupir : « O
Apollon, vous m'avez bien trompé par votre réponse, en me disant que
je prendrais Argos ! Je conjecture que l'oracle est accompli. »
| [6,81] μετὰ δὲ ταῦτα ὁ Κλεομένης τὴν μὲν πλέω στρατιὴν ἀπῆκε ἀπιέναι ἐς Σπάρτην,
χιλίους δὲ αὐτὸς λαβὼν τοὺς ἀριστέας ἤιε ἐς τὸ Ἥραιον θύσων· βουλόμενον δὲ αὐτὸν
θύειν ἐπὶ τοῦ βωμοῦ ὁ ἱρεὺς ἀπηγόρευε, φὰς οὐκ ὅσιον εἶναι ξείνῳ αὐτόθι θύειν. ὁ δὲ
Κλεομένης τὸν ἱρέα ἐκέλευε τοὺς εἵλωτας ἀπὸ τοῦ βωμοῦ ἀπάγοντας μαστιγῶσαι, καὶ
αὐτὸς ἔθυσε· ποιήσας δὲ ταῦτα ἀπήιε ἐς τὴν Σπάρτην.
| [6,81] Cléomène permit ensuite à la plus grande partie de ses troupes
de retourner à Sparte, et, ne gardant avec lui que mille hommes des
plus braves, il alla à Héraeum pour y faire un sacrifice. Comme il
se disposait à l'offrir lui-même sur l'autel, le prêtre lui dit qu'il n'était
pas permis à un étranger de sacrifier en ce temple, et le lui défendit en
conséquence. Mais Cléomène ordonna aux Ilotes d'éloigner le prêtre de
l'autel, et de le battre de verges; après quoi il sacrifia lui-même, et, le
service fini, il s'en retourna à Sparte.
| [6,82] νοστήσαντα δέ μιν ὑπῆγον οἱ ἐχθροὶ ὑπὸ τοὺς ἐφόρους, φάμενοί μιν
δωροδοκήσαντα οὐκ ἑλεῖν τὸ Ἄργος, παρεὸν εὐπετέως μιν ἑλεῖν. ὁ δέ σφι ἔλεξε, οὔτε
εἰ ψευδόμενος οὔτε εἰ ἀληθέα λέγων, ἔχω σαφηνέως εἶπαι, ἔλεξε δ᾽ ὦν φάμενος,
ἐπείτε δὴ τὸ τοῦ Ἄργου ἱρὸν εἷλον, δοκέειν οἱ ἐξεληλυθέναι τὸν τοῦ θεοῦ χρησμόν·
πρὸς ὦν ταῦτα οὐ δικαιοῦν πειρᾶν τῆς πόλιος, πρίν γε δὴ ἱροῖσι χρήσηται καὶ μάθῃ
εἴτε οἱ ὁ θεὸς παραδιδοῖ εἴτε ἐμποδὼν ἕστηκε· (2) καλλιερευμένῳ δὲ ἐν τῷ Ἡραίῳ ἐκ
τοῦ ἀγάλματος τῶν στηθέων φλόγα πυρὸς ἐκλάμψαι, μαθεῖν δὲ αὐτὸς οὕτω τὴν
ἀτρεκείην, ὅτι οὐκ αἱρέει τὸ Ἄργος· εἰ μὲν γὰρ ἐκ τῆς κεφαλῆς τοῦ ἀγάλματος
ἐξέλαμψε, αἱρέειν ἂν κατ᾽ ἄκρης τὴν πόλιν, ἐκ τῶν στηθέων δὲ λάμψαντος πᾶν οἱ
πεποιῆσθαι ὅσον ὁ θεὸς ἐβούλετο γενέσθαι. ταῦτα λέγων πιστά τε καὶ οἰκότα ἐδόκεε
Σπαρτιήτῃσι λέγειν, καὶ διέφυγε πολλὸν τοὺς διώκοντας.
| [6,82] Il n'y fut pas plutôt arrivé, que ses ennemis lui intentèrent une
affaire devant les éphores, et l'accusèrent de ne s'être point emparé
d'Argos, dont la prise était facile, parce qu'il s'était laissé corrompre. Je
ne puis dire avec certitude si ce qu'il avança dans sa défense était vrai
ou faux. Quoi qu'il en soit, il répondit qu'il avait cru l'oracle accompli
par la prise du bois consacré à Argos, et qu'ainsi il ne devait rien tenter
contre la ville qu'il n'eût du moins appris par les sacrifices si le dieu la
lui livrerait, on s'il s'opposerait à son entreprise : que les sacrifices
dans l'Heraeum ayant été favorables, il était sorti une flamme de
la poitrine de la statue ; qu'il avait connu à ces marques certaines qu'il
ne prendrait point la ville d'Argos : car si cette flamme fût sortie de la
tête de la statue, il l'aurait prise d'assaut; au lieu qu'étant sortie de la
poitrine, il était clair qu'il avait fait tout ce que le dieu voulait qu'il fit.
Cette défense parut aux Spartiates si plausible et si vraisemblable,
qu'il fut absous à la très grande pluralité des voix.
| [6,83] Ἄργος δὲ ἀνδρῶν ἐχηρώθη οὕτω ὥστε οἱ δοῦλοι αὐτῶν ἔσχον πάντα τὰ
πρήγματα ἄρχοντές τε καὶ διέποντες, ἐς ὃ ἐπήβησαν οἱ τῶν ἀπολομένων παῖδες·
ἔπειτα σφέας οὗτοι ἀνακτώμενοι ὀπίσω ἐς ἑωυτοὺς τὸ Ἄργος ἐξέβαλον· ἐξωθεύμενοι
δὲ οἱ δοῦλοι μάχῃ ἔσχον Τίρυνθα. (2) τέως μὲν δή σφι ἦν ἄρθμια ἐς ἀλλήλους, ἔπειτα
δὲ ἐς τοὺς δούλους ἦλθε ἀνὴρ μάντις Κλέανδρος, γένος ἐὼν Φιγαλεὺς ἀπ᾽ Ἀρκαδίης·
οὗτος τοὺς δούλους ἀνέγνωσε ἐπιθέσθαι τοῖσι δεσπότῃσι. ἐκ τούτου δὴ πόλεμός σφι
ἦν ἐπὶ χρόνον συχνόν, ἐς ὃ δὴ μόγις οἱ Ἀργεῖοι ἐπεκράτησαν.
| [6,83] La ville d'Argos fut tellement dépeuplée par cette défaite, que
les esclaves prirent en main le timon de l'État, et remplirent les
différentes magistratures. Mais les enfants de ceux qui avaient perdu
la vie, étant parvenus à l'âge de puberté, remirent la ville en leur
puissance, et les chassèrent. Les esclaves, se voyant chassés,
s'emparèrent de Tiryns après une bataille. La concorde fut quelque
temps rétablie entre eux et leurs maîtres ; mais dans la suite un devin,
nommé Cléandre, de Phigalia en Arcadie, leur persuada d'attaquer
leurs maîtres : cela occasionna une guerre très longue, et qui ne fut
terminée que par les avantages que remportèrent enfin et avec
beaucoup de peine les Argiens.
| [6,84] Ἀργεῖοι μέν νυν διὰ ταῦτα Κλεομένεα φασὶ μανέντα ἀπολέσθαι κακῶς· αὐτοὶ δὲ
Σπαρτιῆται φασὶ ἐκ δαιμονίου μὲν οὐδενὸς μανῆναι Κλεομένεα, Σκύθῃσι δὲ
ὁμιλήσαντά μιν ἀκρητοπότην γενέσθαι καὶ ἐκ τούτου μανῆναι. (2) Σκύθας γὰρ τοὺς
νομάδας, ἐπείτε σφι Δαρεῖον ἐμβαλεῖν ἐς τὴν χώρην, μετὰ ταῦτα μεμονέναι μιν
τίσασθαι, πέμψαντας δὲ ἐς Σπάρτην συμμαχίην τε ποιέεσθαι καὶ συντίθεσθαι ὡς
χρεὸν εἴη αὐτοὺς μὲν τοὺς Σκύθας παρὰ Φᾶσιν ποταμὸν πειρᾶν ἐς τὴν Μηδικὴν
ἐσβάλλειν, σφέας δὲ τοὺς Σπαρτιήτας κελεύειν ἐξ Ἐφέσου ὁρμωμένους ἀναβαίνειν
καὶ ἔπειτα ἐς τὠυτὸ ἀπαντᾶν. (3) Κλεομένεα δὲ λέγουσι ἡκόντων τῶν Σκυθέων ἐπὶ
ταῦτα ὁμιλέειν σφι μεζόνως, ὁμιλέοντα δὲ μᾶλλον τοῦ ἱκνεομένου μαθεῖν τὴν
ἀκρητοποσίην παρ᾽ αὐτῶν· ἐκ τούτου δὲ μανῆναί μιν νομίζουσι Σπαρτιῆται. ἔκ τε
τόσου, ὡς αὐτοὶ λέγουσι, ἐπεὰν ζωρότερον βούλωνται πιεῖν, Ἐπισκύθισον λέγουσι.
οὕτω δὴ Σπαρτιῆται τὰ περὶ Κλεομένεα λέγουσι· ἐμοὶ δὲ δοκέει τίσιν ταύτην ὁ
Κλεομένης Δημαρήτῳ ἐκτῖσαι.
| [6,84] Les Argiens prétendent que ce fut pour cette cause que
Cléomène perdit la raison, et périt misérablement. Mais les Spartiates
assurent eux-mêmes que sa fureur ne vint pas des dieux, mais de
l'abus du vin, auquel il s'était accoutumé en fréquentant des Scythes.
Les Scythes nomades, persistant dans le dessein de se venger de
l'invasion de Darius, envoyèrent des ambassadeurs à Sparte pour
contracter alliance avec les Lacédémoniens. Il fut convenu entre eux
que les Scythes tâcheraient de pénétrer du côté du Phase dans la
Médie, et que les Spartiates partiraient d'Éphèse, se rendraient dans
l'Asie supérieure, et que les deux années se joindraient au même
endroit. Les Lacédémoniens disent que Cléomène eut avec les Scythes,
qui étaient venus à Sparte pour cette négociation, une très grande
liaison, et même plus intime qu'il ne convenait, et qu'il contracta avec
eux l'habitude de boire du vin pur. Telle fut, selon les Spartiates, la
cause qui le rendit furieux ; ils ajoutent que depuis ce temps, quand ils
veulent boire du vin pur, ils se disent l'un à l'autre : Imitons les
Scythes. C'est ainsi que les Spartiates parlent de la frénésie de
Cléomène ; mais je pense qu'elle fut un effet de la colère des dieux,
qui voulaient venger Démarate.
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