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[37,55] καὶ οὐδὲ τοῦτ´ αὐτῷ ἀπέχρησεν, ἀλλὰ καὶ αὐτοὺς ἐκείνους συνήλλαξεν,
οὐχ ὅτι συνενεχθῆναί σφας ἤθελεν, ἀλλ´ ὅτι δυνατωτάτους
τε ἑώρα ὄντας, καὶ εὖ ἠπίστατο ὅτι οὔτε χωρὶς τῆς παρ´ ἐκείνων
ἀμφοτέρων ἢ καὶ θατέρου βοηθείας μέγα τι ἰσχύσει, κἂν τὸν ἕτερον
ὁποτερονοῦν αὐτῶν προσεταιρίσηται, ἀνταγωνιστήν τε διὰ
τοῦτο τὸν ἕτερον ἕξει καὶ πλέον ὑπ´ αὐτοῦ σφαλήσεται ἢ ὑπὸ τοῦ
συναιρομένου οἱ κατεργάσεται. τοῦτο μὲν γὰρ προθυμότερον ἐδόκουν
αὐτῷ πάντες ἄνθρωποι τοῖς ἐχθροῖς ἀντιπράττειν ἢ συναγωνίζεσθαι
τοῖς ἐπιτηδείοις, οὐ κατ´ ἐκεῖνο μόνον ὅτι ἥ τε ὀργὴ καὶ
τὸ μῖσος σφοδροτέρας τὰς σπουδὰς πάσης φιλίας ποιεῖ, ἀλλὰ καὶ
ὅτι ὁ μὲν ὑπὲρ ἑαυτοῦ ὁ δὲ ὑπὲρ ἑτέρου πράττων τήν τε ἡδονὴν
κατορθώσας καὶ τὴν λύπην σφαλεὶς οὐχ ὁμοίας ἔχουσιν· τοῦτο δὲ
προχειρότερον ἐμποδίζειν τέ τινας καὶ κωλύειν μηδεμίαν αὔξησιν
λαβεῖν ἢ ἐπὶ μέγα προάγειν ἐθέλειν, διά τε τἆλλα καὶ μάλισθ´ ὅτι
ὁ μὲν οὐκ ἐῶν τινα αὐξηθῆναι τοῖς τε ἄλλοις ἅμα καὶ ἑαυτῷ χαρίζεται,
ὁ δὲ ἐξαίρων τινὰ ἐπαχθῆ αὐτὸν ἀμφοτέροις σφίσι ποιεῖ.
| [37,55] Cela ne lui suffit pas : il rétablit la concorde entre
Pompée et Crassus, non qu'il désirât les voir vivre en
bonne intelligence, mais parce qu'ils étaient très
puissants. Il savait que, si le secours de tous les deux ou
même d'un seul lui manquait, il ne pourrait avoir un
grand crédit ; et que s'il mettait l'un, n'importe lequel,
dans ses intérêts, l'autre deviendrait par cela même un
antagoniste qui lui nuirait plus que celui qu'il aurait
gagné ne lui serait utile. D'une part, tous les hommes lui
paraissaient avoir plus d'ardeur pour combattre leurs
ennemis que pour soutenir leurs amis, non seulement
parce que la colère et la haine inspirent de plus
énergiques efforts que l’amitié ; mais aussi parce que
celui qui agit pour lui-même et celui qui agit pour un
autre n'éprouvent ni la même satisfaction s'ils
réussissent, ni la même peine s'ils échouent. D'autre part,
il voyait qu'on est plus porté à susciter des obstacles à un
homme et à l'empêcher de s'élever, qu'à favoriser son
élévation ; et cela pour diverses raisons, mais surtout
parce qu'en ne lui permettant pas de s'élever, on est
agréable aux autres et utile à soi-même ; tandis qu'en
l'élevant, ou en fait un embarras et pour soi-même et
pour les autres.
| [37,56] τούτων δὴ οὖν ἕνεκα καὶ ὁ Καῖσαρ τότε τε αὐτοὺς ὑπῆλθε
καὶ μετὰ τοῦτο ἀλλήλοις κατήλλαξεν. οὔτε γὰρ δίχα τούτων δυνήσεσθαί
τι ἀεὶ καὶ οὐκ ἂν θατέρῳ ποτὲ αὐτῶν προσκροῦσαι ἐνόμιζεν,
οὔτ´ αὖ ἐφοβήθη μὴ καὶ συμφρονήσαντες κρείττους αὐτοῦ
γένωνται· πάνυ γὰρ εὖ ἠπίστατο ὅτι τῶν μὲν ἄλλων εὐθὺς διὰ τῆς
ἐκείνων φιλίας, αὐτῶν δ´ οὐ πολλῷ ὕστερον δι´ ἀλλήλων κρατήσοι.
καὶ ἔσχεν οὕτως. {τούτων} μὲν οὖν ἕνεκα καὶ συνεβίβασεν αὐτοὺς
καὶ προσεποιήσατο. καὶ γὰρ ὁ Πομπήιος ὅ τε Κράσσος ὡς ἀπ´
οἰκείας καὶ αὐτοὶ αἰτίας πρός τε ἀλλήλους, ἐπειδὴ τάχιστα ὥρμησαν,
κατελύσαντο καὶ ἐκεῖνον ἐς τὴν κοινωνίαν τῶν πραγμάτων
προσέλαβον. {ὁ} Πομπήιος μὲν γὰρ οὔτ´ αὐτὸς ὅσον ἤλπισεν ἰσχύων,
καὶ τὸν Κράσσον ἐν δυνάμει ὄντα τόν τε Καίσαρα αὐξανόμενον
ὁρῶν, καὶ ἔδεισε μὴ παντάπασιν ὑπ´ αὐτῶν καταλυθῇ, καὶ ἐπήλπισε,
προσκοινωνήσας σφίσι τῶν παρόντων, τὴν ἀρχαίαν δι´ αὐτῶν
ἐξουσίαν ἀναλήψεσθαι· Κράσσος δὲ ἠξίου τε πάντων ἀπό τε τοῦ
γένους καὶ ἀπὸ τοῦ πλούτου περιεῖναι, καὶ ἐπειδὴ τοῦ τε Πομπηίου
παρὰ πολὺ ἠλαττοῦτο καὶ τὸν Καίσαρα ἐπὶ μέγα ἀρθήσεσθαι ἐνόμιζεν,
ἐς ἀντίπαλον αὐτοὺς ἀλλήλοις καταστῆσαι ἠθέλησεν, ὅπως
μηδέτερός σφων ὑπέρσχῃ, προσδοκήσας ἐκείνους τε ἀνταγωνιστὰς
ἰσοκρατεῖς ἔσεσθαι, καὶ αὐτὸς ἐν τούτῳ τήν τε ἑκατέρου φιλίαν
ἐκκαρπώσεσθαι καὶ ὑπὲρ ἀμφοτέρους τιμηθήσεσθαι. ἀκριβῶς μὲν
γὰρ οὔτε τὰ τοῦ πλήθους οὔτε τὰ τῆς βουλῆς ἐπολίτευεν, τῆς δὲ
ἰδίας αὐτοῦ δυναστείας ἕνεκα πάντ´ ἔπραττε, καὶ διὰ τοῦθ´ ὑπήρχετό
τε ἀμφοτέρους σφᾶς ὁμοίως καὶ τὴν πρὸς ἑκατέρους ἔχθραν
ἐξέκλινεν, ἐπὶ τοσοῦτον ἐν τῷ μέρει κεχαρισμένα ἀμφοῖν σπουδάζων
ἐφ´ ὅσον ἤμελλε τοῦ μὲν καταθυμίου παντὸς ἑκατέροις αἰτιαθήσεσθαι,
τῶν δὲ δυσχερεστέρων μὴ μεταλήψεσθαι.
| [37,56] Telles furent les considérations qui déterminèrent
alors César à s'insinuer dans les bonnes grâces de
Pompée et de Crassus et à rétablir la concorde entre eux.
Il était convaincu qu'il ne pourrait jamais devenir
puissant sans eux, et il espérait ne jamais les choquer ni
l'un ni l'autre. II ne craignait pas non plus qu'une fois
réconciliés ils devinssent plus puissants que lui ; sachant
bien qu'avec leur amitié il s'élèverait tout de suite au-dessus
des autres, et que bientôt après ils contribueraient
l'un et l'autre à le rendre plus puissant qu'eux : ce qui
arriva en effet. Voilà dans quel but César les réconcilia et
chercha à se les attacher. De leur côté, Pompée et
Crassus, mus par des considérations personnelles, firent
la paix, aussitôt qu'ils se furent abouchés, et associèrent
César à leurs projets. Pompée n'était pas aussi puissant
qu'il avait espéré le devenir : en même temps il voyait
que Crassus jouissait d'un grand crédit, que César
prenait chaque jour plus d'influence, et il craignait d'être
brisé par eux. Enfin il se flattait qu'en s'unissant
présentement avec eux, il pourrait avec leur concours
recouvrer son ancienne puissance. Crassus s'imaginait
que sa naissance et ses richesses devaient le placer au-dessus
de tous : très inférieur à Pompée et convaincu que
César était appelé à un grand rôle, il chercha à les mettre
en lutte l'un contre l'autre ; afin que ni l'un ni l'autre ne
fût plus puissant que lui. Il comptait pouvoir, pendant
qu'ils se combattraient avec des forces égales, mettre leur
amitié à profit et obtenir de plus grands honneurs
qu'eux. Crassus, en effet, ne se proposait dans sa vie
politique ni le triomphe du sénat, ni celui du peuple : il
n'avait en vue que sa puissance et, pour arriver à son
but, il cherchait à se concilier également le sénat et le
peuple, à ne point encourir leur haine, et à complaire
tour à tour à l'un et à l'autre, autant qu'il le fallait pour
être regardé comme l'auteur de ce qui leur était agréable,
sans qu'ils pussent lui imputer ce qui leur arrivait de fâcheux.
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