[5,67] Παντὸς δὲ μάλιστα σκοπεῖν αὐτοὺς ἠξίου
καινὴν καθισταμένους πολιτείαν, ὅπως μηθὲν εἰς αὐτὴν παρελεύσεται
πονηρὸν ἔθος, πολλὴν ἀνάγκην εἶναι λέγων ὁποῖ´ ἄττ´ ἂν ᾖ τὰ κοινὰ
τῶν πόλεων ἐπιτηδεύματα, τοιούτους γίνεσθαι τοὺς τῶν ἰδιωτῶν
βίους. ἔθος δ´ εἶναι οὐδὲν κάκιον οὔτε πόλεσιν οὔτε οἴκοις
τοῦ καθ´ ἡδονὰς ἀεὶ ζῆν ἕκαστον καὶ τοῦ πάντα συγχωρεῖσθαι τοῖς
ἥττοσιν ὑπὸ τῶν κρειττόνων, εἴτε πρὸς
χάριν εἴτε πρὸς ἀνάγκην· οὐ γὰρ ἀποπληροῦσθαι τὰς
ἐπιθυμίας τῶν ἀφρόνων τυγχανούσας ὧν ἂν δεηθῶσιν,
ἀλλ´ ἑτέρων εὐθὺς ὀρέγεσθαι μειζόνων καὶ εἰς ἄπειρον
προβαίνειν· μάλιστα δὲ τοῦτο πάσχειν τοὺς ὄχλους·
ἃ γὰρ καθ´ ἑαυτὸν ἕκαστος αἰσχύνεται πράττειν ἢ
δέδιεν ὑπὸ τοῦ κρείττονος κατειργόμενος, ταῦτ´ ἐν
κοινῷ γενομένους ἑτοιμότερον παρανομεῖν προσειληφότας ἰσχὺν ταῖς
ἑαυτῶν γνώμαις ἐκ τῶν τὰ ὅμοια
βουλομένων. ἀπληρώτους δὲ καὶ ἀορίστους ὑπαρχούσας τὰς τῶν
ἀνοήτων ὄχλων ἐπιθυμίας ἀρχομένας ἔφη
δεῖν κωλύειν, ἕως εἰσὶν ἀσθενεῖς, οὐχ, ὅταν ἰσχυραὶ
καὶ μεγάλαι δύνωνται, καθαιρεῖν. χαλεπωτέραν γὰρ
ὀργὴν ἅπαντας ἔχειν τῶν συγχωρηθέντων στερομένους
ἢ τῶν ἐλπιζομένων μὴ τυγχάνοντας. παραδείγμασί τε
πολλοῖς εἰς τοῦτ´ ἐχρήσατο πόλεων Ἑλληνίδων ἔργα
διεξιών, ὅσαι μαλακισθεῖσαι δι´ ἀκαιρούς τινας ἀφορμὰς καὶ
πονηρῶν ἐπιτηδευμάτων ἀρχὰς ἐφεῖσαι παρελθεῖν οὐκέτι παῦσαι καὶ
ἀνελεῖν αὐτὰ δύναμιν ἔσχον·
ἐξ ὧν εἰς αἰσχρὰς καὶ ἀνηκέστους ἠναγκάσθησαν προελθεῖν συμφοράς.
ἐοικέναι τε τῷ καθ´ ἕνα τὸ κοινὸν
ἔφη, ψυχῇ μὲν ἀνδρὸς ἀνάλογον ἐχούσης τι τῆς βουλῆς, σώματι δὲ
τοῦ δήμου. ἐὰν μὲν οὖν τῆς βουλῆς τὸν
ἄφρονα δῆμον ἄρχειν ἐῶσιν, ὅμοια πείσεσθαι αὐτοὺς
ἔφη τοῖς ὑποτάττουσι τὴν ψυχὴν τῷ σώματι καὶ μὴ
κατὰ τὸν λογισμόν, ἀλλὰ κατὰ τὰ πάθη ζῶσιν. ἐὰν
δ´ ἄρχεσθαί τε καὶ ἄγεσθαι τὸν δῆμον συνεθίζωσιν
ὑπὸ τῆς βουλῆς, ταὐτὸ ποιήσουσι τοῖς ὑποτάττουσι
τῇ ψυχῇ τὸ σῶμα καὶ πρὸς τὸ βέλτιστον, ἀλλὰ μὴ
πρὸς τὸ ἥδιστον τοὺς βίους ἄγουσι. βλάβην δὲ μεγάλην οὐδεμίαν
ἀπέφαινε συμβήσεσθαι τῇ πόλει, ἐὰν
οἱ πένητες ἀγανακτοῦντες ἐπὶ τῷ μὴ συγχωρηθῆναι
σφίσι τὴν χρεοκοπίαν μὴ θελήσωσιν ὑπὲρ αὐτῆς τὰ
ὅπλα ἀναλαβεῖν, ὀλίγους τινὰς εἶναι λέγων παντάπασι
τοὺς μηδὲν ὑπολειπομένους ἑαυτοῖς ἔξω τοῦ σώματος,
οὓς οὔτ´ ὠφέλειάν τινα παρέξεσθαι τῷ κοινῷ θαυμαστὴν
ὅσην παρόντας ταῖς στρατείαις, οὔτε βλάβην
ἀπόντας· ὑπομιμνήσκων αὐτούς, ὅτι τὴν ἐσχάτην ἀπελάμβανον ἐν τοῖς
πολέμοις χώραν οἱ τοὐλάχιστον ἔχοντες τοῦ βίου τίμημα, καὶ ὅτι
προσθήκης μοῖραν ἐπεῖχον οὗτοι τοῖς ἐν φάλαγγι τεταγμένοις,
καταπλήξεως ἕνεκα τῶν πολεμίων συνόντες, οἷα δὴ μηδὲν φέροντες
ὅπλον ὅτι μὴ σφενδόνας, ὧν ἐλάχιστον ἐν ταῖς μάχαις εἶναι ὄφελος.
| [5,67] XXI. IL pria les sénateurs de prendre garde surtout, qu'en
introduisant une nouvelle forme de gouvernement il ne s'y glissât quelque
mauvaise coutume, et de considérer que la vie des particuliers se
conforme toujours aux règles du gouvernement civil. Qu'il n'y a point de
plus pernicieuse maxime tant pour les villes que pour les familles, que de
laisser vivre un chacun selon ses passions, et de souffrir que les gens
de bien cèdent en tout aux méchants, soit par contrainte, soit de leur
propre mouvement. Que ceux qui n'ont point d'autre règle de leur conduite
qu'une folle passion et une cupidité aveugle, ne sont jamais contents :
que si vous leur accordez ce qu'ils demandent ils en désirent bientôt
davantage, et que l'avidité du peuple insensé va à l'infini sans avoir de
bornes. Que c'est là principalement le génie de la populace et que ce
qu'un particulier n'oserait faire parce que la honte ou la crainte des plus
puissants le retiennent dans le devoir, le peuple le fait sans aucun
scrupule dès qu'il se trouve autorisé par l'exemple des autres. Qu'ainsi les
désirs de la multitude insensée étant insatiables et sans bornes, il fallait
les arrêter dans leurs commencements pendant qu'ils étaient encore
faibles, sans attendre qu'ils se fussent fortifiés à un point qu'on ne pût les
déraciner et que c'est l'ordinaire de tous les hommes de s'irriter
davantage quand on leur ôte un bien dont on leur a déjà donné
jouissance, que lorsqu'on leur refuse ce qu'ils ont espéré. Pour prouver
ce qu'il avançait, il cita l'exemple de quelques villes grecques, qui pour
avoir négligé d'abord de mauvaises coutumes qu'on voulait introduire
dans la république, n'avaient pu dans la suite les abolir ; ce qui les avait
précipitées dans des malheurs également honteux et sans remède.
XXII. IL ajouta qu'une république ressemble à un homme, dont l'âme
représente en quelque façon le sénat, et le corps représente le peuple ;
que par conséquent, souffrir que la populace insensée commandât au
sénat, ce serait assujettir l'âme au corps et suivre l'impétuosité des
passions plutôt que la raison : que si au contraire ils accoutumaient le
peuple à se laisser conduire et gouverner par les sénateurs, ils seraient
comme un homme sage qui soumet le corps à l'esprit et qui règle sa vie
sur les maximes de l'honneur et de la justice plutôt que sur la volupté.
XXIII. IL leur fit voir que quand même les pauvres irrités de ce qu'on
ne voudrait pas leur accorder l'abolition de leurs dettes, refuseraient de
prendre les armes pour défendre la ville, ce ne serait pas un si grand
malheur, qu'ils n'étaient qu'en fort petit nombre, qu'ils n'avaient pour
toutes choses que leurs corps, et qu'ainsi, soit qu'ils consentissent à
prendre les armes, soit qu'ils s'obstinassent à ne point servir, leur
présence ou leur absence n'était pas capable de produire de grands effets
: que ceux qui n'avaient que peu de bien tenaient le dernier rang dans les
armées, et qu'ils ne servaient qu'à épouvanter les ennemis par leur
nombre, et à soutenir le corps de bataille, n'ayant point d'autres armes
que des frondes qui ne sont pas d'un grand usage dans les combats.
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