[8,3] τὰ μὲν οὖν ἐν τῇ πόλει οὕτω παρεσκεύαστο·
τῷ δὲ Μαξιμίνῳ ἐπειδὴ ἀπηγγέλη φρουρουμένη καὶ κεκλεισμένη
γενναίως ἡ πόλις, ἔδοξε πέμψαι ἐν σχήματι πρεσβείας
τοὺς κάτωθεν διαλεξομένους, εἰ ἄρα πείσαιεν αὐτοὺς
ἀνοῖξαι τὰς πύλας. ἦν δὲ ἐν τῷ στρατῷ χιλίαρχος ᾧ
πατρὶς μὲν ἡ Ἀκυληία ἦν, τέκνα τε καὶ γυνὴ οἰκεῖοί τε
πάντες ἔνδον ἀποκέκλειντο. τοῦτον οὖν ἔπεμψε σὺν
ἑτέροις ἑκατοντάρχαις, ἐλπίσας ῥᾷστα πείσειν ὡς πολίτην. ἀφικόμενοι
δὲ οἱ πρέσβεις ἔλεγον ὅτι ἄρα κελεύει
Μαξιμῖνος ὁ κοινὸς βασιλεὺς ὅπλα μὲν αὐτοὺς καταθέσθαι ἐν εἰρήνῃ,
φίλον δὲ ἀντὶ πολεμίου δέχεσθαι,
σπονδαῖς δὲ μᾶλλον καὶ θυσίαις σχολάζειν ἢ φόνοις,
μηδὲ περιορᾶν πατρίδα μέλλουσαν ἄρδην καὶ ἐκ θεμελίων
ἀπόλλυσθαι, ἐνὸν αὐτοῖς τε σώζεσθαι καὶ τὴν
πατρίδα σώζειν, διδόντος αὐτοῖς χρηστοῦ βασιλέως
ἀμνηστίαν συγγνώμην τε τῶν ἁμαρτηθέντων· οὐ γὰρ
αὐτοὺς αἰτίους γεγενῆσθαι ἀλλ´ ἄλλους. οἱ μὲν οὖν
πρέσβεις τοιαῦτά τινα κάτω παρεστῶτες ἐβόων, ὡς ἐξάκουστα εἴη· ὁ δὲ
πλεῖστος δῆμος τῷ τείχει καὶ τοῖς
πύργοις ἐφεστώς, πλὴν τῶν τὰ λοιπὰ μέρη φρουρούντων, ἐπήκουεν
ἡσυχάζων τῶν λεγομένων. ὁ δὲ Κρισπῖνος φοβηθεὶς μή πως ἅτε ὄχλος
ταῖς ὑπνοσχέσεσιν ἀναπεισθείς, εἰρήνην τε ἀντὶ πολέμου ἑλόμενος,
ἀνοίξῃ τὰς πύλας, περιθέων τὸ τεῖχος ἐδεῖτο καὶ ἐλιπάρει μένειν
τε θαρραλέως καὶ ἀντέχειν γενναίως, μηδὲ προδιδόναι
τὴν πρὸς τὴν σύγκλητον καὶ Ῥωμαίων δῆμον πίστιν,
σωτῆρας δὲ καὶ προμάχους Ἰταλίας πάσης ἀναγραφῆναι,
μὴ πιστεύειν δὲ ὑποσχέσεσι τυράννου ἐπιόρκου τε καὶ
ἀπατεῶνος, μηδὲ χρηστοῖς λόγοις δελεασθέντας ὀλέθρῳ
προύπτῳ παραδοθῆναι, ἐνὸν πιστεῦσαι πολέμου ἀμφιβόλῳ
τύχῃ· πολλάκις γὰρ καὶ ὀλίγοι πλειόνων περιεγένοντο, καὶ
δοκοῦντες ἀσθενέστεροι καθεῖλον τοὺς ἐν
ὑπολήψει ἀνδρείας μείζονος· μηδ´ ἐκπλήττεσθαι τῷ
πλήθει τοῦ στρατοῦ. „οἱ μὲν γὰρ ὑπὲρ ἄλλου μαχόμενοι καὶ τῆς παρ´
ἑτέρῳ ἐσομένης εὐδαιμονίας, εἴπερ
γένοιτο, μετριάζουσιν ἐν τῷ προθύμῳ τῆς μάχης, εἰδότες ὡς τῶν μὲν
κινδύνων αὐτοὶ μεθέξουσι, τὰ δὲ μέγιστα καὶ κορυφαῖα τῆς νίκης ἄλλος
καρπώσεται· τοῖς
δὲ ὑπὲρ τῆς πατρίδος μαχομένοις καὶ παρὰ τῶν θεῶν
ἐλπίδες κρείττους, ἐπειδὴ οὐ τὰ ἄλλων λαβεῖν ἀλλὰ τὰ
αὑτῶν σώζειν εὔχονται. τό τε ἐς τὰς μάχας πρόθυμον
οὐκ ἐξ ἄλλου κελεύσεως ἀλλ´ ἐξ οἰκείας ἀνάγκης ἔχουσιν, ἐπεὶ καὶ τῆς
νίκης πᾶς ὁ καρπὸς αὐτοῖς περιγίνεται.“ τοιαῦτά τινα λέγων ὁ
Κρισπῖνος καὶ πρὸς ἑκάστους
καὶ κοινῇ, φύσει μὲν καὶ ἄλλως αἰδέσιμος ὤν, ἔν τε τῇ
Ῥωμαίων φωνῇ εὐπρόσφορος ἐν λόγοις, ἐπιεικῶς τε
αὐτῶν προεστώς, ἔπεισε μένειν ἐν τοῖς προκειμένοις,
τούς τε πρέσβεις ἀπράκτους ἀπιέναι ἐκέλευσεν. ἐλέγετο
δὲ τῇ ἐνστάσει τοῦ πολέμου. ἐμμεμενηκέναι πολλῶν
ἔνδον ὄντων περὶ θυτικήν τε καὶ ἡπατοσκοπίαν ἐμπείρων, τά τε ἱερὰ
αἴσια ἀπαγγελλόντων· μάλιστα γὰρ τῇ
σκέψει ταύτῃ πιστεύουσιν Ἰταλιῶται. καὶ χρησμοὶ δέ
τινες διεδίδοντο ὡς δὴ τοῦ ἐπιχωρίου θεοῦ νίκην
ὑπισχνουμένου· Βέλεν δὲ καλοῦσι τοῦτον, σέβουσί τε
ὑπερφυῶς, Ἀπόλλωνα εἶναι ἐθέλοντες. οὗ καὶ τὴν εἰκόνα
ἔλεγόν τινες τῶν Μαξιμίνου στρατιωτῶν φανῆναι πολλάκις ἐν ἀέρι
ὑπὲρ τῆς πόλεως μαχομένην. ὅπερ εἴτε
ἀληθῶς ἐφαντάσθη τισίν, ἢ καὶ βουλομένοις μὴ ἀσχημονεῖν τοσοῦτον
στρατὸν πρὸς ὄχλον δημοτῶν πολὺ
ἐλάττονα μὴ ἀντισχόντα, δοκεῖν δὲ ὑπὸ θεῶν ἀλλὰ μὴ
ὑπὸ ἀνθρώπων νενικῆσθαι, εἰπεῖν οὐκ ἔχω· τὸ δὲ παράδοξον τῆς
ἀποβάσεως ποιεῖ πάντα πιστεῦσαι.
| [8,3] V. Telle était la situation d'Aquilée : cependant, Maximin, quand il eut
reçu la nouvelle que la ville était fermée et se défendait avec vigueur,
conçut l'idée d'envoyer, en forme de députation, quelques émissaires qui
traiteraient, du pied des murs, avec les habitants, et tâcheraient de les
engager à ouvrir leurs portes. Il y avait dans son armée un tribun dont
Aquilée était la patrie, et dont les enfants, la femme et toute la famille
étaient enfermés dans cette ville. Il envoya cet officier avec d'autres
centurions, dans l'espoir qu'à titre de concitoyens il n'aurait pas de
peine à convaincre les assiégés. Les députés, arrivés aux pieds des
remparts, déclarèrent que « Maximin, leur commun empereur, ordonnait aux
habitants d'Aquilée de déposer paisiblement leurs armes, de le recevoir
comme ami, non comme ennemi ; qu'il valait mieux s'occuper de libations et
de sacrifices, que de carnage; qu'ils ne devaient pas voir avec
indifférence leur patrie sur le point d'être détruite de fond en comble,
lorsqu'il dépendait d'eux de sauver et cette patrie et eux-mêmes ; car
leur excellent prince leur accordait l'oubli et le pardon de leurs fautes
: il savait qu'ils n'étaient point les auteurs du mal commis, et que les
coupables étaient étrangers à leur ville. »
VI. Tel fut le discours que les députés prononcèrent du pied des murs, et
ils étaient obligés d'élever. la voix pour que toutes leurs paroles
fussent entendues. Tous les habitants accourus sur les murs et sur les
tours, à l'exception de ceux qui gardaient les autres parties de la ville,
écoutaient ce discours en silence. Mais Crispinus, craignant que le
peuple, entraîné par les promesses de Maximin, et préférant la paix à la
guerre, n'ouvrit les portes, parcourut les remparts, et supplia la
multitude, la conjura, de persévérer avec courage, de résister avec
vigueur, de ne point trahir la fidélité due au sénat, au peuple romain :
« Ils seraient cités dans l'avenir comme les sauveurs de la patrie, les
défenseurs de l'Italie tout entière; ils devaient bien se garder d'ajouter
foi aux promesses d'un tyran trompeur et parjure, de se laisser prendre à
l'appât de paroles flatteuses, de courir à une ruine manifeste, lorsqu'ils
pouvaient s'en rapporter au sort des armes, dont les chances sont si
nombreuses ! N'avait-on pas vu souvent une poignée d'hommes triompher du
nombre, et ceux qui paraissaient les plus faibles renverser des ennemis
pleins de confiance dans la supériorité présumée de leur courage? Ils
auraient tort de s'effrayer de la force de cette armée. Ceux qui
combattent pour autrui, pour un succès qui doit profiter à d'autres s'il
est obtenu, n'apportent au combat qu'une faible ardeur : ils savent qu'ils
doivent avoir leur part de tous les dangers, mais qu'un autre doit
recueillir les plus grands, les plus précieux fruits de la victoire. Ceux
qui combattent, au contraire, pour leur patrie, peuvent placer dans les
dieux de plus légitimes espérances, puisqu'ils ne désirent pas usurper le
bien d'autrui, mais seulement conserver le leur; et ce n'est point dans
une volonté étrangère, mais dans leur propre nécessité qu'ils puisent le
courage qu'ils apportent au combat, car c'est à eux seuls que doit revenir
tout le fruit de la victoire. »
VII. Par ces paroles qu'il adressait tantôt à chacun en particulier,
tantôt à tous à la fois, Crispinus, homme vénérable du reste par son
caractère, possédant toutes les ressources de l'éloquence romaine, et qui
avait toujours gouverné ce peuple avec douceur, le maintint dans la
résolution de se défendre, et il ordonna aux députés de s'éloigner, sans
avoir rien obtenu. Crispinus, dit-on, ne persévérait si fortement à
poursuivre la guerre commencée, que parce qu'il y avait dans la ville un
grand nombre d'aruspices, d'hommes habiles à lire dans les entrailles des
victimes, et qu'ils donnaient les plus favorables augures. Les Italiens
ont la plus grande confiance dans ces consultations mystérieuses. On
publiait en outre quelques oracles qui annonçaient que le Dieu de la
patrie promettait la victoire. Ils appellent ce dieu Bélis, l'honorent
d'un culte presque fanatique, et prétendent que cette divinité n'est autre
qu'Apollon. Quelques soldats de Maximin affirmaient que l'image de ce dieu
leur était apparue dans les airs, combattant pour la défense de la ville.
Je ne puis dire s'ils avaient vu réellement cette apparition, ou s'ils le
supposaient, pour qu'une si grande armée n'eût pas à rougir de n'avoir pu
résister à une troupe de citoyens bien inférieure en nombre, et qu'elle
parût avoir été vaincue par les dieux et non par les hommes.
VIII. Au reste, il suffit d'un événement inattendu, pour que l'imagination
de l'homme ne trouve plus rien d'incroyable.
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