[10,3] Τὸ μὲν οὖν καταλύσασθαι τὰ πρὸς ἀλλήλους
ἐγκλήματα καὶ μιᾷ χρήσασθαι γνώμῃ περὶ τῶν κοινῶν,
ὡς ὑπετίθεντο οἱ χρησμοί, πάντες ὡμολόγουν· ὅπως
δ´ ἂν τοῦτο γένοιτο καὶ ἀπὸ τίνων ἀρξαμένων εἴκειν
τοῖς ἑτέροις τὸ διάφορον παύσαιτο στασιάζον, οὐ
μικρὰν αὐτοῖς παρεῖχεν ἀπορίαν. οἱ μὲν γὰρ ὕπατοι
καὶ οἱ τῆς βουλῆς προεστῶτες τοὺς εἰσφέροντας καινὰ
πολιτεύματα δημάρχους καὶ καταλύειν ἀξιοῦντας τὸν
πάτριον τῆς πολιτείας κόσμον αἰτίους ἀπέφαινον τῆς
ταραχῆς. οἱ δὲ δήμαρχοι σφᾶς μὲν αὐτοὺς οὐδὲν
ἔλεγον ἀνάξιον δρᾶν οὔτε ἄδικον οὔτε ἀσύμφορον
εὐνομίαν εἰσάγειν βουλομένους καὶ ἰσηγορίαν· τοὺς δὲ
ὑπάτους καὶ τοὺς πατρικίους αἰτίους ἔσεσθαι τῆς
στάσεως ἔλεγον ἀνομίαν αὔξοντας καὶ πλεονεξίαν καὶ
ζηλοῦντας τὰ τῶν τυράννων ἔθη. ταῦτα καὶ πολλὰ
τούτοις ὅμοια παρ´ ἑκατέρων ἐπὶ πολλὰς ἡμέρας ἐλέγετο,
καὶ προὔβαινε διὰ κενῆς ὁ χρόνος· ἐν ᾧ τῶν
κατὰ τὴν πόλιν οὔτε δημοσίων οὔτε ἰδίων οὐδὲν
ἐτελεῖτο. ὡς δ´ οὐδὲν ἐγίνετο τῶν προὔργου, λόγων
μὲν ἐκείνων καὶ κατηγοριῶν, ἃς ἐποιοῦντο κατὰ τῆς
βουλῆς, οἱ δήμαρχοι ἀπέστησαν· συναγαγόντες δὲ τὸ
πλῆθος εἰς τὴν ἐκκλησίαν ὑπέσχοντο τῷ δήμῳ νόμον
εἰσοίσειν ὑπὲρ ὧν ἠξίουν. ἐπαινέσαντος δὲ τοῦ πλήθους τὸν λόγον οὐδὲν ἔτι
ἀναβαλόμενοι τὸν παρασκευασθέντα νόμον ἀνέγνωσαν· κεφάλαια δὲ αὐτοῦ
τάδε ἦν· ἄνδρας αἱρεθῆναι δέκα ὑπὸ τοῦ δήμου
συναχθείσης ἀγορᾶς ἐννόμου τοὺς πρεσβυτάτους τε
καὶ φρονιμωτάτους, οἷς ἐστι πλείστη πρόνοια τιμῆς τε
καὶ δόξης ἀγαθῆς· τούτους δὲ συγγράψαντας τοὺς
ὑπὲρ ἁπάντων νόμους τῶν τε κοινῶν καὶ τῶν ἰδίων
εἰς τὸν δῆμον ἐξενεγκεῖν· τοὺς δὲ συγγραφησομένους
ὑπ´ αὐτῶν νόμους κεῖσθαι ἐν ἀγορᾷ ταῖς καθ´ ἕκαστον
ἐνιαυτὸν ἀποδειχθησομέναις ἀρχαῖς καὶ τοῖς ἰδιώταις
ὅρους τῶν πρὸς ἀλλήλους δικαίων. τοῦτον προθέντες
τὸν νόμον ἐξουσίαν ἔδοσαν τοῖς βουλομένοις αὐτοῦ
κατηγορεῖν, ἀποδείξαντες τὴν τρίτην ἀγοράν. ἦσαν δὲ
πολλοὶ καὶ οὐχ οἱ φαυλότατοι τῶν ἐκ τοῦ συνεδρίου,
πρεσβύτεροι καὶ νέοι, κατήγοροι τοῦ νόμου, λόγους
διεξιόντες ἐκ πολλῆς ἐπιμελείας καὶ παρασκευῆς· καὶ
τοῦτ´ ἐφ´ ἡμέρας ἐγίνετο συχνάς. ἔπειτα οἱ δήμαρχοι
δυσχεραίνοντες ἐπὶ τῇ διατριβῇ τοῦ χρόνου λόγον μὲν
οὐδένα ἔτι τοῖς κατηγόροις τοῦ νόμου προέθεσαν,
ἡμέραν δὲ ἀποδείξαντες, ἐν ᾗ κυρώσειν αὐτὸν ἔμελλον,
παρεῖναι τοὺς δημότας εἰς αὐτὴν παρεκάλουν ἀθρόους,
ὡς οὐκέτι ταῖς μακραῖς δημηγορίαις ἐνοχληθησομένους,
ἀλλ´ ἐποίσοντας ὑπὲρ αὐτοῦ τὴν ψῆφον κατὰ φυλάς.
οἱ μὲν δὴ ταῦτα ὑποσχόμενοι διέλυσαν τὴν ἐκκλησίαν.
| [10,3] Toute l'assemblée fut d'avis qu'il fallait travailler de concert à faire cesser les accusations qu'on formait les uns contre les autres, afin de n'avoir tous qu'un seul et même esprit dans l'administration des affaires, comme portaient les oracles. Mais on était fort embarrassé sur les moyens d'établir à Rome cette parfaite union et d'apaiser les troubles par une réconciliation sincère. La difficulté était de savoir lequel des deux partis commencerait le premier à faire les avances pour céder à ses adversaires. Les consuls et les plus notables du sénat prétendaient qu'on devait regarder les tribuns comme la principale cause de tous les troubles, parce qu'ils avaient voulu abolir l'ancienne forme du gouvernement et introduire des nouveautés. Les tribuns disaient au contraire qu'ils ne faisaient rien qui fut ou indigne de leurs ancêtres, ou injuste et nuisible à l'état, puisqu'ils voulaient seulement introduire l'usage des bonnes lois et établir l'égalité entre tous les citoyens, que les consuls et les patriciens étaient les seuls auteurs des séditions, parce qu'en fomentant la transgression des lois ils ne faisaient qu'augmenter de plus en plus leur domination insupportable qui ne tendait qu'à une véritable tyrannie.
II. Pendant plusieurs jours on tint de semblables propos de part et d'autre. Le temps de passait sans rien conclure, et sans terminer aucune affaire, soit particulière, soit publique. Les tribuns enfin s'aperçoivent qu'ils ne gagnent rien par leurs remontrances et par les plaintes continuelles qu'ils faisaient contre le sénat. Aussitôt ils laissent là toutes leurs vaines poursuites pour prendre d'autres mesures plus convenables. Ils convoquent le peuple, et lui promettent de faire une loi qui renfermera toutes leurs demandes. L'assemblée applaudit à cette proposition, et dans le moment ils font lecture de la loi qu'ils avaient déjà écrite et minutée. En voici la teneur : Que le peuple dans une assemblée légitime, choisirait dix députes respectables par leur âge et par leur prudence, qui n'eussent que l'honneur et la véritable gloire en recommandation: Que ces décemvirs feraient des lois sur toutes les affaires tant publiques que particulières ; et qu'ensuite ils les proposeraient dans une assemblée du peuple : Que les lois qu'ils auraient faites, seraient affichées dans la place publique pour régler les droits tant des particuliers que des magistrats qu'on élirait chaque année.
III. Après avoir proposé cette loi en pleine assemblée, ils laissèrent à tous ceux qui ne la trouveraient pas bonne la liberté de la blâmer, leur accordant du temps jusqu'au troisième jour de marché, c'est- à-dire environ vingt-sept jours, pour faire leurs remontrances. Il y eut plusieurs personnes, et même des plus notables du sénat, tant entre les anciens que parmi les jeunes, qui blâmèrent la loi par des discours étudiés et préparés avec beaucoup de soin, ce qui dura pendant plusieurs jours.
IV. Ensuite les tribuns indignés de ce qu'on perdait ainsi le temps, ne voulurent plus écouter ceux qui parlaient contre la loi. Ayant indiqué le jour auquel ils devaient la confirmer, ils exhortèrent tous les plébéiens de se trouver à l'assemblée pour donner leurs suffrages par tribus, leur promettant qu'on ne leur fatiguerait plus les oreilles par de longues harangues. Sur ces promesses, ils renvoyèrent l'assemblée.
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