[4,68] Τῷ ἀνδρὶ τούτῳ πατὴρ μὲν ἦν Μάρκος
Ἰούνιος ἑνὸς τῶν σὺν Αἰνείᾳ τὴν ἀποικίαν στειλάντων
ἀπόγονος, ἐν τοῖς ἐπιφανεστάτοις Ῥωμαίων ἀριθμούμενος
δι´ ἀρετήν, μήτηρ δὲ Ταρκυνία τοῦ προτέρου
βασιλέως Ταρκυνίου θυγάτηρ· αὐτὸς δὲ τροφῆς τε
καὶ παιδείας τῆς ἐπιχωρίου πάσης μετέλαβε καὶ φύσιν
εἶχε πρὸς οὐδὲν τῶν καλῶν ἀντιπράττουσαν. ἐπεὶ δὲ
Τύλλιον ἀποκτείνας Ταρκύνιος σὺν ἄλλοις ἀνδράσι
πολλοῖς καὶ ἀγαθοῖς καὶ τὸν ἐκείνου πατέρα διεχρήσατο
ἀφανεῖ θανάτῳ δι´ οὐδὲν μὲν ἀδίκημα, τοῦ δὲ πλούτου
προαχθεὶς εἰς ἐπιθυμίαν, ὃν ἐκ παλαιᾶς τε καὶ
προγονικῆς παραλαβὼν εὐτυχίας ἐκέκτητο, καὶ σὺν
αὐτῷ τὸν πρεσβύτερον υἱὸν εὐγενές τι φρόνημα διαφαίνοντα
καὶ τὸ μὴ τιμωρῆσαι τῷ θανάτῳ τοῦ πατρὸς
οὐκ ἂν ὑπομείναντα, νέος ὢν ὁ Βροῦτος ἔτι καὶ κομιδῇ
βοηθείας συγγενικῆς ἔρημος ἔργον ἐπεχείρησε
ποιῆσαι πάντων φρονιμώτατον, ἐπίθετον ἑαυτοῦ καταψεύσασθαι
μωρίαν· καὶ διέμεινεν ἅπαντα τὸν ἐξ ἐκείνου χρόνον,
ἕως {οὗ} τὸν ἐπιτήδειον ἔδοξε καιρὸν
ἔχειν, φυλάττων τὸ προσποίημα τῆς ἀνοίας, ἐξ οὗ ταύτης
ἔτυχε τῆς ἐπωνυμίας· τοῦτ´ αὐτὸν ἐρρύσατο μηδὲν
δεινὸν ὑπὸ τοῦ τυράννου παθεῖν πολλῶν καὶ ἀγαθῶν
ἀνδρῶν ἀπολλυμένων.
| [4,68] XII. SON père fut Marcus Junius qui descendait d'un des
compagnons d'Enée, et qui par sa vertu et par son mérite singulier passait
pour un des plus illustres de Rome. Sa mère s'appelait Tarquinie, elle
était fille du roi Tarquin l'ancien. Brutus fut instruit dans toutes les
sciences des Romains. Cette bonne éducation soutenue d'un naturel
heureux et porté au bien lui fit faire de grands progrès. Après avoir fait
mourir Tullius avec plusieurs autres citoyens du premier mérite, Tarquin
résolut aussi de se défaire secrètement de Marcus Junius, non pour
aucun crime qu'il eût commis mais parce qu'étant héritier d'une famille
anciennement riche il possédait de grands biens dont le tyran voulait
s'emparer. Le fils ainé de Junius subit le même sort : son grand cœur
donnait de l'ombrage à Tarquin, et il paraissait trop bien né pour laisser
impunie la mort de son père. Son cadet encore fort jeune, ne pouvant plus
espérer aucun secours depuis que la cruauté du tyran lui avait enlevé
toute sa famille, prit alors un parti qui fut l'effet de la plus rare prudence. Il
contrefit le fou et continua toujours dans cette stupidité simulée jusqu'à ce
qu'il trouvât quelque occasion favorable pour revenir à son naturel sans
courir le risque de perdre la vie ; voilà pourquoi on le surnomma Brutus.
Ce fut par cette ruse qu'il se mit à couvert de la cruauté du tyran qui
s'étendait sur un grand nombre de gens de bien et de mérite.
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