[10,20] Πρὸς ταῦτα ὁ Ὑδάσπης, οὔπω τῶν ὄντων ἐπήβολος
γινόμενος, «Ἐπαινῶ μέν σε τῆς φιλανθρωπίας, ὦ
θύγατερ» ἔφη, «ξένον Ἕλληνα καὶ ἥλικα καὶ συναιχμάλωτον
καὶ συνήθειαν πρός σε τὴν ἐκ τῆς ἐκδημίας κεκτημένον
χρηστῶς κατελεοῦσαν καὶ περισῴζειν ἐπινοοῦσαν,
ἀλλ´ οὐκ ἔστιν ὅπως ἂν ἐκεῖνος ἐξαιρεθείη τῆς ἱερουργίας·
ἄλλως τε γὰρ οὐκ εὐαγὲς παντάπασι περιγραφῆναι τὸ
πάτριον τῆς τῶν ἐπινικίων θυσίας, καὶ ἅμα οὐδ´ ἂν ὁ δῆμος
ἀνάσχοιτο, μόλις καὶ πρὸς τὴν ἐπὶ σοὶ συγχώρησιν
θεῶν εὐμενείᾳ κινηθείς.» Ἡ δὴ οὖν Χαρίκλεια «Ὦ
βασιλεῦ» ἔφη, «πατέρα γάρ σε καλεῖν τάχα οὐκ ἐγγίνεται,
εἰ μὲν δὴ θεῶν εὐμενείᾳ σῶμα τοὐμὸν περισέσωσται, τῆς
αὐτῆς ἂν γένοιτο εὐμενείας καὶ τὴν ἐμὴν ἐμοὶ περισῶσαι
ψυχήν, ἣν ἀληθῶς εἶναί μοι ψυχὴν ἐπικλώσαντες ἴσασιν.
Εἰ δὲ τοῦτο ἀβούλητον Μοίραις εὑρίσκοιτο καὶ δεήσει πάντως
τὰ ἱερεῖα κοσμῆσαι σφαγιασθέντα τὸν ξένον, ἓν γοῦν
μοι χαρίσασθαι νεῦσον· αὐτήν με κέλευσον αὐτουργῆσαι τὸ
θῦμα καὶ τὸ ξίφος ὡς κειμήλιον δεξαμένην περίβλεπτον
ἐπ´ ἀνδρείᾳ παρ´ Αἰθίοψιν ἀναδειχθῆναι.»
| [10,20] A ces paroles, Hydaspe, qui n'avait pas compris
exactement la vérité, répondit : « Je te fais compliment
de tes sentiments d'humanité, ma fille : tu as raison d'avoir
pitié de cet étranger, de ce Grec, qui est de ton âge,
prisonnier de guerre comme toi, qui a vécu familièrement
avec toi pendant ton exil, et de songer à le sauver,
mais il n'y a aucun moyen de le soustraire au sacrifice.
Il ne serait pas de bon augure de manquer entièrement
aux rites traditionnels des sacrifices d'actions de grâces,
et, d'ailleurs, le peuple ne le tolérerait pas; il a eu déjà
du mal à t'épargner, et c'est la bienveillance des dieux
envers toi qui l'a ému. » Alors Chariclée : « O Roi,
dit-elle, car, sans doute, il ne m'est pas permis de te
donner le nom de père, si la bienveillance divine a sauvé
mon corps, il appartient à la même bienveillance de
sauver aussi mon âme, cette âme, dont ils savent bien
qu'elle est mienne, eux, les dieux, qui en ont filé la destinée.
Mais s'il apparaît que les Moires s'y refusent, et
s'il faut, à tout prix, rehausser cette cérémonie en égorgeant
cet étranger, je ne te demande qu'une faveur :
ordonne que j'accomplisse moi-même le sacrifice, que je
reçoive l'épée, comme un trésor, et que je devienne à
jamais célèbre pour mon intrépidité parmi les Ethiopiens. »
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