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[2,10] Τιμόθεος, Πλάτωνος διαλεγομένου ἀκούσας, ἧττον εὐδαίμονα ἑαυτὸν
ἔκρινεν.
Τιμόθεον ἀκούω τὸν Κόνωνο,ς τὸν Ἀθηναίων στρατηγόν, ὅτε ἐν ἀκμῇ τῆς
εὐτυχίας ἦν, καὶ ᾕρει τὰς πόλεις ῥᾷστα, καὶ οὐκ εἶχον Ἀθηναῖοι ὅποι ποτὲ αὐτὸν
κατάθωνται ὑπὸ θαύματος τοῦ περὶ τὸν ἄνδρα· ἀλλὰ τοῦτόν γε Πλάτωνι τῷ
Ἀρίστωνος περιτυχόντα, βαδίζοντι ἔξω τοῦ τείχους μετά τινων γνωρίμων, καὶ
ἰδόντα σεμνὸν μὲν ἰδεῖν τὸ πλάτος, ἵλεων δὲ τῷ προσώπῳ, διαλεγόμενον δὲ οὐχὶ
περὶ εἰσφορᾶς χρημάτων, οὐδὲ ὑπὲρ τριήρων, οὐδὲ ὑπὲρ ναυτικῶν χρειῶν, οὐδὲ
ὑπὲρ πληρωμάτων, οὐδὲ ὑπὲρ τοῦ δεῖν βοηθεῖν, οὐδὲ ὑπὲρ φόρου τοῦ τῶν
συμμάχων, οὐδὲ ὑπὲρ τῶν νησιωτῶν, ἢ ὑπὲρ ἄλλου τινὸς τοιούτου φληνάφου·
ὑπὲρ ἐκείνων δέ, ὧν ἔλεγε Πλάτων, καὶ ὑπὲρ ὧν εἴθιστο σπουδάζειν, ἐπιστάντα
τὸν Τιμόθεον τὸν τοῦ Κόνωνος, εἰπεῖν, Ὦ τοῦ βίου, καὶ τῆς ὄντως εὐδαιμονίας. Ἐκ
τούτων οὖν δῆλον, ὡς ἑαυτὸν οὐ πάνυ τι εὐδαίμονα ἀπέφαινεν ὁ Τιμόθεος, ὅτι μὴ
ἐν τούτοις, ἀλλ᾿ ἐν τῇ παρ᾿ Ἀθηναίων δόξῃ καὶ τιμῇ ἦν.
| [2,10] Timothée se crut moins heureux après avoir entendu discourir Platon.
J'APPRENDS que Timothée, fils de Conon, général des Athéniens, dans le temps
même où il était au comble du bonheur, où assiéger une ville et s'en rendre
maître, était pour lui une même chose, où enfin les Athéniens, dans l'excès de
leur admiration pour lui, ne savaient plus à quel degré d'honneur ils devaient
l’élever, rencontra Platon, fils d'Ariston, qui se promenait hors des murs, avec
quelques-uns de ses disciples. En voyant ce philosophe, dont la taille avait je
ne sais quoi d'imposant, qui était tempéré par la douceur de sa physionomie,
discourir, non sur les contributions pécuniaires des citoyens, sur les trirèmes
et les équipements des vaisseaux, sur les soldats et les matelots qui devaient
composer l'embarquement, sur la nécessité d'envoyer des secours, sur les tributs
des alliés, sur les insulaires, et autres objets de cette espèce, mais sur les
matières philosophiques qu'il avait coutume de traiter, et dont il s'occupait
uniquement, j'apprends, dis-je, que le fils de Conon s'écria : "Voilà ce qui
s'appelle vivre, et jouir du véritable bonheur !" Timothée, par cette
exclamation, témoignait clairement qu'il ne se croyait pas lui-même parfaitement
heureux, puisqu'il cherchait le bonheur, non dans les grands objets qui
occupaient Platon, mais dans la gloire et les honneurs dont les Athéniens
pouvaient le combler.
| [2,11] Περὶ τῶν ῥηθέντων ὑπὸ Σωκράτους περὶ τῶν ὑπὸ τῶν Τριάκοντα
σφαττομένων.
Σωκράτης ἰδὼν κατὰ τὴν ἀρχὴν τῶν Τριάκοντα τοὺς ἐνδόξους ἀναιρουμένους,
καὶ τοὺς βαθύτατα πλουτοῦντας ὑπὸ τῶν Τυράννων ἐπιβουλευομένους,
Ἀντισθένει φασὶ περιτυχόντα εἰπεῖν, Μὴ τί σοι μεταμέλει, ὅτι μέγα καὶ σεμνὸν
οὐδὲν ἐγενόμεθα ἐν τῷ βίῳ, καὶ τοιοῦτοι οἵους ἐν τῇ τραγῳδίᾳ τοὺς μονάρχας
ὁρῶμεν, Ἀτρέας τε ἐκείνους, καὶ Θυέστας, καὶ Ἀγαμέμνονας, καὶ Αἰγίσθους;
Οὗτοι μὲν γὰρ ἀποσφαττόμενοι, καὶ ἐκτραγῳδούμενοι, καὶ πονηρὰ δεῖπνα
δειπνοῦντες καὶ ἐσθίοντες ἑκάστοτε ἐκκαλύπτονται· οὐδεὶς δὲ οὕτως ἐγένετο
τολμηρὸς, οὐδὲ ἀναίσχυντος τραγῳδίας ποιητής, ὥστε εἰσαγαγεῖν εἰς δρᾶμα
ἀποσφαττόμενον χοῖρον.
| [2,11] Ce que dit Socrate à l'occasion de ceux que les trente tyrans avaient fait
mourir.
SOCRATE voyant, dit-on, que sous la domination des trente tyrans, les
personnages les plus illustres étaient mis à mort, et que les riches surtout
étaient l'objet des plus rigoureuses recherches, dit un jour à Antisthène qu'il
rencontra : "Êtes-vous bien fâché que dans le cours de notre vie nous n'ayons
rien fait de grand et de mémorable, et que nous ne soyons pas tels que ces rois
si célèbres dans nos tragédies, les Atrée, les Thyeste, les Agamemnon, les
Égisthe, qu'on nous représente toujours, ou déplorant leurs malheurs, ou
assassinés, ou faisant des repas abominables, au lieu que nul poète tragique n'a
eu l'audace et l'effronterie d'introduire dans sa pièce un pourceau qu'on égorge ?"
| [2,12] Περὶ Θεμιστοκλέους παυσαμένου τῆς ἀσωτίας.
Θεμιστοκλέους τοῦ Νεοκλέους, οὐκ οἶδα εἰ ἐπαινεῖν χρὴ τοῦτο. Ἐπεὶ γὰρ τῆς
ἀσωτίας ἐπαύσατο Θεμιστοκλῆς, ἀποκηρυχθεὶς ὑπὸ τοῦ πατρός, καὶ ὑπήρξατο
πως τοῦ σωφρονεῖν, καὶ τῶν μὲν ἑταιρῶν ἀπέστη, ἤρα δὲ ἔρωτα ἕτερον, τὸν τῆς
πολιτείας τῶν Ἀθηναίων, καὶ θερμότατα ἐπεχείρει ταῖς ἀρχαῖς, καὶ ἑαυτὸν
ἔσπευδεν εἶναι πρῶτον, ἔλεγε, φασί, πρὸς τοὺς γνωρίμους, Τί δ᾿ ἂν ἐμοὶ δοίητε,
ὃς οὔπω φθονοῦμαι; Ὅστις δὲ ἐρᾷ φθονεῖσθαι, τοῦτο δή που τὸ τοῦ Εὐριπίδου,
Περιβλέπεσθαι σπεύδει. Ὅτι δὲ τοῦτο ἔστι κενόν, ὁ αὐτὸς Εὐριπίδης φησίν.
| [2,12] Mot de Thémistocle.
JE ne sais si ce que je vais raconter de Thémistocle est digne de quelque
louange. Thémistocle se voyant déshérité par son père, quitta la vie dissolue
qu'il avait menée jusqu'alors, et commença à penser plus sensément; il cessa
surtout d'avoir aucun commerce avec les courtisanes. L'ambition d'entrer dans le
gouvernement d'Athènes remplaça ses anciennes passions. Comme il briguait les
charges de la république avec ardeur, et qu'il aspirait à la première place, on
rapporte qu'il dit un jour à ses amis : "Quel emploi pourriez-vous me donner, à
moi qui n'ai point encore mérité d'avoir des envieux ?" Chercher à exciter
l'envie, c'est désirer, comme dit Euripide, de fixer sur soi les regards du
public; et cela même, ajoute le poète, est une chose bien vaine.
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