[650] τούτου παρεῖσα πόθον ἔμιμνον ἐν δόμοις·
651 ἔσω τε μελάθρων κομψὰ θηλειῶν ἔπη
652 οὐκ εἰσεφρούμην, τὸν δὲ νοῦν διδάσκαλον
653 οἴκοθεν ἔχουσα χρηστὸν ἐξήρκουν ἐμοί.
654 γλώσσης τε σιγὴν ὄμμα θ´ ἥσυχον πόσει
655 παρεῖχον· ἤιδη δ´ ἅμ´ ἐχρῆν νικᾶν πόσιν
656 κείνωι τε νίκην ὧν ἐχρῆν παριέναι.
657 καὶ τῶνδε κληδὼν ἐς στράτευμ´ Ἀχαιικὸν
658 ἐλθοῦς´ ἀπώλεσέν μ´· ἐπεὶ γὰρ ἡιρέθην,
659 Ἀχιλλέως με παῖς ἐβουλήθη λαβεῖν
660 δάμαρτα· δουλεύσω δ´ ἐν αὐθεντῶν δόμοις.
661 κεἰ μὲν παρώσας´ Ἕκτορος φίλον κάρα
662 πρὸς τὸν παρόντα πόσιν ἀναπτύξω φρένα,
663 κακὴ φανοῦμαι τῶι θανόντι· τόνδε δ´ αὖ
664 στυγοῦς´ ἐμαυτῆς δεσπόταις μισήσομαι.
665 καίτοι λέγουσιν ὡς μί´ εὐφρόνη χαλαῖ
666 τὸ δυσμενὲς γυναικὸς εἰς ἀνδρὸς λέχος·
667 ἀπέπτυς´ αὐτὴν ἥτις ἄνδρα τὸν πάρος
668 καινοῖσι λέκτροις ἀποβαλοῦς´ ἄλλον φιλεῖ.
669 ἀλλ´ οὐδὲ πῶλος ἥτις ἂν διαζυγῆι
670 τῆς συντραφείσης ῥαιδίως ἕλκει ζυγόν.
671 καίτοι τὸ θηριῶδες ἄφθογγόν τ´ ἔφυ
672 ξυνέσει τ´ ἄχρηστον τῆι φύσει τε λείπεται.
673 σὲ δ´, ὦ φίλ´ Ἕκτορ, εἶχον ἄνδρ´ ἀρκοῦντά μοι
674 ξυνέσει γένει πλούτωι τε κἀνδρείαι μέγαν·
675 ἀκήρατον δέ μ´ ἐκ πατρὸς λαβὼν δόμων
676 πρῶτος τὸ παρθένειον ἐζεύξω λέχος.
677 καὶ νῦν ὄλωλας μὲν σύ, ναυσθλοῦμαι δ´ ἐγὼ
678 πρὸς Ἑλλάδ´ αἰχμάλωτος ἐς δοῦλον ζυγόν.
679 ἆρ´ οὐκ ἐλάσσω τῶν ἐμῶν ἔχει κακῶν
680 Πολυξένης ὄλεθρος, ἣν καταστένεις;
681 ἐμοὶ γὰρ οὐδ´ ὃ πᾶσι λείπεται βροτοῖς
682 ξύνεστιν ἐλπίς, οὐδὲ κλέπτομαι φρένας
683 πράξειν τι κεδνόν· ἡδὺ δ´ ἐστὶ καὶ δοκεῖν.
684 (ΧΟΡΟΣ) ἐς ταὐτὸν ἥκεις συμφορᾶς· θρηνοῦσα δὲ
685 τὸ σὸν διδάσκεις μ´ ἔνθα πημάτων κυρῶ.
686 (ΕΚΑΒΗ) αὐτὴ μὲν οὔπω ναὸς εἰσέβην σκάφος,
687 γραφῆι δ´ ἰδοῦσα καὶ κλύους´ ἐπίσταμαι.
688 ναύταις γὰρ ἢν μὲν μέτριος ἦι χειμὼν φέρειν,
689 προθυμίαν ἔχουσι σωθῆναι πόνων,
690 ὁ μὲν παρ´ οἴαχ´, ὁ δ´ ἐπὶ λαίφεσιν βεβώς,
691 ὁ δ´ ἄντλον εἴργων ναός· ἢν δ´ ὑπερβάληι
692 πολὺς ταραχθεὶς πόντος, ἐνδόντες τύχηι
693 παρεῖσαν αὑτοὺς κυμάτων δραμήμασιν.
694 οὕτω δὲ κἀγὼ πόλλ´ ἔχουσα πήματα
695 ἄφθογγός εἰμι καὶ παρεῖς´ ἔχω στόμα·
696 νικᾶι γὰρ οὑκ θεῶν με δύστηνος κλύδων.
697 ἀλλ´, ὦ φίλη παῖ, τὰς μὲν Ἕκτορος τύχας
698 ἔασον· οὐ μὴ δάκρυά νιν σώσηι τὰ σά.
699 τίμα δὲ τὸν παρόντα δεσπότην σέθεν,
| [650] et me renfermai dans ma demeure, sans admettre au sein de mes foyers les entretiens flatteurs des femmes. Je n'avais d'autre maître que les sentiments honnêtes de mon cœur, et ils me suffisaient : je présentais toujours à mon époux un visage serein et une bouche silencieuse, et je savais à propos quand il fallait lui céder la victoire ou l'emporter sur lui. Le renom de cette conduite, répandu dans l'armée grecque, a causé ma perte : car, dès que je fus captive, le fils d'Achille voulut m'avoir pour épouse, et je serai esclave dans la maison des meurtriers de mon époux. Si, oubliant le souvenir chéri d'Hector, j'ouvre mon cœur à la tendresse de mon nouveau mari, je paraîtrai infidèle aux mânes du premier ; et si je lui témoigne de la haine, je me rendrai odieuse à mes maîtres. On dit cependant qu'une seule nuit calme l'aversion d'une femme pour la couche d'un homme ; je déteste celle qui, perdant un premier époux, peut en aimer un autre. Un cheval même, lorsqu'on le sépare de la compagne avec laquelle il fut élevé, ne porte plus si facilement le joug ; et cependant, privés de la parole et de l'intelligence, ces animaux sont inférieurs à notre nature. En toi, cher Hector, je trouvai réunis la prudence, l'illustration, l'opulence et l'éclat du courage ; tu me reçus innocente et pure au sortir de la maison paternelle, et le premier tu entras dans mon lit virginal. Tu meurs, et l'on m'entraîne captive au delà des mers, pour subir en Grèce le joug de l'esclavage. Ah ! la mort de Polyxène, sur laquelle tu gémis, n'est-elle pas un malheur bien moindre que les miens? J'ai perdu même ce qui reste à tous les mortels, l'espérance; mon esprit ne s'abuse même plus par l'idée d'un sort meilleur : et pourtant c'est déjà un bien que d'y croire.
LE CHOEUR.
Tes malheurs sont les nôtres, et, en les déplorant, tu nous enseignes toute l'étendue de notre misère.
HÉCUBE.
(686) Je ne suis jamais montée sur un vaisseau ; mais ceux que j'ai vus en peinture, et ce que j'en ai ouï dire, me les ont fait connaître. Lorsque la tempête gronde sans déployer toute sa violence, les nautoniers se mettent à l'œuvre avec ardeur pour échapper au danger ; l'un court au gouvernail, l'autre aux voiles, un autre épuise l'eau de la sentine ; mais si leurs efforts sont impuissants contre la furie de la mer bouleversée, ils cèdent à la fortune et s'abandonnent à la merci des flots. Ainsi moi, dans les maux qui m'accablent, je reste sans voix, et la plainte expire sur mes lèvres ; je cède à la tempête de l'adversité soulevée par les dieux. Mais, ma chère fille, laisse là les malheurs d'Hector, tes larmes ne sauraient le sauver. Honore ton nouveau maître, charme son cœur par le doux attrait de tes vertus.
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