[11,10] εἰς τοῦτο μανίας οἱ πολλοὶ ἐληλύθασι καὶ οὕτω πάνυ
ὁ τῦφος αὐτῶν κεκράτηκεν. ἐπιθυμοῦσι γὰρ ὡς πλεῖστον
ὑπὲρ αὐτῶν γίγνεσθαι λόγον· ὁποῖον δέ τινα,
οὐθὲν μέλει αὐτοῖς. ὅλως δὲ πάσχειν μὲν οὐ θέλουσι τὰ δεινὰ
διὰ δειλίαν, φοβούμενοι τούς τε θανάτους καὶ τὰς ἀλγηδόνας· ὡς
δὲ παθόντες μνημονεύεσθαι περὶ πολλοῦ ποιοῦνται.
(11) ἐγὼ δὲ οὔθ´ ὑμῖν χαριζόμενος οὔθ´ Ὁμήρῳ διαφερόμενος οὐδὲ
τῆς δόξης φθονῶν ἐκείνῳ, πειράσομαι δεικνύειν ὅσα μοι δοκεῖ
ψευδῆ εἰρηκέναι περὶ τῶν ἐνθάδε πραγμάτων, οὐκ ἄλλοθέν ποθεν,
ἀλλ´ ἐξ αὐτῆς τῆς ποιήσεως ἐλέγχων, τῷ τε ἀληθεῖ βοηθῶν καὶ
μάλιστα διὰ τὴν Ἀθηνᾶν, ὅπως μὴ δοκῇ ἀδίκως διαφθεῖραι τὴν
αὑτῆς πόλιν μηδὲ ἐναντία βούλεσθαι τῷ αὑτῆς πατρί, οὐχ ἧττον
δὲ διὰ τὴν Ἥραν καὶ τὴν Ἀφροδίτην.
(12) δεινὸν γὰρ τὴν μὲν τῷ Διὶ συνοῦσαν μὴ νομίσαι αὐτὸν κριτὴν ἱκανὸν
τοῦ αὑτῆς εἴδους, εἰ μὴ ἀρέσει καὶ τῶν ἐν Ἴδῃ βουκόλων ἑνί, τὴν δὲ ἀρχὴν
ὑπὲρ κάλλους ἐρίζειν τῇ Ἀφροδίτῃ, πρεσβυτάτην φάσκουσαν εἶναι τῶν Κρόνου
(13) παίδων, ὡς αὐτὸς Ὅμηρος ἀπήγγειλε ποιήσας,
καί με πρεσβυτάτην τέκετο Κρόνος ἀγκυλομήτης,
ἔτι δὲ οὕτω χαλεπῶς διατεθῆναι πρὸς τὸν Πάριν, αὐτὴν ἐπιτρέψασαν τὴν κρίσιν·
καίτοι οὐδὲ τῶν ἀνθρώπων ὃς ἂν ἐπιτρέψῃ δίαιταν, ἐχθρὸν ἡγεῖται τὸν
διαιτητήν, ἐὰν μὴ δικάσῃ καθ´ ἑαυτόν· τὴν
δέ γε Ἀφροδίτην οὕτως αἰσχρὰν καὶ ἄδικον καὶ ἀσύμφορον δοῦναι δωρεάν, καὶ
μηδένα ποιήσασθαι λόγον μήτε τῆς Ἑλένης ἀδελφῆς οὔσης
μήτε τοῦ Ἀλεξάνδρου τοῦ προκρίναντος αὐτήν, ἀλλὰ χαρίζεσθαι
τοιοῦτον γάμον δι´ ὃν αὐτός τε ἔμελλεν ἀπόλλυσθαι καὶ οἱ γονεῖς
αὐτοῦ καὶ ἡ πόλις.
(14) ἔτι δὲ οὐκ ἄξιον οἶμαι παριδεῖν οὐδὲ τὸ τῆς
Ἑλένης, ἣ τοῦ Διὸς λεγομένη θυγάτηρ διὰ μὲν τὴν ἄδικον φήμην
περιβόητος ἐπ´ αἰσχύνῃ γέγονε, διὰ δὲ τὴν αὑτῆς ἰσχὺν θεὸς ἐνομίσθη παρὰ τοῖς
Ἕλλησιν. ἀλλ´ ὅμως ὑπὲρ τηλικούτων ὄντος
τοῦ λόγου τινὲς τῶν σοφιστῶν ἀσεβεῖν με φήσουσιν Ὁμήρῳ ἀντιλέγοντα καὶ
ἐπιχειρήσουσι διαβάλλειν πρὸς τὰ δύστηνα μειράκια,
ὧν ἐμοὶ ἐλάττων λόγος ἐστὶν ἢ πιθήκων.
| [11,10] Telle est l'extravagance de la plupart des peuples. Ils souhaitent ardemment qu'on parle beaucoup d'eux, et ils se soucient peu de quelle façon l'on en parle. Timides, ils ne voudraient pas être exposés aux malheurs ; ils craignent la mort et les peines : mais ils sont charmés qu'on se souvienne qu'ils ont autrefois été malheureux.
11 Si je me propose de vous faire voir combien Homère a défiguré par des fables les faits qu'il a rapportés, je ne me servirai pour cela que de ses vers mêmes; et j'en tirerai des secours pour éclaircir la vérité. Ce n'est ni dans le dessein de vous flatter, ni par un esprit de critique ou de basse jalousie, que j'ai conçu ce projet. Mon principal but est de justifier Minerve, d'empêcher qu'on ne la regarde comme ayant détruit sans raison sa propre ville, et ayant agi contre les volontés de son père. Je veux aussi justifier Junon et Vénus. 12 Il est injurieux à l'épouse de Jupiter, qu'on croie qu'elle ne trouva personne plus capable de bien juger de ses attraits qu'un berger du mont Ida, et que ce fut elle qui commença à disputer de beauté avec Vénus ; elle, dis-je, qui était la plus âgée des enfants 13 de Saturne, comme elle en convient dans Homère, où elle s'exprime en ces termes : Ne suis-je pas la première qu'engendra Saturne ? Enfin c'est faire injure à cette déesse que de la supposer si violemment irritée contre Pâris, à la décision duquel elle s'était volontairement soumise. Assurément il n'y a personne parmi les mortels qui, après s'être choisi un arbitre, traite cet arbitre en ennemi, parce qu'il n'a pas décidé en sa faveur. Ce n'est pas une chose moins injurieuse pour Vénus, que la honteuse, l'injuste, la funeste récompense qu'on lui fait donner à Pâris. Sans égards ni pour Hélène qu'elle avait pour sœur, ni pour Pâris, dont le jugement lui avait été si favorable, elle unit ces deux personnes par un mariage fatal qui devait causer la perte de la famille, de la patrie de Pâris, et de Pâris même. 14 Je ne dois pas non plus oublier ici le sort d'Hélène, que l'on dit être fille de Jupiter. Sa honte l'a rendue à jamais célèbre ; et les Grecs y en l'érigeant en immortelle, ont immortalisé son déshonneur.
Quelque louable que soit mon dessein, certains sophistes ne laisseront pas de crier à l'impiété, parce que je contredis Homère : ils s'efforceront de me perdre dans l'esprit de quelques jeunes gens méprisables, et dont je ne fais aucun cas.
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