[6,87] Τοιαῦτα λέγοντος τοῦ Μενηνίου πολλαὶ
καὶ ποικίλαι παρ´ ὅλην ἐγίγνοντο τὴν δημηγορίαν ἐκ
τῶν παρόντων φωναί. ἐπειδὴ δὲ τελευτῶν τοῦ λόγου
πρὸς ὀλοφυρμοὺς ἐτράπετο καὶ τὰς μελλούσας καθέξειν
συμφορὰς τούς τε ὑπομένοντας ἐν τῇ πόλει καὶ τοὺς
ἀπελαυνομένους καὶ τὰς ἀμφοῖν ἀνεκλαύσατο τύχας,
δάκρυά θ´ ἁπάντων ἐξεχεῖτο καὶ μιᾷ βοῇ συμφρονήσαντες
ἀνεβόησαν ἀπάγειν σφᾶς εἰς τὴν πόλιν καὶ μὴ
τρίβειν τὸν χρόνον· ὀλίγου τε πάνυ ἐδέησαν ἀπιέναι
διὰ τάχους ἐκ τῆς ἐκκλησίας ἅπαντα τὰ πράγματα τοῖς
πρεσβευταῖς ἐπιτρέψαντες καὶ μηδὲν ἄλλο τῶν εἰς
ἀσφάλειαν πραγματευσάμενοι, εἰ μὴ παρελθὼν ὁ Βροῦτος
ἐπέσχε τὰς ὁρμὰς αὐτῶν τὰ μὲν ἄλλα καλῶς ἔχειν
τῷ δήμῳ λέγων, ὅσα ἡ βουλὴ ὑπισχνεῖτο, καὶ πολλὴν
αὐτῇ τῶν συγχωρηθέντων χάριν ἔχειν ἀξιῶν· δεδοικέναι
μέντοι τὸν ἅπαντα χρόνον φάσκων καὶ τοὺς
αὖθίς ποτε τυραννικοὺς ἄνδρας ἐπιχειρήσοντας εἰ τύχοι,
περὶ τῶν γεγονότων τῷ δήμῳ μνησικακεῖν. μίαν δ´
εἶναι πᾶσι τοῖς δεδοικόσι τοὺς κρείττονας μόνην ἀσφάλειαν
ταύτην, εἰ γένοιτο αὐτοῖς φανερόν, ὅτι τοῖς βουλομένοις
αὐτοὺς ἀδικεῖν οὐχ ὑπάρχει δύναμις· ἕως δ´
ἂν παρῇ τὸ δύνασθαι τὰ πονηρὰ δρᾶν, οὐκ ἐλλείψειν
τοῖς πονηροῖς τὸ βούλεσθαι. ταύτης οὖν εἰ τύχοιεν
τῆς ἀσφαλείας, οὐθὲν αὐτοῖς ἔτι δεήσειν. ὑποτυχόντος
δὲ τοῦ Μενηνίου καὶ κελεύσαντος λέγειν τὴν ἀσφάλειαν, ἧς
ἔτι τὸν δῆμον οἴεται δεῖσθαι, Συγχωρήσατε,
φησίν, ἡμῖν ἄρχοντας ἀποδεικνύναι καθ´ ἕκαστον ἐνιαυτὸν
ἐξ ἡμῶν ὁσουσδήτινας, οἵτινες ἄλλου μὲν οὐδενὸς ἔσονται
κύριοι, τοῖς δ´ ἀδικουμένοις ἢ κατισχυομένοις
τῶν δημοτῶν βοηθήσουσι καὶ οὐ περιόψονται
τῶν δικαίων ἀποστερούμενον οὐθένα· τοῦτο ὑμᾶς
ἀντιβολοῦμεν καὶ δεόμεθα πρὸς τοῖς ἄλλοις οἷς δεδώκατε,
εἰ μὴ λόγος, ἀλλ´ ἔργον εἰσὶν αἱ διαλλαγαί, δοῦναι καὶ χαρίσασθαι.
| [6,87] IX. Pendant que Menenius parlait ainsi, il s'éleva différents discours
par toute l'assemblée. Mais lorsque vers la fin de sa harangue, il se mit a
gémir sur les malheurs dont étaient menacés tous les Romains, tant ceux
qui étaient restés à la ville que ceux qui en étaient sortis, pendant qu'il
déplorait la mauvaise fortune des uns et des autres, tous fondirent en
larmes, et lui crièrent d'une commune voix qu'il les menât à Rome sans
différer plus longtemps. Peu s'en fallut même qu'ils ne se retirassent tout
d'un coup de l'assemblée, remettant tous leurs intérêts entre les mains
des ambassadeurs sans songer à prendre d'autres sûretés. Mais Brutus
s'étant avancé au milieu d'eux, réprima cet empressement : il leur dit
qu'on devait être content des promesses du sénat, et qu'on lui était fort
obligé d'avoir accordé au peuple toutes ses demandes. Que cependant il
craignait toujours l'avenir, et qu'il appréhendait que ces esprits
tyranniques et impérieux rappelant un jour le souvenir des anciennes
querelles, ne déchargeassent leur colère sur les plébéiens à la première
occasion qui s'en présenterait. Que le seul moyen de rassurer le peuple
contre les entreprises des grands dont il redoutait la puissance, était de
mettre ceux-ci entièrement hors d'état de lui nuire, puisqu'il était certain
que quand les méchants auraient le pouvoir de faire du mal, la volonté ne
leur manquerait pas. Qu'ainsi pourvu qu'on accordât aux plébéiens cette
parfaite sûreté, ils n'auraient plus besoin de rien.
X. Alors Menenius prenant la parole, lui demanda quelle était cette
nouvelle espèce de sûreté qu'il croyait encore nécessaire au peuple.
« Accordez-nous, répartit Brutus, la liberté de créer tous les ans des
magistrats choisis d'entre nous, qui n'auront point d'autre pouvoir que de
secourir les plébéiens à qui on fera quelqu'injustice ou violence, et
d'empêcher qu'on ne les dépouille de leurs droits. C'est la seule grâce
que nous vous prions instamment d'ajouter à celles que vous nous avez
déjà accordées. Ne nous la refusez pas, si vous voulez véritablement faire
la paix, et si vos propositions d'accommodement ne sont pas de vaines
paroles sans effet. »
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