HODOI ELEKTRONIKAI
Du texte à l'hypertexte

EURIPIDE, Médée

Scène VII - vers 271-354

 Scène VII - vers 271-354

[7] Scène VII - vers 271-354
(ΚΡΕΩΝ)
σὲ τὴν σκυθρωπὸν καὶ πόσει θυμουμένην͵
Μήδειαν͵ εἶπον τῆσδε γῆς ἔξω περᾶν
φυγάδα͵ λαβοῦσαν δισσὰ σὺν σαυτῇ τέκνα·
καὶ μή τι μέλλειν· ὡς ἐγὼ βραβεὺς λόγου
τοῦδ΄ εἰμί͵ κοὐκ ἄπειμι πρὸς δόμους πάλιν͵
πρὶν ἄν σε γαίας τερμόνων ἔξω βάλω.
(ΜΗΔΕΙΑ) αἰαῖ· πανώλης τάλαιν΄ ἀπόλλυμαι.
ἐχθροὶ γὰρ ἐξιᾶσι πάντα δὴ κάλων͵
κοὐκ ἔστιν ἄτης εὐπρόσοιστος ἔκβασις.
280 ἐρήσομαι δὲ καὶ κακῶς πάσχουσ΄ ὅμως·
τίνος μ΄ ἕκατι γῆς ἀποστέλλεις͵ Κρέον;
(ΚΡΕΩΝ) δέδοικά σ΄—οὐδὲν δεῖ παραμπίσχειν λόγους
μή μοί τι δράσῃς παῖδ΄ ἀνήκεστον κακόν.
συμβάλλεται δὲ πολλὰ τοῦδε δείματος·
σοφὴ πέφυκας καὶ κακῶν πολλῶν ἴδρις͵
λυπῇ δὲ λέκτρων ἀνδρὸς ἐστερημένη.
κλύω δ΄ ἀπειλεῖν σ΄͵ ὡς ἀπαγγέλλουσί μοι͵
τὸν δόντα καὶ γήμαντα καὶ γαμουμένην
δράσειν τι. ταῦτ΄ οὖν πρὶν παθεῖν φυλάξομαι.
290 κρεῖσσον δέ μοι νῦν πρός σ΄ ἀπεχθέσθαι͵ γύναι͵
μαλθακισθένθ΄ ὕστερον μέγα στένειν.
(ΜΗΔΕΙΑ) φεῦ φεῦ.
οὐ νῦν με πρῶτον͵ ἀλλὰ πολλάκις͵ Κρέον͵
ἔβλαψε δόξα μεγάλα τ΄ εἴργασται κακά.
χρὴ δ΄ οὔποθ΄ ὅστις ἀρτίφρων πέφυκ΄ ἀνὴρ
παῖδας περισσῶς ἐκδιδάσκεσθαι σοφούς·
χωρὶς γὰρ ἄλλης ἧς ἔχουσιν ἀργίας
φθόνον πρὸς ἀστῶν ἀλφάνουσι δυσμενῆ.
σκαιοῖσι μὲν γὰρ καινὰ προσφέρων σοφὰ
δόξεις ἀχρεῖος κοὐ σοφὸς πεφυκέναι·
300 τῶν δ΄ αὖ δοκούντων εἰδέναι τι ποικίλον
κρείσσων νομισθεὶς ἐν πόλει λυπρὸς φανῇ.
ἐγὼ δὲ καὐτὴ τῆσδε κοινωνῶ τύχης.
σοφὴ γὰρ οὖσα͵ τοῖς μέν εἰμ΄ ἐπίφθονος͵
τοῖς δ΄ ἡσυχαία͵ τοῖς δὲ θατέρου τρόπου͵
τοῖς δ΄ αὖ προσάντης· εἰμὶ δ΄ οὐκ ἄγαν σοφή.
σὺ δ΄ οὖν φοβῇ με· μὴ τί πλημμελὲς πάθῃς;
οὐχ ὧδ΄ ἔχει μοιμὴ τρέσῃς ἡμᾶς͵ Κρέον
ὥστ΄ ἐς τυράννους ἄνδρας ἐξαμαρτάνειν.
σὺ γὰρ τί μ΄ ἠδίκηκας; ἐξέδου κόρην
310 ὅτῳ σε θυμὸς ἦγεν. ἀλλ΄ ἐμὸν πόσιν
μισῶ· σὺ δ΄͵ οἶμαι͵ σωφρονῶν ἔδρας τάδε.
καὶ νῦν τὸ μὲν σὸν οὐ φθονῶ καλῶς ἔχειν·
νυμφεύετ΄͵ εὖ πράσσοιτε· τήνδε δὲ χθόνα
ἐᾶτέ μ΄ οἰκεῖν. καὶ γὰρ ἠδικημένοι
σιγησόμεσθα͵ κρεισσόνων νικώμενοι.
(ΚΡΕΩΝ) λέγεις ἀκοῦσαι μαλθάκ΄͵ ἀλλ΄ ἔσω φρενῶν
ὀρρωδία μοι μή τι βουλεύσῃς κακόν͵
τόσῳ δέ γ΄ ἧσσον πάρος πέποιθά σοι·
γυνὴ γὰρ ὀξύθυμος͵ ὡς δ΄ αὔτως ἀνήρ͵
320 ῥᾴων φυλάσσειν σιωπηλὸς σοφός.
ἀλλ΄ ἔξιθ΄ ὡς τάχιστα͵ μὴ λόγους λέγε·
ὡς ταῦτ΄ ἄραρε͵ κοὐκ ἔχεις τέχνην ὅπως
μενεῖς παρ΄ ἡμῖν οὖσα δυσμενὴς ἐμοί.
(ΜΗΔΕΙΑ) μή͵ πρός σε γονάτων τῆς τε νεογάμου κόρης.
(ΚΡΕΩΝ) λόγους ἀναλοῖς· οὐ γὰρ ἂν πείσαις ποτέ.
(ΜΗΔΕΙΑ) ἀλλ΄ ἐξελᾷς με κοὐδὲν αἰδέσῃ λιτάς;
(ΚΡΕΩΝ) φιλῶ γὰρ οὐ σὲ μᾶλλον δόμους ἐμούς.
(ΜΗΔΕΙΑ) πατρίς͵ ὥς σου κάρτα νῦν μνείαν ἔχω.
(ΚΡΕΩΝ) πλὴν γὰρ τέκνων ἔμοιγε φίλτατον πολύ.
330 (ΜΗΔΕΙΑ) φεῦ φεῦ͵ βροτοῖς ἔρωτες ὡς κακὸν μέγα.
(ΚΡΕΩΝ) ὅπως ἄν͵ οἶμαι͵ καὶ παραστῶσιν τύχαι.
(ΜΗΔΕΙΑ) Ζεῦ͵ μὴ λάθοι σε τῶνδ΄ ὃς αἴτιος κακῶν.
(ΚΡΕΩΝ) ἕρπ΄͵ ματαία͵ καί μ΄ ἀπάλλαξον πόνων.
(ΜΗΔΕΙΑ) πονοῦμεν ἡμεῖς κοὐ πόνων κεχρήμεθα.
(ΚΡΕΩΝ) τάχ΄ ἐξ ὀπαδῶν χειρὸς ὠσθήσῃ βίᾳ.
(ΜΗΔΕΙΑ) μὴ δῆτα τοῦτό γ΄͵ ἀλλά σ΄ αἰτοῦμαι͵ Κρέον . .
(ΚΡΕΩΝ) ὄχλον παρέξεις͵ ὡς ἔοικας͵ γύναι.
(ΜΗΔΕΙΑ) φευξούμεθ΄· οὐ τοῦθ΄ ἱκέτευσα σοῦ τυχεῖν.
(ΚΡΕΩΝ) τί δαὶ βιάζῃ κοὐκ ἀπαλλάσσῃ χερός;
340 (ΜΗΔΕΙΑ) μίαν με μεῖναι τήνδ΄ ἔασον ἡμέραν
καὶ ξυμπερᾶναι φροντίδ΄ φευξούμεθα͵
παισίν τ΄ ἀφορμὴν τοῖς ἐμοῖς͵ ἐπεὶ πατὴρ
οὐδὲν προτιμᾷ μηχανήσασθαι τέκνοις.
οἴκτιρε δ΄ αὐτούς· καὶ σύ τοι παίδων πατὴρ
πέφυκας· εἰκὸς δ΄ ἐστὶν εὔνοιάν σ΄ ἔχειν.
τοὐμοῦ γὰρ οὔ μοι φροντίς͵ εἰ φευξούμεθα͵
κείνους δὲ κλαίω συμφορᾷ κεχρημένους.
(ΚΡΕΩΝ) ἥκιστα τοὐμὸν λῆμ΄ ἔφυ τυραννικόν͵
αἰδούμενος δὲ πολλὰ δὴ διέφθορα·
350 καὶ νῦν ὁρῶ μὲν ἐξαμαρτάνων͵ γύναι͵
ὅμως δὲ τεύξῃ τοῦδε· προυννέπω δέ σοι͵
εἴ σ΄ ΄πιοῦσα λαμπὰς ὄψεται θεοῦ
καὶ παῖδας ἐντὸς τῆσδε τερμόνων χθονός͵
θανῇ· λέλεκται μῦθος ἀψευδὴς ὅδε.
νῦν δ΄͵ εἰ μένειν δεῖ͵ μίμν΄ ἐφ΄ ἡμέραν μίαν·
οὐ γάρ τι δράσεις δεινὸν ὧν φόβος μ΄ ἔχει.
[7] Scène VII – vers 271-354
CRÉON (271-276) (Criant)
Toi avec ta tête d'enterrement! Toi qui te déchaiînes contre ton mari!
Médée! Je l'ai dit, va-t-en! Hors de ma terre! Pars en exil, prends tes
gosses avec toi! Oui, tous les deux! Tout de suite! Moi, je suis ici pour
faire exécuter cet ordre et je ne rentre pas chez moi avant de t'avoir jetée
hors des limites de mon territoire.
MÉDÉE (277-281)
Aiaî!
On me détruit, misérable que je suis, on me tue! Mes ennemis mobilisent
tout contre moi! (279) Quel havre pour m'arracher à cette malédiction?...
(Se reprenant)
Je te demanderai quand même, tout affligée que je suis: pourquoi me
chasses-tu de ta terre, Créon?
CRÉON (282-291)
J'ai peur de toi... Non, il ne faut pas donner de prétextes... J'ai peur que
tu fasses à mon enfant du mal dont elle ne se remettrait pas. Bien des
raisons se recoupent qui expliquent ma crainte: tu es habile de nature et
tu t'entends à commettre bien des méfaits.Tu souffres aussi d'être exclue
de la couche de ton mari.
J'entends dire que tu menaces - oui, on me le rapporte -, que tu menaces
de t'en prendre à celui qui a accordé sa fille, et au mari, et à la mariée. Je
me protégerai donc avant d'en souffrir. Mieux vaut pour moi me faire
détester de toi, femme, que me laisser fléchir et me répandre plus tard en
lamentations.
MÉDÉE (292-315)
Pheû, pheû
(Se reprenant et prenant peu à peu Créon à partie)
Ce n'est pas seulement maintenant, mais souvent Créon, que ma
renommée m'a fait du tort et m'a causé de grands maux irréparables. Il
ne faut jamais, quand on a du bon sens, faire inculquer à ses enfants un
savoir extraordinaire. Hormis la réputation d'oisifs qu'on leur attribue, ces
enfants attirent l'animosité et l'envie de leurs concitoyens. Car, si tu
proposes à des ignares de nouveaux savoirs, tu passeras pour quelqu'un
d'inutile, mais pas de savant. En revanche, si tu es jugé supérieur à ceux
qui passent pour maîtriser un savoir compliqué, tu paraîtras difficile à
supporter...
Or j'ai moi-même ce sort en partage. Car mon savoir me rend odieuse aux
uns, et me fait passer, par contre, pour hostile aux autres. Or, est-il si
grand le savoir que je maîtrise?
Donc toi, tu me redoutes, tu crains de subir quelque chose de contraire..
(307) Je ne suis pas disposée... - mais ne te mets pas à trembler devant
moi, Créon - ... je suis pas disposée à me mettre en faute vis-à-vis
d'hommes de pouvoir. Car, quel mal m'as tu fait?
Tu as donné ta fille à celui à qui ton coeur te menait...
Mais... c'est mon mari! C'est lui que je hais! Quant à toi, je pense, tu
agissais de manière sensée et, en ce moment, je ne t'en veux pas d'être
dans une situation favorable.
Fêtez ce mariage! Puisse-t-il vous réussir! Mais cette terre, permettez-moi
de l'habiter. Certes, je suis victime de préjudices, mais je me tairai, car de
plus forts ont raison de moi.
CRÉON (316-323)
Qu'elles sont douces à entendre tes paroles! Mais en mon for intérieur, la
frayeur me prend que tu ne médites un forfait. J'en ai d'autant moins
confiance en toi qu'auparavant. Car il est plus facile de se méfier d'une
femme au comble de la colère - d'un homme aussi d'ailleurs - que d'une
rouée qui se tait...
(Un silence, puis soudain Créon explose)
Mais partez donc tout de suite! Plus de discours! C'est décidé une fois
pour toutes et aucun artifice ne réussira à te faire rester auprès de nous
puisque tu m'es hostile.
MÉDÉE (324) (Saisissant les genoux de Créon)
Non! Je t'en supplie par tes genoux! Au nom de la jeune mariée,... de ta
fille...
CRÉON (325) (Repoussant Médée)
Tu parles pour rien! Jamais tu ne pourrais me convaincre!
MÉDÉE (326)
Mais me chasseras-tu sans égard pour mes prières?
CRÉON (327)
Oui, parce que je t'aime moins que ma famille!
MÉDÉE (328)
Ô ma patrie, comme je me souviens de toi en ce moment!
CRÉON (329)
Hormis des enfants, c'est pour moi ce qu'il y a vraiment de plus cher!
MÉDÉE (330)
Pheû, pheû!
Pour les gens quel grand mal que l'amour!
CRÉON (331)
Cela dépend, je crois, des circonstances.
MÉDÉE (332)
Zeus! Pourvu qu'il ne t'échappe pas le responsable de ces maux...
CRÉON (333)
File, espèce de folle et arrête de me faire endurer...
MÉDÉE (334)
Mais c'est moi qui endure et qui n'arrête pas de souffrir...
CRÉON (335)
Mon escorte va t'empoigner et te chasser de force!
(L'escorte s'avance vers Médée)
MÉDÉE (336)
Non! Pas cela! Créon! Je te demande...
CRÉON (337)
Tu veux nous faire des ennuis, n'est-ce pas, femme?
MÉDÉE (338)
Nous partirons en exil! Ce n'est pas pour y échapper que je t'ai supplié...
CRÉON (339) (décontenancé)
Alors pourquoi résistes-tu et ne quittes-tu pas le pays?
MÉDÉE (340-347)
Laisse-moi rester un seul jour, rien qu'aujourd'hui! Je dois réfléchir
comment organiser mon exil et assurer la subsistance de mes enfants
puisque leur père ne songe pas du tout à remédier au sort de ses petits...
Prends-les en pitié, toi qui es aussi père de famille. C'est tout naturel que
tu sois bien disposé à leur égard. Ce n'est pas du tout de mon sort que je
me soucie, si nous partons en exil. Si je pleure, c'est sur eux qui sont
confrontés au malheur.
CRÉON (348-354) (Avec résignation)
Mon pouvoir n'a rien d'une tyrannie et mes scrupules m'ont attiré
beaucoup de déconvenues. Maintenant aussi, je vois, femme, que je me
mets dans l'erreur... Pourtant, tu obtiendras ce que tu demandes...
(Avec rage) Mais je te préviens! Si le prochain lever du dieu Soleil te voit -
et c'est vrai aussi pour tes enfants - en deçà des limites de mon territoire,
tu mourras. Voilà qui est dit sans ambages!
(Créon et son escorte quittent la scène. Médée demeure prostrée. Le
coryphée est en larmes)


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Dernière mise à jour : 30/04/2010