HODOI ELEKTRONIKAI
Du texte à l'hypertexte

DION CHRYSOSTOME, Discours Eubéen ou Le Chasseur (discours VII) ; traductions française et anglaise)

Paragraphes 30-39

  Paragraphes 30-39

[7,30] ἐγὼ δὲ ἀκούσας ἐγέλασα ὅσον ἐδυνάμην μέγιστον. τὸ δὲ πλῆθος οὐκέτ´ ἐγέλων, ὥσπερ πρότερον, ἀλλ´ ἐθορύβουν. δὲ ἄνθρωπος { ῥήτωρ} ἐχαλέπαινε, καὶ δεινὸν ἐμβλέψας εἰς ἐμὲ εἶπεν, Ὁρᾶτε τὴν εἰρωνείαν καὶ τὴν ὕβριν τοῦ καθάρματος, ὡς καταγελᾷ πάνυ θρασέως; ὃν ἀπάγειν ὀλίγου δέω καὶ τὸν κοινωνὸν αὐτοῦπυνθάνομαι γὰρ δύο εἶναι τοὺς κορυφαίους τῶν κατειληφότων ἅπασαν (7,31) σχεδὸν τὴν ἐν τοῖς ὄρεσι χώρανοἶμαι γὰρ αὐτοὺς μηδὲ τῶν ναυαγίων ἀπέχεσθαι τῶν ἑκάστοτε ἐκπιπτόντων, ὑπὲρ αὐτὰς σχεδόν τι τὰς Καφηρίδας οἰκοῦντας. πόθεν γὰρ οὕτως πολυτελεῖς ἀγρούς, μᾶλλον δὲ ὅλας κώμας κατεσκευάσαντο καὶ τοσοῦτον πλῆθος βοσκημάτων καὶ ζεύγη καὶ ἀνδράποδα; (7,32) καὶ ὑμεῖς δὲ ἴσως ὁρᾶτε αὐτοῦ τὴν ἐξωμίδα ὡς φαύλη, καὶ τὸ δέρμα, ἐλήλυθε δεῦρο ἐναψάμενος τῆς ὑμετέρας ἕνεκεν ἀπάτης, ὡς πτωχὸς δῆλον ὅτι καὶ οὐδὲν ἔχων. ἐγὼ μὲν γάρ, ἔφη, βλέπων αὐτὸν μικροῦ δέδοικα, ὥσπερ οἶμαι τὸν Ναύπλιον ὁρῶν ἀπὸ τοῦ Καφηρέως ἥκοντα. καὶ γὰρ οἶμαι πυρσεύειν αὐτὸν ἀπὸ τῶν ἄκρων τοῖς πλέουσιν, ὅπως ἐκπίπτωσιν εἰς τὰς πέτρας. (7,33) ταῦτα δὲ ἐκείνου λέγοντος καὶ πολλὰ πρὸς τούτοις, μὲν ὄχλος ἠγριοῦτο· ἐγὼ δὲ ἠπόρουν καὶ ἐδεδοίκειν μή τί με ἐργάσωνται κακόν. παρελθὼν δὲ ἄλλος τις, ὡς ἐφαίνετο, ἐπιεικὴς ἄνθρωπος ἀπό τε τῶν λόγων οὓς εἶπε καὶ ἀπὸ τοῦ σχήματος πρῶτον μὲν ἠξίου σιωπῆσαι τὸ πλῆθος· καὶ ἐσιώπησαν· ἔπειτα εἶπε τῇ φωνῇ πρᾴως ὅτι οὐδὲν ἀδικοῦσιν οἱ τὴν ἀργὸν τῆς χώρας ἐργαζόμενοι καὶ κατασκευάζοντες, (7,34) ἀλλὰ τοὐναντίον ἐπαίνου δικαίως ἂν τυγχάνοιεν· καὶ δεῖ μὴ τοῖς οἰκοδομοῦσι καὶ φυτεύουσι τὴν δημοσίαν γῆν χαλεπῶς ἔχειν, ἀλλὰ τοῖς καταφθείρουσιν. ἐπεὶ καὶ νῦν, ἔφη, ἄνδρες, σχεδόν τι τὰ δύο μέρη τῆς χώρας ἡμῶν ἔρημά ἐστι δι´ ἀμέλειάν τε καὶ ὀλιγανθρωπίαν. κἀγὼ πολλὰ κέκτημαι πλέθρα, ὥσπερ οἶμαι καὶ ἄλλος τις, οὐ μόνον ἐν τοῖς ὄρεσιν, ἀλλὰ καὶ ἐν τοῖς πεδινοῖς, εἴ τις ἐθέλοι γεωργεῖν, οὐ μόνον ἂν προῖκα δοίην, ἀλλὰ καὶ ἀργύριον ἡδέως προστελέσαιμι. (7,35) δῆλον γὰρ ὡς ἐμοὶ πλέονος ἀξία γίγνεται, καὶ ἅμα ἡδὺ ὅραμα χώρα οἰκουμένη καὶ ἐνεργός· δ´ ἔρημος οὐ μόνον ἀνωφελὲς κτῆμα τοῖς ἔχουσιν, ἀλλὰ καὶ σφόδρα ἐλεεινόν τε καὶ δυστυχίαν τινὰ κατηγοροῦν τῶν δεσποτῶν. (7,36) ὥστε μοι δοκεῖ μᾶλλον ἑτέρους προτρέπειν, ὅσους ἂν δύνησθε τῶν πολιτῶν, ἐργάζεσθαι τῆς δημοσίας γῆς ἀπολαβόντας, τοὺς μὲν ἀφορμήν τινα ἔχοντας πλείω, τοὺς δὲ πένητας, ὅσην ἂν ἕκαστος δυνατός, ἵνα ὑμῖν τε χώρα ἐνεργὸς καὶ τῶν πολιτῶν οἱ θέλοντες δύο τῶν μεγίστων ἀπηλλαγμένοι κακῶν, ἀργίας καὶ πενίας. (7,37) ἐπὶ δέκα μὲν οὖν ἔτη προῖκα ἐχόντων· μετὰ δὲ τοῦτον τὸν χρόνον ταξάμενοι μοῖραν ὀλίγην παρεχέτωσαν ἀπὸ τῶν καρπῶν, ἀπὸ δὲ τῶν βοσκημάτων μηδέν. ἐὰν δέ τις ξένος γεωργῇ, πέντε ἔτη καὶ οὗτοι μηδὲν ὑποτελούντων, ὕστερον δὲ διπλάσιον οἱ πολῖται. ὃς δὲ ἂν ἐξεργάσηται τῶν ξένων διακόσια πλέθρα, πολίτην αὐτὸν εἶναι, ἵνα ὡς πλεῖστοι ὦσιν οἱ προθυμούμενοι. (7,38) ἐπεὶ νῦν γε καὶ τὰ πρὸ τῶν πυλῶν ἄγρια παντελῶς ἐστι καὶ αἰσχρὰ δεινῶς, ὥσπερ ἐν ἐρημίᾳ τῇ βαθυτάτῃ, οὐχ ὡς προάστιον πόλεως· τὰ δέ γε ἐντὸς τείχους σπείρεται τὰ πλεῖστα καὶ κατανέμεται. οὐκοῦν ἄξιον, ἔφη, θαυμάσαι τῶν ῥητόρων, ὅτι τοὺς μὲν ἐπὶ τῷ Καφηρεῖ φιλεργοῦντας ἐν τοῖς ἐσχάτοις τῆς Εὐβοίας συκοφαντοῦσι, τοὺς δὲ τὸ γυμνάσιον γεωργοῦντας καὶ τὴν ἀγορὰν κατανέμοντας οὐδὲν οἴονται ποιεῖν δεινόν. (7,39) βλέπετε γὰρ αὐτοὶ δήπουθεν ὅτι τὸ γυμνάσιον ὑμῖν ἄρουραν πεποιήκασιν, ὥστε τὸν Ἡρακλέα καὶ ἄλλους ἀνδριάντας συχνοὺς ὑπὸ τοῦ θέρους ἀποκεκρύφθαι, τοὺς μὲν ἡρώων, τοὺς δὲ θεῶν· καὶ ὅτι καθ´ ἡμέραν τὰ τοῦ ῥήτορος τούτου πρόβατα ἕωθεν εἰς τὴν ἀγορὰν ἐμβάλλει καὶ κατανέμεται τὰ περὶ τὸ βουλευτήριον καὶ τὰ ἀρχεῖα· ὥστε τοὺς πρῶτον ἐπιδημήσαντας ξένους τοὺς μὲν καταγελᾶν τῆς πόλεως, τοὺς δὲ οἰκτίρειν αὐτήν. πάλιν οὖν ταῦτα ἀκούσαντες ὠργίζοντο πρὸς ἐκεῖνον καὶ ἐθορύβουν. [7,30] — En entendant ces mots, je ne pus m’empêcher de rire. Mais cette fois le peuple ne riait plus: il paraissait agité et tumultueux. L’orateur, de son côté, avec un air d’indignation et me jetant un regard terrible: « Voyez, s’écria-t-il, voyez l’audace de ce coquin! l’impudent n’ose-t-il pas se moquer de cette vénérable assemblée? Je ne sais qui me tient de le faire conduire en prison lui et son complice: car j’apprends qu’ils sont deux chefs principaux de cette bande qui infeste nos montagnes. Bien plus, citoyens, faut-il vous dire tout ce que je pense? J’ai de fortes raisons de soupçonner que leurs mains ne respectent même pas les malheureux que la tempête jette sur les écueils de Capharée, voisins de leur demeure. Car enfin, d’où pourraient leur venir tant de champs fertiles, tant d’habitations magnifiques, tant de troupeaux, d’attelages, d’esclaves? (7,32) Peut-être avez-vous été étonnés de la simplicité de son extérieur, et du peu de valeur de la peau qui le couvre. Mais ce n’est là qu’un grossier artifice; il veut vous en imposer, et vous faire croire à sa pauvreté. Mais il n’a pas trompé mes regards; et j’ai pâli à sa vue, comme à celle de Nauplius même, arrivant de Capharée. Oui, citoyens, croyez-moi, il est certain que ces hommes allument des feux trompeurs au haut de leurs rochers et qu’ils attirent par là sur les écueils les navigateurs qui voguent dans ces parages. » (7,33) Ces paroles avaient porté au plus haut point l’indignation du peuple. Pour moi, je me troublais, et je commençais à craindre qu’ils ne me fissent du mal, quand tout à coup un autre homme se lève du milieu de l’assemblée; sa mine et ses discours annonçaient une personne douce et bien élevée. Ayant demandé et obtenu silence, il commença en ces termes « Mes concitoyens, je ne conçois pas les reproches qu’on adresse à ceux qui défrichent et labourent les parties autrefois incultes de notre territoire. Il me semble que, s’il y a lieu de s’indigner contre quelqu’un, c’est apparemment contre les auteurs de la stérilité et de l’abandon de nos terres, (7,34) et non contre les hommes laborieux qui les cultivent et les embellissent. Vous le savez, notre négligence et le défaut de population ont laissé incultes les deux tiers de notre île. Je possède, pour ma part, un grand nombre de terres en friche, soit dans la montagne, soit dans la plaine! Eh bien, si quelqu’un consent à les mettre en valeur, non seulement je les lui donnerai pour rien, mais j’y ajouterai de l’argent de ma bourse, (7,35) et encore croirai-je avoir gagné à ce marché. En effet, citoyens, y a-t-il au monde un spectacle plus beau, plus ravissant, que celui d’une terre riche et bien cultivée? Est-il rien de plus triste et de plus affligeant au contraire que la vue d’une terre inculte, inutile, et dont la stérilité semble accuser la misère de son possesseur? (7,36) Bien loin donc de vouloir punir ces malheureux, mon avis est que vous devez engager tous les citoyens à imiter leur exemple, à se partager les différentes portions de notre territoire, et à les cultiver, chacun selon ses moyens, les riches plus, les pauvres moins. Vous y trouverez le double avantage de rendre à la culture la plus grande partie de l’île, et d’en bannir deux grands fléaux, la paresse et l’indigence. (7,37) Ceux qui répondront à votre invitation recevront des terres en don gratuit, et les laboureront pendant dix ans, sans payer de rétribution. Au bout de ce temps, il sera prélevé sur leurs fruits une petite portion, qui appartiendra au peuple: leurs bestiaux ne devront rien payer. Si un étranger veut participer à cette entreprise, bornez le privilège à cinq ans, et qu’au bout de ce temps il paie le double des autres citoyens. Que si cet étranger défriche plus de deux cents arpents, qu’il soit fait citoyen lui-même. Ainsi l’émulation donnera des bras à la culture. (7,38) Au lieu de cela, voyez ce qu’il en est aujourd’hui: regardez à nos portes mêmes; dirait-on que c’est là l’entrée d’une cité opulente? Tout y présente le spectacle honteux de la stérilité. En dedans de nos murs, au contraire, je vois des jardins cultivés avec art, et même des pâturages pour nos troupeaux. Il y a, en vérité, de quoi s’étonner lorsqu’on voit de verbeux orateurs accuser de pauvres citoyens parce qu’ils labourent une terre abandonnée aux confins de l’Eubée, et en même temps ne se faire aucun scrupule à eux-mêmes d’étendre leurs plantations sur le champ de nos exercices, et de faire paître leurs troupeaux sur la place publique. (7,39) Car je n’ai pas besoin sans doute de vous apprendre que le gymnase est devenu semblable à un champ labouré, que les statues d’Hercule et des autres dieux y sont ensevelies sous les épis, et que chaque matin les troupeaux de cet orateur se répandent sur la place, où ils broutent l’herbe jusque sous les murs de nos palais, et aux portes mêmes du sénat. D’où il arrive qu’au premier aspect de cette ville, l’étranger ne sait qu’en rire ou en prendre pitié. » — Ces paroles remuaient fortement l’assemblée, qui commençait à se tourner en tumulte vers mon accusateur.


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Dernière mise à jour : 15/12/2008