[6,9] „ἐβουλόμην μέν, ἄνδρες συστρατιῶται, τοὺς συνήθεις
πρὸς ὑμᾶς ποιεῖσθαι λόγους, δι´ ὧν αὐτός τε ἐκοσμούμην δημηγορῶν
ὑμᾶς τε ἀκούοντας εὔφραινον· εἰρήνης
γὰρ πολυετοῦς ἀπολαύσαντες εἴ τι καινὸν νῦν ἀκούοιτε,
ἴσως ἂν ὡς παρ´ ἐλπίδα λεχθέντι ἐκπλαγείητε. χρὴ δ´
ἄνδρας γενναίους τε καὶ σώφρονας εὔχεσθαι μὲν ὑπάρχειν τὰ βέλτιστα,
φέρειν δὲ τὰ προσπίπτοντα· τῶν μὲν
γὰρ δι´ ἡδονῆς πραττομένων ἡ ἀπόλαυσις γλυκεῖα, τῶν
δ´ ἐξ ἀνάγκης κατορθουμένων ἔνδοξος ἡ ἀνδρεία. καὶ
τὸ μὲν ἄρχειν ἀδίκων ἔργων οὐκ εὐγνώμονα ἔχει τὴν
πρόκλησιν, τὸ δὲ τοὺς ἐνοχλοῦντας ἀποσείεσθαι ἐκ τε
τῆς ἀγαθῆς συνειδήσεως ἔχει τὸ θαρραλέον, καὶ ἐκ τοῦ
μὴ ἀδικεῖν ἀλλ´ ἀμύνεσθαι ὑπάρχει τὸ εὔελπι. Ἀρταξάρης ἀνὴρ Πέρσης,
τὸν ἑαυτοῦ δεσπότην Ἀρτάβανον ἀποκτείνας τήν τε ἀρχὴν ἐς Πέρσας
μεταστήσας, ἀλλὰ καὶ τῶν ἡμετέρων ὅπλων καταθαρρήσας καὶ τῆς Ῥωμαίων
δόξης καταφρονήσας, πειρᾶται κατατρέχειν καὶ
λυμαίνεσθαι τὰ τῆς ἡμετέρας ἀρχῆς κτήματα. τοῦτον
ἐπειράθην τὸ μὲν πρῶτον γράμμασι καὶ πειθοῖ παῦσαι
τῆς ἀπλήστου μανίας καὶ τῆς ἀλλοτρίων ἐπιθυμίας· ὃ
δὲ βαρβάρῳ φερόμενος ἀλαξονείᾳ οὔτε μένειν οἴκοι βούλεται,
προκαλεῖταί τε ἡμᾶς ἐς μάχην. μὴ δὴ μέλλωμεν
μηδὲ ὀκνῶμεν, ἀλλ´ οἱ μὲν πρεσβύτεροι ὑμῶν ὑπομνήσατε ἑαυτοὺς
τροπαίων ἃ μετὰ Σεβήρου καὶ Ἀντωνίνου
τοῦ ἐμοῦ πατρὸς ἠγείρατε πολλάκις κατὰ βαρβάρων, οἱ δ´
ἐν ἀκμῇ ὄντες δόξης καὶ κλέους ἐπιθυμήσαντες δείξατε ὅτι
ἄρα καὶ εἰρήνην ἄγειν πράως καὶ μετ´ αἰδοῦς ἐπίστασθε
καὶ τὰ πολεμικὰ τῆς χρείας ἀπαιτούσης γενναίως κατορθοῦτε.
τὸ δὲ βάρβαρον πρὸς μὲν τὰ ὑπείκοντα καὶ
ὀκνοῦντα θρασύνεται, τῷ δ´ ἀντιπίπτοντι οὐκέθ´ ὁμοίως
ἀντέχει, ἐπεὶ μὴ ἐκ συστάσεως αὐτοῖς ἡ μάχη κατὰ τῶν
ἀντιπάλων ὑπισχνεῖται τὸ εὔελπι, ἀλλ´ ἐξ ἐπιδρομῆς ἢ
φυγῆς κερδαίνειν νομίζουσιν ὅπερ ἂν σχῶσι δι´ ἁρπαγῆς.
ἡμῖν δὲ καὶ τὸ εὔτακτον ἅμα τῷ κοσμίῳ ὑπάρχει,
καὶ νικᾶν αὐτοὺς ἀεὶ δεδιδάγμεθα.“
| [6,9] IX. « J'aurais voulu, compagnons d'armes, vous faire, comme d'ordinaire,
un de ces discours qui m'attiraient autant d'honneur et d'applaudissements
que vous éprouviez de plaisir à les entendre. Après avoir joui d'une douce
paix pendant de longues années, si l'on vous annonce quelque changement,
peut-être vous effrayerez-vous d 'appendre ces nouvelles inattendues. Mais
si l'homme courageux et sage peut désirer qu'il ne lui arrive rien que
d'heureux, il doit aussi savoir supporter les événements les plus
contraires. Si le bonheur procure de douces jouissances, les circonstances
fâcheuses ou difficiles amènent la gloire, quand on s'en tire avec
courage. Être l'agresseur, c'est agir avec autant de légèreté que
d'injustice ; s'opposer à l'agression, c'est puiser une nouvelle audace
dans sa bonne conscience. L'idée seule que nous ne supportons point
l'outrage, mais que nous le repoussons, nous remplit d'une forte
espérance. Artaxerce, un Perse, après avoir tué son maître Artaban et
transféré l'empire à sa nation, s'est enhardi jusqu'à braver vos armes, et
au mépris de la majesté romaine, il ose envahir et dévaster nos provinces.
J'ai d'abord essayé de le détourner par des lettres, par la persuasion, de
cette folle et insatiable ambition. Mais, entraîné par l'insolence
naturelle aux barbares, il refuse de rester sur son territoire, et nous
provoque à la guerre. Loin de nous tout délai, toute hésitation :
Vétérans, rappelez-vous les trophées qu'avec Sévère et mon père Antonin,
vous avez remportés souvent contre ces barbares; et vous, qui êtes dans la
force de la jeunesse, désirez l'honneur et la gloire; montrez que si, dans
la paix, vous savez être doux et modérés, vous savez aussi , quand la
nécessité l'exige, faire la guerre en vaillants soldats! Les barbares ont
de l'audace devant une armée qui se retire, qui hésite à les combattre ;
ils ne résistent pas à qui les attend de pied ferme. Ils ne savent pas se
battre en bataille rangée; ils n'espèrent rien d'un engagement général
avec l'ennemi ; mais ils s'avancent, ils fuient tour à tour ; ils
n'attendent d'autre fruit de la guerre que leurs rapines. Nous avons tout
pour nous, l'ordre, la discipline, et de plus l'habitude de les avoir
toujours vaincus. »
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