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[46,8] ταῦτα μὲν οὖν
ἐάσω, καὶ νὴ Δία καὶ τὸν Γαβίνιον, ᾧ τοὺς κατηγόρους παρασκευάσας
ἔπειτα οὕτω συνεῖπες ὥστ´ αὐτὸν καταδικασθῆναι, τά τε
συγγράμματα ἃ κατὰ τῶν φίλων συγγράφεις, ἐφ´ οἷς οὕτω σαυτῷ
ἀδικοῦντι σύνοισθα ὥστε μηδὲ δημοσιεύειν αὐτὰ τολμᾶν. καίτοι
καὶ σχετλιώτατον καὶ ἐλεεινότατόν ἐστι μὴ δύνασθαι ταῦτα ἀρνήσασθαι
ἃ πάντων αἴσχιστόν ἐστιν ὁμολογῆσαι. ἀλλ´ ἐγὼ ταῦτα
μὲν παραλείψω, τὰ δὲ δὴ λοιπὰ ἐπεξάξω. ἡμεῖς μὲν γάρ, καίπερ
δισχίλια τῷ διδασκάλῳ πλέθρα τῆς Λεοντίνων γῆς, ὡς φῄς, δεδωκότες,
οὐδὲν ἄξιον αὐτῶν ἐμάθομεν· τὰ δὲ δὴ σὰ παιδεύματα
τίς οὐκ ἂν θαυμάσειεν; τίνα δ´ ἐστὶ ταῦτα; φθονεῖς ἀεὶ τῷ κρείττονι,
βασκαίνεις ἀεὶ τὸν προήκοντα, διαβάλλεις τὸν προτετιμημένον,
συκοφαντεῖς τὸν δεδυνημένον, καὶ μισεῖς μὲν τοὺς ἀγαθοὺς
ὁμοίως πάντας, προσποιῇ δὲ δὴ φιλεῖν ἐκείνους μόνους δι´ ὧν
ἂν κακουργήσειν τι προσδοκήσῃς. καὶ διὰ τοῦτο τούς τε νεωτέρους
ἐπὶ τοὺς πρεσβυτέρους ἀεὶ παροξύνεις, καὶ τοὺς πιστεύοντάς
σοι καὶ ὁτιοῦν ἐς κινδύνους προαγαγὼν προλείπεις.
| [46,8] Je laisse donc ce sujet, et aussi, par Jupiter,
Gabinius, que tu as, après lui avoir suscité des
accusateurs, si bien défendu qu'il a été condamné. Je ne
parlerai pas, non plus, des écrits que tu as composés
contre tes amis, et que tu n'oses pas publier, tant tu as la
conscience de ta perversité. Et pourtant rien de plus
affreux, de plus digne de pitié que de ne pouvoir nier
des choses dont l'aveu est la plus grande de toutes les
hontes. Mais je laisse de côté ces considérations; je ne
m'occuperai que du reste. Si nous, bien que nous avons,
comme tu le dis, donné deux mille plèthres à notre
maître dans le territoire des Léontins, nous n'avons rien
appris qui les vaille, comment ne pas admirer le talent
que tu possèdes? Quel talent? celui de toujours envier
qui vaut mieux que toi, de jalouser toujours qui est au-dessus
de toi, de calomnier qui t'est préféré, de déchirer
qui est au pouvoir, de haïr tous les gens de bien
indistinctement, de ne rechercher que ceux à l'aide
desquels tu comptes faire tes coups. C'est pour cela que
tu excites sans cesse les jeunes contre les vieux, et que
tu abandonnes, après les avoir poussés dans le danger,
ceux qui mettent en toi la moindre confiance.
| [46,9] τεκμήριον δέ, πρᾶξιν μὲν οὐδεμίαν πώποτε ἐλλογίμου ἀνδρὸς ἀξίαν,
οὔτ´ ἐν πολέμῳ οὔτε ἐν εἰρήνῃ, πέπραχας· ποίους μὲν γὰρ πολέμους
ἐνικήσαμεν σοῦ στρατηγοῦντος, ποίαν δὲ χώραν ἐκτησάμεθα σοῦ ὑπατεύοντος;
ἐξαπατῶν δὲ ἀεί τινας τῶν πρώτων καὶ σφετεριζόμενος
ἰδίᾳ μὲν διὰ τούτων πολιτεύῃ καὶ πάνθ´ ὅσα βούλει διοικεῖς,
δημοσίᾳ δὲ βοᾷς ἄλλως, κεκραγὼς τοὺς μιαροὺς ἐκείνους λόγους
‘ἐγὼ μόνος ὑμᾶς φιλῶ,’ καὶ εἰ οὕτω τύχοι, ‘καὶ ὁ δεῖνα, οἱ δ´
ἄλλοι πάντες μισοῦσι,’ καὶ ‘ἐγὼ μόνος ὑμῖν εὐνοῶ, οἱ δ´ ἄλλοι
πάντες ἐπιβουλεύουσι,’ καὶ τὰ ἄλλα τὰ τοιαῦτα, ἐξ ὧν τοὺς μὲν
ἐπαίρων καὶ φυσῶν προδίδως, τοὺς δὲ λοιποὺς ἐκπλήττων προστίθεσαι.
κἂν μέν τι χρηστὸν ὑφ´ ὁτουδὴ τῶν πάντων γένηται,
ἀντιποιῇ τε αὐτοῦ καὶ σεαυτὸν ἐπ´ αὐτὸ ἐπιγράφεις, θρυλῶν
‘ἐγὼ γὰρ εἶπον, ἐγὼ γὰρ ἔγραψα, καὶ δι´ ἐμὲ ταῦτα οὕτω πέπρακται·’
ἂν δέ τι συμβῇ οἷον οὐκ ἔδει, σαυτὸν μὲν ἐξαιρεῖς, τοὺς
δὲ δὴ ἄλλους πάντας αἰτιᾷ, λέγων ‘μὴ γὰρ ἐστρατήγουν ἐγώ; μὴ
γὰρ ἐπρέσβευον; μὴ γὰρ ὑπάτευον;’ καὶ λοιδορεῖς μὲν ἀεὶ πάντας
πανταχοῦ, τὴν ἐκ τοῦ θρασέως παρρησιάζεσθαι δοκεῖν δύναμιν
περὶ πλείονος τοῦ τι τῶν δεόντων εἰπεῖν ποιούμενος, ἔργον δὲ
δὴ ῥήτορος οὐδὲν ἄξιον λόγου παρέχῃ.
| [46,9] La preuve, c'est que tu n'as jamais, ni dans la
guerre, ni dans la paix, accompli aucune action digne
d'un homme estimable. Quelle victoire, en effet, avons-nous
remportée sous ta conduite? quel pays avons-nous
conquis sous ton consulat? Circonvenant sans cesse et
accaparant quelques-uns des premiers citoyens, tu
gouvernes par leur entremise, et tu administres tout à
ton gré; en public, tu cries à tort et à travers, nous
assourdissant de ces abominables paroles : « Moi seul,
je vous aime, ainsi qu'un tel (suivant l'occasion); tous
les autres vous haïssent; » ou bien encore : « Moi seul,
j'ai pour vous de la bienveillance; tous les autres vous
tendent des embûches ; » et autres paroles de la sorte,
au moyen desquelles tu trahis les uns en les exaltant et
en les remplissant d'orgueil, tandis que tu frappes les
autres de crainte, afin de les attirer à toi. L'un de nous
tous, quel qu'il soit, a-t-il remporté un succès, tu
t'inscris pour une part : « Je l'avais bien dit, répètes-tu;
c'est moi qui ai rédigé le décret, c'est par mes conseils
que cela s'est fait ainsi.» Est-il, au contraire, arrivé un
malheur, tu te mets en dehors, tu accuses tous les autres :
« Était-ce moi, dis-tu alors, qui étais à la tête de
l'armée? était-ce moi qui étais ambassadeur? était-ce
moi qui étais consul? » Partout, toujours, tu injuries tout
le monde, estimant la puissance de la parole plus parce
qu'elle te donne l'apparence d'une audacieuse franchise,
que parce qu'elle te permet d'ouvrir un avis utile;
comme orateur, tu n'as donc rien fait qui mérite mention.
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