[10,12] Ταῦτ´ εἰπόντος αὐτοῦ πολλή τις ἔκπληξις
κατέσχε τὸ συνέδριον καὶ ἀμηχανία· διελογίζοντό τε
καὶ συνελάλουν ἀλλήλοις, ὡς χαλεπὸν ἑκάτερον ἦν,
καὶ τὸ συγχωρεῖν τοῖς δημάρχοις ζητήσεις ἐφ´ ἑαυτῶν
ποιεῖσθαι περὶ κοινοῦ καὶ μεγάλου πράγματος, καὶ
τὸ μὴ συγχωρεῖν. ὑποπτεύσας δ´ αὐτῶν τὴν γνώμην
ἀνέστη τῶν ὑπάτων ἅτερος, Γάιος Κλαύδιος καὶ
ἔλεξε τοιάδε· Οὐ δέδοικα, Οὐεργίνιε, μή με ὑπολάβωσιν
οὗτοι κοινωνὸν εἶναι τῆς συνωμοσίας, ἣν ἐφ´
ὑμῖν καὶ τῷ δήμῳ πράττεσθαι λέγετε, ἢ τὰ ὑπὲρ
ἐμαυτοῦ δεδιότα ἢ τῶν ἐμῶν τινος ἐνόχου ταῖς αἰτίαις
ὄντος ἀνεστάναι τἀναντία ὑμῖν ἐροῦντα· ὁ γὰρ βίος
ἀπολύει με πάσης ὑποψίας τοιαύτης. ἃ δὲ νομίζω τῇ
τε βουλῇ καὶ τῷ δήμῳ συμφέρειν, ἀπὸ τοῦ κρατίστου
καὶ δίχα πάσης εὐλαβείας ἐρῶ. πολλοῦ, μᾶλλον δὲ
τοῦ παντὸς ἁμαρτάνειν δοκεῖ μοι Οὐεργίνιος, εἴ τινα
ὑπείληφεν ἡμῶν ἐρεῖν, ἢ ὡς ἀνεξέταστον ἀφεῖσθαι
δεῖ πρᾶγμα οὕτως ὂν μέγα καὶ ἀναγκαῖον, ἢ ὡς οὐ
δεῖ κοινωνεῖν οὐδὲ παρεῖναι τῇ ζητήσει τοὺς ἀνειληφότας τὴν τοῦ δήμου ἀρχήν.
οὐθεὶς οὔτε ἠλίθιός
ἐστιν οὕτως οὔτε τῷ δήμῳ κακόνους, ὥστε ταῦτα
λέγειν. τί οὖν, εἴ τις ἔροιτό με, παθών, ἃ συγχωρῶ
καί φημι δίκαια εἶναι, τούτοις ἀντιλέξων ἀνέστην, καὶ
τί βούλεταί μου ὁ λόγος, ἐγὼ νὴ Δία φράσω πρὸς
ὑμᾶς. παντὸς οἴομαι δεῖν πράγματος, ὦ βουλή, τὰς
ἀρχὰς καὶ τὰς πρώτας ὑποθέσεις τοὺς εὖ φρονοῦντας
ἀκριβῶς σκοπεῖν· οἷαι γὰρ ἂν αὗται τύχωσιν οὖσαι,
τοιούτους ἀνάγκη γίνεσθαι καὶ τοὺς περὶ αὐτῶν λόγους. φέρε δή, τίς ἡ τοῦδε τοῦ
πράγματος ὑπόθεσίς
ἐστι καὶ τί τὸ βούλευμα τῶν δημάρχων, ἀκούσατέ μου.
οὐκ ἐνῆν τούτοις οὐδέν, ὧν ἐν τῷ παρελθόντι ἐνιαυτῷ
πράττειν ἐπιβαλλόμενοι διεκωλύθησαν, ἐπιτελέσασθαι
νῦν ὑμῶν τε ἐναντιουμένων αὐτοῖς ὡς πρότερον καὶ
τοῦ δήμου μηκέθ´ ὁμοίως συναγωνιζομένου. συνιδόντες
δὴ τοῦτο ἐσκόπουν, ὅπως ἂν ὑμεῖς τ´ ἀναγκασθείητε
παρὰ γνώμην αὐτοῖς εἶξαι, καὶ ὁ δῆμος ἅπαντα ὅς´
ἂν ἀξιῶσι συμπράττειν. ἀληθῆ μὲν οὖν καὶ δικαίαν
ὑπόθεσιν οὐδεμίαν εὕρισκον, δι´ ἧς ἑκάτερον τούτοις
ἔσται, πολλὰ δὲ βουλεύματα πειράζοντες καὶ στρέφοντες
ἄνω καὶ κάτω τὸ πρᾶγμα τελευτῶντες ἐπὶ τοιοῦτον δή
τινα λογισμὸν ἦλθον· αἰτιασώμεθα συνίστασθαί τινας
ἐκ τῶν ἐπιφανῶν ἐπὶ καταλύσει τοῦ δήμου, καὶ σφάττειν διεγνωκέναι τοὺς
παρέχοντας αὐτῷ τὸ ἀσφαλές.
καὶ ταῦτα ἐκ πολλοῦ παρασκευάσαντες λέγεσθαι κατὰ
τὴν πόλιν, ὅταν ἤδη πιστὰ εἶναι τοῖς πολλοῖς δόξῃ -
δόξει δὲ διὰ τὸ δέος - ἐπιστολὰς μηχανησώμεθα
πολλῶν παρόντων ἡμῖν ὑπ´ ἀνδρὸς ἀγνῶτος ἀναδοθῆναι· ἔπειτ´ ἐλθόντες ἐπὶ τὸ
συνέδριον ἀγανακτῶμέν
τε καὶ σχετλιάζωμεν καὶ τοῦ ζητεῖν τὰ προσηγγελμένα
αἰτῶμεν τὴν ἐξουσίαν. ἐάν τε γὰρ ἀντιλέγωσιν ἡμῖν
οἱ πατρίκιοι, ταύτην ληψόμεθα τοῦ διαβαλεῖν αὐτοὺς
πρὸς τὸν δῆμον ἀφορμήν, καὶ οὕτως ἅπαν τὸ δημοτικὸν ἠγριωμένον αὐτοῖς ἕτοιμον
ἡμῖν εἰς ἃ βουλόμεθα
ὑπάρξει· ἐάν τε συγχωρῶσι, τοὺς γενναιοτάτους ἐξ
αὐτῶν καὶ πλεῖστα ἡμῖν ἐναντιωθέντας πρεσβυτέρους
τε καὶ νέους ἐλαύνωμεν, ὡς εὑρηκότες ταῖς αἰτίαις
ἐνόχους. ἐκεῖνοι δὲ ἄρα τὰς καταγνώσεις δεδιότες ἢ
συμβήσονται πρὸς ἡμᾶς ἐπὶ τῷ μηθὲν ἔτι ἀντιπράττειν
ἢ καταλιπεῖν ἀναγκασθήσονται τὴν πόλιν. ἐκ δὲ τούτου πολλὴν ποιήσομεν ἐρημίαν
τοῦ ἀντιπάλου.
| [10,12] VII. Ce discours du tribun jeta tellement l'épouvante dans les esprits, qu'on ne savait plus quel parti prendre. Les sénateurs ayant conféré ensemble, trouvaient qu'il était également périlleux ou d'irriter les tribuns par un refus ou de leur donner le pouvoir de faire seuls et par eux-mêmes les informations sur une affaire importante qui intéressait tout le public. Enfin Caius Claudius un des consuls, eut quelque soupçon de la mauvaise foi des tribuns, et pénétra dans leurs intrigues et dans leurs vues les plus secrètes. Il se leva de son siège, et parla en ces termes.
« Je ne crains pas, Virginius, que les sénateurs me soupçonnent d'être complice de la conjuration que vous dites qu'on a tramée contre vous et contre le peuple. On n'a garde de s'imaginer, que si je m'oppose à vos demandes, c'est que j'appréhende pour moi ou pour quelqu'un des miens, comme étant coupable du crime dont vous voulez qu'on informe. En effet, ma vie passée me met entièrement à couvert de tout soupçon de cette nature. Je vous dirai donc avec liberté et sans aucun respect humain, ce que je crois de plus avantageux au sénat et au peuple. Il me paraît que Virginius se trompe de beaucoup, ou pour mieux dire, il se trompe entièrement, s'il croit que quelqu'un de nous dira qu'il n'est pas besoin de faire des perquisitions sur une chose aussi importante et aussi nécessaire que celle dont il s'agit, ou qu'au moins il ne faut pas que les magistrats du peuple soient admis à ces informations, supposé qu'on en fasse. Il n'y a personne, ou assez déraisonnable ou assez ennemi du peuple pour avoir de semblables sentiments. Si donc on veut savoir ce qui m'oblige de me lever pour combattre des prétentions que je trouve pleines d'équité, et si l'on me demande quel est le but de mon discours, soyez persuadés, Messieurs, que je ne balancerai pas à vous le dire; j'en atteste le grand Jupiter.
VIII. Pour moi, je crois que pour parler judicieusement sur une affaire, tout homme sage doit remonter jusqu'à la source, examiner les commencements avec attention, et considérer le but de chaque chose : car tel est le commencement et le premier but d'une affaire, tels aussi doivent être les discours de celui qui la discute. Sur ce principe, Messieurs, voyons ce qui fait agir les tribuns, examinons quelles ont été d'abord leurs premières vues. Sous notre consulat ils n'ont pu venir à bout de leurs entreprises, que nous avions fait échouer dès l'année précédente. Nous y avons mis des obstacles invincibles, le peuple même s'est ralenti, et devenu moins ardent, ils ne l'ont plus trouvé si favorable à leurs desseins. Qu'ont-ils fait après cela? Ils ont cherché de nouveaux moyens pour vaincre votre résistance, et pour obliger le peuple à les soutenir dans tous leurs projets. Mais n'ayant point trouvé de voies légitimes pour réussir dans ces deux choses, ils ont fait plusieurs tentatives, ils se sont donné mille mouvements, ils ont tourné et retourné l'affaire sur tous les sens enfin après bien des intrigues et des consultations, ils ont raisonné de cette manière. Feignons, ont-ils dit, que quelques-uns des plus apparents de cette ville se sont ligués pour dépouiller le peuple de ses pouvoirs, et qu'ils ont résolu d'égorger ceux qui le protègent. Quand nous aurons semé ces bruits pendant quelque temps dans la ville de Rome, et qu'ils auront fait impression sur les esprits, qui saisis de crainte se persuaderont aisément ce qu'ils appréhendent, nous trouverons le moyen de nous faire rendre des lettres par quelque inconnu en présence de plusieurs témoins. Ensuite nous irons au sénat, nous y porterons nos plaintes, nous gémirons, et nous ferons éclater nos ressentiments, et nous lui demanderons la permission de faire des informations sur ce qu'on nous aura mandé. Si les patriciens nous la refusent, nous prendrons de là occasion de leur faire un crime auprès du peuple : par ce moyen tous les plébéiens irrités contre eux, seront prêts à exécuter tout ce que nous voudrons. Si au contraire ils nous l'accordent, nous poursuivrons comme coupables de trahison les plus illustres du sénat : nous n'épargnerons ni les jeunes ni les plus anciens : nous nous déferons enfin des plus adents à s'opposer à nos desseins. La crainte d'être punis les obligera ou à sortir de la ville, ou à s'accommoder avec nous, ou à nous promettre de ne plus traverser nos entreprises: par cet artifice, nos adversaires réduits à un très-petit nombre, ne seront plus en état de nous nuire.
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