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[58,9] ἐπ´ οὖν τούτοις ἔτι καὶ μᾶλλον αὐτοῦ κατεφρόνησαν, ὥστε καὶ
φανερώτερον ἢ λανθάνειν καὶ ἐξίστασθαι αὐτὸν καὶ ἐγκαταλείπειν.
μαθὼν οὖν ταῦτα ὁ Τιβέριος, καὶ θαρσήσας ὡς καὶ τὸν δῆμον καὶ τὴν βουλὴν
συμμάχους ἕξων, ἐπεχείρησεν αὐτῷ· καὶ προκαθεὶς τὸν λόγον ὅτι τήν τε
ἐξουσίαν οἱ τὴν δημαρχικὴν δώσοι, ὅπως ἀπροσδόκητον αὐτὸν ὅτι μάλιστα
λάβῃ, ἐπέστειλε κατ´ αὐτοῦ τῷ συνεδρίῳ διὰ Ναιουίου Σερτωρίου
Μάκρωνος, ἄρχειν τε αὐτὸν τῶν σωματοφυλάκων κρύφα
προκαταστήσας, καὶ πάνθ´ ὅσα ἐχρῆν πραχθῆναι προδιδάξας. καὶ
ὃς νύκτωρ ἐς τὴν Ῥώμην ὡς καὶ κατ´ ἄλλο τι ἐλθών, τά τε ἐπεσταλμένα
οἱ Μεμμίῳ τε Ῥηγούλῳ τότε ὑπατεύοντι (ὁ γὰρ συνάρχων
αὐτοῦ τὰ τοῦ Σεϊανοῦ ἐφρόνει) καὶ Γραικινίῳ Λάκωνι τῷ τῶν
νυκτοφυλάκων ἄρχοντι ἐπεκοίνωσε, καὶ ἀναβὰς ἅμα τῇ ἕῳ ἐς τὸ
παλάτιον (τῆς γὰρ βουλῆς ἕδρα ἐν τῷ Ἀπολλωνίῳ γενήσεσθαι ἔμελλε)
τῷ τε Σεϊανῷ μηδέπω ἐς αὐτὸ ἐσεληλυθότι περιέπεσε, καὶ ἰδὼν
αὐτὸν ταραττόμενον ὅτι μηδέν οἱ ὁ Τιβέριος ἐπεστάλκει, παρεμυθήσατο
εἰπὼν ἰδίᾳ καὶ ἐν ἀπορρήτῳ ὅτι τὴν ἐξουσίαν αὐτῷ τὴν
δημαρχικὴν φέροι. καὶ ὁ μὲν περιχαρὴς ἐπὶ τούτῳ γενόμενος ἐς
τὸ βουλευτήριον ἐσεπήδησε· Μάκρων δὲ τοὺς μὲν δορυφόρους τοὺς
περί τε ἐκεῖνον καὶ τὸ συνέδριον ὄντας ἐς τὸ στρατόπεδον ἀπέπεμψε,
τήν τε ἡγεμονίαν σφίσι τὴν ἑαυτοῦ ἐκφήνας καὶ γράμματα παρὰ
τοῦ Τιβερίου γέρα τινὰ αὐτοῖς διδόντα φέρειν φήσας, τοὺς δὲ δὴ
νυκτοφύλακας ἀντ´ αὐτῶν περὶ τὸν ναὸν περιστήσας ἐσῆλθέ τε ἐς
αὐτόν, καὶ τὴν ἐπιστολὴν τοῖς ὑπάτοις δοὺς ἐξῆλθε πρὶν καὶ ὁτιοῦν
ἀναγνωσθῆναι, αὐτῷ τε τῷ Λάκωνι τἀνταῦθα φυλάττειν προστάξας
αὐτὸς ἐς τὸ στρατόπεδον, μὴ καὶ νεωτερισθείη τι, ὥρμησε.
| [58,9] Ces mesures augmentèrent encore le mépris pour
Séjan ; en sorte que la défection et l'abandon devinrent
trop évidents pour ne pas être aperçus. Informé de ces
faits et enhardi par la persuasion qu'il aurait le sénat et
le peuple pour auxiliaires, Tibère attaqua Séjan : prétextant,
afin de le surprendre le plus possible à l'improviste,
la puissance tribunitienne qu'il veut lui donner,
il charge d'une lettre contre lui pour le sénat Naevius
Sertorius Macron, à qui il avait secrètement confié le
commandement des gardes prétoriennes, et enseigné à
l'avance tout ce qu'il fallait faire. Celui-ci étant entré
de nuit dans Rome, comme s'il y venait pour un autre
motif, communiqua ses ordres à Memmius Régulus,
alors consul (le collègue de Régulus était dans les intérêts
de Séjan), et à Grécinus Lacon, chef des Vigiles; puis
étant, au point du jour, monté au Palatin, où le sénat
devait tenir séance dans le temple d'Apollon, il y rencontra
Séjan, qui n'était pas encore entré, et, le voyant
inquiet de ce que Tibère ne lui avait pas écrit, il le
consola en lui annonçant, en particulier et loin de tous
témoins, qu'il lui apportait la puissance tribunitienne.
Séjan, transporté de joie à cette nouvelle, s'élança dans
le sénat; Macron alors renvoya dans leur camp les prétoriens
qui entouraient Séjan et l'assemblée, après leur
avoir fait connaître qu'il était leur chef, et leur avoir déclaré
qu'il est porteur d'un décret de Tibère qui récompense
leurs services : ensuite, quand il leur eut substitué
les Vigiles autour du temple, il y entra lui-même, et en
ressortit, la lettre du prince remise aux consuls, avant
qu'on en eût commencé la lecture : ayant, après cela,
chargé Lacon de veiller en ce lieu, il se rendit au camp,
afin de prévenir toute tentative de révolte.
| [58,10] κἀν τούτῳ ἡ ἐπιστολὴ ἀνεγνώσθη. ἦν δὲ μακρά, καὶ οὐδὲν ἀθρόον
κατὰ τοῦ Σεϊανοῦ εἶχεν, ἀλλὰ τὰ μὲν πρῶτα ἄλλο τι, εἶτα μέμψιν
κατ´ αὐτοῦ βραχεῖαν, καὶ μετ´ αὐτὴν ἕτερόν τι, καὶ κατ´ ἐκείνου
ἄλλο· καὶ ἐπὶ τελευτῆς δύο τε βουλευτὰς τῶν ᾠκειωμένων οἱ κολασθῆναι
καὶ αὐτὸν ἐν φρουρᾷ γενέσθαι δεῖν ἔλεγεν. ἄντικρυς
γὰρ ἀποθανεῖν αὐτὸν ὁ Τιβέριος οὐ προσέταξεν, οὐχ ὅτι οὐκ ἐβούλετο,
ἀλλ´ ὅτι ἐφοβήθη μὴ ταραχή τις ἐκ τούτου γένηται· ὡς γοῦν
οὐδὲ τὴν ὁδὸν ἀσφαλῶς ποιήσασθαι δυνάμενος, τὸν ἕτερον τῶν
ὑπάτων μετεπέμψατο. τοσαῦτα μὲν ἡ γραφὴ ἐδήλου, παρῆν δὲ
καὶ ἀκοῦσαι ἐπ´ αὐτῇ καὶ ἰδεῖν πολλὰ καὶ ποικίλα. πρότερον μὲν
γάρ, πρὶν ἀναγιγνώσκεσθαι αὐτήν, ἐπαίνους τε αὐτοῦ ὡς καὶ τὴν
δημαρχικὴν ἐξουσίαν ληψομένου ἐποιοῦντο καὶ ἐπιβοήμασιν ἐχρῶντο,
προλαμβάνοντες ὅσα ἤλπιζον, καὶ προσενδεικνύμενοί οἱ ὡς καὶ αὐτοὶ
αὐτὰ δώσοντες· ἐπεὶ δ´ οὐδὲν τοιοῦτον εὑρίσκετο, ἀλλὰ καὶ
πᾶν τοὐναντίον ἢ προσεδόκων ἤκουον, ἔν τε ἀπορίᾳ καὶ μετὰ τοῦτο
καὶ ἐν κατηφείᾳ πολλῇ ἐγίγνοντο. καί τινες καὶ ἐξανέστησαν τῶν
συγκαθημένων αὐτῷ· ὃν γὰρ πρόσθεν περὶ πολλοῦ φίλον ἔχειν ἐποιοῦντο,
τούτῳ τότε οὐδὲ τῆς αὐτῆς συνεδρείας κοινωνεῖν ἤθελον.
κἀκ τούτου καὶ στρατηγοὶ καὶ δήμαρχοι περιέσχον αὐτόν, ὅπως μὴ
συνταράξῃ τι ἐκπηδήσας· ὅπερ πάντως ἂν ἐπεποιήκει, εἰ κατ´ ἀρχὰς
ἀθρόῳ τινὶ ἀκούσματι ἐπέπληκτο. νῦν δὲ τό τε ἀεὶ ἀναγιγνωσκόμενον
ὡς καὶ κοῦφον καὶ μόνον ὂν παρορῶν, καὶ μάλιστα μὲν
μηδὲν ἄλλο, εἰ δὲ μή, μήτι γε καὶ ἀνήκεστόν τι ἐπεστάλθαι περὶ
αὑτοῦ ἐλπίζων, διετρίβη καὶ κατὰ χώραν ἔμεινε. κἀν τούτῳ προσκαλεσαμένου
αὐτὸν τοῦ Ῥηγούλου οὐχ ὑπήκουσεν, οὐχ ὅτι ὑπερεφρόνησεν
(ἤδη γὰρ ἐτεταπείνωτο) ἀλλ´ ὅτι ἀήθης τοῦ προστάττεσθαί
τι ἦν. ὡς δὲ καὶ δεύτερον καὶ τρίτον γε ἐκεῖνος ἐμβοήσας οἱ καὶ
τὴν χεῖρα ἅμα ἐκτείνας εἶπε "Σεϊανὲ δεῦρο ἐλθέ," ἐπηρώτησεν αὐτὸν
αὐτὸ τοῦτο, "ἐμὲ καλεῖς;" ὀψὲ δ´ οὖν ποτε ἀναστάντι αὐτῷ
καὶ ὁ Λάκων ἐπεσελθὼν προσέστη. καὶ τέλος διαναγνωσθείσης
τῆς ἐπιστολῆς πάντες ἀπὸ μιᾶς γλώσσης καὶ κατεβόων αὐτοῦ καὶ
δεινὰ ἐπέλεγον, οἱ μὲν ἠδικημένοι οἱ δὲ πεφοβημένοι, ἄλλοι τὴν
φιλίαν τὴν πρὸς αὐτὸν ἐπηλυγαζόμενοι, ἄλλοι τῇ μεταβολῇ αὐτοῦ
ἐπιχαίροντες. οὐ μὴν οὔτε πάντας αὐτοὺς οὔτε περὶ τοῦ θανάτου
τινὰ αὐτοῦ ὁ Ῥήγουλος ἐπεψήφισε, φοβηθεὶς μή τις ἐναντιωθῇ
κἀκ τούτου καὶ ταραχθῇ τι (συχνοὺς γὰρ δὴ καὶ συγγενεῖς καὶ
φίλους εἶχεν)· ἀλλ´ ἕνα τινὰ ἀνακρίνας καὶ σύμψηφον ὅπως δεθῇ
λαβών, ἐξήγαγέ τε αὐτὸν ἐκ τοῦ συνεδρίου καὶ ἐς τὸ δεσμωτήριον
μετά τε τῶν ἄλλων ἀρχόντων καὶ μετὰ τοῦ Λάκωνος κατήγαγεν.
| [58,10] Pendant ce temps, on lut la lettre. Elle était longue,
et les griefs contre Séjan n'y étaient pas présentés réunis;
il y était d'abord question d'une chose étrangère;
venaient ensuite quelques mots de blâme contre le favori;
puis, autre chose encore; puis, une nouvelle attaque :
la lettre se terminait par l'ordre de châtier deux
sénateurs dévoués à Séjan et de mettre Séjan lui-même
en garde. S'il ne commanda pas ouvertement de le faire
mourir, ce ne fut pas manque de le vouloir, ce fut
crainte d'exciter par là des troubles; bien plus, comme
s'il ne pouvait faire la route en sûreté, il demanda que
l'un des deux consuls se rendît auprès de lui. Tel était
le contenu de la lettre : on put alors voir et entendre
mille choses diverses. Avant la lecture du message, on
prodiguait les éloges à Séjan prêt à recevoir la puissance
tribunitienne; c'étaient en sa faveur des acclamations
qui lui promettaient à l'avance les dignités dont on espérait
le voir revêtu, et lui témoignaient les dispositions
où chacun était de lui donner ce qu'il désirait : mais,
comme rien ne se trouvait conforme aux espérances
qu'on avait conçues ; que, loin de là, on entendait des
choses toutes contraires à celles sur lesquelles on comptait,
l'hésitation d'abord, puis l'abattement, s'emparèrent
des esprits. Quelques-uns des sénateurs assis près de lui
se levèrent : celui dont auparavant ils estimaient si haut
l'amitié, ils ne voulaient plus même siéger sur le même
banc que lui. Dès-lors les préteurs et les tribuns l'entourèrent,
de peur qu'il n'excitàt quelque émeute, en s'élanlançant
hors du sénat; ce qu'il n'eût pas manqué de faire
si, dans le principe, les griefs fussent venus réunis frapper
ses oreilles. Mais comme, à mesure qu'on en lisait
un, il y prêtait peu d'attention, vu que ce grief était peu
grave et isolé, et surtout qu'il se flattait de l'espérance
que le message ne contenait rien autre chose contre lui,
ou, tout au moins, rien d'irrémédiable, il laissa le temps
s'écouler et demeura en place. Sur ces entrefaites, Régulus
l'ayant appelé, il n'obéit pas : ce ne fut point par
mépris (son orgueil était déjà tombé), mais il n'était pas
habitué à recevoir des ordres. Régulus, en même temps
qu'il portait la main sur lui, ayant une seconde et une
troisième fois répété le commandement : "Séjan, viens
ici", Séjan se contenta de lui adresser cette seule question :
"C'est moi que tu appelles?" et lorsque, bien que
tardivement, il se fut enfin levé, Lacon, qui venait d'entrer,
se plaça à ses côtés. La lecture de la lettre terminée,
tous, d'une seule voix, firent retentir leurs clameurs
et leurs malédictions contre lui; les uns par esprit de
vengeance, les autres par crainte ; ceux-ci dissimulaient
leur ancienne amitié, ceux-là se réjouissaient de sa
disgrâce. Régulus s'abstint de prendre l'avis de tous les
sénateurs et même de les consulter sur la mort de Séjan,
de peur de rencontrer de l'opposition et d'exciter
des troubles, car Séjan avait là des parents et des amis;
mais, se contentant de poser à chacun la question de
mettre le coupable dans les fers, et ayant obtenu leur
assentiment, il l'emmena de l'assemblée, et, accompagné
des autres magistrats et de Lacon, il le conduisit dans la prison.
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