[4,62] Λέγεται δέ τι καὶ ἕτερον ἐπὶ τῆς Ταρκυνίου
δυναστείας πάνυ θαυμαστὸν εὐτύχημα τῇ Ῥωμαίων
ὑπάρξαι πόλει εἴτε θεῶν τινος εἴτε δαιμόνων εὐνοίᾳ
δωρηθέν· ὅπερ οὐ πρὸς ὀλίγον καιρόν, ἀλλ´ εἰς ἅπαντα
τὸν βίον πολλάκις αὐτὴν ἔσωσεν ἐκ μεγάλων κακῶν.
γυνή τις ἀφίκετο πρὸς τὸν τύραννον οὐκ ἐπιχωρία
βύβλους ἐννέα μεστὰς Σιβυλλείων χρησμῶν ἀπεμπολῆσαι
θέλουσα. οὐκ ἀξιοῦντος δὲ τοῦ Ταρκυνίου τῆς
αἰτηθείσης τιμῆς πρίασθαι τὰς βύβλους ἀπελθοῦσα
τρεῖς ἐξ αὐτῶν κατέκαυσε· καὶ μετ´ οὐ πολὺν χρόνον
τὰς λοιπὰς ἓξ ἐνέγκασα τῆς αὐτῆς ἐπώλει τιμῆς.
δόξασα δ´ ἄφρων τις εἶναι καὶ γελασθεῖσα ἐπὶ τῷ τὴν
αὐτὴν τιμὴν αἰτεῖν περὶ τῶν ἐλαττόνων, ἣν οὐδὲ περὶ
τῶν πλειόνων ἐδυνήθη λαβεῖν, ἀπελθοῦσα πάλιν τὰς
ἡμισείας τῶν ἀπολειπομένων κατέκαυσε καὶ τὰς λοιπὰς
τρεῖς ἐνέγκασα τὸ ἴσον ᾔτει χρυσίον. θαυμάσας δὴ τὸ
βούλημα τῆς γυναικὸς ὁ Ταρκύνιος τοὺς οἰωνοσκόπους
μετεπέμψατο καὶ διηγησάμενος αὐτοῖς τὸ πρᾶγμα, τί
χρὴ πράττειν, ἤρετο. κἀκεῖνοι διὰ σημείων τινῶν
μαθόντες, ὅτι θεόπεμπτον ἀγαθὸν ἀπεστράφη, καὶ μεγάλην
συμφορὰν ἀποφαίνοντες τὸ μὴ πάσας αὐτὸν τὰς
βύβλους πρίασθαι, ἐκέλευσαν ἀπαριθμῆσαι τῇ γυναικὶ
τὸ χρυσίον, ὅσον ᾔτει καὶ τοὺς περιόντας τῶν χρησμῶν
λαβεῖν. ἡ μὲν οὖν γυνὴ τὰς βύβλους δοῦσα καὶ
φράσασα τηρεῖν ἐπιμελῶς ἐξ ἀνθρώπων ἠφανίσθη,
Ταρκύνιος δὲ τῶν ἀστῶν ἄνδρας ἐπιφανεῖς δύο προχειρισάμενος
καὶ δημοσίους αὐτοῖς θεράποντας δύο
παραζεύξας ἐκείνοις ἀπέδωκε τὴν τῶν βιβλίων φυλακήν,
ὧν τὸν ἕτερον Μάρκον Ἀτίλιον ἀδικεῖν τι δόξαντα
περὶ τὴν πύστιν καταμηνυθέντα ὑφ´ ἑνὸς τῶν δημοσίων,
ὡς πατροκτόνον εἰς ἀσκὸν ἐνράψας βόειον ἔρριψεν
εἰς τὸ πέλαγος. μετὰ δὲ τὴν ἐκβολὴν τῶν βασιλέων
ἡ πόλις ἀναλαβοῦσα τὴν τῶν χρησμῶν προστασίαν
ἄνδρας τε τοὺς ἐπιφανεστάτους ἀποδείκνυσιν αὐτῶν
φύλακας, οἳ διὰ βίου ταύτην ἔχουσι τὴν ἐπιμέλειαν
στρατειῶν ἀφειμένοι καὶ τῶν ἄλλων τῶν κατὰ πόλιν
πραγματειῶν, καὶ δημοσίους αὐτοῖς παρακαθίστησιν,
ὧν χωρὶς οὐκ ἐπιτρέπει τὰς ἐπισκέψεις τῶν χρησμῶν
τοῖς ἀνδράσι ποιεῖσθαι. συνελόντι δ´ εἰπεῖν οὐδὲν
οὕτω Ῥωμαῖοι φυλάττουσιν οὔθ´ ὅσιον κτῆμα οὔθ´
ἱερὸν ὡς τὰ Σιβύλλεια θέσφατα. χρῶνται δ´ αὐτοῖς,
ὅταν ἡ βουλὴ ψηφίσηται, στάσεως καταλαβούσης τὴν
πόλιν ἢ δυστυχίας τινὸς μεγάλης συμπεσούσης κατὰ
πόλεμον ἢ τεράτων τινῶν καὶ φαντασμάτων μεγάλων
καὶ δυσευρέτων αὐτοῖς φανέντων, οἷα πολλάκις συνέβη.
οὗτοι διέμειναν οἱ χρησμοὶ μέχρι τοῦ Μαρσικοῦ κληθέντος
πολέμου κείμενοι κατὰ γῆς ἐν τῷ ναῷ τοῦ
Καπιτωλίνου Διὸς ἐν λιθίνῃ λάρνακι, ὑπ´ ἀνδρῶν
δέκα φυλαττόμενοι. μετὰ δὲ τὴν τρίτην ἐπὶ ταῖς ἑβδομήκοντα
καὶ ἑκατὸν ὀλυμπιάσιν ἐμπρησθέντος τοῦ
ναοῦ, εἴτ´ ἐξ ἐπιβουλῆς, ὡς οἴονταί τινες, εἴτ´ ἀπὸ ταὐτομάτου,
σὺν τοῖς ἄλλοις ἀναθήμασι τοῦ θεοῦ καὶ
οὗτοι διεφθάρησαν ὑπὸ τοῦ πυρός. οἱ δὲ νῦν ὄντες
ἐκ πολλῶν εἰσι συμφορητοὶ τόπων, οἱ μὲν ἐκ τῶν ἐν
Ἰταλίᾳ πόλεων κομισθέντες, οἱ δ´ ἐξ Ἐρυθρῶν τῶν
ἐν Ἀσίᾳ, κατὰ δόγμα βουλῆς τριῶν ἀποσταλέντων
πρεσβευτῶν ἐπὶ τὴν ἀντιγραφήν· οἱ δ´ ἐξ ἄλλων πόλεων
καὶ παρ´ ἀνδρῶν ἰδιωτῶν μεταγραφέντες· ἐν οἷς
εὑρίσκονταί τινες ἐμπεποιημένοι τοῖς Σιβυλλείοις, ἐλέγχονται
δὲ ταῖς καλουμέναις ἀκροστιχίσι· λέγω δ´ ἃ
Τερέντιος Οὐάρρων ἱστόρηκεν ἐν τῇ θεολογικῇ πραγματείᾳ.
| [4,62] CHAPITRE QUATORZIEME.
I. ON dit que du règne de Tarquin, soit par la providence des dieux,
soit par la protection de quelque génie, la république Romaine eut encore
un autre bonheur fort extraordinaire, qui ne fut pas seulement passager,
mais qui a plusieurs fois délivré la ville des plus grands maux et des périls
les plus évidents. Une certaine femme qui n'était pas du pays, vint
trouver le tyran pour lui vendre neuf livres des oracles des Sibylles. Sur le
refus que fit Tarquin de lui en donner le prix qu'elle demandait, elle s'en
alla et en brûla trois. Peu de temps après elle lui rapporta les six autres,
qu'elle voulait encore vendre le même prix. On la prit pour une folle, et on
se moqua d'elle, parce qu'elle demandait pour ces six livres la même
somme qu'on n'avait pas voulu lui donner pour les neuf. Là dessus elle se
retira, une seconde fois et en brûla encore la moitié. Ensuite elle rapporta,
les trois qui restaient, et en demanda le même prix qu'auparavant.
II. TARQUIN surpris du procédé de cette femme, fit venir les
augures, leur raconta ce qui s'était passé et voulut savoir d'eux ce qu'il
fallait faire. Ceux-ci qui connurent par certains signes que Tarquin avait
négligé un présent que les dieux lui envoyaient, dirent que c'était une
grande perte de n'avoir pas acheté tous les neuf livres, que le roi devait
prendre les trois volumes d'oracles qui restaient, et qu'il fallait compter à
cette femme la somme qu'elle demandait. Elle donna donc ces trois livres,
et après avoir averti qu'on en eut un grand soin, elle disparut et jamais on
ne la vît depuis.
III. POUR conserver ce précieux trésor, le roi choisît deux des plus
illustres citoyens auxquels il joignit deux ministres publics, et leur donna la
garde des trois livres. L'un des deux qu'on appelait Marcus Atillius,
soupçonné d'infidélité et accusé de parricide par un des deux ministres
publics, fut condamné par le roi à être cousu dans une peau de bœuf et
précipité dans la mer. Après que les rois eurent été chassés, la république
prit soin elle-même de ces oracles, et en commit la garde aux personnes
du premier ordre. Ceux-ci avaient cette éminente dignité toute leur vie; ils
étaient exempts de porter les armes et de toutes les autres charges
civiles. On leur donnait pour adjoints, des ministres publics sans lesquels
il ne leur était pas permis de regarder ces livres mystérieux, et, pour le
dire en un mot, les Romains n'avaient rien de si sacré ni rien qu'ils
gardaient avec autant de soin que les oracles des Sibylles.
IV. ON les consultait par l'ordre du sénat quand la ville était agitée de
séditions, que l'état avait reçu quelque grand échec dans la guerre, ou
qu'il paraissait des prodiges surprenants et que les présages étaient
difficiles à expliquer, comme c'est arrivé plusieurs fois.
V. CES livres ont subsisté jusqu'au temps de la guerre des Marses.
Ils étaient dans un caveau du temple de Jupiter Capitolin, enfermés dans
un coffre de pierre, et dix hommes qu'on appelait Décemvirs en avaient la garde.
VI. MAIS après la cent soixante-treizième olympiade le temple ayant
été brûlé, ou par hasard, ou exprès par des gens mal intentionnés,
comme le croient quelques historiens, ces précieux livres furent
consumés par le feu avec les autres offrandes consacrées au dieu
Jupiter. Les livres des oracles qu'on a aujourd'hui, ont été apportés de
différents endroits, les uns des villes d'Italie, les autres d'Erythrée qui est
en Asie, par des personnes que le sénat avait envoyés exprès pour les
transcrire, il y en a aussi qui ont été apportés d'autres villes par des
particuliers qui en ont tiré copie. Il est vrai que parmi ces vers des Sibylles
il y en a quelques-uns qui sont supposés : mais on distingue facilement
ceux-ci d'avec les autres par les lettres initiales qui forment ce que nous
appelons Acrostiches. Au reste, je ne fais ici que rapporter ce qu'en a écrit
Terentius Varron dans ses livres théologiques. Et voila ce que fit Tarquin
pendant la paix et pendant la guerre.
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