[4,9] Πολλή με ἀνάγκη κατείληφεν, ἄνδρες πολῖται,
κήδεσθαι τῶν παιδίων τούτων καὶ νηπίων. Ταρκύνιος
γὰρ ὁ πάππος αὐτῶν ἀπάτορα καὶ ἄπολιν ὄντα
με παραλαβὼν ἐξέθρεψεν οὐδὲν ἐνδεέστερον ἄγων τῶν
αὑτοῦ τέκνων καὶ τὴν ἑτέραν τῶν θυγατέρων ἔδωκέ
μοι γυναῖκα, καὶ παρὰ πάντα τὸν τοῦ βίου χρόνον
ὥσπερ ἐξ αὑτοῦ γεγονότα τιμῶν καὶ φιλῶν, ὡς καὶ
ὑμεῖς ἴστε, διετέλεσε, καὶ ἐπειδὴ τὰ περὶ τὴν ἐπιβουλὴν
αὐτῷ συνέπεσεν, εἴ τι πάθοι τῶν ἀνθρωπίνων,
ἐμοὶ τὴν ἐπιμέλειαν τῶν παιδίων ἐπίστευσε. τίς οὖν
ἢ πρὸς θεοὺς ὅσιον ἢ πρὸς ἀνθρώπους δίκαιον ὑπολήψεταί
με, ἐὰν ἐγκαταλίπω καὶ προδῶ τοὺς ὀρφανούς,
οἷς τοσαύτας ὀφείλω χάριτας; ἀλλ´ οὔτε τὴν ἐμαυτοῦ
προδώσω πίστιν οὐδὲ τὴν τῶν παιδίων ἐρημίαν ἐγκαταλείψω
κατὰ δύναμιν τὴν ἐμήν. δίκαιοι δ´ ἐστὲ καὶ
ὑμεῖς διαμεμνῆσθαι τὰς εὐεργεσίας, ἃς ὁ πάππος αὐτῶν
τὸ κοινὸν εὐηργέτησεν ὑποτάξας μὲν ὑμῖν τὰς Λατίνων
τοσαύτας πόλεις ἀντιποιουμένας τῆς ἀρχῆς, ὑπηκόους
δὲ ποιήσας Τυρρηνοὺς ἅπαντας μέγιστον τῶν περιοίκων
δυναμένους, ἀναγκάσας δὲ τὸ Σαβίνων ἔθνος
ὑποχείριον ὑμῖν γενέσθαι, μετὰ πολλῶν ἅπαντα ταῦτα
καὶ μεγάλων κινδύνων κατεργασάμενος. ὅσον μὲν οὖν
αὐτὸς ἔζη χρόνον, ἐκείνῳ προσῆκεν ὑμᾶς τὰς ὑπὲρ
τῶν εὐεργεσιῶν χάριτας εἰδέναι, ἐπειδὴ δὲ τετελεύτηκε
τὸν βίον τοῖς ἐγγόνοις αὐτοῦ τὰς ἀμοιβὰς ἀποτίνειν,
καὶ μὴ συγκατορύττειν ἅμα τοῖς σώμασι τῶν εὐεργετῶν
καὶ τὴν μνήμην τῶν ἔργων. δόξατε οὖν κοινῇ πάντες
ἐπίτροποι καταλελεῖφθαι τῶν παιδίων καὶ βεβαιοῦτε
αὐτοῖς ἣν ὁ πάππος κατέλιπεν ἀρχήν. οὐδὲν γὰρ τοσοῦτον
ἀπολαύσειαν ἂν ἐκ τῆς ἐμῆς ἑνὸς ὄντος προστασίας,
ὅσον ἐκ τῆς κοινῆς ἁπάντων ὑμῶν βοηθείας.
ταῦτα δ´ εἰπεῖν ἠνάγκασμαι συνισταμένους τινὰς ἐπ´
αὐτοὺς αἰσθόμενος καὶ τὴν ἀρχὴν ἑτέροις παραδοῦναι
βουλομένους. ἀξιῶ δ´ ὑμᾶς, ἄνδρες Ῥωμαῖοι, καὶ τῶν
ἐμῶν μεμνημένους ἀγώνων, οὓς ὑπὲρ τῆς ἡγεμονίας
ἠγωνισάμην, οὔτε μικρῶν ὄντων οὔτ´ ὀλίγων, οὓς οὐδὲν
δέομαι πρὸς εἰδότας ὑμᾶς λέγειν, τὰς ἀντὶ τούτων ὀφειλομένας
ἐμοὶ χάριτας τοῖς παιδίοις ἀποδοῦναι τούτοις.
οὐ γὰρ ἰδίαν ἀρχὴν ἐμαυτῷ κατασκευαζόμενος, ἧς οὐδενὸς
ἧττον ἄξιος ἦν βουληθεὶς τυγχάνειν, ἀλλὰ τῷ
Ταρκυνίου γένει βοηθῶν τὰ κοινὰ πράττειν προῄρημαι.
ἱκέτης δ´ ὑμῶν γίνομαι μὴ τοὺς ὀρφανοὺς ἐγκαταλιπεῖν
νῦν μὲν ὑπὲρ τῆς ἀρχῆς κινδυνεύοντας, εἰ δ´
ἡ πρώτη πεῖρα τοῖς ἐχθροῖς αὐτῶν χωρήσει κατὰ νοῦν,
καὶ ἐκ τῆς πόλεως ἐξελαθησομένους. ἀλλ´ ὑπὲρ μὲν
τούτων ὡς ἐγνωκόσιν ὑμῖν τὰ δέοντα καὶ ποιήσουσιν,
ὅσα προσήκει, οὐδὲν δέομαι πλείω λέγειν· ἃ δὲ παρεσκεύασμαι
ποιεῖν ὑμᾶς αὐτὸς ἀγαθὰ καὶ ὧν χάριν
τὴν ἐκκλησίαν συνεκάλεσα, ἀκούσατέ μου. ὅσοι μὲν
ὑμῶν ὀφείλοντες ἤδη χρέα διὰ πενίαν ἀδύνατοί εἰσιν
ἀποδοῦναι, τούτοις βοηθεῖν προθυμούμενος, ἐπειδὴ
πολῖταί τ´ εἰσι καὶ πολλοὺς ὑπὲρ τῆς πατρίδος ἀνηντλήκασι
πόνους, ἵνα μὴ τὴν ἰδίαν ἀφαιρεθῶσιν ἐλευθερίαν
οἱ τὴν κοινὴν βεβαιώσαντες, ἐκ τῶν ἐμαυτοῦ
χρημάτων δίδωμι διαλύσασθαι τὰ χρέα. ὅσοι δ´ ἂν
μετὰ ταῦτα δανείσωνται, τούτους οὐκ ἐάσω πρὸς τὰ
χρέα ἀπάγεσθαι καὶ νόμον θήσομαι μηδένα δανείζειν
ἐπὶ σώμασιν ἐλευθέροις ἱκανὸν ἡγούμενος τοῖς δανεισταῖς
τῆς οὐσίας τῶν συμβαλόντων κρατεῖν. ἵνα δὲ
καὶ τὰς εἰς τὸ δημόσιον γινομένας εἰσφοράς, δι´ ἃς οἱ
πένητες ἐπιβαροῦνταί τε καὶ ἀναγκάζονται δανείσματα
ποιεῖν, κουφοτέρας εἰς τὸ λοιπὸν φέρητε, τιμήσασθαι
τὰς οὐσίας ἅπαντας κελεύσω καὶ ἀπὸ τοῦ τιμήματος
ἕκαστον εἰσφέρειν τὸ ἐπιβάλλον, ὡς ἐν ταῖς μεγίσταις
καὶ εὐνομωτάταις πόλεσι πυνθάνομαι γινόμενον, δίκαιόν
τε καὶ συμφέρον τῷ κοινῷ τοῦθ´ ἡγούμενος
τοὺς μὲν πολλὰ κεκτημένους πολλὰ εἰσφέρειν, τοὺς
δ´ ὀλίγα ἔχοντας ὀλίγα. δοκεῖ δέ μοι καὶ τῆς δημοσίας
γῆς, ἣν διὰ τῶν ὅπλων κτησάμενοι κατέχετε, μὴ
τοὺς ἀναιδεστάτους ὥσπερ νῦν κρατεῖν οὔτε χάριτι
λαβόντας οὔτ´ ὠνῇ κτησαμένους, ἀλλὰ τοὺς μηδένα
κλῆρον ἔχοντας ὑμῶν, ἵνα μὴ θητεύητε ὄντες ἐλεύθεροι
μηδὲ τὰς ἀλλοτρίας κτήσεις, ἀλλὰ τὰς ἰδίας
γεωργῆτε· οὐ γὰρ ἂν γένοιτο φρόνημα εὐγενὲς ἐν ἀνδράσιν
ἀπορουμένοις τῶν καθ´ ἡμέραν ἀναγκαίων.
ὑπὲρ ἅπαντα δὲ ταῦτ´ ἔγνων καὶ ἴσην καὶ κοινὴν ποιεῖν
τὴν πολιτείαν καὶ τὰ δίκαια πᾶσι πρὸς ἅπαντας ὅμοια.
εἰς τοῦτο γὰρ ἥκουσί τινες αὐθαδείας, ὥσθ´ ὑβρίζειν
εἰς τὸ δημοτικὸν ἀξιοῦσι καὶ μηδ´ ἐλευθέρους ἡγεῖσθαι
τοὺς πένητας ὑμῶν. ἵνα δὲ καὶ λαμβάνωσι τὰ δίκαια
καὶ ὑπέχωσιν οἱ μείζους τοῖς ἐλάττοσιν ἐξ ἴσου, νόμους
θήσομαι κωλυτὰς μὲν τῆς βίας, φύλακας δὲ τῆς
δικαιοσύνης καὶ αὐτὸς οὐδένα χρόνον ἀνήσω τῆς ἁπάντων
προνοούμενος ἰσηγορίας.
| [4,9] « Je suis engagé, Romains, par plusieurs motifs à prendre soin de
ces deux petits enfants. J'étais sans père et sans patrie, et Tarquin leur
aïeul m'a fait élever auprès de lui avec autant de bonté que ses propres
fils. Il m'a même fait épouser une de ses filles, et tout le temps de sa vie il
m'a témoigné autant de tendresse et d'estime que si j'eusse été son fils ;
enfin, après le funeste accident qui lui est arrivé, il me recommanda ses
petits-fils et me conjura de leur tenir lieu de père en cas qu'il vint a mourir
de ses blessures. Ne serais-je donc pas coupable envers les hommes de
l'injustice la plus criante, si je trahissais ces pauvres orphelins à qui je
dois une vive reconnaissance pour toutes les faveurs que j'ai reçues de
leur grand-père ? N'aurait-on pas raison de me regarder comme un impie
si je les abandonnais? Non, autant que je pourrai, je ne les abandonnerai
point, et je ne manquerai jamais à la parole que j'en ai donnée.
IV. POUR vous, Romains, il est juste que vous vous souveniez aussi
des bienfaits dont leur aïeul a comblé la république. Un grand nombre de
villes latines vous disputaient l'empire, il les a réduites sous votre
puissance; il a subjugué tous les Tyrrhéniens les plus puissants de vos
voisins et il a obligé les Sabins à vous reconnaitre pour leurs maîtres, et il
n'est venu à bout de toutes ces grandes entreprises qu'au milieu d'une
infinité de dangers auxquels ils s'est exposé volontiers pour vous élever
au comble de la grandeur. Pendant qu'il a vécu, vous avez dû lui marquer
à lui-même votre reconnaissance. Mais aujourd'hui qu'une mort violente
nous l'a enlevé, c'est à la postérité que vous devez donner des preuves
de votre attachement, et il n'est pas juste que vous ensevelissiez avec le
corps de vos bienfaiteurs le souvenir de leurs bons offices. Regardez-vous
donc comme les tuteurs communs de ces enfants, et soyez
persuadés que c'est à vous à leur conserver l'empire que leur aïeul leur a
laissé comme un héritage qui leur appartient. Pour moi je ne me verrai
jamais en état de leur rendre moi seul autant de services que la protection
de tous les Romains peut leur faire de bien. Je n'ai su me dispenser de
vous tenir ces discours parce que je suis et informé que certaines gens
conspirent contre nos jeunes princes dans le dessein de donner la
couronne à d'autres. Souvenez-vous, Romains, des travaux que j'ai
essuyés et des périls auxquels je me suis exposé pour la république. J'en
ai essuyé de terribles et en très grand nombre, vous le savez, et il n'est
pas besoin de vous en parler. Je vous conjure donc de protéger ces
enfants, et toute la reconnaissance que j'ai droit d'exiger de vous pour les
services que j'ai rendus à l'état, je ne vous la demande que pour eux. Je
n'ai pas dessein d'usurper la royauté pour moi-même, quoique, si je
voulais y prétendre, je n'en serais peut-être pas indigne : mais lorsque j'ai
pris le maniement des affaires, mon unique but a été de servir de protecteur
aux petits-fils de Tarquin et de défendre leurs droits. C'est pourquoi je
vous prie de vous joindre à moi et de ne point abandonner ces pupilles
dans l'extrême danger où ils sont aujourd'hui de se voir enlever la
couronne de leur grand-père, et même d'être bientôt chassés de Rome si
leurs ennemis viennent à bout de leur première entreprise. Mais qu'est-il
besoin de m'étendre plus au long sur ce sujet ? Vous connaissez vous-mêmes
votre devoir, je n'en doute point, et je suis persuadé que vous ne
manquerez pas de le remplir d'une manière digne de vous.
V. IL me reste maintenant à vous dire ce que j'ai dessein de faire
pour votre avantage, et c'est pour cela principalement que je vous ai
assemblés. Tous ceux d'entre vous qui sont chargés de dettes, mais qui
se voient hors d'état de satisfaire leurs créanciers, je veux les secourir et
payer de mes propres deniers tout ce qu'ils doivent. Ce sont des citoyens
Romains, et puisqu'ils ont prodigué leur sang et leurs peines pour affermir
la liberté publique, j'aime mieux répondre pour eux tous que de souffrir
qu'ils soient privés d'un bien qu'ils ont conservé par leurs travaux tant
pour eux-mêmes que pour les autres. A l'égard de ceux qui dans la suite
prendront de l'argent à intérêt, je ne permettrai jamais qu'on les traîne en
prison pour dettes. Je ferai même une loi par laquelle les créanciers
seront obligés de se contenter des biens de leurs débiteurs, sans qu'il leur
soit permis d'étendre leurs droits sur le corps des personnes libres.
J'aurai soin aussi de régler les taxes que les particuliers doivent payer au trésor
public. Les pauvres sont accablés d'impôts qui les mettent dans la
nécessité d'emprunter à intérêt et il n'y a rien de plus onéreux pour vous,
et c'est ce qui cause votre ruine. Pour remédier a ces inconvénients,
j'ordonne qu'on fasse le dénombrement de tous les revenus et que
chacun paye à proportion de son bien, comme j'apprends qu'il se pratique
dans les grandes villes les mieux policées. En effet il me paraît juste que
ceux qui possèdent de grands biens, contribuent beaucoup, et que les
pauvres ne payent au trésor public que de légères taxes ; l'utilité publique
le veut ainsi. A l'égard des terres publiques que vous avez acquises par la
force de vos armes, il ne convient point que les plus effrontés s'en
emparent insolemment, comme cela se fait aujourd'hui, les uns en payant
une somme d'argent, les autres sans qu'il leur en coûte rien. Il est plus à
propos de les partager à ceux d'entre vous qui n'ont aucun héritage, afin
que vous fassiez valoir un fond de terres qui vous appartiennent en
propre, et qu'étant libres comme vous êtes, vous ne soyez plus dans la
dure nécessité de servir les autres et de cultiver leurs terres ; car il n'est
pas possible qu'on aie de la valeur et de grands sentiments lorsqu'on
manque du nécessaire pour vivre chaque jour.
VI. DE plus mon intention est d'établir une parfaite égalité entre les
citoyens, et de tenir tellement la balance juste, qu'ils aient tous les mêmes
droits et les mêmes privilèges. Il en a en effet qui deviennent si fiers qu'ils
regardent les pauvres comme des esclaves, et qui poussent leur
insolence jusqu'a faire les derniers outrages au peuple. Mais afin que le
droit soit égal entre tous les Romains, en sorte que les petits puissent
avoir action contre les grands et que leur pauvreté ne les mette pas hors
d'état de soutenir leurs intérêts, je ferai des lois équitables tant pour
empêcher la violence et les voies de fait que pour maintenir la justice
dans les jugements, et je ne céderai de tenir la balance égale entre le
peuple et les plus puissants.
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