[52,7] ἓν μὲν δὴ τοῦτο τοιοῦτον ὂν πράγματά σοι παρέξει, ἕτερον δὲ
ἐκεῖνο. πάντως μέν τινα δεῖ δίκην τὸν ἀεὶ κακουργοῦντα διδόναι·
οὔτε γὰρ ἐκ νουθεσίας οὔτε ἐκ παραδειγμάτων οἱ πολλοὶ σωφρονίζονται,
ἀλλὰ ἀνάγκη πᾶσα αὐτοὺς καὶ ἀτιμίᾳ καὶ φυγῇ καὶ θανάτῳ
ζημιοῦσθαι, οἷα ἔν τε ἀρχῇ τηλικαύτῃ καὶ ἐν πλήθει ἀνθρώπων
τοσούτῳ, ἄλλως τε καὶ ἐν μεταβολῇ πολιτείας, φιλεῖ συμβαίνειν.
τούτοις δ´ ἂν μὲν ἑτέρους δικαστὰς καθίζῃς, ἀπολύοιντό τε ἂν
διασπευδόμενοι, καὶ μάλιστα ὅσους ἂν ἐχθραίνειν νομισθῇς· καὶ
γὰρ προσποίησίν τινα ἐξουσίας οἱ δικάζοντες λαμβάνουσιν, ὅταν τι
παρὰ τὸ δοκοῦν τῷ κρατοῦντι ποιήσωσι· κἂν ἄρα τινὲς ἁλίσκωνται,
διὰ σὲ δόξουσιν ἐκ κατασκευάσματος κατεψηφίσθαι. ἂν δ´
αὐτὸς δικάζῃς, πολλοὺς ἀναγκασθήσῃ καὶ τῶν ὁμοτίμων κολάζειν
(τοῦτο δὲ οὐκ εὐτυχές), καὶ πάντως τινὰς αὐτῶν ὀργῇ μᾶλλον ἢ
δικαιώσει δόξεις εὐθύνειν· τοὺς γὰρ βιάζεσθαι δυναμένους οὐδεὶς
δικάζοντας δικαιοπραγεῖν πιστεύει, ἀλλ´ οἴονται πάντες αὐτοὺς
σχῆμα καὶ σκιαγραφίαν πολιτείας αἰσχύνῃ πρὸ τῆς ἀληθείας προπεταννύντας,
ὀνόματι ἐννόμῳ δικαστηρίου τὴν ἑαυτῶν ἐπιθυμίαν
ἀποπιμπλάναι. ἐν μὲν οὖν ταῖς μοναρχίαις ταῦθ´ οὕτω γίγνεται·
ἐν δὲ δὴ ταῖς δημοκρατίαις, ἄν τ´ ἰδίᾳ τις ἀδικεῖν αἰτίαν λάβῃ,
ἰδίαν δίκην παρὰ δικασταῖς ἴσοις φεύγει, ἄν τε δημοσίᾳ, καὶ ἐκείνῳ
δικασταὶ καθίζουσιν ἐκ τῶν ὁμοίων οὓς ἂν ὁ κλῆρος ἀποδείξῃ, ὥστε
ῥᾷον τὰ ἀποβαίνοντα ἀπ´ αὐτῶν τοὺς ἀνθρώπους φέρειν, μήτ´
ἰσχύι δικαστοῦ μήτε χάριτι ἀναγκαστῇ νομίζοντάς τι πεπονθέναι.
| [52,7] «Voilà donc une des choses de nature à te susciter
des embarras; en voici une autre. Il faut de toutes les
façons que les malfaiteurs soient châtiés; ni les avertissements,
ni les exemples, ne rendent sages la plupart
des hommes, et il est de toute nécessité de les punir
par l'infamie, par l'exil et par la mort, ainsi qu'il arrive
ordinairement dans un empire si étendu, au milieu
d'une si grande multitude d'habitants, et surtout
dans un changement de gouvernement. Si tu établis
d'autres citoyens que toi pour les juger, ils s'empresseront
d'absoudre les criminels, et principalement ceux
que tu regarderas comme tes ennemis; car les juges se
donnent un simulacre d'indépendance, lorsqu'ils agissent
contre les intentions de celui qui a l'autorité : si
quelques criminels sont condamnés, la sentence rendue
contre eux passera pour l'avoir été frauduleusement,
à ton instigation. Si, d'un autre côté, tu juges
toi-même, tu seras forcé, chose malheureuse, de punir
plusieurs de ceux qui te sont égaux en dignité, et,
de toutes les façons, tu sembleras sévir contre eux
par colère plus que par justice; car ceux qui sont en
position de faire violence, personne ne croit qu'ils
suivent la justice dans les jugements ; tous s'imaginent
qu'ils interposent, par honte, au-devant de la vérité,
un simulacre et une ombre de gouvernement, pour
pouvoir, sous le nom d'un tribunal établi d'après les
lois, contenter leur désir. Voilà comment les choses se
passent dans les monarchies. Dans les gouvernements
populaires, si quelqu'un est accusé comme particulier,
c'est une cause particulière qu'il défend devant
des juges qui sont ses égaux; s'il est accusé au nom
de l'Etat, ceux qui siégent pour le juger sont ceux de
ses pareils que le sort a désignés : de façon que les
citoyens supportent plus aisément les résultats de la
décision, convaincus qu'ils ne subissent aucun arrêt
de la force ni de la faveur.
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