[2] Πῶς οὖν οὐκ αἰσχρόν, ᾧ μόνῳ τῶν ἐν ἡμῖν κοινωνοῦμεν θεοῖς, τούτου μὲν
ἀμελεῖν, ἐσπουδακέναι δὲ περί τι τῶν ἄλλων, τέχνης μὲν ἀναλήψεως
καταφρονοῦντα, Τύχῃ δ´ ἑαυτὸν ἐπιτρέποντα· ἧς τὴν μοχθηρίαν ἐμφανίσαι
βουληθέντες οἱ παλαιοὶ γράφοντες καὶ πλάττοντες αὐτὴν οὐ μόνον ἐν εἴδει
γυναικὸς ἠρκέσθησαν (καίτοι καὶ τοῦθ´ ἱκανὸν ἦν ἀνοίας σύμβολον) ἀλλὰ
καὶ πηδάλιον ἔδοσαν ἐν χεροῖν ἔχειν αὐτῇ καὶ τοῖν ποδοῖν ὑπέθεσαν βάσιν
σφαιρικήν, ἐστέρησαν δὲ καὶ τοῖν ὀφθαλμοῖν, ἐνδεικνύμενοι διὰ τούτων
ἁπάντων τὸ τῆς τύχης ἄστατον. Ὥσπερ οὖν ἐν νηὶ χειμαζομένῃ σφοδρῶς, ὡς
ἐπικλύζεσθαί τε τοῖς κύμασι καὶ κινδυνεύειν βυθισθῆναι, μοχθηρῶς ἄν τις
πράξειεν ἐπιτρέψας τὰ πηδάλια κυβερνήτῃ τυφλῷ, κατὰ τὸν αὐτὸν οἶμαι τρόπον
κἀν τῷ βίῳ, μειζόνων ναυαγιῶν περὶ πολλοὺς .Οἴκους γιγνομένων ἢ περὶ τὰ
σκάφη κατὰ θάλατταν, οὐκ ὀρθῶς γιγνώσκοντός ἐστιν ἐπιτρέπειν ἑαυτὸν ἐν
τοιαύταις περιστάσεσι πραγμάτων τυφλῇ δαίμονι μηδ´ αὐτῇ βεβαίως
ἐστηριγμένῃ. Ἔμπληκτός τε γάρ ἐστι καὶ ἄνους εἰς τοσοῦτον ὡς πολλάκις τοὺς
ἀξιωτάτους ἄνδρας παρερχομένη πλουτίζειν τοὺς ἀναξίους, οὐδὲ τούτους
βεβαίως ἀλλ´ ἕως ἂν αὐτῇ δοκῇ πάλιν αὐτῶν ἀφαιρεῖσθαι τὰ δοθέντα. Ταύτῃ
τῇ δαίμονι πλῆθος ἀνδρῶν ἀμαθῶν οὐκ ὀλίγον ἕπεται μηδέποτ´ ἐν ταὐτῷ
μενούσῃ διὰ τὸ τῆς βάσεως εὐμετακύλιστον, ἥτις αὐτὴν ἄγει καὶ φέρει καὶ
κατὰ κρημνῶν ἐνίοτε καὶ θαλάττης· ἔνθα συναπόλλυνται μὲν ἀλλήλοις ἑπόμενοι
πάντες αὐτῇ, μόνη δ´ ἀβλαβὴς ἐκείνη διεξέρχεται καταγελῶσα τῶν
ὀλοφυρομένων τε καὶ ἐγκαλούντων αὐτῇ μάτην ὅτ´ οὐδὲν ὄφελος.
| [2] CHAPITRE II.
N'est-il donc pas honteux de négliger précisément ce que nous avons de
commun avec les dieux, pour nous préoccuper de toute autre chose, et de
mépriser la culture des arts, pour nous attacher à la Fortune ? Afin de dévoiler la
perversité de ce génie, les anciens, non contents de le représenter, soit en
peinture, soit en sculpture, sous les traits d'une femme (et cela était déjà un
symbole assez significatif de déraison), ont mis un gouvernail
dans ses mains, ont placé un piédestal sphérique sous ses pieds, et ont
recouvert ses yeux d'un bandeau, voulant, par tous ces attributs, nous montrer son
instabilité. De même qu'au milieu d'une violente tempête, sur le point d'être
enveloppés et engloutis par les flots, on commettrait une grande faute en confiant le
gouvernail à un aveugle ; de même, au sein des naufrages qui, dans le cours de la
vie, assaillent tant de familles, naufrages plus terribles encore que ceux des
vaisseaux, en pleine mer, on se tromperait étrangement, ce me semble, si dans les
embarras extrêmes dont on est alors environné, on attendait son salut d'une divinité
aveugle et instable. La Fortune est si stupide et si déraisonnable que,
délaissant le plus souvent ceux qui méritent ses faveurs, elle
enrichit les plus indignes; encore n'est-ce point d'une manière durable, mais
pour les dépouiller bientôt des richesses qu'elle leur a prodiguées. Une foule
d'hommes ignorants courent après cette divinité qui ne reste jamais en place, à
cause de la mobilité de son piédestal qui l'entraîne, et l'emporte souvent au-dessus
des précipices ou des mers ; là, ses suivants tombent et périssent pêle-mêle ;
seule, s'échappant saine et sauve, elle se rit de ceux qui gémissent et l'appellent à
leur aide, quand tout espoir est perdu. Telles sont les œuvres de la Fortune.
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