HODOI ELEKTRONIKAI
Du texte à l'hypertexte

Denys d'Halicarnasse, Les Antiquités romaines, livre V (avec trad. française)

Chapitre 8

  Chapitre 8

[5,8] Τὰ δὲ μετὰ ταῦτα ἔργα θατέρου τῶν ὑπάτων Βρούτου μεγάλα καὶ θαυμαστὰ λέγειν ἔχων, ἐφ´ οἷς μέγιστα φρονοῦσι Ῥωμαῖοι, δέδοικα μὴ σκληρὰ καὶ ἄπιστα τοῖς Ἕλλησι δόξω λέγειν, ἐπειδὴ πεφύκασιν ἅπαντες ἀπὸ τῶν ἰδίων παθῶν τὰ περὶ τῶν ἄλλων λεγόμενα κρίνειν καὶ τὸ πιστὸν ἄπιστον ἐφ´ ἑαυτοὺς ποιεῖν· ἐρῶ δ´ οὖν ὅμως. ἐπειδὴ γὰρ ἡμέρα τάχιστα ἐγένετο, καθίσας ἐπὶ τὸ βῆμα καὶ τὰς ἐπιστολὰς τῶν ἐν τῇ συνωμοσίᾳ διασκεπτόμενος, ὡς εὗρε τὰς ὑπὸ τῶν υἱῶν γραφείσας ταῖς σφραγῖσιν ἑκατέραν γνωρίσας καὶ μετὰ τὸ λῦσαι τὰ σημεῖα τοῖς χειρογράφοις, ἀναγνωσθῆναι πρῶτον ἐκέλευσεν ἀμφοτέρας ὑπὸ τοῦ γραμματέως εἰς τὴν ἁπάντων τῶν παρόντων ἀκοήν· ἔπειτα λέγειν ἐκέλευσε τοῖς παισίν, εἴ τι βούλονται. ὡς δ´ οὐκ ἐτόλμησεν αὐτῶν οὐδέτερος πρὸς ἄρνησιν ἀναιδῆ τραπέσθαι, ἀλλὰ κατεψηφικότες ἑαυτῶν ἔκλαιον ἀμφότεροι, ὀλίγον δ´ ἐπισχὼν χρόνον ἀνίσταται καὶ σιωπὴν προκηρύξας ἐκδεχομένων ἁπάντων, τί τέλος ἐξοίσει, θάνατον ἔφη καταδικάζειν τῶν τέκνων· ἐφ´ πάντες ἀνέκραγον οὐκ ἀξιοῦντες τοιοῦτον ἄνδρα ζημιωθῆναι τέκνων θανάτῳ καὶ χαρίζεσθαι τὰς ψυχὰς τῶν μειρακίων ἐβούλοντο τῷ πατρί. δ´ οὔτε τὰς φωνὰς αὐτῶν οὔτε τὰς οἰμωγὰς ἀνασχόμενος ἐκέλευσε τοῖς ὑπηρέταις ἀπάγειν τοὺς νεανίσκους ὀλοφυρομένους καὶ ἀντιβολοῦντας καὶ ταῖς φιλτάταις αὐτὸν ἀνακαλουμένους προσηγορίαις. θαυμαστὸν μὲν καὶ τοῦτο πᾶσιν ἐφάνη τὸ μηδὲν ἐνδοῦναι τὸν ἄνδρα μήτε πρὸς τὰς δεήσεις τῶν πολιτῶν μήτε πρὸς τοὺς οἴκτους τῶν τέκτων, πολλῷ δ´ ἔτι τούτου θαυμασιώτερον τὸ περὶ τὰς τιμωρίας αὐτῶν ἀμείλικτον. οὔτε γὰρ ἄλλοθί που συνεχώρησεν ἀπαχθέντας τοὺς υἱοὺς ἔξω τῆς ἁπάντων ὄψεως ἀποθανεῖν, οὔτ´ αὐτὸς ἐκ τῆς ἀγορᾶς ὑπανεχώρησεν, ἕως ἐκεῖνοι κολασθῶσι, τὴν δεινὴν θέαν ἐκτρεπόμενος, οὔτ´ ἄνευ προπηλακισμοῦ ἀφῆκεν αὐτοῖς τὴν ἐψηφισμένην ἐκπληρῶσαι μοῖραν· ἀλλὰ πάντα τὰ περὶ τὰς τιμωρίας ἔθη καὶ νόμιμα φυλάττων, ὅσα τοῖς κακούργοις ἀπόκειται παθεῖν, ἐν ἀγορᾷ πάντων ὁρώντων αἰκισθέντας τὰ σώματα πληγαῖς, αὐτὸς ἅπασι τοῖς γιγνομένοις παρών, τότε συνεχώρησε τοὺς αὐχένας τοῖς πελέκεσιν ἀποκοπῆναι. ὑπὲρ ἅπαντα δὲ τὰ παράδοξα καὶ θαυμαστὰ τοῦ ἀνδρὸς τὸ ἀτενὲς τῆς ὄψεως καὶ ἄτεγκτον ἦν· ὅς γε τῶν ἄλλων ἁπάντων ὅσοι τῷ πάθει παρεγένοντο κλαιόντων μόνος οὔτ´ ἀνακλαυσάμενος ὤφθη τὸν μόρον τῶν τέκνων οὔτ´ ἀποιμώξας ἑαυτὸν τῆς καθεξούσης τὸν οἶκον ἐρημίας οὔτ´ ἄλλο μαλακὸν οὐθὲν ἐνδούς, ἀλλ´ ἄδακρύς τε καὶ ἀστένακτος καὶ ἀτενὴς διαμένων εὐκαρδίως ἤνεγκε τὴν συμφοράν. οὕτως ἰσχυρὸς ἦν τὴν γνώμην καὶ βέβαιος τὰ κριθέντα διατηρεῖν καὶ τῶν ἐπιταραττόντων τοὺς λογισμοὺς παθῶν καρτερός. [5,8] V. JE crains que ce que je vais dire maintenant de l'action généreuse du consul Brutus si vantée chez les Romains, ne paraisse trop dur aux autres {nations et surtout à nos} Grecs pour mériter quelque créance. En effet tous les hommes sont ainsi faits que ce qui se passe chez eux devient la règle du jugement qu'ils portent sur ce qu'on leur raconte des autres peuples, et quelque créance que mérite un fait avéré, ils ne peuvent y ajouter foi dès qu'il n'est pas conforme à leurs mœurs ou aux principes qu'ils ont reçus dans leur éducation. Quoique en soit, je ne laisserai pas de rapporter ce que fit le consul en cette occasion. Aussitôt qu'il fut jour, Brutus s'assit sur son tribunal. Il jeta les yeux sur les lettres des conjurés, et reconnaissant d'abord au cachet et à l'écriture celles de ses fils, il les fit lire toutes les deux par un secrétaire qui prit un ton de voix assez haut pour le faire entendre de toute l'assemblée. La lecture achevée, le consul commanda à ses enfants de répondre, s'ils avaient quelque chose à dire pour leur défense. Mais ces deux jeunes gens ne furent pas assez hardis pour s'inscrire en faux contre une vérité constante, et s'étant déjà condamnés eux-mêmes ils n'eurent recours qu'aux larmes. Brutus fut un moment sans parler; il se leva ensuite, et ayant fait faire silence, lorsqu'il vit que tout le peuple était attentif au dénouement de cette grande affaire ; il prononça la sentence de mort contre ses deux fils. VI. ALORS toute l'assemblée se récria qu'il n'était pas juste qu'un homme comme Brutus eût le chagrin de voir mourir ses enfants, et voulut qu'on leur accordât la vie en faveur de leur père. Mais malgré ces remontrances, insensible aux larmes des deux coupables, le consul ordonna aux licteurs de les conduire à la mort. Il ne se laissa fléchir ni par leurs gémissements ni par les prières les plus touchantes qu'ils lui adressaient nommément avec les termes les plus tendres et les plus capables de lui gagner le cœur. Tous les citoyens étaient surpris de voir un père qui n'écoutait ni la voix de la nature qui parlait en faveur de son sang, ni les vives sollicitations d'une nombreuse assemblée qui tâchait de le ramener à la douceur. Mais la sévérité qu'il fit paraitre dans la manière de les punir, étonna beaucoup plus. Non seulement il ne permit pas qu'on les menât ailleurs pour dérober aux yeux du peuple le triste spectacle de leur mort ; il ne se retira pas lui-même de la place publique qu'ils n'eussent été punis, se mettant peu en peine de s'épargner la douleur de voir mourir ses propres fils d'une mort si tragique. Pour observer dans toute l'exactitude la rigueur des lois portées contre les malfaiteurs, il ne leur épargna ni l'ignominie d'un supplice public, ni la honte d'être battus et déchirés de verges. Enfin il voulut qu'on les décollât au milieu de la grande place devant tout le monde, et assista en personne à cette sanglante exécution jusqu'à ce qu'il eut vu tomber leurs têtes sous les coups des bourreaux. Davantage, il regarda leur punition, avec des yeux attentifs sans en paraître touché : et ce qui surpasse toute créance, les spectateurs fondant en larmes, il fut le seul qui ne versa point sur le sort de ses enfants. D'une constance inébranlable au milieu des malheurs de sa famille, à l'épreuve de toutes les rigueurs de la fortune, il ne lui échappa aucune plainte, il ne poussa pas un soupir ; il sut arrêter les mouvement de la tendresse paternelle; il supporta généreusement la vue de cette cruelle tragédie sans qu'il parût aucune altération sur son visage ; tant il est vrai qu'il donnait à la raison tout l'empire qu'elle peut avoir sur les passions, et que ferme dans les arrêts qu'il prononçait, rien n'était capable de lui troubler l'esprit ou de le détourner du parti qu'il avait pris.


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Dernière mise à jour : 25/06/2009