[10,37] Ταῦτ´ ἐστίν, ὦ δημόται, τὰ φανερώσαντά
με καὶ εἰς ἡγεμονίας προαγαγόντα γενναῖα ἔργα. ἐπεὶ
δ´ ὀνόματος ἤδη λαμπροῦ τυγχάνων φανερὸς ἤμην,
ἅπαντας ὑπέμενον τοὺς λοιποὺς ἀγῶνας αἰδούμενος
τὰς ἐπὶ τοῖς προτέροις ἔργοις τιμὰς καὶ χάριτας
ἀφανίσαι. καὶ διετέλεσα πάντα τὸν μεταξὺ χρόνον
στρατευόμενος καὶ ταλαιπωρῶν καὶ οὐδένα κίνδυνον
δεδιὼς οὐδὲ ὑπολογιζόμενος· ἐξ ὧν ἁπάντων ἀριστεῖα
καὶ σκῦλα καὶ στεφάνους καὶ τὰς ἄλλας τιμὰς παρὰ
τῶν ὑπάτων ἔλαβον· ἵνα δὲ συνελὼν εἴπω, μάχας μὲν
ἐν τοῖς τετταράκοντα ἔτεσιν, ἐν οἷς διατελῶ στρατευόμενος, ἀμφὶ τὰς ἑκατὸν εἴκοσι
μεμάχημαι, τραύματα δὲ
πέντε καὶ τετταράκοντα εἴληφα καὶ πάντα ἐμπρόσθια,
κατὰ νώτου δ´ οὐθέν. καὶ τούτων δώδεκά ἐστιν, ἃ συνέβη μοι λαβεῖν ἐν ἡμέρᾳ μιᾷ,
ὅτε Σαβῖνος Ἑρδώνιος
τὴν ἄκραν καὶ τὸ Καπιτώλιον κατελάβετο. ἀριστεῖα
δ´ ἐκ τῶν ἀγώνων ἐξενήνεγμαι τεσσαρεσκαίδεκα μὲν
στεφάνους πολιτικούς, οἷς ἀνέδησάν με οἱ σωθέντες
ἐν ταῖς μάχαις ὑπ´ ἐμοῦ, τρεῖς δὲ πολιορκητικοὺς πρῶτος ἐπιβὰς πολεμίων τείχεσι
καὶ κατασχών, ὀκτὼ δὲ
τοὺς ἐκ παρατάξεως, οἷς ὑπὸ τῶν αὐτοκρατόρων ἐτιμήθην· πρὸς δὲ τούτοις
ὀγδοήκοντα μὲν καὶ τρεῖς
χρυσοῦς στρεπτοὺς περιαυχενίους, ἑξήκοντα δὲ καὶ
ἑκατὸν περιβραχιόνια χρύσεα, δόρατα δ´ ὀκτωκαίδεκα,
φάλαρα δ´ ἐπίσημα πέντε πρὸς τοῖς εἴκοσιν, † ὧν ἐννέα ἦσαν, οὓς μονομαχῆσαί τινα
ἡμῶν προκαλεσαμένους
ἑκούσιος ὑποστὰς ἐνίκησα. οὗτος μέντοι Σίκκιος, ὦ
πολῖται, ὁ τοσαῦτα μὲν ἔτη στρατευσάμενος ὑπὲρ ὑμῶν,
τοσαύτας δὲ μάχας ἀγωνισάμενος, τοσούτοις δὲ τετιμημένος ἀριστείοις, ὁ μηδένα
κίνδυνον ὀκνήσας πώποτε
μηδ´ ἀπειπάμενος ἄλλῃ ἐν παρατάξεσι καὶ ἐν τειχομαχίαις καὶ ἐν πεζοῖς καὶ ἐν
ἱππεῦσι καὶ μετὰ πάντων
καὶ σὺν ὀλίγοις καὶ μόνος, καὶ κατατετρωμένος ὅλον
τὸ σῶμα, ὁ συγκατακτησάμενος τῇ πατρίδι πολλὴν καὶ
ἀγαθὴν γῆν, τοῦτο μὲν ἣν Τυρρηνούς τε παὶ Σαβίνους
ἀφείλεσθε, τοῦτο δὲ ἣν Αἰκανῶν καὶ Οὐολούσκων καὶ
Πωμεντίνων κρατήσαντες ἔχετε, οὐδὲ τὴν ἐλαχίστην
ἔχω μοῖραν ἐξ αὐτῆς λαβών, οὐδ´ ὑμῶν, ὦ δημόται,
τῶν τὰ ὅμοια ταλαιπωρησάντων οὐδείς· οἱ δὲ βιαιότατοι τῶν ἐν τῇ πόλει καὶ
ἀναιδέστατοι τὴν καλλίστην
κατέχουσιν ἐξ αὐτῆς καὶ πολλὰ ἔτη κεκάρπωνται οὔτε
δωρεὰν παρ´ ὑμῶν λαβόντες οὔτε χρημάτων πριάμενοι
οὔτε ἄλλην δικαίαν κτῆσιν οὐδεμίαν αὐτῆς ἀποδεῖξαι
δυνάμενοι. καὶ εἰ μὲν ἴσα τοῖς ἄλλοις ἡμῖν ταλαιπωρήσαντες,
ὅτ´ αὐτὴν ἐκτώμεθα, πλεῖον ἠξίουν ἡμῶν ἔχειν,
ἦν μὲν οὐδ´ οὕτω δίκαιον οὐδὲ πολιτικὸν ὀλίγους σφετερίσασθαι
τὰ κοινά, οὐ μὴν ἀλλ´ εἶχέ γέ τινα λόγον
ἡ πλεονεξία τῶν ἀνθρώπων· ὁπότε δ´ οὐθὲν ἔχοντες
ἐπιδείξασθαι μέγα καὶ νεανικὸν ἔργον, ἀνθ´ οὗ τὰ
ἡμέτερα βίᾳ κατέσχον, ἀναισχυντοῦσι καὶ οὐδ´ ἐξελεγχόμενοι
μεθίενται αὐτῶν, τίς ἂν ἀνάσχοιτο;
| [10,37] Voilà, Romains, les grands exploits qui m'ont fait connaître, et qui m'ont élevé jusqu'à la qualité d'officier. C'est ainsi que je suis devenu célèbre, et que ma réputation s'est étendue si loin.
XII. Dans la suite je n'ai pas dégénéré de ma première valeur : je me suis exposé dans tous les autres combats : j'ai soutenu ma gloire par de nouvelles actions pour ne pas perdre les honneurs que j'avais acquis. Depuis ce temps-là jusqu'aujourd'hui, j'ai été de toutes les campagnes : j'ai couru mille dangers : loin de redouter les périls les plus évidents, je les ai affrontés avec une nouvelle audace, et j'ai risqué ma vie mille fois. Dans tous les combats où je me suis trouvé, que de couronnes, que de prix de valeur, que de dépouilles j'ai remportées, que de marques d'honneur j'ai reçu des consuls ? En un mot, pendant quarante ans que j'ai servi, j'ai été environ à cent vingt batailles, j'ai reçu quarante-cinq blessures, toutes par devant, pas une seule par derrière. De ces quarante cinq blessures j'en reçus douze en un seul jour en combattant contre Erdonius Sabin qui avait occupé la citadelle et le Capitole.
Des cent vingt batailles où j'ai été, j'ai remporté par ma valeur quatorze couronnes civiques, qui m'ont été données par ceux à qui j'avais sauvé la vie dans les combats. J'ai obtenu une couronne obsidionale pour avoir fait lever le siège et trois couronnes murales, pour être monté le premier à l'escalade sur les murailles de l'ennemi. J'ai reçu huit autres couronnes dont les généraux de nos armées m'ont honoré pour avoir vaincu en bataille rangée. J'ai gagné outre cela quatre-vingt-trois colliers d'or, soixante bracelets aussi d'or, dix-huit piques, vint-cinq magnifiques harnois. De ces harnois il y en a neuf qui sont les fruits de mes victoires sur autant d'ennemis qui ont osé présenter le défi au plus brave de notre armée, et contre lesquels j'ai eu moi seul le courage de soutenir un combat singulier.
XIII. Cependant, Romains, ce Siccius qui a porté les armes tant d'années pour votre service, qui s'est trouvé à tant de batailles, qui a remporté tant de prix de valeur, qui n'a jamais fui ni redouté aucun péril ; qui a monté à l'assaut, qui a combattu en bataille rangée, à pied, à cheval, tantôt avec toute l'armée, tantôt avec une poignée de monde, quelquefois lui seul : ce Siccius percé de coups par tout son corps, qui de concert avec vous a conquis au prix de son sang tant de terres conquises, d'excellentes terres sur les Tyrrhéniens, sur les Sabins, sur les ennemis, sur les Aeques, sur les Volsques, sur les Pométiens, et sur les autres ennemis du peuple Romain : ce Siccius, dis-je, n'a pas eu pour lui la moindre portion de ces terres non plus que vous Plébéiens, qui avez été les compagnons de ses travaux.
XIV. La plus belle et la meilleure partie de nos conquêtes, est possédée par les plus violents et les plus effrontés des citoyens de Rome. Ils en jouissent, ils en perçoivent les revenus depuis plusieurs années, quoique ces héritages ne leur appartiennent ni à titre de présent, ni à titre d'achat, et qu'ils n'en puissent prouver une possession légitime. Quand même ils auraient partagé avec nous les peines qu'il nous en a coûté pour acquérir ces terres, s'ils voulaient en avoir une plus grande portion que nous, il n'y aurait ni justice ni raison dans leurs prétentions, puisqu'il ne convient pas qu'un petit nombre de particuliers s'approprient ce qui appartient également à tous les citoyens : ils auraient cependant quelque léger prétexte pour colorer leur avarice insatiable. Mais ne pouvant pas se vanter de s'être signalés par des actions de bravoure, ou d'avoir fait de grands exploits qui autorisent leur usurpation, leur procédé n'est-il pas insupportable ? Et puisqu'ils sont assez effrontés pour ne pas restituer ce qu'ils nous ont enlevé par la violence, souffrirons-nous plus longtemps qu'ils jouissent du fruit de nos conquêtes ?
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