[6,7] CHAPITRE VII. HIPPARCHIE.
<96> Ἐθηράθη δὲ τοῖς λόγοις καὶ ἡ ἀδελφὴ τοῦ Μητροκλέους Ἱππαρχία.
Μαρωνεῖται δ' ἦσαν ἀμφότεροι. Καὶ ἤρα τοῦ Κράτητος καὶ τῶν λόγων καὶ
τοῦ βίου, οὐδενὸς τῶν μνηστευομένων ἐπιστρεφομένη, οὐ πλούτου, οὐκ
εὐγενείας, οὐ κάλλους· ἀλλὰ πάντ' ἦν Κράτης αὐτῇ. Καὶ δὴ καὶ ἠπείλει τοῖς
γονεῦσιν ἀναιρήσειν αὑτήν, εἰ μὴ τούτῳ δοθείη. Κράτης μὲν οὖν
παρακαλούμενος ὑπὸ τῶν γονέων αὐτῆς ἀποτρέψαι τὴν παῖδα, πάντ'
ἐποίει, καὶ τέλος μὴ πείθων, ἀναστὰς καὶ ἀποθέμενος τὴν ἑαυτοῦ σκευὴν
ἀντικρὺ αὐτῆς ἔφη, « Ὁ μὲν νυμφίος οὗτος, ἡ δὲ κτῆσις αὕτη, πρὸς ταῦτα
βουλεύου· οὐδὲ γὰρ ἔσεσθαι κοινωνός, εἰ μὴ καὶ τῶν αὐτῶν
ἐπιτηδευμάτων γενηθείης. » <97> Εἵλετο ἡ παῖς καὶ ταὐτὸν ἀναλαβοῦσα
σχῆμα συμπεριῄει τἀνδρὶ καὶ ἐν τῷ φανερῷ συνεγίνετο καὶ ἐπὶ τὰ δεῖπνα
ἀπῄει. Ὅτε καὶ πρὸς Λυσίμαχον εἰς τὸ συμπόσιον ἦλθεν, ἔνθα Θεόδωρον
τὸν ἐπίκλην Ἄθεον ἐπήλεγξε, σόφισμα προτείνασα τοιοῦτον· ὃ ποιῶν
Θεόδωρος οὐκ ἂν ἀδικεῖν λέγοιτο, οὐδ' Ἱππαρχία ποιοῦσα τοῦτο ἀδικεῖν
λέγοιτ' ἄν· Θεόδωρος δὲ τύπτων ἑαυτὸν οὐκ ἀδικεῖ, οὐδ' ἄρα Ἱππαρχία
Θεόδωρον τύπτουσα ἀδικεῖ. Ὁ δὲ πρὸς μὲν τὸ λεχθὲν οὐδὲν ἀπήντησεν,
ἀνέσυρε δ' αὐτῆς θοἰμάτιον· ἀλλ' οὔτε κατεπλάγη Ἱππαρχία οὔτε
διεταράχθη ὡς γυνή. <98> Ἀλλὰ καὶ εἰπόντος αὐτῇ, « Αὕτη ἐστὶν
Ἡ τὰς παρ' ἱστοῖς ἐκλιποῦσα κερκίδας; »,
« Ἐγώ, » φησίν, « εἰμί, Θεόδωρε· ἀλλὰ μὴ κακῶς σοι δοκῶ
βεβουλεῦσθαι περὶ αὑτῆς, εἰ, τὸν χρόνον ὃν ἔμελλον ἱστοῖς
προσαναλώσειν, τοῦτον εἰς παιδείαν κατεχρησάμην; »
Καὶ ταῦτα μὲν καὶ ἄλλα μυρία τῆς φιλοσόφου.
Φέρεται δὲ τοῦ Κράτητος βιβλίον Ἐπιστολαί, ἐν αἷς ἄριστα φιλοσοφεῖ,
τὴν λέξιν ἔστιν ὅτε παραπλήσιος Πλάτωνι. Γέγραφε καὶ τραγῳδίας
ὑψηλότατον ἐχούσας φιλοσοφίας χαρακτῆρα, οἷόν ἐστι κἀκεῖνο)·
Οὐχ εἷς πάτρας μοι πύργος, οὐ μία στέγη,
πάσης δὲ χέρσου καὶ πόλισμα καὶ δόμος
ἕτοιμος ἡμῖν ἐνδιαιτᾶσθαι πάρα.
Ἐτελεύτησε δὲ γηραιὸς καὶ ἐτάφη ἐν Βοιωτίᾳ.
| [6,7] CHAPITRE VII. HIPPARCHIE.
<96> Hipparchie, sœur de Métroclès et originaire comme lui de
Maronée, se laissa aussi prendre aux discours de Cratès. Elle s’éprit
d’une telle passion pour sa doctrine et son genre de vie, qu’elle repoussa
tous les prétendants, sans tenir aucun compte de la richesse, de la
naissance et de la beauté ; Cratès était tout pour elle. Elle menaça même
ses parents de se tuer si on ne la mariait avec lui. Ceux-ci prièrent Cratès
de la détourner de son dessein : il mit pour cela tout en œuvre ; enfin la
trouvant inébranlable, il se leva et plaça sous ses yeux tout ce qu’il
possédait en lui disant : « Voilà l’époux, voilà le patrimoine ; réfléchis; tu
ne seras ma compagne qu’à la condition d’adopter le même genre de vie
que moi. » <97> La jeune fille se décida sur-le-champ ; elle prit le même
vêtement que lui et le suivit partout. Elle se livrait à lui en public et prenait
place avec lui dans les festins. Un jour entre autres, étant à un repas
chez Lysimaque, elle adressa ce sophisme à Théodore l’athée : « Ce qui
est permis à Théodore l’est aussi à Hipparchie ; il est permis à Théodore
de se frapper lui-même ; il est donc permis à Hipparchie de frapper
Théodore. » Au lieu de répondre à l’argument, Théodore alla relever sa
tunique et la mit à nu ; mais quoique femme elle ne fut ni troublée ni
déconcertée; et comme il lui appliquait ce vers:
<98> Quelle est la femme qui a abandonné la navette auprès de la toile?
elle répliqua sur-le-champ : « C’est moi qui suis cette femme; mais
crois-tu que j’aie pris un mauvais parti en consacrant à l’étude le temps
que j’aurais perdu à faire de la toile ? »
On cite beaucoup d’autres traits semblables de cette femme philosophe.
Cratès a laissé un livre de lettres remplies d’une excellente
philosophie et dont le style égale quelquefois celui de Platon. Il a aussi
composé des tragédies marquées au coin de la plus sublime philosophie;
témoin ce passage :
52 Je n’ai point pour patrie une seule ville, un seul toit; l’univers entier,
voilà la ville, voilà la demeure qui m’est préparée.
Il mourut vieux et fut enterré en Béotie.
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