[9,11] Ἐπεὶ δὲ ἠθροίσθησαν καθ´ ἣν προείρητο πύλην,
ἐγκάρσια τῷ πηλῷ τὰ ξύλα ἅπερ ἑκάστη δεκὰς ἐπήχθιστο
ἐπιβάλλων καὶ ἀλλήλων ἐχόμενα συντιθείς, τῶν κατόπιν
ἀεὶ τοῖς ἡγουμένοις μεταδιδόντων, οἷον διὰ ζεύγματος
ῥᾷστά τε καὶ τάχιστα διεβίβασε τὸ πλῆθος. Καὶ λαβόμενος
τῆς ἐστερεωμένης τούς τε Αἰθίοπας οὐδὲν προϊδομένους
οὐδὲ φροντίδα τῆς φυλακῆς πεποιημένους ἀλλ´
ἀπρονοήτως καθεύδοντας διαλαθὼν ἐπὶ τὴν Ἐλεφαντίνην
ὡς δρόμου τε εἶχε καὶ ἄσθματος καθ´ ἓν τὸν στρατὸν
ἦγεν, ἀκώλυτός τε εἰσέφρησεν εἰς τὴν πόλιν, τῶν ἐκ τῆς
Συήνης προαπεσταλμένων δύο Περσῶν (οὕτω πρὸς αὐτοὺς
συντεταγμένον) ἐπιτηρούντων ὅσαι νύκτες τὴν ἔφοδον
κἀπειδὴ τὸ συγκείμενον ἀνεφθέγξαντο σύμβολον παραχρῆμα
τὰς πύλας ἀναπετασάντων. Ἤδη δὲ ἡμέρας ὑποφαινούσης
οἱ Συηναῖοι τὸν δρασμὸν ἐγνώριζον, τὰ μὲν
πρῶτα κατ´ οἶκον τὸν ἴδιον ἕκαστος τοὺς ἐπεξενωμένους
Περσῶν οὐχ ὁρῶντες, εἶτα καὶ κατὰ συλλόγους συνιστάμενοι,
καὶ τέλος καὶ τὸ ζεῦγμα ἐποπτεύοντες. Αὖθις οὖν εἰς
ἀγωνίαν καθίσταντο καὶ δευτέρων ἀδικημάτων ἔγκλημα
προσεδέχοντο βαρύτερον ὡς ἐπὶ φιλανθρωπίᾳ τοσαύτῃ γεγονότες
ἄπιστοι καὶ τὸν δρασμὸν τοῖς Πέρσαις συνεργήσαντες.
Ἔγνωσαν οὖν πανδημεὶ τῆς πόλεως ἐξορμήσαντες
ἐγχειρίζειν ἑαυτοὺς τοῖς Αἰθίοψι καὶ ὅρκοις πιστοῦσθαι
τὴν ἄγνοιαν, εἴ πως εἰς ἔλεον ἐπικλασθεῖεν. Ἀθροίσαντες
οὖν πᾶσαν ἡλικίαν καὶ κλάδους εἰς ἱκετηρίαν ἀναλαβόντες
κηρούς τε καὶ δᾷδας ἁψάμενοι καὶ τὰ ἱερὰ γένη καὶ
ἕδη τῶν θεῶν ὥσπερ κηρύκεια προβεβλημένοι διά τε τοῦ
ζεύγματος ὡς τοὺς Αἰθίοπας ἐλθόντες, ἱκέται πόρρωθεν
γονυπετοῦντες ἐκάθηντο καὶ ὑφ´ ἓν σύνθημα καὶ φωνὴν
γοώδη μίαν ἐλεεινὴν ὀλολυγὴν ἱέντες ἱκέτευον. Οἰκτιζόμενοι
δὲ πλέον, τὰ νεογνὰ τῶν βρεφῶν ἐπὶ γῆς προκαταβάλλοντες
φέρεσθαι ὡς ἔτυχε μεθῆκαν, διὰ τῆς ἀνυπόπτου καὶ ἀνυπαιτίου
μοίρας τὸ θυμούμενον τῶν Αἰθιόπων προμαλάσσοντες.
Τὰ βρέφη δὲ ὑπὸ πτοίας τε ἅμα καὶ ἀγνοίας τῶν πραττομένων τοὺς
μὲν φύντας καὶ τρέφοντας, τάχα που τὴν ἄπειρον ἀποτρεπόμενα βοήν,
ὑπέφευγεν, ἐπὶ δὲ τὴν ἄγουσαν ὡς τοὺς πολεμίους τὰ μὲν εἷρπε, τὰ
δὲ ψελλιζόμενα τὴν βάσιν καὶ κλαυθμυριζόμενα ἐπαγωγὸν
ἐφέρετο, καθάπερ σχεδιαζούσης ἐν αὐτοῖς τὴν ἱκεσίαν τῆς τύχης.
| [9,11] Une fois rassemblés à la porte désignée, ils
jetèrent au travers de la boue les pièces de bois apportées
par chaque unité et les disposèrent bout à bout, ceux
d'arrière les passant chaque fois aux hommes de tête,
si bien que, grâce à cette sorte de passerelle, toute la
troupe put franchir aisément le fossé et en peu de temps.
Lorsqu'il eut atteint la terre ferme, sans être aperçu
des Ethiopiens qui ne se doutaient de rien et n'avaient
pas pris la précaution de se garder mais dormaient sans
défiance, il courut avec son armée jusqu'à Eléphantine,
aussi vite qu'il le put et autant qu'il eut de souffle; il
pénétra sans difficulté dans la ville, car les deux Perses
envoyés de Syéné les jours précédents avaient reçu la
consigne de guetter chaque nuit son arrivée et, dès que
l'on eut donné le mot de passe convenu, aussitôt ils lui
ouvrirent les portes. Au lever du jour, les Syéniens
s'aperçurent de sa fuite, d'abord en ne voyant pas chacun
dans sa maison le Perse qu'il hébergeait, ensuite par les
conversations qu'ils eurent entre eux, et, finalement,
lorsqu'ils découvrirent la passerelle. Et de nouveau ils
furent plongés dans l'angoisse et se virent exposés à
être accusés d'une faute plus grave que la première fois,
celle d'avoir répondu par la trahison à la grande bienveillance
du roi et de s'être faits les complices de la fuite des
Perses. Ils résolurent donc de sortir de la ville, tous, sans
exception et de se livrer aux Ethiopiens, en affirmant
par serment qu'ils n'avaient été au courant de rien, pour
tenter d'émouvoir leur pitié. Ils se rassemblèrent donc,
sans distinction d'âge, prirent des rameaux de suppliants,
allumèrent des cierges et des torches, se firent précéder
par les familles sacerdotales et les Statues de leurs dieux
pour indiquer leurs intentions pacifiques et se mirent
en marche, par la passerelle, vers les Ethiopiens. Arrivés
à une certaine distance de ceux-ci, ils se jetèrent à genoux,
dans une attitude suppliante, et, comme à un signal,
commencèrent à pousser d'une seule voix des cris
pitoyables et des lamentations pour les émouvoir. Afin
d'inspirer plus sûrement la pitié, ils déposèrent les petits
enfants et les laissèrent aller où ils voudraient, s'imaginant
que cette troupe innocente, qu'on ne pouvait soupçonner
de mauvais desseins, adoucirait la colère des Ethiopiens.
Et les petits, terrorisés, ne comprenant rien à ce
qui se passait, se mirent à fuir leurs pères et leurs mères,
sans doute pour s'éloigner de cette clameur infinie, et
leur fuite, les uns rampant, les autres vacillant sur leurs
petites jambes, les entraînait vers les ennemis, tandis
qu'ils pleuraient de façon touchante, comme si la Fortune
avait imaginé de les faire participer, eux aussi, aux lamentations.
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