[11,30] ὁρώσας δὲ τὰ νήπια βρέφη πρὸς τῇ γῇ
παιόμενα ὠμῶς, οὔτε ἱερὰ πορθούμενα θεῶν
οὔτε χρημάτων πλῆθος ἁρπαζόμενον οὔτε κατ´ ἄκρας ὅλην ἐμπιμπραμένην
{τὴν} πόλιν οὔτε μείζονα βοὴν ἢ κτύπον χαλκοῦ τε καὶ πυρὸς
τῶν μὲν φθειρομένων, τῶν δὲ ῥιπτουμένων· ἃ τὸν Πρίαμον πεποίηκε λέγοντα
ἐπ´ ὀλίγον ὡς ἐσόμενα, ἃ τυχὸν αὐτῷ ὡς γιγνόμενα διελθεῖν, ὅπως ἐβούλετο καὶ
μεθ´ ὅσου τἄλλα εἰώθει δείματος,
ἐκπλήττων τε καὶ αὔξων τὰ μικρότατα.
(31) εἰ δέ γε ἤθελεν ἀνδρῶν ἐπισήμων εἰπεῖν θάνατον,
πῶς ἀπέλιπε τὸν τοῦ Ἀχιλλέως καὶ
τὸν τοῦ Μέμνονος καὶ Ἀντιλόχου καὶ Αἴαντος καὶ αὐτοῦ τοῦ Ἀλεξάνδρου; πῶς
δὲ τὴν Ἀμαζόνων στρατείαν καὶ τὴν μάχην ἐκείνην
τὴν λεγομένην τοῦ Ἀχιλλέως καὶ τῆς Ἀμαζόνος γενέσθαι καλὴν
(32) οὕτως καὶ παράδοξον; ὁπότε τὸν ποταμὸν αὐτῷ πεποίηκε μαχόμενον ὑπὲρ
τοῦ λέγειν τι θαυμαστόν, ἔτι δὲ τοῦ Ἡφαίστου καὶ
τοῦ Σκαμάνδρου μάχην καὶ τῶν ἄλλων θεῶν πρὸς ἀλλήλους, τροπάς
τε καὶ ἥττας καὶ τραύματα {ἐπιθυμῶν ὅ, τι εἴποι μέγα καὶ θαυμαστόν}, ὑπὸ
ἀπορίας πραγμάτων τοσούτων ἔτι καὶ τηλικούτων
ἀπολειπομένων.
(33) ἀνάγκη οὖν ἐκ τούτων ὁμολογεῖν ἢ ἀγνώμονα
Ὅμηρον καὶ φαῦλον κριτὴν τῶν πραγμάτων, ὥστε τὰ ἐλάττω καὶ
ταπεινότερα αἱρεῖσθαι, καταλιπόντα ἄλλοις τὰ μέγιστά τε καὶ
σπουδαιότατα, ἢ μὴ δύνασθαι αὐτόν, ὅπερ εἶπον, ἰσχυρίζεσθαι τὰ
ψευδῆ, μηδ´ ἐν τούτοις ἐπιδεικνύναι τὴν ποίησιν ἃ ἐβούλετο κρύψαι
ὅπως γέγονεν.
(34) οὕτως γὰρ καὶ ἐν Ὀδυσσείᾳ τὰ μὲν περὶ τὴν Ἰθάκην
καὶ τὸν θάνατον τῶν μνηστήρων αὐτὸς λέγει, τὰ δὲ μέγιστα τῶν
ψευσμάτων οὐχ ὑπέμεινεν εἰπεῖν, τὰ περὶ τὴν Σκύλλαν καὶ τὸν
Κύκλωπα καὶ τὰ φάρμακα τῆς Κίρκης, ἔτι δὲ τὴν εἰς ᾅδου κατάβασιν τοῦ
Ὀδυσσέως, ἀλλὰ τὸν Ὀδυσσέα ἐποίησε διηγούμενον τοῖς
περὶ τὸν Ἀλκίνοον· ἐκεῖ δὲ καὶ τὰ περὶ τὸν ἵππον καὶ τὴν ἅλωσιν
τῆς Τροίας διεξιόντα τὸν Δημόδοκον ἐν ᾠδῇ δι´ ὀλίγων ἐπῶν.
| [11,30] après avoir vu écraser cruellement contre terre leurs tendres enfants ! Quelle multiplicité d'images lui auraient fourni tant de temples dépouillés, tant de richesses pillées, une ville entière réduite en cendres, l'horrible bruit du fer et des flammes, les cris des mourants et des vainqueurs! Ces choses, qu'Homère se contente de faire dire par Priam en peu de mots, et comme par prédiction, ce poète devait sans doute les raconter lui-même si elles fussent arrivées ainsi qu'il le supposait, et les représenter avec autant d'exactitude qu'à son ordinaire, peignant fortement les objets, et insistant sur les moindres détails.
31 S'il a cherché à nous offrir des tableaux de morts illustres, comment a-t-il oublié la mort d'Achille, celles de Memnon, d'Ajax, de Pâris même ? Pourquoi n'a-t-il point parlé de l'armée des Amazones, ni du fameux et incroyable combat de leur Reine et d'Achille ? 32 Etait-il réduit, pour raconter quelque chose d'admirable, à faire combattre Achille contre un fleuve, Vulcain contre le Scamandre, les Dieux les uns contre les autres ; à peindre leurs attaques, leurs suites, leurs blessures ? Ne pouvait-il trouver sans cela rien de grand et de merveilleux à dire ? Manquait- il de matière, lui qui négligeait tant d'objets intéressants auxquels Priam ne sait que toucher lorsqu'il dit: " Que Jupiter lui réservait dans la vieillesse une mort cruelle, après qu'il aura été témoin des plus grands malheurs ; qu'il aura vu ses fils massacrés, ses villes violées, ses petits enfants écrasés contre terre, les femmes de ses fils tombées aux mains des fiers vainqueurs ; et que peut-être lui-même, percé par les ennemis, sera dévoré par les chiens devant les portes de son palais. » 33 Il faut nécessairement convenir, ou qu'Homère était un mauvais connaisseur qui jugeait mal des choses, puisqu'il s'attachait aux faits les plus frivoles et les moins considérables, tandis qu'il négligeait les plus importants et les plus dignes d'être écrits : ou plutôt il faut avouer qu'il n'a pas eu la force, comme je l'ai dit, d'insister sur des mensonges; et que par cela même son propre ouvrage fait sentir quels sont les faits qu'il a voulu déguiser.
34 Il en est de même de l'Odyssée. Homère y raconte lui-même ce qui s'est passé à Ithaque, et la mort des amants de Pénélope ; mais il ne peut soutenir de débiter sous son nom les mensonges principaux ; comme ce qui concerne Scylla, le Cyclope, les poisons de Circé, la descente d'Ulysse aux enfers. Il suppose que ce fut Ulysse qui raconta toutes ces choses aux convives d'Alcinoüs. C'est encore à la table d'Alcinoüs qu'Homère dans une pièce de peu de vers, qu'il met dans la bouche de Démodocus, fait chanter la prise de Troie, et ce cheval fameux, ouvrage de la ruse des Grecs.
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