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[58,17] τοιαύτης δ´ οὖν τότε τῆς καταστάσεως οὔσης, καὶ μηδ´ ἀπαρνήσασθαί
τινος δυναμένου τὸ μὴ οὐ καὶ τῶν σαρκῶν ἂν αὐτοῦ ἡδέως
ἐμφαγεῖν, γελοιότατον πρᾶγμα τῷ ἑξῆς ἔτει, ᾧ Γναῖος Δομίτιος
καὶ Κάμιλλος Σκριβωνιανὸς ὑπάτευσαν, ἐγένετο. νομιζομένου γὰρ
συχνὸν ἤδη χρόνον μηκέτι κατὰ ἄνδρα τὴν βουλὴν ἐν τῇ νουμηνίᾳ
ὀμνύναι, ἀλλ´ ἑνός, ὥσπερ εἴρηταί μοι, προομνύντος καὶ τοὺς λοιποὺς
συνεπαινεῖν, οὐκ ἐποίησαν αὐτό, ἀλλὰ αὐτεπάγγελτοι, μηδενός
σφας ἀναγκάσαντος, ἰδίᾳ καὶ καθ´ ἑαυτὸν ἕκαστος ἐπιστώθησαν
ὥσπερ τι παρὰ τοῦτο μᾶλλον εὐορκήσοντες. πρότερον μὲν γὰρ καὶ
ἐπὶ πολλὰ ἔτη οὐδ´ ὀμνύντα τινὰ τὰ πρὸς τὴν ἀρχὴν αὐτοῦ φέροντα,
ὥσπερ εἶπον, ἠνέσχετο· τότε δὲ καὶ ἕτερόν τι γελοιότερον
ἐγένετο. προχειρίσασθαί τε γὰρ αὐτὸν ὅσους ἂν ἐθελήσῃ σφῶν,
καὶ ἐξ αὐτῶν εἴκοσιν, οὓς ἂν ὁ κλῆρος ἀποφήνῃ, φρουροῖς, ὁσάκις
ἂν ἐς τὸ βουλευτήριον ἐσίῃ, ξιφίδια ἔχουσι χρῆσθαι ἐψηφίσαντο.
τῶν τε γὰρ ἔξω πρὸς τῶν στρατιωτῶν τηρουμένων καὶ εἴσω μηδενὸς
ἰδιώτου ἐσιόντος, δι´ οὐδένα δῆλον ὅτι ἄλλον, ἀλλὰ δι´ ἑαυτοὺς
μόνους ὡς καὶ πολεμίους οἱ ὄντας τὴν φρουρὰν αὐτῷ δοθῆναι ἔγνωσαν.
| [58,17] Dans une telle disposition des esprits, bien que
personne ne pût nier qu'il n'eût volontiers mangé Tibère
tout crû, il se passa, l'année suivante, celle où Cn. Domitius
et Camillus Scribonianus furent consuls, un fait des
plus ridicules. C'était l'usage depuis longtemps déjà que
les sénateurs ne prêtassent plus, aux calendes de janvier,
le serment individuel ; l'un d'eux, comme je l'ai dit,
prononçait une formule à laquelle les autres membres
adhéraient ; cette fois, il n'en fut pas ainsi : de leur
propre mouvement, sans y être contraints par qui que
ce fût, chacun d'eux s'enchaîna par un serment particulier,
comme si par là le serment devait être plus
saint. Dans les commencements de son règne, en effet,
Tibère, je l'ai dit, et durant plusieurs années, ne souffrait
pas que personne jurât sur ses actes; mais alors il se passa
un autre fait plus ridicule encore. On décréta que l'empereur
choisirait dans l'ordre entier le nombre de sénateurs
qu'il lui plairait, et que vingt d'entre eux, désignés
par le sort, l'escorteraient, l'épée à la main, à son
entrée dans la curie. Le prince étant au dehors gardé
par les soldats et aucun particulier ne pénétrant dans la
curie, ce n'était évidemment pas pour le garantir contre
des étrangers, mais bien contre eux-mêmes, comme
s'ils eussent été ses ennemis, qu'ils adoptèrent la résolution
de lui donner une garde.
| [58,18] ὁ δ´ οὖν Τιβέριος ἐπῄνεσε μὲν αὐτούς, καὶ χάριν δῆθεν
τῆς εὐνοίας σφίσιν ἔγνω, τὸ δὲ δὴ πρᾶγμα ὡς καὶ ἄηθες διεκρούσατο·
οὐ γὰρ οὕτως εὐήθης ἦν ὥστ´ αὐτοῖς γε ἐκείνοις, οὕς τε
ἐμίσει καὶ ὑφ´ ὧν ἐμισεῖτο, ξίφη δοῦναι. ἀμέλει καὶ ἐξ αὐτῶν
τούτων προσυποτοπήσας σφᾶς (πᾶν γὰρ ὅ τι ἄν τις παρὰ τὴν
ἀλήθειαν ἐπὶ κολακείᾳ ποιῇ ὑποπτεύεται) τοῖς μὲν ἐκείνων ψηφίσμασι
μακρὰ χαίρειν ἔφρασε, τοὺς δὲ δορυφόρους καὶ λόγοις καὶ
χρήμασι, καίπερ τὰ τοῦ Σεϊανοῦ φρονήσαντας εἰδώς, ἐτίμησεν, ἵνα
αὐτοῖς προθυμοτέροις κατ´ αὐτῶν χρῆσθαι ἔχῃ. ἔστι μὲν γὰρ ὅτε
καὶ τοὺς βουλευτὰς αὖθις ἐπῄνεσεν, ἐπεί σφισιν ἐκ τοῦ δημοσίου
τὸ ἀργύριον δοθῆναι ἐψηφίσαντο· οὕτω δὲ δὴ ἀκριβῶς τοὺς μὲν
τῷ λόγῳ ἀντεξηπάτα τοὺς δὲ τῷ ἔργῳ προσηταιρίζετο, ὥστε καὶ
Ἰούνιον {Γαλλῆνον} Γαλλίωνα, θέαν τοῖς διαστρατευσαμένοις αὐτῶν
ἐν τῇ τῶν ἱππέων ἕδρᾳ δίδοσθαι ἐσηγησάμενον, μὴ μόνον
φυγαδεῦσαι, αὐτὸ τοῦτο ἐπικληθέντα ὅτι σφᾶς ἀναπείθειν ἐδόκει
τῷ κοινῷ μᾶλλον ἢ ἑαυτῷ εὐνοεῖν, ἀλλὰ καὶ ἐπειδὴ ἔγνω αὐτὸν ἐς
Λέσβον ἀπαίρειν, τῆς τε ἐκεῖ ἀσφαλοῦς εὐδαιμονίας ἀφελέσθαι
καὶ ἐς φυλακὴν τοῖς ἄρχουσιν, ὥσπερ ποτὲ τὸν Γάλλον, παραδοῦναι.
καὶ ἵνα γε ἐπὶ μᾶλλον ἑκατέρους πείσῃ ὅπως περὶ ἀμφοτέρων
αὐτῶν φρονοίη, ᾐτήσατο παρὰ τῆς βουλῆς οὐ πολλῷ ὕστερον
ἀρκεῖν οἱ τόν τε Μάκρωνα καὶ χιλιάρχους ἐς τὸ συνέδριον
ἐσάγεσθαι. οὐ γάρ που καὶ ἐδεῖτό τι αὐτῶν, ὅς γε οὐδὲ ἐς τὴν
πόλιν ἔτι ἐσελθεῖν ἐνενόει, ἀλλὰ τό τε ἐκείνων μῖσος καὶ τὴν τῶν
στρατιωτῶν εὔνοιαν ἐνδείξασθαί σφισιν ἠθέλησε. καὶ τοῦτο καὶ
αὐτοὶ οἱ βουλευταὶ ὡμολόγησαν· τῷ γοῦν δόγματι προσενέγραψαν
ὥστε ἔρευνάν σφων συνιόντων, μὴ καὶ ξιφίδιόν τις ὑπὸ μάλης ἔχῃ,
γίγνεσθαι. τοῦτο μὲν δὴ τῷ ἐχομένῳ ἔτει ἐγνώσθη.
| [58,18] Tibère loua le sénat et lui rendit gràce de son
dévouement, mais il rejeta la chose comme insolite ; il
n'était pas assez simple, en effet, pour donner des armes
à des gens qu'il haïssait et dont il était lui-même fortement haï.
Se méfiant d'eux, rien que pour ces propositions
(tout ce qui se fait par flatterie aux dépens de
la vérité inspire le soupçon), il dit un long adieu à leurs
décrets, et accorda aux soldats prétoriens, bien qu'il sût
qu'ils avaient été du parti de Séjan, des éloges et des
largesses, afin d'augmenter leurs dispositions à le servir
contre le sénat. Cela ne l'empêcha pas de louer de
nouveau les sénateurs pour avoir décrété que cette gratification
serait prise sur le trésor public; car il mettait
tant d'adresse à tromper les uns par ses paroles et à se
concilier les autres par ses actions, que Junius Gallion,
pour avoir proposé que les prétoriens vétérans eussent
le droit de s'asseoir, aux jeux, dans les places réservées
aux chevaliers, fut non seulement exilé, rien que pour
ce chef, attendu qu'il semblait vouloir, par cette proposition,
les attacher à l'État plus qu'à la personne de l'empereur;
mais que, de plus, lorsque le prince apprit qu'il
faisait voile pour Lesbos, il fut enlevé au bonheur qu'il
aurait goûté en sûreté dans cette île, et remis, comme
autrefois Gallus, à la garde des magistrats. Puis, afin de
mieux montrer aux sénateurs et aux soldats sa pensée à
leur égard, il demanda, peu de temps après, au sénat de
trouver suffisant qu'il fit entrer avec lui dans la curie
Macron et dix tribuns militaires. Ce n'était pas qu'il eût
aucun besoin d'eux, puisque son intention était de ne
jamais rentrer dans Rome, il voulait seulement donner
une marque de sa haine contre les sénateurs et de sa bienveillance
pour les soldats. Sa demande fut accordée, et
on inséra, en outre, dans le décret, que les sénateurs seraient
fouillés en entrant, de peur qu'ils ne cachassent
un poignard sous leur aisselle. Ce sénatus-consulte fut
rendu l'année suivante.
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