[4,36] Ὑμῶν δὲ τεθαύμακα, εἴ τινές εἰσιν, ὦ βουλή,
τῆς ἀρχῆς με ἀπαλλάξαι βουλόμενοι, καὶ μετὰ τούτου
συνεστηκότες ἐπ´ ἐμοί· ἡδέως δ´ ἂν πυθοίμην παρ´
αὐτῶν, τίνος ἀδικήματος ἕνεκα πολεμοῦσί μοι καὶ ἐπὶ
τίνι τῶν ἐμῶν ἔργων ἀχθόμενοι· πότερον ὅτι πολλοὺς
ἴσασιν ἐπὶ τῆς ἐμῆς ἀρχῆς ἀκρίτους ἀπολωλότας ἢ τῆς
πατρίδος στερομένους ἢ τὰς οὐσίας ἀπολωλεκότας ἢ
ἄλλῃ τινὶ συμφορᾷ κεχρημένους ἀδίκως; ἢ τούτων
μὲν τῶν τυραννικῶν ἀδικημάτων οὐδὲν ἔχουσιν εἰπεῖν
ὑπ´ ἐμοῦ γεγονός, ὕβρεις δέ μοί τινας συνοίδασιν εἰς
γυναῖκας γαμετὰς ἢ προπηλακισμοὺς εἰς θυγατέρας
παρθένους ἢ ἄλλην τινὰ περὶ σῶμα ἐλεύθερον ἀκολασίαν;
δικαίως μέντ´ ἄν, εἴ τί μοι τοιοῦτον ἡμάρτηται,
τῆς ἀρχῆς θ´ ἅμα καὶ τῆς ψυχῆς ἀποστερηθείην.
φέρε ἀλλ´ ὑπερήφανός εἰμι καὶ διὰ βαρύτητα ἐπαχθὴς
καὶ τὴν αὐθάδειαν, ᾗ κέχρημαι περὶ τὴν ἀρχήν, οὐδεὶς
φέρειν δύναταί μου; τίς μέντοι τῶν πρὸ ἐμοῦ βασιλέων
οὕτω μέτριος ὢν ἐν ἐξουσίᾳ διετέλεσε καὶ
φιλάνθρωπος ἅπασι τοῖς πολίταις ὡς πατὴρ πρᾷος
υἱοῖς αὐτοῦ χρώμενος; ὅς γε καὶ τὴν ἐξουσίαν, ἣν
ὑμεῖς ἐδώκατέ μοι πατέρων φυλάττοντες παραδοχάς,
οὐχ ἅπασαν ἐβουλήθην ἔχειν, ἀλλὰ νόμους θ´ ὑπὲρ
τῶν κυριωτάτων καταστησάμενος, οὓς ἅπαντες ἐπεκυρώσατε,
κατὰ τούτους ὑμῖν ἀπέδωκα διδόναι τὰ δίκαια
καὶ λαμβάνειν, καὶ αὐτὸς ἐξηταζόμην πρῶτος οἷς ὥρισα
κατὰ τῶν ἄλλων δικαίοις ὥσπερ ἰδιώτης πειθόμενος·
τῶν τ´ ἀδικημάτων οὐχ ἁπάντων αὐτὸς ἐγινόμην δικαστής,
ἀλλὰ τὰς ἰδιωτικὰς δίκας ὑμῖν ἀπέδωκα
διαγινώσκειν, ὃ τῶν ἔμπροσθεν οὐδεὶς ἐποίησε βασιλέων.
ἀλλ´ ἔοικεν ἀδίκημα μὲν οὐδὲν εἶναι, δι´ ὃ
δυσχεραίνουσί μοί τινες, αἱ δ´ εἰς τὸ δημοτικὸν πλῆθος
εὐεργεσίαι λυπεῖν ὑμᾶς δοκοῦσι, περὶ ὧν πολλάκις
ἀπολελόγημαι πρὸς ὑμᾶς. ἀλλ´ οὐδὲν δεῖ τούτων νυνὶ
τῶν λόγων· εἰ δὲ δοκεῖ κρεῖττον ἐπιμελήσεσθαι τῶν
κοινῶν Ταρκύνιος οὑτοσὶ τὰ πράγματα παραλαβών,
οὐ φθονῶ τῇ πόλει βελτίονος ἡγεμόνος· ἀποδοὺς δὲ
τὴν ἀρχὴν τῷ δεδωκότι μοι δήμῳ καὶ γενόμενος ἰδιώτης
πειράσομαι ποιῆσαι πᾶσι φανερόν, ὅτι καὶ ἄρχειν
ἐπίσταμαι καλῶς καὶ ἄρχεσθαι δύναμαι σωφρόνως.
| [4,36] XVII. JE vous avoue, Messieurs, que je serais extrêmement surpris
d'apprendre que quelques-uns de cette illustre compagnie conspirassent
avec Tarquin pour me détrôner. Je leur demanderais volontiers quelle
injustice ou quelle mauvaise action j'ai pu faire pour encourir leur disgrâce
et leur inimitié. Ont-ils des preuves que de mon règne aucun citoyen ait
jamais été mis à mort, {exilé, dépouillé de se biens}, ou puni de
quelqu'autre manière, sans avoir été convaincu dans toutes les formes de
la justice ? Quel si l'on ne peut me reprocher une pareille tyrannie, ai-je
donc attenté à l'honneur d'aucune femme mariée, ai-je déshonoré les
vierges, ou porté l'intempérance jusqu'à commettre des excès plus
honteux avec des personnes de condition libre ? Si j'avais fait quelque
crime de cette nature, il serait juste de m'ôter la couronne et la vie même,
On dira peut-être que je suis fier, que j'ai des manières hautaines, que l'air
impérieux avec lequel je gouverne, me rend odieux à tout le monde. Mais
y a-t-il aucun des rois mes prédécesseurs qui aie traité les citoyens avec
plus d'amitié ou qui ait fait un usage plus modéré de ses pouvoirs? Je
puis dire que j'ai marqué à tous les Romains autant de tendresse qu'un
bon père en a pour ses enfants. Je n'ai pas même retenu en son entier
toute l'autorité que vous m'aviez confiée, et que vous conservez avec tout
le soin dont vous êtes capables, comme un précieux trésor que vos pères
vous ont laissé par succession. N'ai-je pas établi des lois fondamentales
auxquelles vous avez donné votre approbation ? Ne m'y suis-je pas
conformé pour faire rendre la justice, et n'ai-je pas été moi-même le
premier à observer aussi exactement que le dernier des citoyens ce que je
prescrivais aux autres ? Davantage, ce que nul de mes prédécesseurs
n'avait jamais fait, je vous ai abandonné les causes des particuliers au
lieu de me réserver la connaissance de tous les procès criminels.
XVIII. JE vois bien, Messieurs, que s'il y en a parmi vous qui aient
conçu de la haine contre moi, ce n'est pas pour aucun tort que je leur aie
fait. La seule chose qui les irrite c'est que j'ai comblé le peuple de mes
bienfaits. Mais vous avez grand tort d'en avoir pris ombrage. Vous savez
que plusieurs fois je me suis justifié là-dessus, et que je vous ai rendu
compte de ma conduite ; il n'est pas besoin de rien ajouter à ce que j'ai
déjà dit pour ma défense. Au reste si Tarquin vous paraît plus capable de
gouverner, je n'empêche point que Rome ne choisisse un meilleur roi que
celui qui est aujourd'hui sur le trône. Je remettrai volontiers entre les
mains du peuple toute l'autorité dont il m'a fait dépositaire, et quand il
m'aura réduit à la condition de simple particulier, je ferai voir à tout le
monde que si j'ai su commander, je sais également obéir avec modestie.
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