[6,51] Οὕτω δὲ κακῶς ἐχόντων ἡμῖν τῶν ὑπαιθρίων
οὐδὲ τὰ ἐντὸς τείχους δεινὰ ἧττόν ἐστι φοβερά. οὔτε
γὰρ ὡς πολιορκησόμενοι παρεσκευάσμεθα ἐκ πολλοῦ
τὰ συμμαχικὰ οὔτε πλήθει αὐτοὶ ἀποχρῶντές ἐσμεν
ὡς πρὸς τοσαῦτα πολεμίων ἔθνη, τοῦ δ´ ὀλίγου καὶ
οὐκ ἀξιομάχου πληρώματος τὸ πλεῖόν ἐστι δημοτικόν,
θῆτες καὶ πελάται καὶ χειρώνακτες, οὐ πάνυ βέβαιοι
τεταραγμένης ἀριστοκρατίας φύλακες. αἵ τε νῦν αὐτομολίαι
συνεχεῖς αὐτῶν πρὸς τοὺς ἀφεστηκότας γινόμεναι, τὸ
σύμπαν ὕποπτον εἶναι παρεσκευάκασιν. ὑπὲρ
ἅπαντα δὲ ταῦτα ἡ τῶν ἐπιτηδείων συγκομιδὴ κρατουμένης
ὑπὸ τῶν πολεμίων τῆς γῆς ἀδύνατος οὖσα
φοβεῖ τε ἤδη λιμόν, ἐπειδάν τ´ ἐν τῷ ἀπόρῳ γενώμεθα ἔτι
μᾶλλον φοβήσει, χωρὶς δὲ τούτων ὁ μηδένα
χρόνον ἡμᾶς εὐσταθεῖν ταῖς διανοίαις ἐῶν πόλεμος.
ἅπαντα δ´ ὑπερβάλλει τὰ δεινὰ γύναια τῶν ἀποστατῶν καὶ
παιδία νήπια καὶ γηραιοὶ γονεῖς, ἐν ἐσθῆσιν
ἐλεειναῖς καὶ σχήμασι πενθίμοις περιφθειρόμενοι κατὰ
τὴν ἀγορὰν καὶ τοὺς στενωποὺς κλαίοντες, ἱκετεύοντες,
ἁπτόμενοι δεξιᾶς ἑκάστου καὶ γονάτων, ἀπολοφυρόμενοι τὴν
κατέχουσαν αὐτοὺς καὶ ἔτι μᾶλλον καθέξουσαν ἐρημίαν,
δεινὴ καὶ ἀνυπομόνητος ὄψις. οὐδεὶς
γοῦν ἐστιν οὕτως ὠμὸς τὸν τρόπον, ὃς οὐκ ἀνατρέπεται τὴν
ψυχὴν ὁρῶν ταῦτα καὶ πάσχει τι πρὸς τὰς
ἀνθρώπων τύχας. ὥστ´ εἰ μέλλοιμεν ἀσπείστως πρὸς
τὸ δημοτικὸν ἔχειν, ἀπαλλακτέον ἡμῖν καὶ ταῦτα τὰ
σώματα ἐκποδών, τὰ μὲν ὡς ἄχρηστα εἰς πολιορκίαν
ἐσόμενα, τὰ δ´ ὡς οὐ διαμενοῦντα βεβαίως φίλα.
ἀπελαυνομένων δὲ καὶ τούτων τίς ἡ φυλάξουσα τὴν πόλιν
ἔτι λειφθήσεται δύναμις; ἢ τίνι πιστεύσαντες ἐπικουρίᾳ
τὰ δεινὰ τολμήσομεν ὑπομένειν; ἡ μέντοι οἰκεία ἡμῶν
καταφυγὴ καὶ μόνη βέβαιος ἐλπίς, ἡ τῶν πατρικίων
ἀκμή, βραχεῖά ἐστιν, ὥσπερ ὁρᾶτε, καὶ οὐκ ἄξιον ἐπὶ
ταύτῃ μέγα φρονεῖν. τί οὖν οἱ τὸν πόλεμον ὑπομένειν
εἰσηγούμενοι ληροῦσι καὶ φενακίζουσιν ἡμᾶς,
ἀλλ´ οὐχὶ φανερῶς παραινοῦσιν ἀναιμωτὶ καὶ δίχα πόνου
παραδιδόναι τοῖς ἐχθροῖς ἤδη τὴν πόλιν;
| [6,51] XV. Pendant que nos affaires du dehors sont en si mauvais état,
celles du dedans ne vont pas mieux. Comme nous ne nous attendions
point a un siège, nous n'avons pas eu la précaution de rechercher le
secours des alliés. Nous n'avons point par nous-mêmes assez de monde
pour tenir contre tant d'ennemis ligués, et le peu qui nous reste de troupes
n'est presque composé que de plébéiens, de mercenaires, de clients, et
d'artisans qui ne sont guère en état de soutenir notre autorité chancelante
parmi tant de troubles. Ajoutez à cela que tous les jours il en déserte un
grand nombre pour se joindre aux rebelles ; ce qui nous rend fort
suspecte la fidélité de tous les autres.
XVI. OUTRE les maux qui nous accablent de tous côtés, l'ennemi
s'est emparé de nos terres, et on ne peut nous apporter les provisions
nécessaires. La famine est donc à craindre : et si ce terrible fléau tombe
sur nous, ne nous épouvantera-t-il pas plus que tous les autres malheurs ?
Mais sans parler de tout cela, la guerre est le plus grand de nos maux.
Elle ne nous laisse aucun repos, ni le temps de nous tranquilliser l'esprit
pour penser à nos affaires. Les femmes des révoltés, leurs petits enfants,
leurs pères et mères, accablés de vieillesse, revêtus d'habits de deuil qui
excitent la compassion, courent ça et là par la place publique et par les
carrefours. Ils fondent en larmes, ils conjurent avec les plus vives
instances tous ceux qu'ils rencontrent, ils leur prennent les mains, leur
embrassent les genoux, déplorent les malheurs présents et encore plus
ceux dont ils sont menacés ; spectacle affreux et capable d'attendrir les
cœurs les plus barbares. Est-il en effet des hommes assez durs pour
n'être pas touchés de leur infortune, et peut-on se défendre d'y prendre
part ? Ainsi, Messieurs, si nous ne voulons pas nous fier aux plébéiens, il
faut nous défaire de tous ces malheureux qui ne nous serviront de rien à
soutenir un siège et sur la fidélité desquels nous ne pouvons nullement
compter. Mais après que nous les aurons chassés, dites-moi, je vous prie,
quel secours nous restera-t-il pour garder la ville? Quelles forces aurons-nous
pour résister à tant de maux ? Nous n'aurons pour toute ressource
et pour unique espérance que la valeur et le courage des patriciens, qui,
comme vous voyez, ne peut pas aller bien loin ni nous donner de si hauts
sentiments de nous-mêmes. A quoi rêvent donc ceux qui nous exhortent à
soutenir une guerre ? Ne se moquent-ils pas de nous, et ne vaudrait-il pas
mieux nous conseiller ouvertement de livrer la ville aux ennemis sans
nous mettre en défense et sans répandre de sang?
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