|
[6,75] μαθόντες δὲ Κλεομένεα Λακεδαιμόνιοι ταῦτα πρήσσοντα, κατῆγον αὐτὸν
δείσαντες ἐπὶ τοῖσι αὐτοῖσι ἐς Σπάρτην τοῖσι καὶ πρότερον ἦρχε. κατελθόντα δὲ αὐτὸν
αὐτίκα ὑπέλαβε μανίη νοῦσος, ἐόντα καὶ πρότερον ὑπομαργότερον· ὅκως γὰρ τεῷ
ἐντύχοι Σπαρτιητέων, ἐνέχραυε ἐς τὸ πρόσωπον τὸ σκῆπτρον. (2) ποιέοντα δὲ αὐτὸν
ταῦτα καὶ παραφρονήσαντα ἔδησαν οἱ προσήκοντες ἐν ξύλω· ὁ δὲ δεθεὶς τὸν φύλακον
μουνωθέντα ἰδὼν τῶν ἄλλων αἰτέει μάχαιραν· οὐ βουλομένου δὲ τὰ πρῶτα τοῦ
φυλάκου διδόναι ἀπείλεε τά μιν αὖτις ποιήσει, ἐς ὁ δείσας τὰς ἀπειλὰς ὁ φύλακος (ἦν
γὰρ τῶν τις εἱλωτέων) διδοῖ οἱ μάχαιραν. (3) Κλεομένης δὲ παραλαβὼν τὸν σίδηρον
ἄρχετο ἐκ τῶν κνημέων ἑωυτὸν λωβώμενος· ἐπιτάμνων γὰρ κατὰ μῆκος τὰς σάρκας
προέβαινε ἐκ τῶν κνημέων ἐς τοὺς μηρούς, ἐκ δὲ τῶν μηρῶν ἔς τε τὰ ἰσχία καὶ τὰς
λαπάρας, ἐς ὃ ἐς τὴν γαστέρα ἀπίκετο, καὶ ταύτην καταχορδεύων ἀπέθανε τρόπῳ
τοιούτῳ, ὡς μὲν οἱ πολλοὶ λέγουσι Ἐλλήνων, ὅτι τὴν Πυθίην ἀνέγνωσε τὰ περὶ
Δημαρήτου λέγειν γενόμενα, ὡς δὲ Ἀθηναῖοι μοῦνοι λέγουσι, διότι ἐς Ἐλευσῖνα
ἐσβαλὼν ἔκειρε τὸ τέμενος τῶν θεῶν, ὡς δὲ Ἀργεῖοι, ὅτι ἐξ ἱροῦ αὐτῶν τοῦ Ἄργου
Ἀργείων τοὺς καταφυγόντας ἐκ τῆς μάχης καταγινέων κατέκοπτε καὶ αὐτὸ τὸ ἄλσος
ἐν ἀλογίῃ ἔχων ἐνέπρησε.
| [6,75] Les intrigues de Cléomène étant venues à la connaissance des
Lacédémoniens, la crainte le leur fit rappeler à Sparte aux mêmes
conditions qu'il était monté sur le trône auparavant. Mais à peine y fut-
il arrivé, qu'il tomba dans une frénésie, mal dont il avait déjà eu
précédemment quelques légères attaques. En effet, s'il rencontrait un
Spartiate en son chemin, il le frappait au visage de son sceptre. Ses
parents, témoins de ses extravagances, l'avaient fait lier dans des
entraves de bois. Mais un jour, se voyant seul avec un garde, il lui
demanda un couteau : celui-ci le lui refusa d'abord; mais, d'autant plus
intimidé par ses menaces que c'était un Ilote, il lui en donna un.
Cléomène ne l'eut pas plutôt reçu, qu'il commença à se déchirer les
jambes dans toute leur longueur, et à en couper les chairs. Des jambes
il passa aux cuisses, des cuisses aux hanches, aux côtés ; enfin, étant
parvenu au ventre, il se le découpa, et mourut de la sorte. La plupart
des Grecs prétendent que ce fut un châtiment de ce qu'il avait engagé
la Pythie à prononcer contre Démarate. Les Athéniens assurent, au
contraire, que ce fut en punition de ce qu'étant entré sur le territoire
d'Éleusis, il avait coupé le bois consacré aux déesses ; mais ils sont les
seuls de ce sentiment. Les Argiens disent, de leur côté, que ce fut
parce qu'après avoir fait arracher du bois consacré à Argos les Argiens
qui s'y étaient réfugiés après la bataille, il les avait fait passer au fil de
l'épée, et parce que, sans aucun égard pour les choses saintes, il y
avait fait mettre le feu.
| [6,76] Κλεομένεϊ γὰρ μαντευομένῳ ἐν Δελφοῖσι ἐχρήσθη Ἄργος αἱρήσειν· ἐπείτε δὲ
Σπαρτιήτας ἄγων ἀπίκετο ἐπὶ ποταμὸν Ἐρασῖνον, ὃς λέγεται ῥέειν ἐκ τῆς
Στυμφαλίδος λίμνης· τὴν γὰρ δὴ λίμνην ταύτην ἐς χάσμα ἀφανὲς ἐκδιδοῦσαν
ἀναφαίνεσθαι ἐν Ἄργεϊ, τὸ ἐνθεῦτεν δὲ τὸ ὕδωρ ἤδη τοῦτο ὑπ᾽ Ἀργείων Ἐρασῖνον
καλέεσθαι· ἀπικόμενος δ᾽ ὦν ὁ Κλεομένης ἐπὶ τὸν ποταμὸν τοῦτον ἐσφαγιάζετο αὐτῷ·
(2) καὶ οὐ γὰρ ἐκαλλιέρεε οὐδαμῶς διαβαίνειν μιν, ἄγασθαι μὲν ἔφη τοῦ Ἐρασίνου οὐ
προδιδόντος τοὺς πολιήτας, Ἀργείους μέντοι οὐδ᾽ ὣς χαιρήσειν. μετὰ δὲ ταῦτα
ἐξαναχωρήσας τὴν στρατιὴν κατήγαγε ἐς Θυρέην, σφαγιασάμενος δὲ τῇ θαλάσσῃ
ταῦρον πλοίοισι σφέας ἤγαγε ἔς τε τὴν Τιρυνθίην χώρην καὶ Ναυπλίην.
| [6,76] Cléomène étant un jour allé consulter l'oracle de Delphes, la
Pythie lui avait répondu qu'il prendrait Argos. Il se mit à la tête des
Spartiates, et les mena sur les bords du fleuve Érasinus, qui coule, à
ce qu'on prétend, du lac Stympliale; car on assure que ce lac, après
avoir disparu dans un gouffre où il s'est précipité, reparaît dans le
territoire d'Argos; et depuis cet endroit les Argiens l'appellent Érasinus.
Lorsque Cléomène fut arrivé sur les bords de ce fleuve, il lui fit des
sacrifices : mais comme les entrailles des victimes ne lui annonçaient
rien de favorable en cas qu'il le traversât, il dit qu'il savait gré à
Érasinus de ne pas trahir ses concitoyens; mais que les Argiens
n'auraient pas pour cela sujet de se réjouir. Aussitôt il fit rebrousser
chemin à son armée, et la mena à Thyrée, où il immola un taureau à la
mer; après quoi il la fit embarquer et la conduisit dans la Tirynthie, et
de là à Nauplie.
| [6,77] Ἀργεῖοι δὲ ἐβοήθεον πυνθανόμενοι ταῦτα ἐπὶ θάλασσαν· ὡς δὲ ἀγχοῦ μὲν
ἐγίνοντο τῆς Τίρυνθος, χώρῳ δὲ ἐν τούτῳ τῷ κεῖται Ἡσίπεια οὔνομα, μεταίχμιον οὐ
μέγα ἀπολιπόντες ἵζοντο ἀντίοι τοῖσι Λακεδαιμονίοισι. ἐνθαῦτα δὴ οἱ Ἀργεῖοι τὴν μὲν
ἐκ τοῦ φανεροῦ μάχην οὐκ ἐφοβέοντο, ἀλλὰ μὴ δόλῳ αἱρεθέωσι· (2) καὶ γὰρ δή σφι ἐς
τοῦτο τὸ πρῆγμα εἶχε τὸ χρηστήριον τὸ ἐπίκοινα ἔχρησε ἡ Πυθίη τούτοισί τε καὶ
Μιλησίοισι, λέγον ὧδε.
Ἀλλ᾽ ὅταν ἡ θήλεια τὸν ἄρσενα νικήσασα
ἐξελάσῃ καὶ κῦδος ἐν Ἀργείοισιν ἄρηται,
πολλὰς Ἀργείων ἀμφιδρυφέας τότε θήσει.
ὧς ποτέ τις ἐρέει καὶ ἐπεσσομένων ἀνθρώπων
“δεινὸς ὄφις τριέλικτος ἀπώλετο δουρὶ δαμασθείς”.
(3) ταῦτα δὴ πάντα συνελθόντα τοῖσι Ἀργείοισι φόβον παρεῖχε. καὶ δή σφι πρὸς
ταῦτα ἔδοξε τῷ κήρυκι τῶν πολεμίων χρᾶσθαι, δόξαν δέ σφι ἐποίεον τοιόνδε· ὅκως ὁ
Σπαρτιήτης κῆρυξ προσημαίνοι τι Λακεδαιμονίοισι, ἐποίευν καὶ οἱ Ἀργεῖοι τὠυτὸ
τοῦτο.
| [6,77] Aussitôt que les Argiens en eurent connaissance, ils se
portèrent en forces sur le bord de la mer. Lorsqu'ils furent près de
Tiryns, et dans la partie de son territoire où est Sépia, ils assirent leur
camp vis-à-vis des Lacédémoniens, et à une très petite distance de
leur armée. Ils ne craignaient pas une bataille dans un lieu découvert,
mais la surprise et les embûches; et c'était le sens de la réponse que la
Pythie leur avait rendue en à eux et aux Milésiens. Elle était
conçue en ces termes : « Lorsque la femelle victorieuse aura repoussé
le mâle, et qu'elle se sera acquis de la gloire parmi les Argiens, alors
grand nombre d'Argiennes se déchireront le visage; de sorte qu'un jour
les races futures diront : Un serpent effroyable, dont le corps faisait
trois replis, a été tué à coups de pique. » Le concours de toutes
ces circonstances inspirait de la frayeur aux Argiens. Ils résolurent par
cette raison de régler leurs mouvements sur le héraut des ennemis.
Cette résolution prise, toutes les fois que le héraut de Sparte signifiait
un ordre aux Lacédémoniens, ils exécutaient de leur côté la même chose.
| [6,78] μαθὼν δὲ ὁ Κλεομένης ποιεῦντας τοὺς Ἀργείους ὁκοῖόν τι ὁ σφέτερος κῆρυξ
σημήνειε, παραγγέλλει σφι, ὅταν σημήνῃ ὁ κῆρυξ ποιέεσθαι ἄριστον, τότε
ἀναλαβόντας τὰ ὅπλα χωρέειν ἐς τοὺς Ἀργείους. (2) ταῦτα καὶ ἐγένετο ἐπιτελέα ἐκ
τῶν Λακεδαιμονίων· ἄριστον γὰρ ποιευμένοισι τοῖσι Ἀργείοισι ἐκ τοῦ κηρύγματος
ἐπεκέατο, καὶ πολλοὺς μὲν ἐφόνευσαν αὐτῶν, πολλῷ δέ τι πλεῦνας ἐς τὸ ἄλσος τοῦ
Ἄργου καταφυγόντας περιιζόμενοι ἐφύλασσον.
| [6,78] Cléomène, ayant remarqué que les Argiens se réglaient sur le
héraut de Sparte, ordonna à ses troupes de prendre les armes quand
le héraut leur donnerait le signal du repos, et d'aller droit à eux. Les
Lacédémoniens exécutèrent cet ordre, et fondirent sur les Argiens
tandis qu'ils se reposaient, suivant le signal du héraut. Il y en eut
beaucoup de tués; mais ils se réfugièrent en beaucoup pins grand
nombre dans le bois consacré à Argos, où ils furent aussitôt investis.
| [6,79] ἐνθεῦτεν δὲ ὁ Κλεομένης ἐποίεε τοιόνδε. ἔχων αὐτομόλους ἄνδρας καὶ
πυνθανόμενος τούτων, ἐξεκάλεε πέμπων κήρυκα ὀνομαστὶ λέγων τῶν Ἀργείων τοὺς
ἐν τῷ ἱρῷ ἀπεργμένους, ἐξεκάλεε δὲ φὰς αὐτῶν ἔχειν τὰ ἄποινα. ἄποινα δὲ ἐστὶ
Πελοποννησίοισι δύο μνέαι τεταγμέναι κατ᾽ ἄνδρα αἰχμάλωτον ἐκτίνειν. κατὰ
πεντήκοντα δὴ ὦν τῶν Ἀργείων ὡς ἑκάστους ἐκκαλεύμενος ὁ Κλεομένης ἔκτεινε. (2)
ταῦτα δέ κως γινόμενα ἐλελήθεε τοὺς λοιποὺς τοὺς ἐν τῷ τεμένεϊ· ἅτε γὰρ πυκνοῦ
ἐόντος τοῦ ἄλσεος, οὐκ ὥρων οἱ ἐντὸς τοὺς ἐκτὸς ὅ τι ἔπρησσον, πρίν γε δὴ αὐτῶν τις
ἀναβὰς ἐπὶ δένδρον κατεῖδε τὸ ποιεύμενον. οὔκων δὴ ἔτι καλεόμενοι ἐξήισαν.
| [6,79] Voici de quelle manière Cléomène se conduisit après cela.
Ayant appris, par des transfuges qu'il avait dans son camp, les noms
de ceux qui étaient renfermés dans le lieu sacré, il envoya un héraut
qui les appela chacun par son nom, et leur dit qu'il avait leur rançon.
Or la rançon est fixée par les Péloponnésiens à dix mines par
prisonnier. Environ cinquante Argiens sortirent à la voix du héraut, et
Cléomène les fit massacrer. L'épaisseur du bois ne permettant pas
de voir ce qui se passait au dehors, ces meurtres échappèrent à la
connaissance de ceux qui s'y étaient retirés; mais l'un d'entre eux,
étant monté sur un arbre, s'aperçut de la manière dont on les avait
traités. Depuis ce moment on eut beau les appeler, ils ne voulurent
plus sortir.
| | |