[11,135] Μενέλαος δὲ τὸ παράπαν οὐχ ἧκεν εἰς Πελοπόννησον,
ἀλλ´ ἐν Αἰγύπτῳ κατέμεινεν. καὶ σημεῖά γε ἔστιν
ἄλλα τε τῆς ἀφίξεως καὶ νομὸς ἀπ´ αὐτοῦ καλούμενος, οὐκ ἂν εἰ
πεπλανημένος καὶ πρὸς ὀλίγον ἀφίκετο. γήμας δὲ τὴν τοῦ βασιλέως θυγατέρα
καὶ διηγήσατο τοῖς ἱερεῦσι τὰ τῆς στρατείας οὐθὲν
ἀποκρυπτόμενος. {οἱ δέ φασιν ὅτι καὶ τὴν Ἑλένην ἐκεῖθεν ἔλαβεν,
λόγον ἁπάντων ἀπιστότατον· τέως δὲ ἐλάνθανεν εἴδωλον ἐκ τῆς
Τροίας ἔχων· ὅ τε πόλεμος συνεστήκει περὶ εἰδώλου τὰ δέκα ἔτη.}
(136) σχεδὸν δὲ καὶ Ὅμηρος ἐπίσταται τοῦτο καὶ αἰνίττεται, φήσας τὸν
Μενέλαον μετὰ τὴν τελευτὴν ὑπὸ τῶν θεῶν εἰς τὸ Ἠλύσιον πεδίον
πεμφθῆναι, ὅπου μήτε νιφετὸς γίγνεται μήτε χειμών, ἀλλ´ αἰθρία
δι´ ἔτους καὶ πρᾷος ἀήρ· ὁ γὰρ ἐπὶ τῆς Αἰγύπτου τόπος τοιοῦτός
ἐστιν. δοκοῦσι δέ μοι καὶ τῶν ὕστερον ποιητῶν τινες ὑποπτεῦσαι
τὰ πράγματα. τὴν γὰρ Ἑλένην ἐπιβουλευθῆναι μὲν ὑπὸ Ὀρέστου
λέγει τις τῶν τραγῳδοποιῶν εὐθὺς ἐλθοῦσαν, γενέσθαι δὲ ἀφανῆ
τῶν ἀδελφῶν ἐπιφανέντων. τοῦτο δὲ οὐκ ἄν ποτε ἐποίησεν, εἰ ἐφαίνετο
ἡ Ἑλένη κατοικήσασα ὕστερον ἐν τῇ Ἑλλάδι καὶ τῷ Μενελάῳ συνοῦσα.
(137) τὰ μὲν δὴ τῶν Ἑλλήνων μετὰ τὸν πόλεμον εἰς τοῦτο ἦλθε
δυστυχίας καὶ ταπεινότητος, τὰ δὲ τῶν Τρώων πολὺ
κρείττονα καὶ ἐπικυδέστερα ἐγένετο. τοῦτο μὲν γὰρ Αἰνείας ὑπὸ
Ἕκτορος πεμφθεὶς μετὰ στόλου καὶ δυνάμεως πολλῆς Ἰταλίαν
κατέσχε τὴν εὐδαιμονεστάτην χώραν τῆς Εὐρώπης· τοῦτο δὲ Ἕλενος
εἰς μέσην ἀφικόμενος τὴν Ἑλλάδα Μολοττῶν ἐβασίλευσε καὶ τῆς
Ἠπείρου πλησίον Θετταλίας. καίτοι πότερον εἰκὸς ἦν τοὺς ἡττηθέντας ἐπιπλεῖν
ἐπὶ τὴν τῶν κρατησάντων χώραν καὶ βασιλεύειν
παρ´ αὐτοῖς ἢ τοὐναντίον τοὺς κρατήσαντας ἐπὶ τὴν τῶν ἡττημένων;
(138) {πῶς δέ, εἴπερ ἁλούσης Τροίας ἔφευγον οἱ περὶ τὸν Αἰνείαν
καὶ τὸν Ἀντήνορα καὶ τὸν Ἕλενον, οὐ πανταχόσε μᾶλλον ἔφευγον
ἢ εἰς τὴν Ἑλλάδα καὶ τὴν Εὐρώπην, οὐδὲ τόπον τινὰ ἠγάπων καταλαβόντες τῆς
Ἀσίας, ἀλλ´ εὐθὺς ἐπὶ τὴν ἐκείνων ἔπλεον ὑφ´ ὧν
ἀνάστατοι ἐγένοντο; πῶς δὲ ἐβασίλευσαν ἅπαντες οὐ σμικρῶν οὐδὲ
ἀνωνύμων χωρίων;} {ἐξὸν αὐτοῖς καὶ τὴν Ἑλλάδα κατασχεῖν; ἀλλ´
ἀπείχοντο διὰ τοὺς ὅρκους. ὅμως δὲ Ἕλενος οὐκ ὀλίγον αὐτῆς
ἀπετέμετο, τὴν Ἤπειρον· Ἀντήνωρ δὲ Ἑνετῶν ἐκράτησε καὶ γῆς
ἀρίστης τῆς περὶ τὸν Ἀδρίαν· Αἰνείας δὲ πάσης Ἰταλίας ἐβασίλευσε
καὶ πόλιν ᾤκισε τὴν μεγίστην πασῶν}.
(139) {ταῦτα δὲ οὐκ εἰκὸς ἦν πρᾶξαι φυγάδας ἀνθρώπους καὶ ταῖς οἴκοθεν
ξυμφοραῖς καταβεβλημένους, ἀλλ´ ἀγαπᾶν, εἴ τις αὐτοὺς εἴα κατοικεῖν· ἄλλως
τε μετὰ ποίας ἀφορμῆς ἀφικομένους χρημάτων ἢ στρατιᾶς διὰ μέσων τῶν
πολεμίων φεύγοντας, ἐμπεπρησμένης τῆς πόλεως, πάντων ἀπολωλότων, ὅπου
χαλεπὸν ἦν τὰ σώματα αὐτὰ διασῶσαι τοὺς ἰσχύοντας καὶ νέους, ἀλλ´ οὐ μετὰ
παίδων, γυναικῶν καὶ γονέων καὶ χρημάτων ἀπανίστασθαι, καὶ ταῦτα ἀδοκήτως
τε καὶ παρ´ ἐλπίδας
ἁλούσης τῆς πόλεως, οὐχ ὥσπερ εἰώθασι κατὰ σπονδὰς κατ´ ὀλίγον
ἐκλείπειν; ἀλλὰ τὸ γενόμενον δυνατὸν γενέσθαι.}
| [11,135] Pour Ménélas, il ne retourna jamais dans le Péloponnèse ; il se fixa en Egypte. Entr'autres preuves qu'on en a, il y a une contrée qui porte son nom ; ce qui ne serait pas s'il n'eût fait qu'y aborder, ou qu'il n'y eût resté que peu de temps. Il y épousa la fille du Roi, et apprit aux prêtres de ce pays toute l'expédition de Troie, sans leur rien cacher. Quelques-uns disent qu'il y retrouva Hélène qui y était toujours demeurée. Ils ajoutent, ce qui est le plus inconcevable, qu'on n'avait eu à Troie que le fantôme de cette princesse, et que ce fut pour ce fantôme qu'on fit la guerre durant dix ans.
136 Homère semble avoir su le voyage de Ménélas en Egypte, et en avoir parlé énigmatiquement, lorsqu'il a dit que Ménélas après sa mort fut envoyé par les Dieux dans les champs Elysées, où il n'y a ni neige, ni hiver; où l'air est toujours doux et serein. Le climat de L'Egypte est tel en effet. Il semble aussi que quelques poètes postérieurs ont entrevu la vérité des choses. Car un poète tragique représente Oreste voulant assassiner Hélène qui court au devant du coup; mais les frères d'Hélène apparaissent, et elle disparaît tout-à-coup. Or ce poète n'aurait pas avancé ce fait, s'il était vrai qu'on vit depuis Hélène vivre en Grèce avec Ménélas.
137 Depuis la guerre, les affaires de la Grèce se trouvèrent dans un état de faiblesse et de décadence : les Troyens au contraire devinrent plus florissants et plus glorieux que jamais. Aussi vit-on Enée, envoyé par Hector avec une flotte et des troupes nombreuses, s'emparer de l'Italie, le plus beau pays de 'Europe ; Hélenus aborder au milieu de la Grèce, et se faire Roi des Molosses et de l'Epire près de la Thessalie. Lequel des deux est le plus probable que les vaincus passent dans le pays des vainqueurs et y fondent des royaumes, ou que ce soit plutôt les vainqueurs dans le pays des vaincus ? 138 Si ceux qui suivirent Enée, Anténor, Hélenus, étaient des fugitifs échappés des débris de Troie, pourquoi ne se réfugiaient-ils pas partout ailleurs qu'en Europe et en Grèce ? Pourquoi ne préféraient-ils pas quelque contrée de l'Asie au lieu d'aborder chez des ennemis qui venaient tout récemment de les détruire ? Comment vinrent-ils à bout de se faire tous souverains, et non pas de pays peu vastes, ou peu célèbres ; car il ne tint qu'à eux de se rendre maîtres de la Grèce ; mais ils s'en abstinrent pour ne pas violer les traités ? Hélénus ne laissa pas cependant d'en occuper une bonne partie, l'Epire ; Anténor s'empara du pays des Hénetes, et de l'excellent terrain autour d'Adria ; Enée régna sur toute l'Italie, et y fonda la plus grande ville qu'il y ait dans l'univers.
139 Assurément il n'est point vraisemblable que des fugitifs, après avoir, essuyé les plus grands malheurs dans leur patrie, aient pu former des établissements de cette nature, ils auraient dû être trop heureux que quelqu'un eût voulu leur accorder retraite. D'ailleurs avec quels fonds, avec quelles troupes partirent-ils, eux qui s'embarquaient au milieu de leurs ennemis, au milieu de Troie en flammes, ayant tout perdu, se trouvant dans des conjonctures où, loin de pouvoir s'embarquer avec leurs pères, leurs enfants, leurs femmes, leurs effets, les plus jeunes et les plus vigoureux pouvaient à peine sauver leurs vies ; dans les circonstances d'une ville surprise, où l'on n'a pas, comme dans le cas d'une capitulation, un temps pour se retirer. Si ces suppositions sont impossibles, il est très possible au contraire que les choses soient arrivées comme j'ai dit qu'effectivement elles ont été.
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