[8,16] Ἤδη δὲ πλησιάζων Αἰθιοπικῷ περιπίπτει λόχῳ
καὶ πλήθει νεολαίας εὐοπλούσης οἳ προαπεστάλησαν μὲν
ὀπτῆρές τε ἐσόμενοι καὶ τὸ ἀσφαλὲς τῆς ὁδοιπορίας τῇ
παρὰ σφῶν ἀποπείρᾳ πρὸς τὴν ὅλην στρατιὰν βεβαιώσοντες,
τότε δὲ ὑπὸ νυκτός τε καὶ τόπων ἀπειρίας, ᾗ πορρωτάτω
τῶν φιλίων προσῆκον ἦν φθάνειν ἀποσφαλέντες, κατά
τινα τοῦ ποταμοῦ λόχμην ἐγκαταδύντες αὐτοῖς τε ἅμα εἰς
φρουρὰν καὶ τοῖς ἐναντίοις εἰς ἐνέδραν ἄυπνοι τὴν λόχμην
ἐπετείχιζον. Ἄρτι δὲ ἡμέρας ὑποφαινούσης τὸν
Βαγώαν καὶ τὴν σὺν αὐτῷ ἵππον αἰσθόμενοι παριόντας καὶ
τὸ πλῆθος ὡς ὀλίγοι διοπτεύσαντες μικρόν τε παραδραμεῖν
ἐνδόντες καὶ ὅτι ἄλλοι μηδένες ἐφέποιντο ἀκριβώσαντες
ἀθρόον τοῦ ἕλους μετὰ βοῆς ἐκδύντες μετέθεον. Ὁ δὲ
Βαγώας καὶ τὸ ἄλλο ἱππικὸν ὑπό τε τῆς ἀπροσδοκήτου
βοῆς πτοίας ἐμπέπληστο καὶ ἀπὸ τῆς χροιᾶς Αἰθίοπας
εἶναι τοὺς φανέντας γνωρίσαντες καὶ τὸ πλῆθος ὡς ἀπρόσμαχον
ἰδόντες (χίλιοι γὰρ εἰς τὴν κατασκοπὴν ὡπλισμένοι
κούφως ἐστάλησαν) οὐδὲ ἀκριβῶς τὴν θέαν ἀνασχόμενοι
πρὸς φυγὴν ὥρμησαν σχολαίτερον τὰ πρῶτα ἢ ὅσον ἠδύναντο
καὶ ὥστε μὴ προῦπτον δρασμὸν ἐμφαίνειν ἀπιόντες· οἱ δὲ
ἐπεδίωκον, τοὺς ὅσοι Τρωγλοδύται σφῶν (ἦσαν δὲ εἰς
διακοσίους) προτέρους ἐπαφέντες. Τρωγλοδύται δὲ
μοῖρα μέν ἐστιν Αἰθιοπική, νομαδική τε καὶ Ἀράβων ὅμορος,
δρόμου δὲ ὀξύτητα φύσει τε εὐτυχοῦντες καὶ ἐκ παίδων
ἀσκοῦντες, τὴν μὲν βαρεῖαν ὅπλισιν οὐδὲ ἀρχὴν ἐδιδάχθησαν
ἀπὸ σφενδόνης δὲ κατὰ τὰς μάχας ἀκροβολιζόμενοι ἢ
δρῶσί τι πρὸς ὀξὺ τοὺς ἀνθισταμένους ἢ καθυπερτέρους
αἰσθόμενοι διαδιδράσκουσιν· οἱ δὲ ἀπογινώσκουσιν αὐτίκα
τὴν ἐπιδίωξιν ἐπτερωμένους τῇ ποδωκείᾳ συνειδότες καὶ
εἰς ὀπάς τινας βραχυστόμους καὶ χηραμοὺς κρυφίους
πετρῶν καταδυομένους. Οὗτοι δ´ οὖν τότε πεζοὶ τοὺς
ἱππέας ἔφθανον καί τινας καὶ τραυματίας γενέσθαι σφενδονῶντες
ἴσχυσαν· οὐ μὴν ἐδέξαντό γε ἀντεφορμήσαντας
ἀλλὰ προτροπάδην εἰς τοὺς ἀπολειφθέντας τῶν φιλίων
πολὺ καθυστεροῦντας ἀπεδίδρασκον. Ὃ δὴ καὶ σκοπήσαντες
οἱ Πέρσαι καὶ τῆς ὀλιγότητος ὑπεριδόντες τὴν ἀντεφόρμησιν
ἐθάρσησαν, ἀποσκευασάμενοί τε εἰς βραχὺ τοὺς ἐγκειμένους
τὸν δρασμὸν αὖθις ἐπέσπευδον τοῖς τε μύωψι τοὺς ἵππους
ἐρεθίζοντες καὶ δυνάμεως ὅσον ἦν καὶ τάχους ἀνέτοις τοῖς
χαλινοῖς ἐφιέντες. Οἱ μὲν οὖν ἄλλοι διαδιδράσκουσιν
ἑλιγμόν τινα τοῦ Νείλου καθάπερ ἄκραν ὑποδραμόντες καὶ
τῷ προβόλῳ τῆς ὄχθης τὴν θέαν τῶν ἐναντίων ἀποκρύψαντες·
ὁ δὲ Βαγώας ἁλίσκεται προσπταίσαντι τῷ ἵππῳ συγκατενεχθεὶς
καὶ θάτερον τοῖν σκελοῖν εἰς τὸ ἀκίνητον πηρωθείς.
Ἁλίσκονται δὲ Θεαγένης καὶ Χαρίκλεια τὸ μέν τι τὸν
Βαγώαν ἐγκαταλιπεῖν οὐκ ἐνεγκόντες, ἄνδρα φιλάνθρωπον
περὶ αὐτοὺς καὶ ὀφθέντα καὶ ἐλπισθέντα (παρειστήκεισαν
γοῦν ἀποβάντες τῶν ἵππων ἴσως ἂν καὶ διαφυγόντες), πλέον
δὲ ἑκόντες ὑποκατακλινόμενοι, τοῦ Θεαγένους πρὸς τὴν
Χαρίκλειαν τοῦτ´ ἐκεῖνο εἶναι τὸ ὄναρ εἰπόντος καὶ τοὺς
Αἰθίοπας τούτους ὧν εἰς τὴν γῆν ἀφικέσθαι πεπρωμένον
εἶναι ἡμῖν αἰχμαλώτους ἁλόντας· καλὸν οὖν ἐγχειρίζειν
ἑαυτοὺς καὶ ἐπιτρέπειν ἀδηλοτέρᾳ τύχῃ τοῦ προδήλου
παρὰ Ὀροονδάτῃ κινδύνου.
| [8,16] Il en approchait déjà lorsqu'il tomba dans une
embuscade tendue par une forte troupe de jeunes
Ethiopiens bien armés qui avaient été envoyés en éclaireurs
pour assurer par leurs reconnaissances la sécurité
du gros de l'armée dans son avance; mais la nuit et leur
ignorance du pays les avaient égarés et entraînés plus
loin des leurs qu'il n'eût fallu; ils s'étaient donc cachés
dans un fourré au bord du fleuve; et là, autant pour se
protéger eux-mêmes que pour surprendre les adversaires,
ils faisaient le guet, sans dormir, à l'abri de
leur cachette. Le jour venait de se lever lorsqu'ils virent
passer Bagoas et ses cavaliers. Ayant constaté qu'ils
n'étaient pas nombreux et s'étant assurés, en les laissant
continuer sur quelque distance, qu'ils n'étaient pas suivis
par d'autres soldats, ils sortirent brusquement du marais
avec de grands cris et se jetèrent sur eux. En entendant
cette clameur imprévue, Bagoas et ses cavaliers furent
remplis de terreur et s'aperçurent, à la couleur de leur
peau, que leurs agresseurs étaient des Ethiopiens; ils
virent d'autre part qu'ils étaient trop nombreux pour
que l'on pût leur opposer une résistance — on avait
envoyé pour cette reconnaissance un millier d'hommes
armés à la légère. Aussi, sans même prendre le temps
de les examiner attentivement, se mirent-ils en devoir
de s'échapper, mais d'abord moins rapidement qu'ils
n'auraient pu le faire et en s'éloignant sans se donner
l'air de fuir ouvertement. Les autres les poursuivirent
et envoyèrent en avant tout ce qu'ils avaient avec eux de
Troglodytes (il y en avait environ deux cents).
Les Troglodytes sont un peuple d'Ethiopie ; ce sont des
nomades, voisins des Arabes; naturellement très bien
doués pour la course, ils s'y entraînent dès l'enfance; ils
n'apprennent absolument pas à utiliser l'armement lourd
mais, dans les combats, lancent de loin des projectiles
avec la fronde; ou bien ils harcèlent leurs adversaires
par leur rapidité d'action ou bien, s'ils s'aperçoivent qu'ils
ont le dessous, ils battent rapidement en retraite. Leurs
ennemis renoncent bien vite à les poursuivre, car l'on
sait qu'ils fuient comme s'ils avaient des ailes et qu'ils
vont se réfugier dans des grottes dont l'entrée est fort
étroite et dans des abris dissimulés dans les rochers.
En l'occurrence, bien qu'ils fussent seulement à pied, ils
réussirent à rejoindre les cavaliers et même à en blesser
quelques-uns à coups de fronde. Mais ils n'attendirent
pas les Perses, lorsque ceux-ci les contre-attaquèrent; ils
refluèrent en désordre et à toute vitesse vers les leurs,
qu'ils avaient laissés loin derrière. Ce que voyant, les
Perses, encouragés par le petit nombre de leurs adversaires,
s'enhardirent jusqu'à les attaquer à leur tour, se
débarrassèrent rapidement de ceux qui les pressaient et,
de nouveau, se remirent à fuir à toute vitesse, excitant
leurs chevaux de l'éperon et courant à bride abattue,
aussi vite qu'ils le pouvaient. Leur course les entraîna
au delà d'une courbe du Nil, qui formait comme un
promontoire, et l'avancée du terrain les dissimula à la
vue de leurs ennemis; mais Bagoas fut pris. Son cheval
avait bronché, l'entraînant dans sa chute, et lui-même
s'était fait à une cuisse une blessure qui l'empêchait de
bouger. Avec lui furent pris Théagène et Chariclée, à la
fois parce qu'ils n'avaient pas voulu abandonner Bagoas,
qui avait été bon pour eux, comme ils l'avaient constaté
dans le passé, et dont ils espéraient qu'il le serait encore
— ils étaient descendus de cheval pour l'aider, alors
que, peut-être, ils auraient pu s'enfuir - mais surtout,
s'ils se rendirent si volontiers, c'est que Théagène avait
dit à Chariclée que son rêve était en train de s'accomplir
et que c'étaient là les Ethiopiens dans le pays desquels
leur destinée voulait qu'ils fussent emmenés comme
prisonniers de guerre. Aussi valait-il mieux, avait-il
ajouté, se livrer à eux et s'abandonner à un sort incertain
plutôt que de courir les dangers trop certains que
leur réservait Oroondatès.
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