[6,15] γενόμενος δὲ ἐν τῇ Ἀντιοχείᾳ ὁ Ἀλέξανδρος αὐτός τε
ῥᾳδίως ἐπερρώσθη τῷ εὐψυχεῖ καὶ ἐνύδρῳ τῆς πόλεως
μετὰ τὸν ἐν Μεσοποταμίᾳ ξηρὸν αὐχμόν, τούς τε στρατιώτας ἀνεκτᾶτο,
καὶ ἐφ´ οἷς λελύπηντο παρεμυθεῖτο
μεγαλοδωρίᾳ χρημάτων· τοῦτο γὰρ μόνον ἐς εὐνοίας
ἀνάκτησιν στρατιωτῶν ἐνόμιζε φάρμακον. δύναμίν τε
ἤθροιζε καὶ παρεσκεύαζεν ὡς δὴ πάλιν ἐπάξων Πέρσαις,
εἰ ἐνοχλοῖεν καὶ μὴ ἡσυχάζοιεν. ἀπηγγέλλετο δὲ καὶ ὁ
Πέρσης λύσας τὴν δύναμιν καὶ ἑκάστους ἐς τὰ ἑαυτῶν
ἀποπέμψας. εἰ γὰρ καὶ ἐκ τοῦ κρείττονος ὑπέρτεροι ἐδόκουν
γεγενῆσθαι οἱ βάρβαροι, πλὴν ὅμως ἐτετρύχωντο
ταῖς τε κατὰ Μηδίαν πολλάκις γενομέναις συμβολαῖς τῇ
τε ἐν Παρθίᾳ μάχῃ, πολλῶν μὲν πεσόντων παμπλείστων
δὲ τετρωμένων. οὐ γὰρ ἀνάνδρως οἱ Ῥωμαῖοι ἡττήθησαν,
ἀλλὰ καὶ αὐτοὶ τοὺς πολεμίους ἔσθ´ ὅπῃ κακώσαντες,
παρὰ τοῦτο δὲ ἀπολόμενοι παρ´ ὅσον πλήθει ἐλάττους
εὑρέθησαν, ὡς σχεδὸν ἰσαρίθμου γενομένου τοῦ ἑκατέρωθεν
πεσόντος στρατοῦ τὸ περιλειφθὲν τῶν βαρβάρων
πλήθει ἀλλ´ οὐ δυνάμει δοκεῖ νενικηκέναι. δεῖγμα δὲ
τοῦτο οὐ μικρὸν τῆς τῶν βαρβάρων κακώσεως· ἐτῶν
γοῦν τριῶν ἢ τεττάρων ἡσύχασαν οὐδ´ ἐν ὅπλοις ἐγένοντο.
ἅπερ μανθάνων ὁ Ἀλέξανδρος καὶ αὐτὸς ἐν τῇ
Ἀντιοχείᾳ διέτριβεν· εὐθυμότερος δὲ καὶ ἀδεέστερος
γενόμενος ἀνειμένης αὐτῷ τῆς περὶ τὰ πολεμικὰ φροντίδος,
ταῖς τῆς πόλεως ἐσχόλαζε τρυφαῖς.
οἰομένου δὲ αὐτοῦ τὰ ἐν Πέρσαις μὴ μὲν ἐν εἰρήνῃ
συγκειμένῃ ἡσυχάζειν, ἔχειν δὲ ἀνακωχὴν καὶ μέλλησιν
τῷ βαρβάρῳ πρὸς τὸ πάλιν ἐπάγειν τὸν στρατόν, ὃς
ἅπαξ διαλυθεὶς οὐ ῥᾳδίως ἠθροίζετο ἅτε μὴ συντεταγμένος μηδὲ συνεστώς,
ἀλλ´ ὄχλος μᾶλλον ἢ στρατὸς ὑπάρχων, καὶ τῶν ἐπισιτισμῶν αὐτοῖς τοσούτων
ὄντων ὅσον ἃν ἕκαστος ἀφικνούμενος πρὸς τὸ ἑαυτοῦ χρειῶδες ἐπενέγκηται,
καὶ δυσαποσπάστως τε καὶ δυσόκνως καταλειπόντων τέκνα καὶ γυναῖκας
καὶ τὴν οἰκείαν χώραν, αἰφνιδίως ἄγγελοί τε καὶ γράμματα ἐτάραξε
τὸν Ἀλέξανδρον καὶ ἐς μείζονα φροντίδα ἐνέβαλεν, ἐπιστειλάντων
αὐτῷ τῶν ἐμπεπιστευμένων τὴν Ἰλλυρίδος ἡγεμονίαν
ὅτι ἄρα Γερμανοὶ Ῥῆνον καὶ Ἴστρον διαβαίνοντες τὴν
Ῥωμαίων πορθοῦσιν ἀρχὴν καὶ τὰ ἐπὶ ταῖς ὄχθαις στρατόπεδα ἐπικείμενα
πόλεις τε καὶ κώμας πολλῇ δυνάμει
κατατρέχουσιν, εἴη τε οὐκ ἐν ὀλίγῳ κινδύνῳ τὰ Ἰλλυρικὰ ἔθνη
ὁμοροῦντα καὶ γειτνιῶντα Ἰταλίᾳ· δεῖσθαι
τοίνυν τῆς αὐτοῦ παρουσίας καὶ τοῦ στρατοῦ παντὸς ὃς
ἦν σὺν αὐτῷ. δηλωθέντα δὴ ταῦτα τόν τε Ἀλέξανδρον
ἐτάραξε καὶ τοὺς ἐκ τοῦ Ἰλλυρικοῦ στρατιώτας ἐλύπησε,
διπλῇ δοκοῦντας κεχρῆσθαι συμφορᾷ, ἔκ τε ὧν πεπόνθεσαν Πέρσαις
μαχόμενοι, ἔκ τε ὧν ἐπυνθάνοντο τοὺς
οἰκείους ἕκαστοι ὑπὸ Γερμανῶν ἀπολωλότας. ἠγανάκτουν
οὖν, καὶ τὸν Ἀλέξανδρον εἶχον ἐν αἰτίᾳ ὡς τὰ ὑπὸ ταῖς
ἀνατολαῖς δι´ ἀμέλειαν ἢ δειλίαν προδεδωκότα, πρός τε
τὰ ἀρκτῷα μέλλοντα καὶ ὀκνοῦντα. ἦν δὲ καὶ αὐτῷ δέος
τῷ Ἀλεξάνδρῳ τοῖς τε συνοῦσι φίλοις ἤδη καὶ περὶ αὐτῆς Ἰταλίας.
οὐ γὰρ ὅμοιον ἡγοῦντο τὸν ἐκ Περσῶν
κίνδυνον οἷον ἐκ Γερμανῶν· οἱ μὲν γὰρ ὑπὸ ταῖς ἀνατολαῖς κατοικοῦντες,
μακρᾷ γῇ καὶ θαλάττῃ πολλῆ διῃρημένοι, τὴν Ἰταλῶν χώραν μόλις ἀκούουσι,
τὰ Ἰλλυρικὰ δὲ ἔθνη στενὰ ὄντα καὶ οὐ πολλὴν ἔχοντα τὴν ὑπὸ
Ῥωμαίοις γῆν, παρὰ τοσοῦτον ὁμόρους καὶ γείτονας
ποιεῖ Γερμανοὺς Ἰταλιώταις. ἐπαγγέλλει δὴ ἄκων μὲν
καὶ ἀσχάλλων τὴν ἔξοδον· πλὴν τῆς ἀνάγκης αὐτὸν καλούσης,
καταλιπών τε δύναμιν ὅσην ᾤετο αὐτάρκη ῥύεσθαι τὰς Ῥωμαίων ὄχθας,
τά τε στρατόπεδα καὶ τὰ φρούρια ἐπιμελέστερον τειχίσας καὶ πληρώσας
ἕκαστα τοῦ ὡρισμένου στρατοῦ, αὐτὸς ἐς Γερμανοὺς ἠπείγετο
ἅμα τῷ λοιπῷ πλήθει. ἀνύσας δὲ τὴν ὁδὸν μετὰ πολλῆς
σπουδῆς ἐπέστη ταῖς τοῦ Ῥήνου ὄχθαις, καὶ τὰ πρὸς
τὸν Γερμανικὸν πόλεμον παρεσκευάζετο, τόν τε ποταμὸν
ναυσὶ διελάμβανεν, ὧν πρὸς ἀλλήλας συνδεθεισῶν γεφυρωθέντα
εὐμαρῆ τὴν διάβασιν τοῖς στρατιώταις παρέξειν ᾤετο.
μέγιστοι γὰρ δὴ οὗτοι ποταμῶν ὑπ´ ἄρκτῳ ῥέουσι,
Ῥῆνός τε καὶ Ἴστρος, ὃ μὲν Γερμανοὺς ὃ δὲ Παίονας
παραμείβων· οἳ θέρους μὲν ναυσίπορον ἔχουσι τὸ ῥεῖθρον διὰ βάθος τε καὶ
πλάτος, τοῦ δὲ χειμῶνος παγέντες ὑπὸ τοῦ κρύους ἐν πεδίου σχήματι
καθιππεύονται. ἀντιτυπὲς δὲ οὕτω καὶ στερρὸν γίνεται τό ποτε ῥεῖθρον
ὡς μὴ μόνον ἵππων ὁπλαῖς καὶ ποσὶν ἀνθρώπων ἀντέχειν, ἀλλὰ καὶ τοὺς
ἀρύσασθαι θέλοντας μὴ κάλπεις ἐπ´
αὐτὸ μηδὲ κοῖλα σκεύη φέρειν, πελέκεις δὲ καὶ δικέλλας,
ἵν´ ἐκκόψαντες γυμνόν τε σκεύους ἀράμενοι τὸ ὕδωρ φέρωσιν ὥσπερ λίθον.
φύσις μὲν δὴ τῶν ποταμῶν αὕτη·
| [6,15] XV. L'empereur, de retour à Antioche, se rétablit facilement, grâce à
l'air salubre et tempéré, par des cours d'eau qu'il respirait dans cette
ville après les brûlantes chaleurs de la Mésopotamie ; il songea alors à
regagner l'amour des soldats, et à consoler le chagrin de leurs revers par
d'abondantes largesses (le seul remède qu'il connût pour reconquérir leur
bienveillance). On le vit aussi rassembler et exercer de nouvelles troupes
dans le dessein de marcher de nouveau contre les Perses, s'ils
recommençaient les hostilités et refusaient de se tenir en repos chez eux.
Mais on ne tarda pas à apprendre que le roi de Perse avait licencié son
armée et renvoyé chaque soldat dans ses foyers. Quoique les barbares
eussent eu, par les résultats de la guerre, l'apparence de la supériorité,
cependant ils avaient été fort affaiblis par les fréquents combats dont la
Médie fut le théâtre, et par la bataille qui s'était livrée chez les
Parthes; ils avaient eu beaucoup de morts, beaucoup de blessés. Les
Romains n'avaient pas été vaincus par le défaut de courage; ils avaient
souvent porté à leurs ennemis des coups funestes, et leur infériorité
numérique causa seule leur perte. Des deux côtés, le nombre des morts fut
à peu près le même; mais la victoire resta au grand nombre de barbares qui
survivaient, et non pas à leur courage. Ce qui prouva, d'une manière assez
décisive, le mal qu'on leur fit dans cette guerre, c'est que, pendant
trois ou quatre ans, ils restèrent en paix et ne prirent point les armes.
Alexandre, instruit de leur situation, demeurait à Antioche : joyeux de
son repos et délivré de tous les soucis de la guerre, il se livrait aux
plaisirs de cette voluptueuse cité. Il pensait que, si les Perses
s'étaient mis sur le pied de paix, leur repos ne pouvait s'interrompre de
longtemps, et que le roi barbare aurait de longs délais, de longs retards
à subir, avant de pouvoir faire marcher de nouveau son armée. Car dès
qu'elle est une fois congédiée, il n'est point facile de la réunir sous
les drapeaux. Les Perses, comme nous l'avons déjà dit, n'ont point de
troupes disciplinées; c'est une multitude confuse plutôt qu'une armée; les
soldats ne reçoivent point d'autres vivres que ceux qu'ils apportent
chacun pour leur usage, à leur arrivée ; ce n'est qu'avec peine qu'ils se
laissent arracher de leurs demeures; ce n'est qu'à regret qu'ils
abandonnent leurs femmes, leurs enfants et leurs foyers. Tout à coup des
courriers et d'importantes dépêches vinrent troubler Alexandre et le jeter
dans de plus grandes inquiétudes. Les généraux auxquels était confié le
gouvernement de l'Illyrie lui écrivaient « que les Germains, franchissant
le Rhin et le Danube, dévastaient le territoire de l'empire, inquiétaient,
par de continuelles incursions, les armées campées sur le bord des
fleuves, et envahissaient en corps nombreux les villes et les villages ;
que les peuples d'Illyrie, placés sur les frontières et dans le voisinage
de l'Italie, se trouvaient dans un grand péril; que sa présence était
nécessaire, ainsi que celle de toute l'armée qu'il commandait. » Ces
nouvelles alarmèrent Alexandre, et contristèrent les soldats illyriens,
qui se regardaient comme frappés d'un double malheur, en songeant aux
revers qu'ils avaient éprouvée dans la guerre de Perse, et en apprenant
que leurs familles étaient massacrées par les Germains. Ils ne cachaient
point leur indignation; ils accusaient Alexandre, qui avait perdu, par
négligence ou par crainte, les affaires d'Orient, et qui montrait de
l'hésitation et de la lenteur à s'occuper de celles du Nord. L'empereur et
les amis qui l'entouraient commençaient à trembler pour l'Italie
elle-même. A leur avis, le danger était bien moindre de la part des Perses
que de celle des Germains. Les peuples d'Orient, séparés de l'Italie par
une grande étendue de terre et de mer, entendent à peine parler de cette
contrée, tandis que les nations d'Illyrie, resserrées dans un étroit
espace, et n'occupant qu'une faible partie du territoire de l'empire,
rendent les Germains limitrophes et tout à fait voisins de l'Italie.
L'empereur ordonna donc le départ, non sans regret et sans chagrin, mais
parce que la nécessité l'y forçait. Il laissa le nombre de troupes qu'il
crut suffisant pour la défense des rives romaines, fortifia avec soin les
camps, les citadelles, en compléta les garnisons, et se mit lui-même en
marche pour la Germanie avec le reste de son armée. II fit la route en
grande hâte, et se trouva bientôt sur les bords du Rhin. Là il acheva tous
ses préparatifs pour la guerre de Germanie. il fit couvrir le fleuve de
bateaux qui, joints ensemble, devaient offrir à ses soldats un passage facile.
Les deux plus grands fleuves du Nord, le Rhin et le Danube,
coulent l'un dans la Germanie, l'autre en Pannonie ; pendant l'été, ils
sont navigables, à cause de la profondeur et du la largeur de leur
courant; mais pendant l'hiver, gelés par la rigueur du froid, on les
traverse à cheval comme une plaine. L'eau de ces fleuves, auparavant si
limpide, durcit alors jusqu'au fond, et acquiert tant de solidité que, non
seulement elle résiste à la corne du cheval et au pied de l'homme, mais
ceux qui veulent s'en procurer viennent avec des haches et des cognées, en
guise d'urnes et d'amphores, la brisent, et emportent dans leurs mains,
comme une pierre, cette eau qu'ils ont puisée sans vase.
Telle est la nature de ces fleuves.
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