[7,40] καὶ τοιαῦτα ποιῶν
τοὺς ταλαιπώρους ἰδιώτας οἴεται δεῖν ἀπαγαγεῖν, ἵνα δῆλον
ὅτι μηδεὶς ἐργάζηται τὸ λοιπόν, ἀλλ´ οἱ μὲν ἔξω λῃστεύωσιν, οἱ
δ´ ἐν τῇ πόλει λωποδυτῶσιν. ἐμοὶ δέ, ἔφη, δοκεῖ τούτους ἐᾶν
ἐφ´ οἷς αὐτοὶ πεποιήκασιν, ὑποτελοῦντας τὸ λοιπὸν ὅσον μέτριον,
περὶ δὲ τῶν ἔμπροσθεν προσόδων συγγνῶναι αὐτοῖς, ὅτι ἔρημον
καὶ ἀχρεῖον γεωργήσοντες τὴν γῆν κατελάβοντο. ἐὰν δὲ τιμὴν θέλωσι
καταβαλεῖν τοῦ χωρίου, ἀποδόσθαι αὐτοῖς ἐλάττονος ἢ ἄλλοις.
(7,41) εἰπόντος δὲ αὐτοῦ τοιαῦτα, πάλιν ὁ ἐξ ἀρχῆς ἐκεῖνος ἀντέλεγεν,
καὶ ἐλοιδοροῦντο ἐπὶ πολύ. τέλος δὲ καὶ ἐμὲ ἐκέλευον εἰπεῖν ὅ, τι βούλομαι.
Καὶ τί με, ἔφην, δεῖ λέγειν; Πρὸς τὰ εἰρημένα, εἶπέ τις τῶν
καθημένων. Οὐκοῦν λέγω, ἔφην, ὅτι οὐθὲν ἀληθές ἐστιν ὧν εἴρηκεν.
(7,42) ἐγὼ μὲν, ὦ ἄνδρες, ἐνύπνια ᾤμην, ἔφην, ὁρᾶν, ἀγροὺς καὶ
κώμας καὶ τοιαῦτα φλυαροῦντος. ἡμεῖς δὲ οὔτε κώμην ἔχομεν οὔτε
ἵππους οὔτε ὄνους οὔτε βοῦς. εἴθε γὰρ ἦν ἔχειν ἡμᾶς ὅσα οὗτος
ἔλεγεν ἀγαθά, ἵνα καὶ ὑμῖν ἐδώκαμεν καὶ αὐτοὶ τῶν μακαρίων ἦμεν.
καὶ τὰ νῦν δὲ ὄντα ἡμῖν ἱκανά ἐστιν, ἐξ ὧν εἴ τι βούλεσθε λάβετε·
κἂν πάντα ἐθέλητε, ἡμεῖς ἕτερα κτησόμεθα. ἐπὶ τούτῳ δὲ τῷ λόγῳ ἐπῄνεσαν.
(7,43) εἶτα ἐπηρώτα με ὁ ἄρχων τί δυνησόμεθα
δοῦναι τῷ δήμῳ; κἀγώ, Τέσσαρα, ἔφην, ἐλάφεια δέρματα πάνυ
καλά. οἱ δὲ πολλοὶ αὐτῶν ἐγέλασαν. ὁ δὲ ἄρχων ἠγανάκτησε πρός
με. Τὰ γὰρ ἄρκεια, ἔφην, σκληρά ἐστιν καὶ τὰ τράγεια οὐκ ἄξια
τούτων, ἄλλα δὲ παλαιά, τὰ δὲ μικρὰ αὐτῶν· εἰ δὲ βούλεσθε, κἀκεῖνα
λάβετε. πάλιν οὖν ἠγανάκτει καὶ ἔφη με ἄγροικον εἶναι παντελῶς.
(7,44) κἀγώ, Πάλιν, εἶπον, αὖ καὶ σὺ ἀγροὺς λέγεις; οὐκ ἀκούεις
ὅτι ἀγροὺς οὐκ ἔχομεν; ὁ δὲ ἠρώτα με εἰ τάλαντον ἐκάτερος
Ἀττικὸν δοῦναι θέλοιμεν. ἐγὼ δὲ εἶπον, Οὐχ ἵσταμεν τὰ κρέα
ἡμεῖς· ἃ δ´ ἂν ᾖ, δίδομεν. ἔστι δὲ ὀλίγα ἐν ἁλσί, τἄλλα δ´ ἐν
τῷ καπνῷ ξηρά, οὐ πολὺ ἐκείνων χείρω, σκελίδες ὑῶν καὶ ἐλάφειοι
καὶ ἄλλα γενναῖα κρέα.
(7,45) ἐνταῦθα δὴ ἐθορύβουν καὶ ψεύδεσθαί με
ἔφασαν. ὁ δὲ ἠρώτα με εἰ σῖτον ἔχομεν καὶ πόσον τινά. εἶπον
τὸν ὄντα ἀληθῶς· Δύο, ἔφην, μεδίμνους πυρῶν καὶ τέτταρας κριθῶν
καὶ τοσούτους κέγχρων, κυάμων δὲ ἡμίεκτον· οὐ γὰρ ἐγένοντο
τῆτες. τοὺς μὲν οὖν πυροὺς καὶ τὰς κριθάς, ἔφην, ὑμεῖς λάβετε, τὰς
δὲ κέγχρους ἡμῖν ἄφετε. εἰ δὲ κέγχρων δεῖσθε, καὶ ταύτας λάβετε.
(7,46) Οὐδὲ οἶνον ποιεῖτε; ἄλλος τις ἠρώτησεν. Ποιοῦμεν, εἶπον. ἂν οὖν
τις ὑμῶν ἀφίκηται, δώσομεν· ὅπως δὲ ἥξει φέρων ἀσκόν τινα·
ἡμεῖς γὰρ οὐκ ἔχομεν. Πόσαι γάρ τινές εἰσιν ὑμῖν ἄμπελοι; Δύο
μέν, ἔφην, αἱ πρὸ τῶν θυρῶν, ἔσω δὲ τῆς αὐλῆς εἴκοσι· καὶ τοῦ
ποταμοῦ πέραν ἃς ἔναγχος ἐφυτεύσαμεν, ἕτεραι τοσαῦται· εἰσὶ δὲ
γενναῖαι σφόδρα καὶ τοὺς βότρυς φέρουσι μεγάλους, ὅταν οἱ παριόντες
ἐπαφῶσιν αὐτούς.
(7,47) ἵνα δὲ μὴ πράγματα ἔχητε καθ´ ἕκαστον
ἐρωτῶντες, ἐρῶ καὶ τἄλλα ἅ ἐστιν ἡμῖν· αἶγες ὀκτὼ θήλειαι, βοῦς
κολοβή, μοσχάριον ἐξ αὐτῆς πάνυ καλόν, δρέπανα τέτταρα, δίκελλαι
τέτταρες, λόγχαι τρεῖς, μάχαιραν ἡμῶν ἑκάτερος κέκτηται πρὸς τὰ
θηρία. τὰ δὲ κεράμια σκεύη τί ἂν λέγοι τις; καὶ γυναῖκες ἡμῖν
εἰσι καὶ τούτων τέκνα. οἰκοῦμεν δὲ ἐν δυσὶ σκηναῖς καλαῖς· καὶ
τρίτην ἔχομεν, οὗ κεῖται τὸ σιτάριον καὶ τὰ δέρματα.
(7,48) Νὴ Δία,
εἶπεν ὁ ῥήτωρ, ὅπου καὶ τὸ ἀργύριον ἴσως κατορύττετε. Οὐκοῦν,
ἔφην, ἀνάσκαψον ἐλθών, ὦ μῶρε. τίς δὲ κατορύττει ἀργύριον;
οὐ γὰρ δὴ φύεταί γε. ἐνταῦθα πάντες ἐγέλων, ἐκείνου μοι
δοκεῖν καταγελάσαντες. Ταῦτα ἔστιν ἡμῖν· εἰ οὖν καὶ πάντα θέλετε,
ἡμεῖς ἑκόντες ὑμῖν χαριζόμεθα, καὶ οὐδὲν ὑμᾶς ἀφαιρεῖσθαι
δεῖ πρὸς βίαν ὥσπερ ἀλλοτρίων ἢ πονηρῶν·
(7,49) ἐπεί τοι καὶ πολῖται
τῆς πόλεώς ἐσμεν, ὡς ἐγὼ τοῦ πατρὸς ἤκουον. καί ποτε ἐκεῖνος
δεῦρο ἀφικόμενος, ἐπιτυχὼν ἀργυρίῳ διδομένῳ, καὶ αὐτὸς ἔλαβεν
ἐν τοῖς πολίταις. οὐκοῦν καὶ τρέφομεν ὑμετέρους πολίτας τοὺς
παῖδας. κἄν ποτε δέησθε, βοηθήσουσιν ὑμῖν πρὸς λῃστὰς ἢ πρὸς
πολεμίους. νῦν μὲν οὖν εἰρήνη ἐστίν· ἐὰν δέ ποτε συμβῇ καιρὸς
τοιοῦτος, εὔξεσθε τοὺς πολλοὺς φανῆναι ὁμοίους ἡμῖν. μὴ γὰρ
δὴ τοῦτόν γε τὸν ῥήτορα νομίζετε μαχεῖσθαι τότε περὶ ὑμῶν, εἰ
μή γε λοιδορούμενον ὥσπερ τὰς γυναῖκας.
| [7,40] « Et cependant, continue
l’orateur, il vient, il ose demander l’exil de pauvres gens du peuple!
sans doute pour que personne ne travaille désormais, et qu’on ne voie
plus, hors de la ville, que des voleurs et des brigands, au dedans que des
complices de leurs rapines! En deux mots, voici mon avis: vous devez
laisser à ces gens les possessions qu’ils se sont acquises, à condition
néanmoins qu’ils paieront à l’avenir une rétribution modique. Quant à
celles dont, par le passé, ils sont redevables, on les en doit tenir
quittes ; ils les ont assez payées en rendant à la culture des terres
abandonnées. Que si vous voulez qu’ils en paient le prix, au moins
faites-leur des conditions plus favorables qu’à d’autres. » Ainsi parla
mon défenseur. Il avait à peine cessé, que l’autre se leva pour lui
répondre, d’où suivit entre eux un conflit de paroles et d’injures. Enfin
ils se turent, et l’on m’ordonna de parler.
« Que faut-il que je dise? demandai-je. — Répondez à ce qu’on a dit contre
vous, me cria quelqu’un de l’assemblée. — En ce cas, repris-je, je dis
qu’il n’y a pas un mot de vrai dans toutes les paroles de cet autre.
(7,42) En vérité, citoyens, je croyais rêver en l’entendant parler de richesses, de
terres, de châteaux, et répéter toutes les niaiseries dont il a rempli vos
oreilles. Le fait est que nous n’avons ni terres, ni châteaux, ni haras,
ni troupeaux, ni bêtes de somme. Plût au ciel que nous eussions toutes ces
belles choses! car nous serions plus riches que nous ne le sommes, et nous
aurions la satisfaction de partager avec vous nos richesses. Au reste, ce
que nous avons nous suffit: si, par hasard, vous en voulez quelque chose,
prenez-le, et si vous voulez le tout, prenez le tout: nous chercherons
ailleurs de quoi pourvoir à notre subsistance. » Ces paroles plurent à
l’assemblée, qui les accueillit avec applaudissements.
(7,43) Puis un archonte,
s’adressant à moi: « Que pouvez-vous donner au peuple? me dit-il. —Nous
pouvons donner au peuple, répondis-je, quatre peaux de cerf, mais des
peaux superbes, en vérité. » Tout le monde se mit à rire: l’archonte seul
parut indigné. « Nous ne vous offrirons pas, ajoutai-je, nos peaux d’ours,
elles sont trop rudes; ni celles de boucs, qui ne valent pas les peaux de
cerf. Quant aux autres, elles sont toutes vieilles ou petites. Si
cependant vous les voulez aussi, prenez-les avec les premières. »
L’indignation de l’archonte s’accrut à ces derniers mots, et avec le plus
grand emportement: « On voit bien, s’écria-t-il, que vous êtes un rustre,
et que vous n’avez jamais vécu qu’aux champs. — Eh quoi! lui dis-je, vous
aussi vous parlez de champs! Ne vous ai je pas dit vingt fois que nous
n’avions ni champs, ni terres? faut-il le répéter encore? » — il ne
m’écouta pas; mais m’interpellant de nouveau: « Pourrez-vous au moins,
reprit-il, donner chacun un talent attique? — Point du tout: nous
n’avons pas une si grosse quantité de viande; mais ce que nous en avons
vous sera remis. Quelque peu de salées, d’autres morceaux séchés à la
fumée; quelques jambons de porc et de cerf qui ne valent guère moins,
enfin d’autres excellentes pièces. »
(7,45) — Ici grand tumulte, et plusieurs
voix de m’appeler menteur. Le magistrat continuât et me demanda si nous
possédions du blé, et en quelle quantité: « Nous avons, lui répondis-je,
douze boisseaux de froment, quatre d’orge, autant de millet, et seulement
un demi septier de fèves, la récolte n’ayant pas été bonne cette année.
Prenez, ajoutai-je, si vous le voulez, le froment, l’orge, et les fèves;
mais laissez-nous le millet. Que si vous avez besoin du millet, qu’il soit
à vous avec le reste.
(7,46) — Ne faites-vous pas de vin? me demanda un autre.
—Nous en faisons, lui dis-je: si quelqu’un de vous veut se donner la peine
de venir jusque chez nous, nous lui en donnerons; mais il faut qu’il ait
soin de se munir d’une outre, car il n’en trouvera pas à notre logis. —
Vous avez donc des vignes? me dit-on. — Assurément, répondis-je: nous en
avons deux devant la porte de l’habitation, et une vingtaine dans
l’intérieur de la cour. De l’autre côté du ruisseau, il y en a à peu près
un pareil nombre que nous plantâmes l’an dernier. Elles sont toutes d’une
excellente qualité, et donnent de belles grappes, quand les passants ne
commettent aucun dégât.
(7,47) En un mot, ajoutai-je, pour vous épargner la peine
de faire tant de questions les unes après les autres, voici de quoi se
compose le reste de notre ménage: huit chèvres d’abord, puis une vache
mutilée, avec son veau: c’est un joli petit animal. Nos instruments sont
quatre hoyaux, autant de fourches, autant de faux, trois épieux, et deux
couteaux de chasse pour moi et mon compagnon. Il n’est pas besoin, que je
pense, de parler de la poterie. Nous avons chacun une femme et de enfants.
Notre habitation consiste en deux huttes très propres et très agréables,
qui nous servent de logement, et une troisième où nous déposons nos
provisions et le produit de notre chasse.
(7,48) Par Jupiter! s’écria le rhéteur,
peut-être nous diras-tu enfin où vous enfouissez votre argent? — Enfouir
de l’argent ! m’écriai-je; viens donc, insensé, viens l’enfouir toi-même!
Qui s’est avisé jamais d’enfouir de l’argent? comme s’il pouvait pousser
quelque chose à la place! » — Cette réponse excita de grands éclats de
rire: il me sembla à moi que c’était du rhéteur qu’on riait. — « Voilà
donc, continuai-je, tout ce que nous possédons. Si vous voulez le tout,
nous vous l’abandonnerons avec plaisir; mais au moins ne nous l’enlevez
pas par violence, comme si nous étions des étrangers ou des méchants: car
nous sommes citoyens de cette ville, tout comme vous: c’est mon père qui
me l’a dit. Il n’y a pas bien longtemps qu’étant venu ici, il assista à
une distribution d’argent, et reçut sa part comme les autres citoyens. Nos
enfants sont aussi vos concitoyens; nous les élevons pour la patrie, et
ils sauront la défendre contre les brigands et les étrangers. Vous êtes en
paix maintenant; mais que l’occasion se présente seulement, et vous
souhaiterez que tout le monde fasse comme nous. Car n’espérez pas que ce
rhéteur s’arme alors pour votre défense, à moins qu’il ne faille combattre
avec des paroles et des injures, à la manière des femmes.
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