| [7,30] ἐγὼ δὲ ἀκούσας ἐγέλασα ὅσον ἐδυνάμην μέγιστον. τὸ δὲ πλῆθος οὐκέτ´
ἐγέλων, ὥσπερ πρότερον, ἀλλ´ ἐθορύβουν. ὁ δὲ ἄνθρωπος {ὁ
ῥήτωρ} ἐχαλέπαινε, καὶ δεινὸν ἐμβλέψας εἰς ἐμὲ εἶπεν, Ὁρᾶτε τὴν
εἰρωνείαν καὶ τὴν ὕβριν τοῦ καθάρματος, ὡς καταγελᾷ πάνυ θρασέως; 
ὃν ἀπάγειν ὀλίγου δέω καὶ τὸν κοινωνὸν αὐτοῦ—πυνθάνομαι 
γὰρ δύο εἶναι τοὺς κορυφαίους τῶν κατειληφότων ἅπασαν
(7,31) σχεδὸν τὴν ἐν τοῖς ὄρεσι χώραν—οἶμαι γὰρ αὐτοὺς μηδὲ τῶν
ναυαγίων ἀπέχεσθαι τῶν ἑκάστοτε ἐκπιπτόντων, ὑπὲρ αὐτὰς σχεδόν
τι τὰς Καφηρίδας οἰκοῦντας. πόθεν γὰρ οὕτως πολυτελεῖς ἀγρούς,
μᾶλλον δὲ ὅλας κώμας κατεσκευάσαντο καὶ τοσοῦτον πλῆθος 
βοσκημάτων καὶ ζεύγη καὶ ἀνδράποδα; 
(7,32) καὶ ὑμεῖς δὲ ἴσως ὁρᾶτε αὐτοῦ
τὴν ἐξωμίδα ὡς φαύλη, καὶ τὸ δέρμα, ὃ ἐλήλυθε δεῦρο ἐναψάμενος
τῆς ὑμετέρας ἕνεκεν ἀπάτης, ὡς πτωχὸς δῆλον ὅτι καὶ οὐδὲν ἔχων.
ἐγὼ μὲν γάρ, ἔφη, βλέπων αὐτὸν μικροῦ δέδοικα, ὥσπερ οἶμαι τὸν
Ναύπλιον ὁρῶν ἀπὸ τοῦ Καφηρέως ἥκοντα. καὶ γὰρ οἶμαι πυρσεύειν 
αὐτὸν ἀπὸ τῶν ἄκρων τοῖς πλέουσιν, ὅπως ἐκπίπτωσιν εἰς τὰς πέτρας. 
(7,33) ταῦτα δὲ ἐκείνου λέγοντος καὶ πολλὰ πρὸς τούτοις, 
ὁ μὲν ὄχλος ἠγριοῦτο· ἐγὼ δὲ ἠπόρουν καὶ ἐδεδοίκειν μή τί
με ἐργάσωνται κακόν.
παρελθὼν δὲ ἄλλος τις, ὡς ἐφαίνετο, ἐπιεικὴς ἄνθρωπος ἀπό 
τε τῶν λόγων οὓς εἶπε καὶ ἀπὸ τοῦ σχήματος πρῶτον μὲν ἠξίου
σιωπῆσαι τὸ πλῆθος· καὶ ἐσιώπησαν· ἔπειτα εἶπε τῇ φωνῇ πρᾴως
ὅτι οὐδὲν ἀδικοῦσιν οἱ τὴν ἀργὸν τῆς χώρας ἐργαζόμενοι καὶ κατασκευάζοντες, 
(7,34) ἀλλὰ τοὐναντίον ἐπαίνου δικαίως ἂν τυγχάνοιεν· καὶ δεῖ
μὴ τοῖς οἰκοδομοῦσι καὶ φυτεύουσι τὴν δημοσίαν γῆν χαλεπῶς ἔχειν,
ἀλλὰ τοῖς καταφθείρουσιν. ἐπεὶ καὶ νῦν, ἔφη, ὦ ἄνδρες, σχεδόν τι
τὰ δύο μέρη τῆς χώρας ἡμῶν ἔρημά ἐστι δι´ ἀμέλειάν τε καὶ ὀλιγανθρωπίαν. 
κἀγὼ πολλὰ κέκτημαι πλέθρα, ὥσπερ οἶμαι καὶ ἄλλος
τις, οὐ μόνον ἐν τοῖς ὄρεσιν, ἀλλὰ καὶ ἐν τοῖς πεδινοῖς, ἃ εἴ τις
ἐθέλοι γεωργεῖν, οὐ μόνον ἂν προῖκα δοίην, ἀλλὰ καὶ ἀργύριον
ἡδέως προστελέσαιμι. 
(7,35) δῆλον γὰρ ὡς ἐμοὶ πλέονος ἀξία γίγνεται,
καὶ ἅμα ἡδὺ ὅραμα χώρα οἰκουμένη καὶ ἐνεργός· ἡ δ´ ἔρημος οὐ
μόνον ἀνωφελὲς κτῆμα τοῖς ἔχουσιν, ἀλλὰ καὶ σφόδρα ἐλεεινόν τε
καὶ δυστυχίαν τινὰ κατηγοροῦν τῶν δεσποτῶν. 
(7,36) ὥστε μοι δοκεῖ
μᾶλλον ἑτέρους προτρέπειν, ὅσους ἂν δύνησθε τῶν πολιτῶν, ἐργάζεσθαι 
τῆς δημοσίας γῆς ἀπολαβόντας, τοὺς μὲν ἀφορμήν τινα
ἔχοντας πλείω, τοὺς δὲ πένητας, ὅσην ἂν ἕκαστος ᾖ δυνατός, ἵνα
ὑμῖν ἥ τε χώρα ἐνεργὸς ᾖ καὶ τῶν πολιτῶν οἱ θέλοντες δύο τῶν
μεγίστων ἀπηλλαγμένοι κακῶν, ἀργίας καὶ πενίας. 
(7,37) ἐπὶ δέκα μὲν
οὖν ἔτη προῖκα ἐχόντων· μετὰ δὲ τοῦτον τὸν χρόνον ταξάμενοι μοῖραν 
ὀλίγην παρεχέτωσαν ἀπὸ τῶν καρπῶν, ἀπὸ δὲ τῶν βοσκημάτων 
μηδέν. ἐὰν δέ τις ξένος γεωργῇ, πέντε ἔτη καὶ οὗτοι μηδὲν
ὑποτελούντων, ὕστερον δὲ διπλάσιον ἢ οἱ πολῖται. ὃς δὲ ἂν ἐξεργάσηται 
τῶν ξένων διακόσια πλέθρα, πολίτην αὐτὸν εἶναι, ἵνα ὡς
πλεῖστοι ὦσιν οἱ προθυμούμενοι. 
(7,38) ἐπεὶ νῦν γε καὶ τὰ πρὸ τῶν
πυλῶν ἄγρια παντελῶς ἐστι καὶ αἰσχρὰ δεινῶς, ὥσπερ ἐν ἐρημίᾳ
τῇ βαθυτάτῃ, οὐχ ὡς προάστιον πόλεως· τὰ δέ γε ἐντὸς τείχους
σπείρεται τὰ πλεῖστα καὶ κατανέμεται. οὐκοῦν ἄξιον, ἔφη,
θαυμάσαι τῶν ῥητόρων, ὅτι τοὺς μὲν ἐπὶ τῷ Καφηρεῖ φιλεργοῦντας
ἐν τοῖς ἐσχάτοις τῆς Εὐβοίας συκοφαντοῦσι, τοὺς δὲ τὸ γυμνάσιον
γεωργοῦντας καὶ τὴν ἀγορὰν κατανέμοντας οὐδὲν οἴονται ποιεῖν 
δεινόν. 
(7,39) βλέπετε γὰρ αὐτοὶ δήπουθεν ὅτι τὸ γυμνάσιον ὑμῖν ἄρουραν 
πεποιήκασιν, ὥστε τὸν Ἡρακλέα καὶ ἄλλους ἀνδριάντας συχνοὺς 
ὑπὸ τοῦ θέρους ἀποκεκρύφθαι, τοὺς μὲν ἡρώων, τοὺς δὲ θεῶν·
καὶ ὅτι καθ´ ἡμέραν τὰ τοῦ ῥήτορος τούτου πρόβατα ἕωθεν εἰς
τὴν ἀγορὰν ἐμβάλλει καὶ κατανέμεται  τὰ  περὶ τὸ βουλευτήριον καὶ
τὰ ἀρχεῖα· ὥστε τοὺς πρῶτον ἐπιδημήσαντας ξένους τοὺς μὲν καταγελᾶν 
τῆς πόλεως, τοὺς δὲ οἰκτίρειν αὐτήν. πάλιν οὖν ταῦτα
ἀκούσαντες ὠργίζοντο πρὸς ἐκεῖνον καὶ ἐθορύβουν. 
 | [7,30] — En entendant ces mots, 
je ne pus m’empêcher de rire. Mais cette fois le 
peuple ne riait plus: il paraissait agité et tumultueux. L’orateur, de son 
côté, avec un air d’indignation et me jetant un regard terrible: « Voyez, 
s’écria-t-il, voyez l’audace de ce coquin! l’impudent n’ose-t-il pas se 
moquer de cette vénérable assemblée? Je ne sais qui me tient de le faire 
conduire en prison lui et son complice: car j’apprends qu’ils sont deux 
chefs principaux de cette bande qui infeste nos montagnes. Bien plus, 
citoyens, faut-il vous dire tout ce que je pense? J’ai de fortes raisons 
de soupçonner que leurs mains ne respectent même pas les malheureux que la 
tempête jette sur les écueils de Capharée, voisins de leur demeure. Car 
enfin, d’où pourraient leur venir tant de champs fertiles, tant 
d’habitations magnifiques, tant de troupeaux, d’attelages, d’esclaves? 
(7,32) Peut-être avez-vous été étonnés de la simplicité de son extérieur, et du 
peu de valeur de la peau qui le couvre. Mais ce n’est là qu’un grossier 
artifice; il veut vous en imposer, et vous faire croire à sa pauvreté. 
Mais il n’a pas trompé mes regards; et j’ai pâli à sa vue, comme à celle 
de Nauplius même, arrivant de Capharée. Oui, citoyens, croyez-moi, il est 
certain que ces hommes allument des feux trompeurs au haut de leurs 
rochers et qu’ils attirent par là sur les écueils les navigateurs qui 
voguent dans ces parages. » 
(7,33) Ces paroles avaient porté au plus haut point 
l’indignation du peuple. Pour moi, je me troublais, et je commençais à 
craindre qu’ils ne me fissent du mal, quand tout à coup un autre homme se 
lève du milieu de l’assemblée; sa mine et ses discours annonçaient une 
personne douce et bien élevée. Ayant demandé et obtenu silence, il 
commença en ces termes 
« Mes concitoyens, je ne conçois pas les reproches qu’on adresse à ceux 
qui défrichent et labourent les parties autrefois incultes de notre 
territoire. Il me semble que, s’il y a lieu de s’indigner contre 
quelqu’un, c’est apparemment contre les auteurs de la stérilité et de 
l’abandon de nos terres,
(7,34)  et non contre les hommes laborieux qui les 
cultivent et les embellissent. Vous le savez, notre négligence et le 
défaut de population ont laissé incultes les deux tiers de notre île. Je 
possède, pour ma part, un grand nombre de terres en friche, soit dans la 
montagne, soit dans la plaine! Eh bien, si quelqu’un consent à les mettre 
en valeur, non seulement je les lui donnerai pour rien, mais j’y ajouterai 
de l’argent de ma bourse, 
(7,35) et encore croirai-je avoir gagné à ce marché. En 
effet, citoyens, y a-t-il au monde un spectacle plus beau, plus ravissant, 
que celui d’une terre riche et bien cultivée? Est-il rien de plus triste 
et de plus affligeant au contraire que la vue d’une terre inculte, 
inutile, et dont la stérilité semble accuser la misère de son possesseur? 
(7,36) Bien loin donc de vouloir punir ces malheureux, mon avis est que vous 
devez engager tous les citoyens à imiter leur exemple, à se partager les 
différentes portions de notre territoire, et à les cultiver, chacun selon 
ses moyens, les riches plus, les pauvres moins. Vous y trouverez le double 
avantage de rendre à la culture la plus grande partie de l’île, et d’en 
bannir deux grands fléaux, la paresse et l’indigence. 
(7,37) Ceux qui répondront 
à votre invitation recevront des terres en don gratuit, et les laboureront 
pendant dix ans, sans payer de rétribution. Au bout de ce temps, il sera 
prélevé sur leurs fruits une petite portion, qui appartiendra au peuple: 
leurs bestiaux ne devront rien payer. Si un étranger veut participer à 
cette entreprise, bornez le privilège à cinq ans, et qu’au bout de ce 
temps il paie le double des autres citoyens. Que si cet étranger défriche 
plus de deux cents arpents, qu’il soit fait citoyen lui-même. Ainsi 
l’émulation donnera des bras à la culture. 
(7,38) Au lieu de cela, voyez ce qu’il 
en est aujourd’hui: regardez à nos portes mêmes; dirait-on que c’est là 
l’entrée d’une cité opulente? Tout y présente le spectacle honteux de la 
stérilité. En dedans de nos murs, au contraire, je vois des jardins 
cultivés avec art, et même des pâturages pour nos troupeaux. Il y a, en 
vérité, de quoi s’étonner lorsqu’on voit de verbeux orateurs accuser de 
pauvres citoyens parce qu’ils labourent une terre abandonnée aux confins 
de l’Eubée, et en même temps ne se faire aucun scrupule à eux-mêmes 
d’étendre leurs plantations sur le champ de nos exercices, et de faire 
paître leurs troupeaux sur la place publique. 
(7,39) Car je n’ai pas besoin sans 
doute de vous apprendre que le gymnase est devenu semblable à un champ 
labouré, que les statues d’Hercule et des autres dieux y sont ensevelies 
sous les épis, et que chaque matin les troupeaux de cet orateur se 
répandent sur la place, où ils broutent l’herbe jusque sous les murs de 
nos palais, et aux portes mêmes du sénat. D’où il arrive qu’au premier 
aspect de cette ville, l’étranger ne sait qu’en rire ou en prendre pitié. » 
— Ces paroles remuaient fortement l’assemblée, qui commençait à se 
tourner en tumulte vers mon accusateur. 
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