[8] Scène VIII – vers 359-409
(ΧΟΡΟΣ) {δύστανε γύναι͵}
φεῦ φεῦ͵ μελέα τῶν σῶν ἀχέων.
ποῖ ποτε τρέψῃ; τίνα πρὸς ξενίαν;
360 ἦ δόμον ἢ χθόνα σωτῆρα κακῶν
ἐξευρήσεις;
ὡς εἰς ἄπορόν σε κλύδωνα θεός͵
Μήδεια͵ κακῶν ἐπόρευσε.
(ΜΗΔΕΙΑ) κακῶς πέπρακται πανταχῇ· τίς ἀντερεῖ;
ἀλλ΄ οὔτι ταύτῃ ταῦτα͵ μὴ δοκεῖτέ πω.
ἔτ΄ εἴσ΄ ἀγῶνες τοῖς νεωστὶ νυμφίοις
καὶ τοῖσι κηδεύσασιν οὐ σμικροὶ πόνοι.
δοκεῖς γὰρ ἄν με τόνδε θωπεῦσαί ποτε͵
εἰ μή τι κερδαίνουσαν ἢ τεχνωμένην;
370 οὐδ΄ ἂν προσεῖπον οὐδ΄ ἂν ἡψάμην χεροῖν.
ὃ δ΄ ἐς τοσοῦτον μωρίας ἀφίκετο͵
ὥστ΄ ἐξὸν αὐτῷ τἄμ΄ ἑλεῖν βουλεύματα
γῆς ἐκβαλόντι͵ τήνδ΄ ἀφῆκεν ἡμέραν
μεῖναί μ΄͵ ἐν ᾗ τρεῖς τῶν ἐμῶν ἐχθρῶν νεκροὺς
θήσω͵ πατέρα τε καὶ κόρην πόσιν τ΄ ἐμόν.
πολλὰς δ΄ ἔχουσα θανασίμους αὐτοῖς ὁδούς͵
οὐκ οἶδ΄ ὁποίᾳ πρῶτον ἐγχειρῶ͵ φίλαι·
πότερον ὑφάψω δῶμα νυμφικὸν πυρί͵
ἢ θηκτὸν ὤσω φάσγανον δι΄ ἥπατος͵
380 σιγῇ δόμους ἐσβᾶσ΄͵ ἵν΄ ἔστρωται λέχος.
ἀλλ΄ ἕν τί μοι πρόσαντες· εἰ ληφθήσομαι
δόμους ὑπεσβαίνουσα καὶ τεχνωμένη͵
θανοῦσα θήσω τοῖς ἐμοῖς ἐχθροῖς γέλων.
κράτιστα τὴν εὐθεῖαν͵ ᾗ πεφύκαμεν
σοφαὶ μάλιστα͵ φαρμάκοις αὐτοὺς ἑλεῖν.
εἶἑν· καὶ δὴ τεθνᾶσι· τίς με δέξεται πόλις;
τίς γῆν ἄσυλον καὶ δόμους ἐχεγγύους
ξένος παρασχὼν ῥύσεται τοὐμὸν δέμας;
οὐκ ἔστι. μείνασ΄ οὖν ἔτι σμικρὸν χρόνον͵
390 ἢν μέν τις ἡμῖν πύργος ἀσφαλὴς φανῇ͵
δόλῳ μέτειμι τόνδε καὶ σιγῇ φόνον·
ἢν δ΄ ἐξελαύνῃ ξυμφορά μ΄ ἀμήχανος͵
αὐτὴ ξίφος λαβοῦσα͵ κεἰ μέλλω θανεῖν͵
κτενῶ σφε͵ τόλμης δ΄ εἶμι πρὸς τὸ καρτερόν.
οὐ γὰρ μὰ τὴν δέσποιναν ἣν ἐγὼ σέβω
μάλιστα πάντων καὶ ξυνεργὸν εἱλόμην͵
Ἑκάτην͵ μυχοῖς ναίουσαν ἑστίας ἐμῆς͵
χαίρων τις αὐτῶν τοὐμὸν ἀλγυνεῖ κέαρ.
πικροὺς δ΄ ἐγώ σφιν καὶ λυγροὺς θήσω γάμους͵
400 πικρὸν δὲ κῆδος καὶ φυγὰς ἐμὰς χθονός.
ἀλλ΄ εἶα· φείδου μηδὲν ὧν ἐπίστασαι͵
Μήδεια͵ βουλεύουσα καὶ τεχνωμένη·
ἕρπ΄ ἐς τὸ δεινόν· νῦν ἀγὼν εὐψυχίας.
ὁρᾷς ἃ πάσχεις· οὐ γέλωτα δεῖ σ΄ ὀφλεῖν
τοῖς Σισυφείοις τοῖς τ΄ Ἰάσονος γάμοις͵
γεγῶσαν ἐσθλοῦ πατρὸς Ἡλίου τ΄ ἄπο.
ἐπίστασαι δέ· πρὸς δὲ καὶ πεφύκαμεν
γυναῖκες͵ ἐς μὲν ἔσθλ΄ ἀμηχανώταται͵
409 κακῶν δὲ πάντων τέκτονες σοφώταται.
| [8] Scène VIII – vers 359-409
CORYPHÉE (358-363)
Pheû, pheû
Toi que tes souffrances accablent,
quelle route prendras-tu? Qui t'accueillera?
Une maison ou une terre qui du malheur te sauvera,
La trouveras-tu? Dans quel flot de maux imparables un dieu,
Médée, t'a-t-il engagée?
MÉDÉE (364-409)
(Sombre)
Mon malheur s'est installé partout! Qui dira le contraire?...
(Un long silence, puis Médée se ressaisit)
Mais non, pas du tout! Cela ne se passera pas comme ça! Ne vous le
figurez pas encore!
(365) Ils courent encore des dangers les tout jeunes mariés et la belle-
famille est dans l'attente de souffrances, et pas des moindres.
(Prenant le coryphée à partie)
Crois-tu donc que celui-là je l'aurais flatté si je ne visais pas un profit ou
une machination? Je ne lui aurais pas parlé et je ne lui aurais pas effleuré
les mains. (371- 375) Quel degré de folie il a atteint! Il pouvait anéantir
mes desseins en m'expulsant du pays. Mais non! Il m'a accordé de rester
ici aujoud'hui, le temps d'aligner les cadavres de mes trois ennemis: le
père, la jouvencelle et le mari... le mien !
(S'adressant d'abord à l'ensemble du choeur, puis soliloquant)
(376-385) Je dispose de plusieurs moyens pour les tuer... Je ne sais pas
comment m'y prendre, mes amies... Vais-je bouter le feu à la demeure
nuptiale?... Ou bien leur pousser une lame aiguisée dans le foie, en
m'introduisant sans bruit chez eux, là où est étendue leur couche?
Non! À mon avis, quelque chose ne va pas: si on me surprend quand je
m'introduis chez eux et que j'exécute mon plan, je mourrai en faisant bien
rire mes ennemis!
Le mieux est de prendre le moyen direct, celui où je suis le plus experte:
les supprimer par empoisonnement.
(386-389) Bien. Les voilà morts...
Quelle ville m'accueillera? Quel hôte m'offrira l'asile dans sa terre, la
protection de son foyer et défendra ma personne? Néant!
Je vais attendre encore un peu...
(390-394) Si je découvre un rempart où me trouver en sécurité, j'irai les
tuer par ruse et sans bruit. Mais si la malchance vient irrémédiablement
m'en priver, moi alors je saisirai un poignard et, même si je dois en
mourir, je les tuerai, je recourrai à la force que je tire de mon audace.
(Avec passion)
(395) Non, par la maîtresse que je vénère par-dessus tout et que j'ai
choisie pour m'aider, toi, Hécate, qui séjournes dans l'intimité de mon
foyer, non, aucun d'entre eux n'éprouvera de joie à affliger mon coeur!
Je rendrai amères et pitoyables leurs noces, amers leurs liens et mon exil
de leur sol.
Mais allons-y! N'épargne rien de ce que tu sais, Médée, car c'est toi qui
décides et qui exécutes. Va vers ta redoutable entreprise. C'est
maintenant le moment où jamais de te montrer vaillante. Tu vois ce que
tu es en train de subir. (404-406) Pas question que tu te rendes ridicule à
cause des noces des lignées de Sisyphe et de Jason, toi qui est née d'un
noble père et du Soleil.
Tu as le savoir. (407) De plus, nous les femmes, nous sommes tout à fait
incapables d'agir avec noblesse, mais très expertes à créer tous les maux.
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